Mesures sur L²
Bonjour
J'avais envie de faire quelque chose d'intéressant et donc j'ai décidé d'essayer de voir si "l'intuition" pouvait servir à quelque chose dans les e.v de dimension infinie ou si tout n'était que "shut up and calculate" . J'ai choisi L² parce que je le connaissais déjà et puisque je trouve son produit scalaire sympa et j'ai commencé par regarder si on pouvait "visualiser" quelque chose dans sa topologie .
D'abord j'ai voulu voir s'il était séparable puisque c'est la moindre des choses - j'ai donc pris 2 points f et g (f=2exp-|x| et g=exp-|x| puisque
d(f,g)=1) et j'ai cherché un point y t.q d(f,y)<1/2 et d(g,y)<1/2 . A moins que je me sois trompé , il y en a une infinité . Il semblerait donc que n'importe quelle boule de L² a une intersection non vide avec une autre boule quelque soit la distance de leur centres et quelque soient leur rayons et L² ne serait donc pas séparable .
Par conséquent il n'existerait pas de compact non plus . Dans ce cas ça me paraitrait assez pathologique (je visualise une sorte d'écume avec des petites et des grosses bulles qui se coupent toutes entre elles - un peu comme les ensembles de Julia mais avec beaucoup plus de dimensions) .
Question 1 : C'est juste que L² n'est pas séparable ou j'ai loupé quelque chose ?
Ensuite j'ai voulu voir à quoi ressemblerait une mesure d'une partie de L² . J'ai aussi commencé avec les boules en me demandant quel serait leur volume . Et j'ai trouvé que ça ne pouvait être que 0 , 1 ou infini ce qui ferait vraiment pauvre pour une mesure .
Question 2 : Ici je suis conscient qu'il faudrait certainement pas mal de technique pour aller plus loin . Mais est-ce qu'il existe des mesures moins triviales que celles que je crois avoir trouvé ?
Je m'excuse d'avance pour ces questions plus qualitatives que quantitatives . Notez bien que mon intention n'est pas de maîtriser la topologie des e.v de dimension infinie (sinon j'aurais acheté quelques livres) mais plutôt de me faire une idée préliminaire de ce que c'est grâce aux lumières de ceux qui savent déjà . Les livres pourront toujours venir éventuellement plus tard .
J'avais envie de faire quelque chose d'intéressant et donc j'ai décidé d'essayer de voir si "l'intuition" pouvait servir à quelque chose dans les e.v de dimension infinie ou si tout n'était que "shut up and calculate" . J'ai choisi L² parce que je le connaissais déjà et puisque je trouve son produit scalaire sympa et j'ai commencé par regarder si on pouvait "visualiser" quelque chose dans sa topologie .
D'abord j'ai voulu voir s'il était séparable puisque c'est la moindre des choses - j'ai donc pris 2 points f et g (f=2exp-|x| et g=exp-|x| puisque
d(f,g)=1) et j'ai cherché un point y t.q d(f,y)<1/2 et d(g,y)<1/2 . A moins que je me sois trompé , il y en a une infinité . Il semblerait donc que n'importe quelle boule de L² a une intersection non vide avec une autre boule quelque soit la distance de leur centres et quelque soient leur rayons et L² ne serait donc pas séparable .
Par conséquent il n'existerait pas de compact non plus . Dans ce cas ça me paraitrait assez pathologique (je visualise une sorte d'écume avec des petites et des grosses bulles qui se coupent toutes entre elles - un peu comme les ensembles de Julia mais avec beaucoup plus de dimensions) .
Question 1 : C'est juste que L² n'est pas séparable ou j'ai loupé quelque chose ?
Ensuite j'ai voulu voir à quoi ressemblerait une mesure d'une partie de L² . J'ai aussi commencé avec les boules en me demandant quel serait leur volume . Et j'ai trouvé que ça ne pouvait être que 0 , 1 ou infini ce qui ferait vraiment pauvre pour une mesure .
Question 2 : Ici je suis conscient qu'il faudrait certainement pas mal de technique pour aller plus loin . Mais est-ce qu'il existe des mesures moins triviales que celles que je crois avoir trouvé ?
Je m'excuse d'avance pour ces questions plus qualitatives que quantitatives . Notez bien que mon intention n'est pas de maîtriser la topologie des e.v de dimension infinie (sinon j'aurais acheté quelques livres) mais plutôt de me faire une idée préliminaire de ce que c'est grâce aux lumières de ceux qui savent déjà . Les livres pourront toujours venir éventuellement plus tard .
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Réponses
-Un espace topologique est séparé si étant donné deux points $x\neq y$ il existe deux ouverts $U$, $V$ tels que $x\in U$, $y\in V$ et $U\cap V=\emptyset$.
-Un espace topologique est séparable s'il possède une partie au plus dénombrable dense. Par exemple $\mathbf R$ (muni de la topologie usuelle) est séparable puisque $\mathbf Q$ y est dense.
