Sur la mesure de Lebesgue

Bonjour à tous,

Je bloque face à un exercice du livre Analyse réelle et complexe de Walter Rudin. Je cherche un borélien de $\mathbb{R}$ tel que pour tout intervalle ouvert non vide I,
$$ 0 < m(E \cap I) < m(I) $$ (où m est la mesure de Lebesgue)

Quelqu'un aurait-il un début d'idée qui pourrait m'aider à trouver la solution s'il vous plaît ? D'après moi un tel ensemble devrait être totalement discontinu et de complémentaire complétement discontinu mais peut-être que je me trompe ?

Je vous remercie d'avance,
Bonne soirée.

Réponses

  • Je pense que l'ensemble de Cantor doit marcher non ?
  • Il me semble que non car quand on l'intersecte avec ]1/3;2/3[, on a l'ensemble vide qui est de mesure nulle et on veux que $ 0 < m(E \cap ]1/3;2/3[)$. C'est pour cela qu'il faut que, selon moi le complémentaire d'un tel ensemble soit aussi totalement discontinu mais ça ne m'a pas l'air simple de trouver un exemple de tel ensemble.
  • Ah oui bien vu. Peut-être que l'union de plusieurs Cantor habilement translatés peuvent faire l'affaire ?
  • Sur $[0,1]$, avec $C$ assez petit $$I=\bigcup_{q=1}^{\infty}~\bigcup_{p=1}^q~\left]\frac{p}{q}-\frac{C}{q^3},\frac{p}{q}+\frac{C}{q^3}\right[\,.$$
  • Ca ne peut pas marcher, car l'ensemble $E$ (noté $I$) contient un intervalle ouvert non dégénéré!
  • Heu je voulais dire $E=[0,1]\setminus I,$ celebre exemple de ferme sans pont interieur et de mesure positive.
  • J'avais fait une "preuve" que ça ne peut pas fonctionner, qui évidemment est fausse puisque c'est un exercice, mais elle donne quand même des informations sur ce à quoi doit ressembler un tel ensemble : pour tout $\varepsilon > 0$, tout intervalle doit contenir un sous-intervalle $I$ sur lequel $0 < (1-\varepsilon) m(I) < m(I \cap E)$.

    Voici la preuve de ça. On se place sur $[0,1]$ pour simplifier.

    Supposons qu'il existe $\alpha < 1$ tel que pour tout intervalle $I$ de longueur non nulle, on ait $m(E \cap I) \leq \alpha m(I)$. Alors on a $m(E \cap A) \leq \alpha m(A)$ pour tout borélien $A$, car l'inégalité passe au au théorème de Carathéodory (considérer la pré-mesure qui est la différence des deux : son prolongement doit être positif). Mais donc on a $m(E) = m(E \cap E) \leq \alpha m(E)$, contradiction car $m(E) > 0$. Ce raisonnement est valable sur tout segment $[a,b]$.

    Maintenant, on subdivise de manière successives l'intervalle $[0,1]$ en deux intervalles $[0,1/2]$ et $[1/2,1]$, puis encore en deux, etc. Soit $\alpha < 1$ pensé proche de $1$. Par le raisonnement précédent (légèrement modifié : on l'applique aux intervalles dyadiques), chaque intervalle dyadique doit contenir un sous-intervalle dyadique $I$ tel que $m(E \cap I) > \alpha m(I)$. Et là, j'aurais envie de dire que par un truc similaire au lemme de König, on obtient que $m(E \cap [0,1]) > \alpha m([0,1])$, mais ça ne fonctionne pas.

    J'ai pensé à faire la chose suivante pour construire un ensemble qui convient : pour chaque intervalle dyadique, ajouter un ensemble de Cantor gras à choisir, dont la mesure décroît rapidement au fur et à mesure que les intervalles rétrécissent. On aura déjà automatiquement que $m(I \cap E) > 0$, il reste à assurer l'autre inégalité.

    On commence par placer sur chaque intervalle dyadique un réel strictement positif tel que pour chacun de ces intervalles, la somme des réels des intervalles dyadiques contenus (au sens large) dedans soit strictement plus petite que $1$. Ça servira de garantie que l'union des ensembles de Cantor correspondants aux intervalles dyadiques ne les recouvre pas essentiellement. Il reste à prendre en compte les ensembles de Cantor correspondants aux intervalles contenant l'intervalle qu'on regarde. Pour cela, on remarque que (par induction), l'union finie d'ensembles de Cantor a pour chaque intervalle, un intervalle plus petit dans son complémentaire.

