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Aire et probabilité

Bonjour,
Dans une activité on considère le carré de sommets de coordonnées (0,0), (0,1), (1,1), (1,0) dans un repère orthonormé du plan. On considère le graphe d'une fonction f contenu dans ce carré. On tire au hasard un point du carré et on cherche la probabilité p que ce point soit dans le domaine D défini par l'axe des abscisses, le graphe de f et les droites d'équation x=0 et x=1.
Dans cette activité, il est écrit : "on admet que la probabilité p cherchée est égale à l'aire du domaine D".
Ma question : comment démontre-t-on cette propriété ? En fait il est "logique" que les "chances de tomber dans une zone donnée" soient égales au rapport de l'aire de cette zone sur l'aire totale (l'aire totale ici valant 1 puisque on a un carré de côté 1). Mais comment démontre-t-on rigoureusement cette propriété ?
Merci.

Réponses

  • Here is the method.

    Soit $U$ la variable uniforme du carré, avec $u$ sa densité. Alors $\displaystyle \mathbb P(U \in D) = \mathbb E(1_D(U)) = \int_D u(x,y) \ \mathrm dx\mathrm dy = \int_D 1 \ \mathrm dx\mathrm dy = \text{Aire} (D)$.
  • C'est quasiment une définition, une fois qu'on a mis le bon cadre probabiliste. Tout est caché dans le très ambigü "on tire au hasard un point du carré". Bien malin celui qui saura expliquer ce que ça veut dire sans avoir fait un peu de maths ! Ici on a affaire à des probabilités continues, donc il faut développer un peu de théorie de la mesure et de l'intégrale de Lebesgue avant d'avoir tous les outils pour faire ça proprement.
  • Pour tirer un point au hasard dans le carré unité, on tire x au hasard dans [0,1] (x est une réalisation de la variable aléatoire X de loi uniforme sur [0,1]), de même on tire y au hasard dans [0,1] (y est une réalisation de la variable aléatoire Y de loi uniforme sur [0,1]) et on obtient un point M(x,y) "tiré au hasard" dans le carré unité.
  • Sais-tu démontrer que ton $(X,Y)$ (tirées indépendamment !) suit la loi uniforme sur le carré ?
  • On peut poser : $U=(X,Y)$.
    Peut-on dire que $U$ suit la loi uniforme sur le carré $[0,1]\times[0,1]$ ?
    Comment est définie la densité de probabilité de $U$ ?
    Comme $X$ et $Y$ sont indépendantes alors $P(U\in[a,b]\times[c,d])=P(X\in[a,b])\times P(Y\in[c,d])$ ?
  • skyffer : non je ne sais pas.
  • Il y a plein de manières. Par exemple, dans tout bon cours on a la propriété que la densité de la loi jointe est le produit des densités marginales, à cause de l'indépendance.
    bulledesavon a écrit:
    Comment est définie la densité de probabilité de $U$ ?
    La loi uniforme continue sur un domaine $I$ mesurable d'aire (i.e. de mesure de Lebesgue) finie et strictement positive (que ce soit en dimension $d=1$ ou plus) est la loi de densité $1_I/k$, où $k=\int_{\mathbb R^d} 1_I = \text{Aire}(I) = \lambda(I)$ est le facteur de renormalisation.
  • Quand on me demande "comment démontre-t-on rigoureusement cette propriété ?" je réponds "à quel niveau ?".
  • J'avais ouvert un fil posant la même question.

    Soit c'est une définition, soit c'est un théorème prouvé par Fubini en quelques lignes, soit c'est un théorème qui demande un peu de travail. Par exemple, à un moindre niveau (Intégrale de Riemann), en s'interdisant l'intégrale double, on peut approcher la fonction, disons continue, par des fonctions en escalier après avoir démontré que c'est vrai pour une fonction constante.

