Fonction lipschitzienne

Bonjour à tous,

J'essaie de montrer ceci: soit $(E,d_{E})$ un espace métrique et $X,Y$ deux fermés dans $(E,d)$ tels que $\inf_{(x,y)\in X\times Y}\{d_{E}(x,y)\}>1$. Alors, il existe une fonction $1$-lipschitzienne sur $E$ qui vaut $1$ sur $X$ et $0$ sur $Y$.

J'ai pas plus d'informations dans l'énoncé, mais je suppose qu'on regarde les fonctions réelles sur $E$ et qu'on considère $\mathbb{R}$ équipé de la distance euclidienne (car cela me semble faux pour, par exemple, la distance discrète). J'ai essayé quelque chose dans le style de \[f(z)=\begin{cases}I^{-1}\inf\{d_{E}(z,y)\mid y\in Y\} &\text{ si } z\notin X\\ 1&\text{ si } z\in X\end{cases}\] où $I=\inf_{(x,y)\in X\times Y}\{d_{E}(x,y)\}$ mais ça n'a pas l'air d'être la bonne voie du tout. J'ai un peu de mal à voir comment utiliser le fait que $X$ et $Y$ sont fermés.

J'ai également tenté quelque chose par l'absurde en supposant qu'il n'existait aucune fonction $1$-lipschitzienne de ce type. Donc, il existe $z,z'$ tels que $\vert f(z)-f(z')\vert > d_{E}(z,z')$. Comme $f$ est constante sur $X$ et constante sur $Y$, $z,z'$ ne peuvent appartenir tous deux à $X$ ou tous deux à $Y$. De même, comme $\vert f(x) -f(y)\vert=1< I$ pour tout $(x,y)\in X\times Y$, au moins un des $z$ ou $z'$ n'est pas dans $X$, ni dans $Y$.

Je suis un peu perdu... Et si cela est vrai pour toute distance sur $\mathbb{R}$, il est probable que l'exercice vise à ce qu'on démontre cela en toute généralité. Auriez-vous une piste pour que je sache dans quelle direction chercher, svp?


EDIT: en fait, si j'essaie de combiner mes deux approches, j'obtiens ceci: soit $f$ comme définie précédemment. Il est évident qu'elle vaut $0$ sur $Y$ et $1$ sur $X$. Supposons qu'elle ne soit pas $1$-lipschitzienne. Alors, il existe $z$ et $z'$ tels que $\vert f(z)-f(z')\vert > d_{E}(z,z')$. Or, $d_{E}(z,z')>d_{E}(z,y)-d_{E}(z',y) > f(z) - d_{E}(z',y)$. Mais encore une fois, on ne sait pas en faire grand chose.


Cordialement,

Réponses

  • Si tu essayais $\min(d(\cdot,Y),1)$ ?
  • Cela me fait penser au théorème de séparation d'Urysohn. Si j'osais, je dirais, pour $z\in E$ : $f(z)=\frac{d(z,X)}{d(z,X)+d(z,Y)}$ (je ne mets pas l'indice $E$, tout le monde aura compris). Je n'ai pas vérifié le caractère lipschitzien.
  • Merci à tous les deux. J'avais pensé à cette fonction, remarque, mais je n'obtenais rien. Je vais continuer à chercher dans cette direction. Chaurien, je ne connaissais pas ce lemme, mais je vais regarder la fonction que tu proposes.

    Cordialement,
  • MoebiusCorzer écrivait:
    > J'avais pensé à cette fonction, remarque, mais je n'obtenais rien.

    Et pourtant, elle tourne marche. :-)
  • Soit $f(z)=\min\{1,d(z,Y)\}$ où $d(z,Y)=\inf\{d(z,y)\mid y\in Y\}$. Si $f(z)=f(z')$,on a bien $\vert f(z)-f(z')\vert=0\le d(z,z')$. Supposons que $f(z)>f(z')$ (sans perte de généralité). Alors, $0<f(z)-f(z')\le d(z,Y) - d(z',Y)$. Par définition de $d(z',Y)$, pour tout $\delta>0$, il existe $y_{\delta}\in Y$ tel que $d(z',Y)>d(z,y_{\delta})-\delta$. Donc, pour tout $\delta >0$, on a \begin{align*}f(z) - f(z') &\le d(z,Y) - d(z',Y) \\ &\le d(z,y_{\delta})-d(z',y_{\delta})+\delta\\ &\le d(z',z) + \delta \end{align*} $\delta$ étant arbitraire, on en déduit $f(z)-f(z')=\vert f(z)-f(z')\vert\le d(z,z')$. Si ceci est bien correct, je ne vois pas trop où on utilise le fait que $X$ et $Y$ sont fermés.
    EDIT: grossière erreur, je n'ai pas considéré le cas où $f(z')=1<d(z',Y)$.
  • Plutôt qu'une disjonction de cas, tu peux commencer par montrer (si tu ne le sais pas déjà) que $x\mapsto d(x,Y)$ est $1$-lipschitzienne. Ensuite, ce n'est pas idiot de penser à la composition des applications.

