Intégrale de Lebesgue et primitives

Bonjour,

Concernant l'usage de l'intégrale de Lebesgue. Si je comprends bien, cette notion permet de généraliser l'intégrale de Cauchy-Riemann enseignée depuis le lycée, permettant ainsi d'intégrer des fonctions bien plus variées et tordues qui jusque là n'entraient pas dans le cadre de ce qui était intégrable au sens de Riemann.

Mais si je comprends bien, l'immense majorité des fonctions vues dans la plupart des exercices d'études sup (autres que celles qui sont étudiées à des fins purement théoriques dans des cas limites et tordus de type "indicatrice de $\mathbb{Q}$") sont des fonctions très simples et intégrables au sens de Riemann (fonctions continues par morceaux, primitives connues...).

Dès lors je me demande : quand on a un symbole "intégrale" d'une fonction "simple" de type $\int \limits_{[0,1]} x dx$, que l'on prenne cette intégrale a sens de Lebesgue ou au sens de Riemann, est-ce la même chose en termes de calcul ? Ou alors peut-être que l'intégrale de Lebesgue ne mène jamais à des "vrais" calculs simples de ce type et que toute étude de l'intégrale de Lebesgue n'a que pour but un gain en rigueur ? Finalement, est-ce que toutes les manipulations/calculs simples faisables avec l'intégrale de Riemann sont utilisables dans le cadre d'une intégrale de Lebesgue, ou alors est-ce que ça n'a juste rien à voir ? Ou alors je me trompe et y'a énormément de cas de type "indicatrice de $\mathbb{Q}$" qui sont au coeur des exercices/applications de l'intégrale de Lebesgue ?

J'espère que ma question est claire et que le fond de mon "problème" est compréhensible, car j'ai parcouru un paquet de polys de théorie de la mesure avec des détails techniques à n'en plus finir mais je suis totalement passé à côté de "comment" on calcule une intégrale de Lebesgue ? Bref, j'ai saisi une partie des détails "techniques" de type "on sépare non pas l'espace de départ mais celui d'arrivée", mais je me demande comment très concrètement on calcule une intégrale de Lebesgue...

Réponses

  • Toute fonction intégrable au sens de Riemann (et j'ai bien dit intégrable) est intégrable au sens de Lebesgue (avec la mesure de Lebesgue) et les deux intégrales valent la même chose. Donc dans le cas Riemann-intégrable, tout ce qui est vrai avec Riemann est vrai avec Lebesgue, ça ne change en particulier rien à la manière de calculer l'intégrale (et le théorème fondamental de l'analyse reste vrai dans ce cadre, même s'il y a une version plus générale propre à l'intégrale de Lebesgue).

    Mais l'intégration de Lebesgue permet à la fois d'intégrer plus de fonctions, et sans se poser trop de questions (intégrer des limites de suites de fonctions par exemple), d'obtenir plus simplement des théorèmes très puissants (as-tu déjà démontrer le théorème de convergence dominée purement dans le cadre de Riemann ?), d'intégrer des fonctions par rapport à d'autres mesures que celle de Lebesgue (indispensable dans le cadre moderne de la théorie des probabilités), ou encore de servir de fondement à l'analyse fonctionnelle (sans la notion de classe de fonctions égales presque partout on serait très embêté, par exemple la norme $L^2$ ne serait plus une norme).
  • Merci beaucoup pour ta réponse. J'ai quelques questions supplémentaires si tu as le temps :
    1) Qu'as-tu insinué dans ton "et j'ai bien dit intégrable" ?
    2) Quand on intègre par rapport à une mesure de probabilité, parle-t-on d'une intégrale de Lebesgue ? Est-ce ce que tu avais en tête quand tu parlais du cadre moderne de la théorie des probabilités ?
    3) Calculer l'intégrale d'une variable aléatoire fait partie de ce que les intégrales "non-Riemann" permettent de calculer ?
  • 1) Avec Riemann on peut intégrer des fonctions non intégrables (au sens de Lebesgue) via la notion d'intégrale impropre (ou généralisée), notion qu'on peut aussi étendre à l'intégrale de Lebesgue bien sûr, mais je préfère éliminer toute ambiguïté sinon on peut aboutir à des contresens, surtout quand on découvre l'intégrale de Lebesgue.

    L'ambiguité provient du fait qu'avec Riemann on intègre toujours sur un segment, sinon c'est qu'on parle d'intégrale impropre. Alors qu'avec Lebesgue, l'intégrale sur n'importe quel ensemble mesurable fait sens, donc sans plus de précision on ne parle pas d'intégrale impropre mais d'intégrale de Lebesgue même quand on n'est pas sur un segment, c'est ça qui peut amener des confusion puisqu'une fonction peut ne pas être intégrable au sens de Lebesgue sur $\R$ mais avoir une intégrale impropre convergente sur $\R$. Avec Riemann, si on parle d'intégrale sur $\R$ c'est forcément une intégrale impropre.

    2) Oui c'est ce que j'avais en tête. Je ne suis pas un pro des terminologies, mais moi j'appelle ça une intégrale de Lebesgue (c'est juste que la mesure n'est plus forcément la mesure de Lebesgue).

    3) L'intégrale (ou plutôt l'espérance) d'une variable aléatoire n'est rien d'autre que l'intégrale de Lebesgue d'une fonction (une variable aléatoire est une fonction) par rapport à une mesure de probabilité.
  • 1) sortir du cadre strict de l'intégrale de fonctions continues ou continues par morceaux en passant à la limite sur les bornes en gros ?

    edit: j'avais pas vu ton edit sur ton message, c'est donc bien ça ;-)

    2) 3) c'est très clair, merci beaucoup pour ton temps !
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