Ensuite tu as fais une erreur. L'espace $L^2$ est métrique, et donc la distance doit vérifier l'inégalité triangulaire, si $d(f,g)=1$ alors l'ensemble des points $y$ vérifiant $d(f,y)<1/2$ et $d(g,y)<1/2$ est vide. Petit rappel d'ailleurs, un espace métrique est toujours séparé : étant donné deux points $x\neq y$ il suffit de prendre les ouverts $U=B(x,d(x,y)/3)$ et $V=B(y,d(x,y)/3)$.
Mais ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas utiliser l'intuition dans les EV de dimension infinie, par contre cela demande de l'entrainement et une bonne connaissance des théorèmes et contre-exemples classiques.
Pour ta deuxième question, développer une théorie de la mesure dans un EV de dimension infinie n'est pas aussi simple que dans $\mathbf R^d$. Un des problème est que ces espaces ne sont pas localement compacts et on peut par exemple ranger (sans intersections) une infinité de boules ouvertes de rayon $1/2$ dans $B(0;2)_{L^2}$. Forcément si on veut une mesure invariante par translation ça coince et on se retrouve avec une mesure qui vaut presque toujours $0$ ou $+\infty$ pour un ouvert borné : c'est pas très intéressant. Mais on peut quand même construire des mesures intéressantes sur des espaces de dimension infinies, il faut par contre oublier l'invariance par translation.
Tu as raison - ce que je voulais vérifier était si l'espace était séparé .
D'abord je me suis dit que c'était évident à cause de l'inégalité triangulaire .
Ensuite j'ai voulu le vérifier directement avec l'exemple que je mentionne .
J'ai donc pris comme distance d(x,y) = ||x-y|| = Sqrt (Intégrale (x-y)²dt)
Ensuite j'ai écrit d²(f,y)=||exp(-|x|) - y||² <1/4 et d²(g,y) = ||2.exp(-|x|) - y||² < 1/4 . Ca m'a donné une inéquation pour l'intégrale de y.exp(-|x|) qui pouvait être satisfaite par une infinité de y .
Comme il y a contradiction, il y a erreur (qui devrait être grosse) mais je n'arrive pas à trouver où d'où Question 1 .
Pour ma 2e question j'étais en fait guidé par la question si on pouvait définir des probabilités sur des parties des espaces comme L² tout comme on le fait sur des attracteurs dans la dynamique non linéaire (pour des espaces de phase de dimension finie) . Evidemment pour que ça ait un sens il faut que la mesure soit invariante par la dynamique sinon ça ne sert à rien . Qu'est-ce que signifie l'invariance par translation d'une mesure dans un espace de dimension infinie ?
Est-ce qu'il y a un rapport avec une invariance par une transformation f (de X dans X) (i.e µ(f^-1(A)) = µ(A) pour tout A measurable )?
Sinon je n'arrive toujours pas à trouver où j'ai fait l'erreur avec les ||exp(-|x|) - y||² <1/4 .
Il doit y avoir une astuce qui permet de relier l'intégrale de f.y (c'est à dire <f,y>) aux intégrales de f² et y² (c'est à dire à ||f|| et ||y||) mais si je l'ai connue, j'ai dû l'oublier et je dois être trop rouillé pour avoir la bonne intuition et la retrouver .
Ça s'appelle l'inégalité de Cauchy-Schwarz :-D Je ne sais pas si c'est ce que tu cherches, je ne fais que passer.
Cauchy-Schwarz - en plus c'est super facile à démontrer. D'ailleurs j'aurais pu y penser - c'est comme en littérature où quand on ne sait pas, la bonne réponse est Marguerite Duras. En maths si ce n'est pas Cauchy, c'est Schwarz
Merci, problème résolu . L² est donc séparé et je peux avancer pour continuer à réinventer la roue.
[Ne pas confondre Herman Schwarz (1843-1921) avec Laurent Schwartz (1915-2002). ;-) AD]
J'ai bien écrit qu'à priori c'était l'inégalité triangulaire mais comme celle-ci supposait que j'avais déjà une norme, je voulais faire la preuve directe pour un exemple via le produit scalaire et j'avais du mal avant que tu n'évoques l'astuce de nos 2 amis .
Si on n'avait pas <x,y>² =< <x,x>.<y,y> je ne vois même pas comment on pourrait démontrer que <x,x> définit une norme . Donc il me semble que Cauchy Schwarz a tout à voir avec le fait que L² est métrique donc séparé .
Je réitère la question (si quelqu'un sait) : à quoi est utile l'invariance d'une mesure par translation et en quoi c'est gênant qu'on ne l'ait pas pour un espace de dimension infinie ?
Maintenant pour la question de savoir à quoi ça sert... tout dépend de ce que tu cherches à faire avec ta mesure. Si tu cherches à calculer la "taille" des parties de $L^2$ ça semble naturel de demander à ce que la mesure soit invariante par translation (déplacer une boule ne devrait par changer son aire). Maintenant si tu es sur un espace des phases et que la translation n'est pas définie ou bien que l'évolution par la dynamique n'est pas une translation alors l'invariance par translation n'a pas forcément grand intérêt. Bref tout dépend de ce que tu cherches à faire avec ta mesure.