    Evidemment, je ne retrouve pas ce fil... j'ai pu retrouver ce fil : http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?12,1392492,1392608

    Edit : j'ai tenté une fois de proposer un exercice interdisant l'intégrale double mais en acceptant le résultat sur le produit de convolution (densité de la somme de deux v.a.ind. à densité) qui se démontre...par Fubini.
  • Je ne vois pas le rapport avec Fubini. Pour être vraiment formel j'aurais dû écrire $\lambda(dx,dy)$ plutôt que $dx dy$, c'est une intégrale simple sur $\R^2$ et non double.
  • Je pensais à X loi uniforme sur [0,1] pour les abscisses et Y idem pour les ordonnées.

    Comment montrer qu'alors...(X,Y) suit la loi uniforme sur le carré ?

    Mais, pour moi une intégrale simple sur $\mathbb R^2$, c'est une intégrale double.
    Non ?
    Ou alors, je devrais plutôt dire « qu'on peut s'y ramener » ?

    Mince, j'accuse le coup...
  • Ok je n'avais pas compris que tu répondais à cette autre question.

    Sinon par rapport à ta deuxième question, non une intégrale simple sur $\R^2$ ce n'est pas le même objet qu'une intégrale double, et Fubini permet justement de passer de l'un à l'autre (ce qui est au moins aussi important que de pouvoir intervertir les intégrales dans une intégrale double).
  • Ok, oui c'est le théorème que j'ai en tête passer de l'une ($R^2$) à l'autre ($double$) et en intervertissant l'ordre "des doubles".

    Là encore, j'ai souvenir que selon les ouvrages c'est une définition ou un théorème...décidément...

    Je devrais courrir ouvrir des bouquins...mais lesquels, tiens ?
  • Sur ce genre de sujets (théorie de la mesure, intégration et probas) le livre d'aléa est bien fait : https://www.amazon.fr/lintégration-aux-probabilités-Olivier-Garet/dp/2729870407
  • On peut faire un certain nombre de choses sans théorie de la mesure (ce qui a le mérite de montrer que les concepts sont moins arbitraires qu'ils n'y paraissent-le lecteur motivé pourra vérifier que l'axiome du choix n'est même pas nécessaire dans ce qui suit).
    Pour construire l'intégrale de Lebesgue, il suffit (!) d'appliquer le théorème de Riesz à la forme linéaire que l'on construit ci-dessous.

    Tous les espaces vectoriels envisagés dans la suite sont réels.

    Soit $d \in \N^*$; soit $\mathcal E$ le sous-espace vectoriel de $\R^{\R^d}$engendré par les $\mathbf 1_{\prod_{i=1}^d ]a_i,b_i]}$ où $(a_i)_{1\leq i \leq d},(b_i)_{1\leq i \leq d} \in \Q^d$. Il existe (*)une (unique) forme linéaire $I$ sur $\mathcal E$ telle que pour tous $x,y \in \Q^d$ tels que $\forall i\in \{1,...,d\}, x_i \leq y_i$, on a $I \left(\mathbf 1_{\prod_{i=1}^d ]x_i,y_i]}\right)=\prod_{i=1}^d (y_i - x_i)$.
    $I$ est également l'unique forme linéaire sur $\mathcal E$ invariante par translation (i.e. telle que $I(\tau_v f)=I(f)$ pour tous $v\in \Q^d$ avec $\tau_vf(x):= f(x+v)$ pour tous $v,x$) et telle que $I\left (\mathbf 1_{]0,1]^d }\right )=1$.

    On peut noter que $I$ est croissante (si $f,g\in \mathcal E$ et $f\leq g$ alors $I(f) \leq I(g)$ -ou, ce qui est équivalent, pour toute $u\in \mathcal E$ positive, $I(u)\geq 0$).

