En supposant connues les propriétés élémentaires de
l'ensemble
et de l'addition des entiers naturels,
nous allons donner une construction rigoureuse de
et de l'addition des entiers relatifs. Dans cette construction,
apparaîtra sous forme d'un quotient de
par une relation d'équivalence. Ce paragraphe est aussi
l'occasion de rappeler les notions de relation d'équivalence
et d'ensemble quotient, notions centrales pour le reste
du cours.
Définition Soit un ensemble. Une relation sur
est un ensemble
de couples d'éléments
de . On écrit au lieu de
. Une relation
est une relation d'équivalence si elle est
a)
réflexive (i.e. pour tout , on a )
b)
symétrique (i.e. on a équivalence entre
et quels que soient )
c)
transitive (i.e. les conditions et
impliquent que quels que soient
)
Exemples 1
[1)] Soit l'ensemble des villes de France. On
définit une relation sur en déclarant que
signifie que et se trouvent dans la
même région. Il est facile de vérifier qu'il s'agit
d'une relation d'équivalence.
[2)] Soit
et définissons par
Par exemple, on a
et
.
La réflexivité et la symétrie de résultent
de la commutativité de l'addition des entiers positifs.
Montrons que est transitive. En effet, par définition,
les conditions
et
équivalent aux équations
En rajoutant la première à la seconde on obtient
ou encore
Or on sait que la loi d'addition sur
est régulière
c'est-à-dire qu'une égalité implique
quels que soient
. Il s'ensuit que
c'est-à-dire que
. Notons
que dans cette démonstration, nous avons utilisé
l'associativité, la commutativité et la régularité
des entiers naturels.
Définition Soit un ensemble et une relation
d'équivalence sur . Pour , on pose
et on appelle classe d'équivalence de par rapport
à cette partie de . Par définition, l'ensemble
est formé des classes
d'éléments
. On appelle le quotient de par la relation
d'équivalence . On définit l'application quotient
(=la projection canonique)
par
. Une partie
de est un système de représentants pour
si elle contient un élément de chaque classe
d'équivalence et un seul.
Exemples 2
[1)] Dans l'exemple des villes de France (voir ci-dessus)
la classe d'équivalence d'une ville est formée de toutes
les villes qui se trouvent dans la même région que . En
particulier deux classes
et
sont
égales ssi et se trouvent dans la même région.
Les éléments de sont des ensembles de villes,
deux villes étant regroupé dans un même ensemble
ssi elles se trouvent dans la même région. On a donc
une bijection
régions de France la région où se trouve v
Il existe beaucoup de systèmes de représentants.
Par exemple, l'ensemble formé des capitales des régions
en est un. L'ensemble formé des villes les plus
éloignées de la capitale dans leur région en est un autre.
[2)] Dans le cas de l'exemple
et de la
relation introduite ci-dessus on vérifie que
si et seulement si l'une des deux
conditions suivantes est remplie
il existe
tel que et
il existe
tel que et .
Ainsi, deux éléments appartiennent à une même
classe d'équivalence si on peut passer de l'un à
l'autre en ajoutant un même entier naturel aux
deux coordonnées. Les classes sont donc des
`parties diagonales' du plan
:
Il y a beaucoup de systèmes de représentants.
Par exemple
en est un. On définit l'ensemble
(
axiomatique)
comme étant l'ensemble quotient
.
Lemme [Propriété universelle de ]
Soit un ensemble, une relation d'équivalence sur
et
une application constante sur les
classes d'équivalence par rapport à
(c'est-á-dire qu'on a
à chaque fois
que ). Alors il existe une application
et une seule telle que
. Réciproquement,
toute application de la forme est constante
sur les classes d'équivalence.
Remarque 3
Le lemme signifie que la règle
définit une application
si et seulement si on a
quels que soient
vérifiant .
Démonstration. On pose
. Il s'agit
de vérifier que est indépendant du
représantant de la classe
. Or si en
est un autre, c'est-à-dire que
,
alors par définition, on a et donc
.
Exemple 4
Il existe une application
et une seule telle que
. En effet,
si
alors et donc .
L'application est bijective : En effet, elle est surjective
car si
, on a
si
et
si . Elle est injective car
si on a , alors c'est-à-dire que
et que
.
Lemme [Addition sur
] Il existe une
application
et une seule telle que
Démonstration. Il s'agit de montrer que
si
et
. Nous laissons au lecteur le soin
de cette vérification.
Définition Un groupe est un couple
formé d'un ensemble et d'une application
appelée la loi du groupe telle que
a)
la loi est associative
(i.e. on a
quels que
soient
)
b)
la loi admet un élément neutre
(i.e. il existe tel que
quel
que soit )
c)
tout élément de admet un inverse
pour la loi (i.e. on a
)
Un groupe est commutatif si on a
quels que soient .
Exemple 5
[1)] Si les conditons a) et b) sont vérifiées, alors
l'élément neutre est unique. En effet, soient
et deux éléments neutres. Alors on a
(car est neutre) et
(car
est neutre) et donc .
[2)] Si les conditions a), b) et c) sont vérifiées,
l'élément inverse de la conditon c) est unique. En
effet, supposons que et sont deux éléments
inverses à . Alors on a
On note l'élement inverse de .
Exemple 6
[1)] Le couple
vérifie a) et b) (pour )
mais non pas c) car l'équation n'admet pas de
solution
si .
[2)] Le couple
est un groupe. En effet,
on vérifie facilement l'associativité. L'élément
neutre est la classe de . L'inverse de la classe
de est la classe de ! En effet, nous avons
Lemme [Propriété universelle de
]
Soit l'application
On a
et
si
est une autre application de
vers un groupe telle que
,
alors il existe une application
et une seule telle que a)
et b)
quels que soient
.
Remarque 7
On peut interpréter ce lemme en disant
que
(et donc
) est le groupe
universel contenant
.
Démonstration. Il est immédiat que est additive. Supposons
donnée une application comme dans l'énoncé.
Définissons
par
.
Montrons que induit une application
,
Supposons que
et donc que .
Alors pour montrer que
il suffit de montrer que
En utilisant que
nous sommes ramenés à montrer que
ce qui est clair car
et
.
Montrons l'unicité de . En effet, si et
vérifient les hypothèses, nous avons
En outre, si
, alors et
sont tous les deux inverses de
où
. Donc
.
Comme les et les ,
, forment
un système de représentants des classes
d'équivalence par rapport à , il s'ensuit que
.