    On ajoute nos ensembles de Cantor un par un. Lorsqu'on arrive à l'intervalle dyadique $I$, on regarde quelle proportion $\alpha$ a déjà été couverte par des ensembles de Cantor d'intervalles le contenant, et on multiplie tous les réels étiquetant les intervalles dyadiques contenus dans $I$ par $\alpha$.
  • @P. tu as dû mettre une intersection au lieu d'une union quelque part, ou quelque chose comme ça, car la propriété est équivalente pour $E$ et son complémentaire.
  • J'ai effectivement ecrit n'importe quoi.
  • Bonjour
    Il y a du Cantor
    http://www.math.utah.edu/~ptrapa/6210/ps2-solutions.pdf

    @ben T, tu ne regardes pas tes mp? je t'ai envoyé ce lien et un autre de MSE , il y a 11 heures
    Le 😄 Farceur


  • L'idée générale est simple : on prend un Cantor gras puis on rajoute d'autres petits Cantor gras pour combler les trous. La partie difficile est de s'assurer que l'on a jamais $m(E\cap I)=m(I)$. On peut le faire en contrôlant attentivement la mesure des Cantor gras mais le plus simple reste sans doute la preuve donnée par Rudin lui même, disponible ici.

    En français voilà ce que ça donne : Soit $I_n$ une énumération des intervalles ouverts de $[0;1]$ à extrémités rationnelles. On construit par récurrence deux suites $A_n$ et $B_n$ de Cantor Gras (compacts totalement discontinus de mesure strictement positive). Supposons que $A_1,\ldots, A_{n}$ et $B_1,\ldots,B_{n}$ soient déjà construits, l'union $C_n=(\bigcup_{1\leq i \leq n} A_i)\cup (\bigcup_{1\leq i \leq n}B_i )$ est encore compacte totalement discontinue et de mesure positive, l'ensemble $I_n\backslash C_n$ contient donc un intervalle ouvert non vide. Dans cet intervalle ouvert non vide on va choisir deux Cantor gras disjoints, ce sera nos $A_{n+1}$ et $B_{n+1}$. L'ensemble $E$ recherché est tout simplement $E=\bigcup_{n=1}^\infty A_n$.

    En effet soit $I$ un intervalle ouvert, il existe $n$ tel que $I_n\subset I$, on a alors $A_n\subset E\cap I$ et $B_n \subset I\backslash E$ d'où
    \[
    0<m(A_n)\leq m(E\cap I) < m(E\cap I)+m(B_n)\leq m(I).
    \]


    À noter que ça ne marche plus si l'on remplace $0<m(I\cap E)<m(I)$ par $am(I)<m(I\cap E)<bm(I)$ avec $0<a<b<1$. Le moyen de plus rapide de voire cela est d'appliquer le théorème de différentiation de Lebesgue à la fonction indicatrice de $E$.
  • Gebrane : La démonstration de ton fichier est très incomplète. En fonction de comment on "remplit les trous" on pourrait très bien avoir $m(E\cap I)=0$ où $m(E\cap I)=m(I)$ pour certains intervalles $I$. Il y a un vrai travaille a faire pour dire comment on remplit les trous et pour s'assurer que ces situations ne se produisent pas.
  • Ça vaudrait le coup de regarder les exercices VIII.1.16 et VIII.1.17 de Problèmes d'analyse réelle
    de Makarov et al. (Cassini).
  • P. a eu une bonne idée mais il faut être un peu plus "soigneux" dans les étapes de construction (le caractère autosimilaire ne semble pas marcher ici!) car il faut contrôler la "densité" de l'ensemble et de son complémentaire à chaque étape!
    La preuve donnée ici est un peu technique malheureusement... :( J'ai opté pour la construction duale (construire un $G_{\delta}$ plutôt qu'un $F_{\sigma}$).

    ***Il suffit de se restreindre au segment $[0,1]$ (quitte à translater).

    Il faut se servir de l'exercice $1$ (si tu as le livre sous les yeux!). On veut construire par récurrence une suite d'ouverts denses $(E_{k})_{k\in \mathbb{N}},$ de mesure $\varepsilon_{k}$ (où $(\varepsilon_{k})$ désigne une suite strictement décroissante de nombres strictement plus petit que $1$, convergeant vers un nombre $c$ strictement positif).