    Soit désormais $\mathcal F$ l'ensemble de toutes les fonctions de $\R^d$ dans $\R$ telles que pour tout $\varepsilon>0$, il existe $g,h\in \mathcal E$ telles que $g \leq f \leq h$ et $I(h)-I(g)\leq \varepsilon$. Alors $\mathcal F$ est un sous-espace vectoriel de $\R^{\R^d}$ et $\mathcal E$ est un sous-espace vectoriel de $\mathcal F$. De plus $I$ admet un unique prolongement en une application $I'$ de $\mathcal F$ dans $\R$ croissante et ce prolongement est encore une forme linéaire.
    On peut vérifier que
    1°) Pour tous $x,y \in \R^d$ tels que $x_i \leq y_i$ pour tout $i$, $\mathbf 1_{\prod_{i=1}^d [x_i,y_i]}\in \mathcal F$ et que $I'\left (\mathbf 1_{\prod_{i=1}^d [x_i,y_i]} \right)=\prod_{i=1}^d (y_i - x_i)$.
    2°) Toute fonction continue à support compact est dans $\mathcal F$ (par le théorème de Heine).

    En fait $\mathcal F$ est exactement l'ensemble des fonctions Riemann-intégrables.

    3°) Soit $\mathcal A$ un ensemble de parties de $\R^d$ contenant toutes les parties de la forme $\prod_{i=1}^d [x_i,y_i]$
    avec $x,y \in \R^d$, stable par translations et unions finies et $\nu:\mathcal A \to \R$ une fonction positive invariante par translation et telle que pour tous $X,Y\in \mathcal A$, $\nu(X\cup Y)=\nu(X)+\nu(Y)$ dès que $X\cap Y=\emptyset$. Alors il existe $\lambda\in \R$ positif tel que pour tout $Z\in \mathcal A$, si $\mathbf 1_Z \in \mathcal F$, alors $\nu(Z)=\lambda I'\left( \mathbf 1_Z \right)$ (cela se voit avec des encadrements).
    Bref si $\nu$ exprime la "plausibilité" de tomber dans $Z$, on voit que sous réserve d'hypothèses d'invariance géométrique
    très simples, $\nu$ ne peut qu'être proportionnelle à l'aire.

    [size=x-small](*)Si $n\in \N^*$, appelons $\mathcal P_n$ l'ensemble des réunions finies d'ensembles de la forme $\prod_{i=1}^d \left] \frac{u_i}{n}, \frac{v_i}{}n\right]$ avec $u,v \in \Z^d$ et posons pour $F\in \mathcal P_n$,$\mu_n(F):= n^{-d} \text{card} \{a \in \Z^d \mid \frac{a}{n} \in F\}$ (c'est juste le nombre d'hypercubes dont est composé $F$ divisé par $n^d$). On peut vérifier que si $m$ divise $n$ et $F\in \mathcal P_m$ alors $F \in \mathcal P_n$ et $\mu_m(F)=\mu_n(F)$. Ainsi pour tous $p,q\in \N^*$, et tout $G\in \mathcal P_p \cap \mathcal P_q$, $\mu_p(G)=\mu_q(G)$ (appliquer ce qui précède au ppcm de $p$ et $q$ ou même simplement à leur produit). De plus $\mathcal E$ est l'espace engendré par les fonctions caractéristiques d'éléments de $\bigcup_{n\geq 1} \mathcal P_n$.
    Ensuite, faire comme dans cette discussion: http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?12,1632032,1633974#msg-1633974[/size]
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Rougemaire : dans l'idéal niveau terminale mais si on a besoin de la mesure de [large]L[/large]ebesgue c'est minimum bac +3.

    [Henri Lebesgue (1875-1941) prend toujours une majuscule. AD]
  • Je ne suis pas à l'aise avec l'intégrale de Lebesgue mais j'ai commencé à regarder.
    On a par définition

    $\int 1_A d\lambda=\lambda(A)$

    où $\lambda$ est la mesure de Lebesgue et $A$ est un ensemble mesurable par la mesure de Lebesgue.
    Je me demande à présent pourquoi $\lambda(A)=$aire$(A)$.
    Il faudrait que je regarde comment est construit $\lambda$.
  • Ça peut être pris comme définition de l'aire (mais effectivement voir la définition pour comprendre pourquoi on a les propriétés attendues).
  • On applique ces définitions à des fonctions constantes, voire à des fonctions affines...
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