J'ai trouvé plein de sites Web qui utilisent une notation bizarre : |<x,y>| =< ||x|| . ||y||
En principe || || signifie "norme" . Mais s'il me faut cette inégalité pour prouver précisément que <x,x> est une norme , comment je peux utiliser l'existence de ladite norme dans l'inégalité qui est censée la prouver ?
C'est pour ça que j'ai utilisé dans mon petit calcul plutôt la notation <x,y>² =< <x,x>.<y,y> . Ou alors il y a un truc qui m'a échappé ?
@Mojo
Merci à nouveau, tes réponses clarifient les choses bien pour moi .
Ce que je cherche à faire ?
D'abord juste m'amuser puisque je trouve que le sujet est amusant et retrouver des éléments de topologie dans un e.v où il n'y a ni base ni coordonnées est intéressant .
Au delà il y a une motivation plus physique .
La dynamique non linéaire où les espaces de phase sont des R^n (i.e on a n équadiffs non linéaires ordinaires) est assez bien étudiée et on peut visualiser assez bien ce qui se passe . La théorie ergodique se passe dans ce genre d'espaces .
La dynamique non linéaire définie par des EDP (p.ex Navier Stokes) a comme espace de phase justement des L^p de dimension infinie .
Alors se pose la question si on peut développer une théorie probabiliste comme dans le cas des R^n .
En d'autres termes est-ce qu'il existe une partie P de L² pour que toute orbite dynamique (ici p.ex des solutions de Navier Stokes) y finisse quand le temps est assez grand .
Pour que ça ait une utilité , il faut bien sûr que P soit mesurable , que µ(P) = 1 et que µ ne change pas quand je démarre avec d'autres conditions initiales .
Si on peut trouver un µ comme ça , alors on pourrait dire que la probabilité que le système soit dans un boule B de P est µ(B) .
C'est pour ça que j'essaie de voir quel genre de mesures on peut avoir sur L² .
Attention tout de même :
-Tout espace vectoriel admet une base algébrique (découle du lemme de Zorn).
-Bien que l'existence d'une base algébrique dans $L^2$ ne soit en général pas très utile cet espace est un espace de Hilbert, il admet donc une base hilbertienne. Une base hilbertienne joue très bien le rôle de base et de coordonnées tout en étant "compatible" avec la topologie de l'espace (ce que ne fait généralement pas une base algébrique).
Mais comme il ne peut pas y avoir de base dénombrable et qu'il y a une infinité non dénombrable de x t.q <x,y> = a pour tout y, j'imagine que la notion de "base" ne peut pas conduire à des coordonnées bien utiles .
Peut-être si je prenais les distributions delta ça pourrait faire une sorte de "base" bizarre mais je ne vois pas ce qu'on pourrait en faire en pratique .
Cela ne me surprend pas puisque de toute façon je ne voyais pas ce que pouvait être une "base" de L² . Comment exprime-t-on d'une façon unique P(x).exp(-x²) en fonction des vecteur de base pour P(x) un polynôme quelconque et comment on prouve que ces vecteurs font partie une base de tout L² ?
Pour revenir sur ma question concernant les mesures.
Existe-t-il une mesure probabiliste sur L² ? Ou à défaut y a-t-il une publication que je pourrais lire qui traite de ce sujet (mesures sur L²) ?
[Inutile de reproduire le message précédent. AD]
Pour ce qui est des histoires de bases je te conseille d'aller voir n'importe quel livre traitant des espaces de Hilbert. $L^2$ possède des bases Hilbertiennes qui sont très pratiques et toutes dénombrables, un vecteur de $L_2$ est entièrement déterminé et de façon uniques par ses coordonnées dans cette base Hilbertienne.
D'ailleurs si on prend $(e_n)_{n\in \mathbf N}$ une base hilbertienne de $L^2$, puis qu'on se donne une suite $(X_n)_{n\in \mathbf N}$ de variables aléatoires i.i.d. de loi normale alors je suppose que la variable aléatoire $Y=\sum_{n=0}^\infty \frac{X_n}{2^{n+1}}e_n$ est à valeurs dans $L^2$ presque sûrement (si quelqu'un pouvait confirmer ce serait sympathique, cela revient à vérifier que $\sum_{n=0}^\infty \left|\frac{X_n}{2^{n+1}}\right|^2$ converge presque sûrement). La loi de $Y$ est alors une mesure de proba sur $L^2$.
Ensuite j'aimerais voir quelle est la probabilité d'une boule B dans N , c'est à dire µ(B) .
Pour les bases ça me parait plus simple après vos éclaircissements . J'imagine que ça pourrait marcher :
- Je prends une famille infinie dénombrable ei de L² p.ex les harmoniques sphériques puisqu'elles sont orthogonales
- Je prouve qu'une série des Ki.ei converge vers f (elle devrait être unique mais comme les ei sont orthogonaux on devrait avoir Ki=<f.ei>
- Je dis que la famille infinie dénombrable des Ki sont les "coordonnées" de f même si la dimension de L² n'est pas dénombrable
C'est à peu près ça l'idée ?