    On note à chaque génération la famille des intervalles ouverts et disjoints $(A_{k,n})$ recouvrant exactement $E_{k}.$ On note également $l_{k,n}=m(A_{k,n})$ (où l'on a $l_{k,n}\leq 2^{-k}$) de manière à avoir $\displaystyle \sum_{n\geq 0}l_{k,n}=\varepsilon_{k}.$

    De plus, on veut que $E_{k+1}\subset E_{k}$ tel que pour tout $n,$ $E_{k+1}\subset A_{k,n}$ soit dense dans $A_{k,n}$ et $\displaystyle m(E_{k+1}\cap A_{k,n})=\frac{\varepsilon_{k+1}}{\varepsilon_{k}}l_{k,n}.$

    ***Procédons à la récurrence. On choisit pour $E_{0}$ un ouvert dense de mesure $0<\varepsilon_{0}<1.$

    Supposons que l'on ait construit les ensembles $E_{i}$ pour $i=0,\ldots,N.$ On veut construire $E_{N+1}$ avec les propriétés requises.
    Par l'exercice $1$, on peut construire $E_{N+1}$ tel que $E_{N+1}\subset E_{N}$ tel que pour tout $n,$ $E_{N+1}\subset A_{N,n}$ soit dense dans $A_{N,n}$ et $\displaystyle m(E_{N+1}\cap A_{N,n})=\frac{\varepsilon_{N+1}}{\varepsilon_{N}}l_{N,n}.$ Mais alors par la propriété de recouvrement de $E_{N}$, on obtient $m(E_{N+1})=\varepsilon_{N+1}.$

    Remarquons bien qu'alors pour tout $n,$ $l_{k,n}\leq 2^{-k}$ et $\displaystyle m(E_{k+1}^{c}\cap A_{k,n})=\left( 1-\frac{\varepsilon_{k+1}}{\varepsilon_{k}} \right)l_{k,n}>0.$

    ***Ainsi, l'ensemble $\displaystyle E=\bigcap_{k\geq 0}E_{k}$ convient. En effet, considérons un intervalle ouvert non dégénéré $I=]x_{0}-\delta,x_{0}+\delta[.$ Soit $k_{0}$ tel que $2^{-k_{0}}\leq \frac{\delta}{2}.$
    Comme $E_{k_{0}}$ est dense dans $[0,1],$ il existe alors $a$ appartenant $E_{k_{0}}$ tel que $\vert a-x_{0}\vert \leq 2^{-k_{0}}.$ Mais alors, par l'inégalité triangulaire, il existe un certain $n_{0}$ tel que $A_{k_{0},n_{0}}\subset I.$
    Par construction, on a alors pour tout $k>k_{0},$ $$m(A_{k_{0},n_{0}}\cap E_{k})=\frac{\varepsilon_{k}}{\varepsilon_{k_{0}}}l_{k_{0},n_{0}}.$$
    Et ainsi, on obtient $$m(A_{k_{0},n_{0}}\cap E)=\frac{c}{\varepsilon_{k_{0}}}l_{k_{0},n_{0}}>0.$$
    Enfin, on a également $$m(A_{k_{0},n_{0}}\cap E^{c})=\left(1-\frac{c}{\varepsilon_{k_{0}}}\right)l_{k_{0},n_{0}}>0.$$
    Et donc vu que $A_{k_{0},n_{0}}\subset I,$ on obtient effectivement $$0<m(I\cap E)<m(I).$$

    Remarque : On a même prouvé au passage que $E$ avait pour mesure $0<c<1$ arbitrairement choisi.
  • @mojojo
    Oui la preuve n'est pas detaillée sur le lien
    Sur MSE, on trouve une de très joli et très bien expliquée


    https://math.stackexchange.com/questions/57317/construction-of-a-borel-set-with-positive-but-not-full-measure-in-each-interval
    Le 😄 Farceur


  • @Gebrane Euh, c'est exactement ce que Mojojo a écrit.... Tu rigoles, j'espère? L'argument exposé par Mojojo était clair!
  • @BobbyJoe Je n' ai pas regardé la preuve de mojojo ni ta preuve.
    J'attends la fraicheur du nuit
    Le 😄 Farceur


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