Intégrale: Fubini vs Tonelli

Bonjour, soient $0<a<b$. Comment savoir s'il faut utiliser le théorème de Fubini ou celui de Tonelli pour calculer par exemple l'intégrale $$\int_{[a,b]}\int_{[0,1]}x^yd\lambda_1(x)d\lambda_1(y)$$ Merci.

Réponses

  • Fonction de signe constant => Tonelli sans hésitation.
  • Merci pour votre réponse.
    L'énoncé des deux théorèmes est vraiment très étrange dans mon cours, j'ai regardé celui de wikipédia et ça me paraissait déjà plus compréhensible. Est-ce que vous pouvez m'expliquer brièvement ces deux énoncés et pourquoi en choisir un plutôt qu'un autre? Merci beaucoup.
  • L'intérêt de Tonelli, c'est qu'il n'y a pas besoin de savoir que la fonction est intégrable pour l'appliquer.
    La mesurabilité (évidente le plus souvent) suffit, et Tonelli nous dira si la fonction est intégrable.

    Quand au théorème de Fubini, dans sa version rigoureuse, il est souvent mal compris et sa difficulté sous-estimée.
    Il dit que si une fonction définie sur un espace produit est intégrable.
    Alors,
    1) pour presque toute tranche horizontale, la fonction est intégrable sur la tranche, que la fonction intégrale à une altitude donnée est mesurable une fois qu'on a complété par 0 pour les altitudes pas intégrales
    2) idem pour les verticales
    3) Les fonctions ainsi définies sont intégrables (avec les mesures qui vont bien), elles ont même intégrale et leur valeur commune est l'intégrale de la fonction par rapport à la mesure produit.

    Souvent, on applique Tonelli avant Fubini, sauf dans des cas où un argument générique peut donner l'intégrabilité: par exemple une fonction bornée est intégrable sur tout ensemble de mesure finie.
  • Je vois merci beaucoup, donc on peut dire que Fubini est un théorème plus fort que Tonelli vu que la différence ne se situe qu'au niveau mesurable vs intégrable non ?
    Aussi j'aurais une question un peu en rapport..

    Soit $f:X\times Y\to \overline{\mathbb{R}}_{\geq 0}$.
    Posons sa restriction à la composante $y$ comme la fonction $$\begin{align*}
    f(x,.):Y &\longrightarrow \overline{\mathbb{R}}_{\geq 0} \\
    y &\longmapsto f(x,y)
    \end{align*}

    $$ Supposons donc que $f(x,.)$ soit intégrable sur $Y$.
    Alors est-ce que son intégrale sur $Y$, qui dépend de $x$: $$\begin{align*}
    \int_{Y}f(x,.):X &\longrightarrow \overline{\mathbb{R}}_{\geq 0} \\
    x &\longmapsto \left (\int_{Y}f(x,.) \right )(x)
    \end{align*}
    $$ Est-ce que donc cette fonction est intégrable sur $X$ ?
    Merci beaucoup.

    Edit. J'ajoute aussi dans l'hypothèse que $f(.,y)$ soit intégrable sur $X$ aussi.
  • Si je comprends bien tes notations, la réponse est oui (modulo les hypothèses sigma fini) car le théorème de Tonelli dit que les trois quantités (qui ont toujours un sens dans $[0,+\infty]$)
    - $\int_{X\times Y} f\ \ d\mu\otimes\nu$
    - $\int_X (\int_Y f(x,y) \ d \nu(y)) \ d \mu(x)$
    - $\int_Y (\int_X f(x,y) \ d \mu(x)) \ d \nu(y)$

    sont égales (et donc en particulier simultanément finies ou infinies).
  • En fait j'aimerais justement, sans utiliser Tonelli si possible car mes hypothèses précèdent Tonelli...

    Edit: En fait c'est très bien comme ça, merci beaucoup :-)
  • Rebonjour aléa, je ne comprends pas pourquoi vous avez mentionné le fait que la fonction soit de signe constant indiquerait d'appliquer Tonelli. En fait, nulle part dans mon cours je ne vois mention du signe de la fonction comme critère de mesurabilité.
  • Je me suis mal fait comprendre; je dis qu'il suffit de vérifier la mesurabilité et que le signe est constant, mais bien sûr ça n'a rien à voir.
    Généralement, pour la mesurabilité, il y a un argument très simple (quand on sait que les indicatrices des boréliens sont mesurables, de même que les fonctions continues, et qu'on sait que les fonctions mesurables forment une algèbre, on a presque tout).
  • Je vois donc si je comprends bien, on a que fonctions continues $\implies$ intégrable sur $\Omega$ et fonctions continues fois indicatrice $\implies$ intégrable sur borélien.

    Par contre je ne comprends toujours pas pourquoi évoquer le signe de la fonction... L'intégrale en générale n'est-elle pas simplement la différence de l'intégrale de la partie positive de $f$ et de -1*partie négative de $f$?
  • Non, la mesurabilité et l'intégrabilité, ça n'a rien à voir.

    A la limite on pourrait définir l'intégrale de fonctions pas mesurables (mais ça ne marcherait pas bien après).

    Lorsque $f$ est mesurable positive $\int f\ d\mu$ a toujours du sens.
    C'est ça le truc important. C'est un nombre de $[0,+\infty]$.
    Et ce nombre est bien défini même si la fonction n'est pas intégrable
    (on dit que la fonction positive est intégrable si l'intégrale est finie).