    Edit : le caractère fermé n'intervient pas à ce niveau-là.
  • Lorsque j'ai écrit que pour tout $\delta>0$, il existe $y_{\delta}>0$ tel que $d(z',Y)>d(z',y_{\delta})+\delta$ et donc \begin{align*}f(z) - f(z') &\le d(z,Y) - d(z',Y) \\ &\le d(z,y_{\delta})-d(z',y_{\delta})+\delta\\ &\le d(z',z) + \delta \end{align*} cela démontre précisément le caractère $1$-lipschitzien de $x\mapsto d(x,Y)$, non?
    Ensuite, je devrais montrer que $f=\min\{g,h\}$ est $1$-lipschitzienne si $g$ et $h$ le sont. Soient $z,z'$ deux points de $E$. Si $f(z)=g(z)\le h(z)$ et $f(z')=h(z')\le g(z')$. Supposons $f(z)>f(z')$ (l'autre cas se traite de manière similaire), on a \begin{align*}f(z) - f(z') &= g(z)-h(z') \\ &\le h(z)-h(z') \\ &\le d(z,z') \end{align*}
  • Ok. Plus simplement : pour tout $y\in Y$, $x,z$ quelconques, $d(x,Y)\le d(x,y)\le d(x,z)+d(z,y)$. On passe à l'inf au membre de droite $d(x,Y)\le d(x,z)+d(z,Y)$.

    Pour le min, l'application $t\mapsto \min(t,1)$ est trivialement $1$-lipschitzienne et quand on compose une application $k_1$-lipschitzienne avec une application $k_2$-lipschitzienne, on obtient une application $k_1k_2$-lipschitzienne.
  • En effet, c'est plus ingénieux comme ça. J'imagine que pour avoir le même résultat pour des distances sur $\mathbb{R}$, il faut de bonnes conditions sur cette distance. Je vais regarder cela.
    Merci encore pour votre aide, en particulier à toi, remarque.

    Cordialement,
  • Implicitement ici, $\R$ est muni de sa distance usuelle. Sinon, ça ne va pas, il suffit de multiplier la distance usuelle par $\frac12$...
  • Idées en vrac (à montrer-exo)

    1) Si $f: A \to B$ et $g: B \to C$ sont des applications 1-lipschitziennes entre espaces métriques alors $g \circ f$ est 1-lipschitzienne.
    2) Si $F$ est une partie d'un espace métrique $(E,d)$ , $d_F: x \in E \mapsto \inf \{d(x,y)| y \in F\}$ est une application 1-lipschitzienne.
    3) $t \in \R \mapsto \max \{1,t\} = \frac{1+t+|1-t|}{2}$ est 1-lipschitzienne.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • @remarque: Bien entendu, ça ne fonctionne pas pour toute distance sur $\mathbb{R}$, mais peut-on espérer déterminer de "bonnes" conditions pour que ça fonctionne ou est-ce illusoire?
    @Foys: Je vais les faire, merci.
    Auriez-vous une explication de l'hypothèse selon laquelle $X$ et $Y$ devraient être fermés?
  • Les exos de Foys ont déjà été plus ou moins faits dans le fil...

    Je dirais que la fermeture de $X$ et $Y$ n'intervient essentiellement nulle part, tu peux remplacer les deux par leurs adhérences sans rien changer. La situation serait différente si l'on demandait à la fonction de ne prendre les valeurs $0$ et $1$ que sur $X$ et $Y$, auquel cas il serait nécessaire que ces ensembles soient fermés. La fonction que j'ai donnée ne remplit pas exactement cette condition plus forte.*

    * Edit : celle de Chaurien la satisfait, mais ce n'est pas si évident que ça qu'elle est $1$-lipschitzienne sous la condition que la distance de $X$ à $Y$ soit supérieure à $1$.
  • Oui, je suis bien conscient qu'ils ont été faits et je sais qu'ils ne sont pas particulièrement compliqués, mais les écrire correctement reste un exercice relativement utile.
    D'accord, merci pour ta réponse.
  • remarque écrivait:

    > * Edit : celle de Chaurien la satisfait, mais ce n'est pas si évident que ça qu'elle est $1$-lipschitzienne sous la condition que la distance de $X$ à $Y$ soit supérieure à $1$.

