Prix d'édition de livres

Pour en revenir à l'économie de l'édition... 900 exemplaires pour 10.000 €, ça fait moins de 12€ le livre de 1200 pages.
Si peu ?? J'aurais pensé que ça reviendrait à trois fois ce prix au moins ! Je m'étais renseigné jadis pour éditer quelques dizaines de pages chez un imprimeur, ça devenait tout de suite hors de prix (mais c'était fin des années 90).

Si les ordres de grandeurs sont exacts, ça me semble ouvrir des perspectives intéressantes pour l'auto-édition, non ? Je sais bien que le boulot le plus lourd et le plus difficile concerne ce qui vient après (publicité/diffusion), mais ça me laisse rêveur quand au "potentiel" pour quelqu'un qui veut essayer de vendre quelques dizaines (ou dizaines de de dizaines) d'exemplaires, surtout avec les moyens "modernes" comme internet.

Voici une version naïve : faire éditer $n$ centaines d'exemplaires, disons avec un prix de revient de 15€ (plus cher que dans le cas concret, mais moins d'exemplaires commandés) ; aller les chercher chez l'imprimeur (un A/R en voiture, ça doit tenir dans une clio, quitte à en mettre des cartons sur les sièges, j'ai fait $x$ déménagements remplis à ras bord : on peut en foutre des trucs même dans une petite voiture... espérons juste que l'imprimeur n'est pas à l'autre bout de la France) ; les stocker chez soi (j'ai vu certains faire ça avec des appareils photos dans un appartement parisien...) ; les vendre sur Internet d'une part (problème : faire de la pub, donc passer par des forums comme celui-ci...), et les proposer chez les libraires d'autre part (à Paris, ce n'est pas ce qui manque : proposer quelques livres au responsable du rayon, qui ne seront bien sûr facturés que s'ils sont vendus, et réapprovisionner si besoin).
A quel prix ? Dur à dire : il faut payer le libraire le cas échéant... 25 ? 30 € ? Pour un très gros livre, un prix aussi bas peut être un atout...
Coût total : avancer l'argent pour l'imprimeur (quelques milliers d'euros : faisable sans trop de problème, quitte à ne pas partir en vacances toute une année), de l'essence pour les A/R (imprimeurs, démarchage des librairies dans sa région...), et surtout beaucoup de temps et de disponibilité. Si au bout de deux ans, la moitié du stock n'a pas été écoulé (livre qui n'attire pas, pas assez de pub, etc.), eh bien c'était juste une belle aventure ;-). Au contraire s'il est écoulé au bout de six mois, faire une réimpression et recommencer !! Bien sûr, inutile de penser à faire fortune (sauf gros best-seller repris en main par un éditeur professionnel ensuite !)...

Bon, j'ai dis "naïve" parce que j'imagine bien qu'il y a énormément de conditionnel derrière tout ça, et sans doute plein de choses que je ne soupçonne même pas. Alors si vous avez des compléments ou des expériences à faire partager, je suis évidemment preneur.
Merci :-) !

[Cette discussion avait initialement lieu dans le fil sur les livres de C&M, mais était hors-sujet. Poirot]

Réponses

  • Pour avoir écrit des bouquins (pas de maths, des romans), je peux te garantir que sans une pub et une promotion acharnée, ça ne se vend pas comme ça...les gens sont ravis qu'on leur en offre un exemplaire, mais de là à les acheter ! Pour moi ca restera un loisir d'écrire.
  • Il faut les vendre les 900 bouquins et la dizaine d'euros c'est seulement le coût d'impression si j'ai compris.
    A mon humble avis, il n'y a pas beaucoup d'auteur(e)s en France qui vendent 900 bouquins.

    J'ai un ami qui a publié un bouquin ou deux (hors mathématiques) et le plus grand nombre d'exemplaires vendus l'ont été parce qu'il les avait achetés lui-même. N'ayant pas ses entrées dans une "grande" maison d'édition pour être édité il fallait qu'il achète un certain volume de livres. Son bouquin doit toujours être sur un rayonnage dans la boutique parisienne de cet éditeur depuis des décades. :-D

    PS:
    Je connaissais une librairie (à Paris, porte d'Orléans) qui était spécialisée dans la revente des "exemplaires de presse". Des livres neufs offerts à des gens lors de campagne de promotion de livres.