    Dans le cas général, on ne pourra définir l'intégrale comme la différence que tu mentionnes que si les deux intégrales que tu mentionnes ne sont pas toutes deux infinies.
  • Si une fonction est continue alors elle est mesurable.
    Si une fonction est mesurable alors sa valeur absolue l'est.
    Alors $\int |f|\ d\mu$ a toujours du sens sur $[0,+\infty]$.
    Alors son intégrale dans le cas général est bien définie comme ce nombre.

    Où se trouve l'erreur dans ce raisonnement?

    Edit: En fait je crois comprendre, c'est peut être la dernière phrase car son intégrale ne vaut pas ce nombre en fait... Le hic se trouve précisément à la transition entre le fait que $\int |f|\ d\mu$ puisse avoir du sens sur $[0,+\infty]$ et définir ensuite $\int f\ d\mu$ je crois.
  • Oui, par exemple si $f(x)=\frac{\sin x}{x}$, $\int_{R^+} f_+=\int_{R^+} f_-=+\infty$, donc on ne peut pas donner de sens à la différence.
  • Je vois, donc pour finir, regarder si la fonction est de signe constant permet juste d'éviter de séparer les cas parties positives et négatives c'est ça?

    Et finalement Tonelli permet de dire que si la fonction est mesurable, et appliquer l'intégrale $\int_X (\int_Y f(x,y) \ d \nu(y)) \ d \mu(x)$ ou encore $\int_Y (\int_X f(x,y) \ d \mu(x)) \ d \nu(y)$ conduit à une intégrale finie, alors $f$ est intégrable sur l'espace produit c'est ça?
  • 1) Oui, mais c'est d'une valeur inestimable, car tu n'as pas besoin de regarder si l'intégrale est finie avant d'avancer dans tes calculs

    2) Oui (pour des fonctions positives, bien sûr).
  • Mais si $f$ n'est pas de signe constant, alors j'ai juste à étudier deux intégrales de signe constant au lieu d'une, si $f$ était de signe constant, donc pas besoin ici non plus de regarder si l'intégrale est finie pour les deux avant d'avancer.. :-S
  • En gros, tu es en train de me dire que avoir A et B à faire, c'est pareil qu'avoir B à faire, car si on a A et B à faire, on peut tout de suite se mettre au boulot en faisant A, de même qu'on pourrait tout de suite se mettre au boulot en faisant B.
  • Si la seule difficulté évoquée est le calcul de deux intégrales au lieu d'une alors ce n'était pas ça que j'avais compris de votre message, dans ce cas c'est bon et pas besoin de lire ce qui suit.

    Sinon: Vous avez dit "tu n'as pas besoin de regarder si l'intégrale est finie avant d'avancer dans tes calculs" par opposition à l'intégrale d'une fonction qui ne soit pas de signe constant.

    Je ne vois pas pourquoi :
    -"Ignorer une condition n’empêche pas d'appliquer B"
    Ne puisse pas impliquer:
    -"Ignorer une condition n’empêche pas d'appliquer A et B"

    Où ici la condition se réfère à "l'intégrale est finie" et A et B étant le calcul de l'intégrale de $f^+$ et $f^-$ respectivement.
  • Par exemple, tu peux calculer $$

    \int_0^1 \frac{-\log x}{1-x}\ dx,

    $$ en développant $\dfrac1{1-x}$ en série sans te poser la question de convergence de l'intégrale. Tu diras juste à la fin "tiens, je l'ai calculée et elle est finie".
  • Oui je sais, mais alors pour $$f(x)=\begin{cases}
    \frac{-\log x}{1-x} & \text{ si } x\in \,]0,1[ \\
    \frac{\log (x-1)}{1-(x-1)} & \text{ si } x\in \,]1,2[
    \end{cases}
    $$ Où est la différence pour $\int_0^2 f(x)\ dx$ ? Pas besoin non plus de connaître si c'est intégrable, on applique le même argument à $f^+$ et $f^-$ et on trouve le résultat, et pourtant $f$ n'est pas de signe constant... ?
  • La différence entre quoi et quoi ?

    Par ailleurs, en pratique, on ne calcule jamais une intégrale par différence de $f_+$ et de $f_-$, genre

    $\int_0^{+\infty} \frac{\sin t}t e^{-t}\ dt$
  • La différence entre calculer l'intégrale de la fonction que j'ai donné et celle que vous avez donné, elles se calculent exactement de la même manière il me semble ($f^+$ et $f^-$ sont donnés directement).

    Donc en pratique, on ne calcule jamais une intégrale d'une fonction qui n'est pas de signe constant? Car calculer l'intégrale de $f^+$ et $f^-$ est le seul moyen...
  • Non, on ne fait quasiment jamais comme ça, même pour un truc plus simple comme

    $\int_0^{+\infty} e^{-t} \sin(t) \ dt$.
  • Donc que fait-on dans ce cas? On se contente de dire que la fonction est intégrable en bornant son intégrale de la valeur absolue sans calculer sa valeur?
  • Il y a plusieurs méthodes possibles, en calculant $\int_0^x \sin(t)e^{-t}\ dt$ ou $\int_0^x e^{it}e^{-t}\ dt$.
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