    Finalement, cette fonction est bien $1$-lipschitzienne sous la condition en question, donc elle est meilleure que la mienne.
  • Soit \[f(z)=\frac{d(z,Y)}{d(z,Y)+d(z,X)}\geq 0\] On observe directement que \[1-f(z)=\frac{d(z,X)}{d(z,Y)+d(z,X)}\] si bien que $f(z)=0\iff z\in Y$ et $f(z)=1\iff z\in X$ (car $X$ et $Y$ sont fermés). En outre, pour tout $z\in M$, on a \begin{align*}d(z,X)+d(z,Y)&\geq \inf\limits_{(x,y)\in X\times Y}\{d(z,x)+d(z,y)\}\\
    &\geq \inf\limits_{(x,y)\in X\times Y}\{d(x,y)\}\\
    &>1\end{align*} Donc, pour tous $z,z'\in M$, comme on a pour tout $y\in Y$: \[d(z,Y)\le d(z,y)\le d(z,z')+d(z',y)\] on en déduit $d(z,Y)-d(z',Y)\le d(z,z')$ en prenant l'infimum dans le dernier membre à droite. On peut en outre supposer $d(z',X)+d(z',Y)\le d(z,X)+d(z,Y)$ (par symétrie de la distance) dont il découle, pour tous $z,z'\in M$: \begin{align*}d(z,z') &\geq \frac{d(z,Y)}{d(z',Y)+d(z',X)}-\frac{d(z',Y)}{d(z',Y)+d(z',X)} \\ &=\frac{d(z,Y)}{d(z',Y)+d(z',X)} - f(z')\\ &\geq \frac{d(z,Y)}{d(z,Y)+d(z,X)}-f(z')\\ &=f(z)-f(z')\end{align*}

    EDIT: c'est probablement quelque chose d'élémentaire, mais je justifie que l'infimum est atteint sur le fermé (ce qui garantit que la fonction s'annule uniquement pour les $y\in Y$ et ne vaut $1$ que pour les $x\in X$). On a $0\le\inf_{x\in X}\{d(z,x)\}<\infty$. Soit $z$ fixé. Je note $L$ l'infimum précédent. Par définition de l'infimum, pour tout $n\in\mathbb{N}$, il existe $x_{n}\in X$ tel que $L\le d(z,x_{n})\le L+\tfrac{1}{n}$. Il est clair que $d(z,\cdot)$ est continue (elle est même $1$-lipschitzienne). Comme $X$ est fermé et comme $(x_{n})_{n}$ est bornée, cette suite converge dans $X$ vers un certain $x_{0}$. Par conséquent, on a $L\le d(z,x_{0})\le L$, donc l'infimum est atteint en $x_{0}\in X$.
  • (tu)(tu)

    Edit : les (tu) s'appliquent à ce qui est situé avant l'edit. Après, c'est plutôt des (td) :-D
  • Merci pour ton aide (et à celle de Chaurien car, vu la contrainte de l'énoncé, il est probable que celui-ci soit en réalité d'avoir ces valeurs uniquement sur les fermés en question), ainsi que ta patience.
  • Pour ton edit : effectivement c'est élémentaire. Faisons plus simple. Soit $Y$ quelconque, alors $A=\{x,d(x,Y)=0\}=\bar Y$. En effet, $A$ est un fermé qui contient $Y$, donc $\bar Y\subset A$. Réciproquement, si $x\in A$, alors toute boule centrée en $x$ intersecte $Y$, sinon, $d(x,Y)\ge \alpha$ où $\alpha$ est le rayon d'une boule n'intersectant pas $Y$. Donc $A\subset \bar Y$. [small](Bon, en fait, ce n'est pas ça du tout que raconte ton edit, voir editedit plus bas...).[/small]

    Edit : je n'avais pas vu que dans ton edit, tu utilises sans le dire la compacité des bornés, qui n'est pas du tout acquise en général. Donc, c'est niet pour cet argument. Mais on peut effectivement aussi raisonner avec des suites.

    Editedit : décidément je n'ai pas les yeux en face des trous. Non l'inf n'est pas nécessairement atteint. Prenons $E=\{0\}\cup{]}1,2]$, muni de la distance induite par la distance usuelle. Alors $X={]}1,2]$ est un fermé de $E$ et la distance de $0$ à $X$ n'est pas atteinte.
  • En effet, la preuve que $d(z,Y)=0$ ssi $z\in Y$ est plus simple que tout ce que j'aurais pu tenter avec des suites (ce qui est voué à l'échec, visiblement). Oui, en fait, si je comprends bien, la compacité me garantirait l'existence de cette limite $x_{0}\in X$ par l'existence d'une sous-suite convergente de $(x_{n})_{n}$. Bien entendu, cette compacité n'est pas assurée, comme le montre ton contre-exemple.
    Ta patience m'impressionne. Merci beaucoup!
  • Non, les suites ne sont pas vouées à l'échec. Il faut juste les utiliser à propos. Ici, si l'on prend $x$ tel que $d(x,Y)=0$, il existe bien une suite $x_n\in X$ telle que $d(x,x_n)\le \frac 1n$. Donc $x$ est adhérent à $Y$. Le fait que l'inf soit nul ou pas est crucial.
  • Et dans le même ordre d'idées, la distance à un compact, elle, est bien atteinte sur ce compact. Mais c'est une évidence.
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