    PS2:
    Une librairie, même en ligne, n'a aucune obligation de vendre tous les livres. Cela n'a rien à voir avec la presse.
    Une petite maison d'édition rencontre des difficultés à "placer" ses livres.
    Je suis convaincu que dans un proche avenir il sera très difficile de trouver une librairie avec des murs qui vend des livres scientifiques. Je connais au moins deux librairies du quartier latin qui vendaient des livres qui ont disparu.
    Le magasin PUF place de la Sorbonne et un magasin qui se trouvait à proximité du Panthéon qui a disparu me semble-t-il depuis longtemps.
    Dans les années 80, il y avait une librairie rue de Buci, au premier étage, il y avait toute la collection des livres scientifiques de l'éditeur Mir (cette librairie existe toujours mais elle a déménagé: librairie du globe)
    "Bébert jeune" à Paris avait cessé de vendre des livres scientifiques anglo-saxons et je ne sais même pas s'il existe encore une de leur librairie qui vend encore du livre scientifique (la boutique place Saint-Michel semble ne plus vendre ce type de livres si j'en crois l'affichage)
  • Concernant l'opposition roman vs mathématiques, je crois qu'il ne s'agit pas du tout de la même chose : on achète un roman pour le lire, pas pour le collectionner (comme certains ici), ou parce qu'on a l'intention de s'en servir professionnellement avec espérance de gains à la clé (comme beaucoup ici). Certains seront prêts à mettre 50€ dans un livre qui les soulagera dans leur préparation de concours, mais pas 15€ dans un roman qui est un genre qu'il ne lise pas forcément ou alors en toute petite quantité. L'utilisation n'est pas la même, les habitudes "de consommation" non plus. Typiquement, je n'achète pas de roman ou alors en occasion à très bas prix car les bibliothèques sont bien fournies et que je ne ressens pas le besoin de les stocker chez moi, alors que je consomme beaucoup plus facilement du livre de maths. Bien sûr, je ne veux pas généraliser mon cas, je suggère juste que les deux types de "littérature" ne sont pas perçues pareillement chez tout le monde...

    Concernant les librairies du quartier latin, on peut ajouter la feue Librairie des Prépas (rue Serpente si ma mémoire ne me joue pas des tours). Par contre, Gibert Jeune (E comme Est : la plus à l'est sur une carte par rapport à l'autre, même si ça ne se joue pas à grand chose :-D) comme Joseph (O comme Ouest...) ont toujours eu un rayon mathématiques depuis que je les connais et fréquente (1992). Par contre, il a constamment changé d'endroit. Chez Jeune, il s'est longtemps trouvé dans un des magasins côté place Saint André des Arts, au premier et dernier étage, puis il a migré au sous-sol, est revenu au premier, a fait un tour dans le bâtiment principal de l'autre côté de la place, est retourné en face à différents étages, puis a déménagé à nouveau il y a quelques années en face au dernier étage (là où naguère se trouvait le "revendez vos livres"). Chez Joseph, je l'ai toujours connu dans le bâtiment principal en face de Cluny, mais il a voyagé également d'étages en étages suivant un cycle que je n'ai pas réussi à cerner...
    Par contre, c'est vrai que le rayon s'est réduit d'années en années et qu'on ne trouve plus que des livres en français chez Jeune depuis pas mal de temps...
  • Le goulot d'étranglement dans l'édition, la fonction stratégique qui tient tout le reste, est bien le métier de diffuseur.

    Pour une expérience de l'autoédition, j'ai connu Caroline Barraud, qui a édité un livre sur un voyage hors des sentiers battus au Tibet.
    Elle a tout pris en main, créé une maison d'édition, négocié avec plusieurs imprimeurs jusqu'à l'obtention de bonnes conditions, entreposé en partie chez elle (à Paris) et elle se déplaçait en province dans les librairies qui organisaient un évènementiel. Elle emmenait ses livres et des objets du Tibet pour animer un stand, elle a fait sa propre promo et est passée dans plusieurs émissions de radios nationales.
    C'était en 2008 ou 2009, j'ai perdu le contact depuis mais son site existe toujours : éditions C.Barraud

    Pour qui voudrait vraiment s'investir dans ce type d'aventure prendre contact avec elle pourrait donner des idées et aider à prendre la mesure des défis à relever.

    [Correction et activation du lien. AD]
    [Merci Alain pour avoir pallié si rapidement et si efficacement mes carences]
  • Curiosity a écrit:
    Chez Joseph, je l'ai toujours connu dans le bâtiment principal en face de Cluny, mais il a voyagé également d'étages en étages suivant un cycle que je n'ai pas réussi à cerner...

    Le rayon a atterri au dernier étage, l'étage que l'escalier mécanique ne dessert pas. Je pense qu'il y a moins de livres qu'avant mais on trouve encore les nouveautés, en particulier les livres de chez Calvage et Mounet.

    Comme on fait de la pub' a des librairies il ne faudrait pas oublier l'excellente librairie qui se trouve sur le boulevard St Germain à deux pas du Collège de France.

