Quand en mathématiques une nouvelle structure est introduite, comme celle d'espace
vectoriel, ou comme présentement celle d'espace de probabilité, une démarche
féconde est de rechercher les transformations qui préservent cette structure.
Pour les espaces vectoriels, ce sont les applications linéaires. Pour les espaces
de probabilité, ce sont les "fonctions mesurables" qu'on va introduire dans un instant.
Le cas particulier important en sera les "variables aléatoires".
Auparavant, adoptons la notation suivante:
Définition si et sont des ensembles
quelconques, si est une fonction définie sur et à valeurs dans , et si
enfin est un sous ensemble de , l'ensemble des de tels que
soit dans sera désormais noté par
Nous l'appellerons
l'image inverse de par .
Insistons sur le fait
que n'est pas nécessairement injective ni surjective. On vérifie
facilement que:
Proposition Si et sont des sous ensembles de alors on a
La même propriété est vraie même avec une famille infinie de .
Définition Soit alors deux espaces et , chacun muni d'une tribu
et
, et soit une fonction définie sur
à valeurs dans On dit que est une
fonction mesurable si pour tout
, alors
est un élément de
.
Dans ces conditions, on voit facilement
que:
Proposition L'ensemble des parties de la tribu qui sont de la forme
, avec
, est une tribu. On la note parfois
. Comme est mesurable, c'est donc une sous tribu de
Montrer qu'une fonction est mesurable est généralement facile grâce au
théorème suivant, dont la démonstration est hors programme.
Théorème 4.1 Soit
une famille de parties de
telle que la tribu soit la plus petite qui contienne
Soit une fonction de à valeurs dans
Soit
une tribu sur Alors est mesurable pour ce couple
de tribus si et seulement si pour tout
alors
Illustrons ceci par un exemple important
en l'appliquant au cas où
,
pour montrer que
Proposition Toute fonction continue de
dans
est mesurable.
Démonstration Pour cela, on applique le théorème
au cas où
est l'ensemble de tous les intervalles ouverts:
par définition de la
tribu
de Borel, l'hypothèse du théorème est vérifiée. Ensuite,
on sait d'après le cours d'analyse que l'image inverse d'un intervalle ouvert
par une fonction continue est une réunion finie ou dénombrable
d'intervalles ouverts, et est donc un borélien.
Démonstration La partie "seulement si" découle des définitions.
Pour la partie "si", l'art est de considérer la tribu
de parties
de engendrée par tous les lorsque
parcourt
ainsi que
A son tour,
est une tribu de parties de
(ce point se vérifie directement facilement), et elle
contient
, et donc elle contient la tribu
. D'où