    Bebert jeune vendait aussi des livres scientifiques à son adresse Boulevard St Denis mais je n'y suis pas allé depuis une décade au moins. Continue-t-il à le faire? Je l'ignore.
    (il y a aussi deux adresses à Versailles, ils ont emménagé dans des locaux neufs si je me souviens bien, j'ignore s'ils vendent du livre scientifique)

    Ce serait une bonne idée de recenser les dernières librairies avec des murs qui vendent des livres de mathématiques, scientifiques.
  • Il me semble FdP que décade signifie en français moderne dix jours consécutifs et non dix ans soit une décennie. En revanche en anglais "decade" signifie bien dix ans.

    Edit : en fait c'est plus compliqué : https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Décade

    Je préfère quand même le terme de décennie.

    [Correction du lien. AD]
  • @curiosity: un certain nombre d'entreprises peuvent faire la diffusion pour toi. Comme je l'ai déjà écris ici, mon dernier livre est chez CreateSpace/Amazon. C'est un bon compromis si tu ne veux pas gérer les envois aux acheteurs ou la perception de la TVA. Mais tu perds les ventes à certain nombre d'institutions publiques qui ont des règles de marché qui les empêchent d'acheter facilement sur Amazon.
  • Sylvain:

    Je n'avais jamais entendu dire qu'une décade était dix jours.
    Si on en croit Wikipedia ( https://fr.wikipedia.org/wiki/Décade ) decade signifie aussi dix ans (je pense que dans le contexte où j'ai utilisé cette expression il n'y avait pas d'ambiguïté)
  • Boulevard Saint-Denis, Dans le XIIIe et Versailles ont un (tout) petit rayon, essentiellement des livres de prépas. Ca se réduit comme peau de chagrin un peu partout. Je suis passé par Lyon puis Toulouse ces 10 dernières années, et là-bas, même constat... Bref !

    @aléa : oui, j'ai jeté un œil rapide à ce système, mais il faudrait que je fasse quelques études de prix pour voir si c'est vraiment intéressant. Par contre, si par "institutions publiques" tu penses aux BU, ce n'est pas un bon calcul vu que ce sont elles qui doivent être les plus gros acheteurs de livres de maths... Non ? Quand je vois 10 exemplaires (ou plus) d'un même livre dans une BU, je pense qu'il faut considérer ces acheteurs potentiels avec attention, même s'ils seront finalement les moins faciles à "convaincre"...
    Sinon, question au passage : tu ne fais pas du tout d'envoi par toi-même ? Trop contraignant ?
  • @ FdP : le dictionnaire de l'académie française donne raison à Sylvain, en langue française une décade est bien une période de dix jours.
  • Chaurien:

    Je venais à l'instant de me rappeler de ce film (je n'ai pas lu le roman).
    Wikipedia a écrit:
    Durant la première moitié du XXe siècle, certains écrivains de premier plan, comme Robert Brasillach, Georges Duhamel, Henry de Montherlant, André Maurois et autres ont ainsi employé le mot « décade » au sens d'une période de dix ans, que le mot décennie, créé à la fin du XIXe siècle à partir de l'adjectif « décennal »4, désigne sans ambiguïté

    En Anglais decade veut dire dix ans.
  • C'est un « écrivain de premier plan » ce Brasillach ? Il n'est pas dans mon Lagarde et Michard...
  • Chaurien:

    Je suis très étonné que tu ne connaisses pas ce type (tu me fais marcher c'est ça?)
    Il a écrit aussi de la poésie mais il a mal fini. Douze balles dans la peau, exécuté au fort de Montrouge à la libération. Il avait choisi le camp de la collaboration (comme Drieu la Rochelle, autre écrivain collaborationniste).
  • @Curiosity: non, je n'ai envoyé moi même que des exemplaires que j'ai donnés.
    Je ne tiens pas à être hors la loi, et maîtriser les aspects légaux de la vente me prendrait un temps qui n'est pas raisonnable.

    Le choix que j'ai fait n'est pas financier, il est idéologique. Je veux que des jeunes puissent acheter mon livre sans que ça leur coûte un bras. Pour ça, je suis prêt à rater quelques ventes (toutes les BU n'ont pas ce problème, et en vrai il est toujours possible d'acheter hors marché si on peut prouver que le marché ne peut fournir).
    De toutes façons, l'argent gagné sur un livre, c'est peu; donc ce qu'il faut viser c'est plus un lectorat important.
    Mais qu'est-ce qui fait le succès d'un livre ? Sa visibilité en bibliothèque ou le crédit chez les prescripteurs ?
    Je pense que c'est le 2e qui compte; c'est d'ailleurs ce qui explique que des livres restent dans les bibliographies des agrégatifs alors qu'objectivement ils auraient dû être remplacés par des ouvrages plus adaptés au public d'aujourd'hui (et qu'on trouve dans les BU !).
  • A propos, je viens aujourd'hui d'investir dans le Garet-Kurtzmann, un achat que j'envisageais depuis longtemps, mais les occasions d'aller en librairies spécialisées se font rares et je n'aime pas trop acheter sur internet. Évidemment, je suis ravie de mon achat, mais j'ai triché, j'avais déjà eu plusieurs fois l'occasion de le feuilleter...
  • FdP a écrit:
    Je venais à l'instant de me rappeler de ce film

    Tant qu'on est dans les discussions sur la langue française, on ne met pas "de" après rappeler. On se souvient de quelque chose, mais on se rappelle quelque chose.
  • @omega: Merci pour ta confiance. Pour mémoire, les errata sont ici: http://www.iecl.univ-lorraine.fr/~Olivier.Garet/livre.php (pas mal d'erreurs ont été débusquées par skyffer3, merci à lui).
  • @aléa "maîtriser les aspects légaux de la vente" : merci d'attirer mon attention sur ce point. Je n'y ai jamais réfléchi en profondeur et je n'ai donc pas creusé, mais c'est vrai qu'il faut sans doute se méfier pour ne pas devenir "hors la loi"... J'y jetterai un œil à l'occasion.

    Pour ce qui est des prescripteurs, je suis d'accord, c'est mieux de les avoir "avec soi". Mais je crois qu'il ne faut pas se leurrer. Peu d'ouvrages font l'unanimité, certains plairont à ceux-ci, d'autres à ceux-là. C'est comme le public d'une façon générale... De plus, on peut estimer un bouquin bien, voire excellent, et le déconseiller pour diverses raisons (niveau trop élevé, point de vue particulier, etc.).

    J'ai l'impression par ailleurs que plusieurs livres ou séries qui semblent peu encensés par les prescripteurs font pourtant un tabac. (Mais ça reste une impression parce que ma vue sur le sujet est plus qu'étriquée et ancienne...) Je pense aux Gostiaux par exemple : est-ce que beaucoup de préparateurs les conseillent aujourd'hui ? Pourtant ils ont toujours une certaine côte chez pas mal de préparationnaires de concours de l'enseignement, j'ai l'impression. Ceci pour dire que le bouche à oreille me semble tout aussi important...
    De toute façon, si un jour j'édite ou parviens à faire éditer quelques pages, je les offrirai certainement à la bibliothèque de l'agrégation - à condition qu'elle existe toujours ! -, en espérant bien entendu qu'elle les accepte :-D...

    Concernant ton deuxième livre sur les processus, as-tu une idée du coût de revient de l'objet en lui-même au sortir de la presse à papier, tout chaud (donc indépendamment de tout les aspects distribution, acheminement, etc.) ? Si ce n'est pas un secret commercial, bien sûr...
  • les Gostiaux ont une certaine cote.
  • Quelques mots au sujet de « se rappeler de ».
    Pour ceux qui se soucient du bon usage de la langue française, je conseille un petit livre d'un grand écrivain du XXème siècle, Jacques Laurent, de l'Académie française : Le français en cage, Grasset, 1988, 140 p. Dans un style alerte, l'auteur revient sur certains interdits communément admis, pour les discuter, et en particulier il consacre un assez long développement à « se rappeler de », qu'il juge admissible dans certains cas, arguments à l'appui.
    D'ordinaire j'interviens plutôt pour corriger, le plus souvent des fautes monstrueuses comme « j'est pas su faire », ou les déformations volontaires qui enlaidissent délibérément notre langue (parler-racaille, « écriture-inclusive » et autres scories).
    Mais ici, il s'agit de liberté dans l'expression des nuances de la pensée, en respect des règles établies et conformément à l'usage des plus grands écrivains français.
    Bonne journée.
    Fr. Ch.
  • Merci Chaurien !

    PS:
    Un billet qui me semble faire le tour de la question:
    https://rouleaum.wordpress.com/2011/05/23/se-rappeler-de-2/
  • Pour les Franciliens qui s'intéressent aux livres de mathématiques plus ou moins anciens, il y a des adresses au Quartier latin :

    Librairie Albert Blanchard
    9 Rue de Médicis, 75006 Paris
    Tél. : 01 43 26 90 34

    Maille Bernard
    3 Rue Dante, 75005 Paris
    Tél. : 01 43 25 51 73

    Librairie philosophique J. Vrin
    6 Place de la Sorbonne, 75005 Paris
    Tél. : 01 43 54 03 47

    Éditions Jacques Gabay
    151 bis Rue Saint-Jacques, 75005 Paris
    Tél. : 01 43 54 64 64

    Bonne journée.
    Fr. Ch.
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