Espaces vectoriels topologiques
Je suis en train de me faire une petite "sociologie" des espaces vectoriels topologiques. Ceux que je connais le mieux sont évidemment les espaces vectoriels normés, mais j'ai pu voir des EVT plus généraux (en cours d'analyse fonctionnelle en Master, et en fouinant sur internet). Ça m'intéresse, mais j'ai un peu de mal à y voir clair à cause de toutes les notions topologiques qui interviennent.
En premier lieu, j'aimerais comprendre les interactions entre les EVT métrisables et les EVT localement convexes. Mais avant même d'aller là, la première question que j'ai, c'est : connait-on un intérêt aux EVT non séparés (Hausdorff) ? Dans le sens, est-ce qu'on s'y intéresse ailleurs (analyse, géométrie...) qu'en topologie générale "pure" ?
Je vais supposer que oui.
1) Métrisable/Localement convexe :
- Je connais déjà un exemple d'EVT localement convexe non métrisable, trouvé par exemple ici.
- Dans l'autre sens, existe-t-il des EVT métrisables mais non localement convexes ? Si oui, quelqu'un peut me donner un exemple ?
2) Métrisable/Séparé :
- Je sais que tout espace métrisable est séparé, donc en particulier les EVT métrisables le sont.
- Dans l'autre sens, j'ai trouvé le théorème de Nagata-Smirnov. Un EVT séparé est régulier, comme tout groupe topologique, mais je ne comprends pas trop ce qu'est une "base dénombrablement localement finie". Est-ce qu'un EVT séparé admet forcément une telle base ?
3) Localement convexe/Séparé :
- Il y a un critère de séparation pour les EVT localement convexes ici, mais je ne connais aucun exemple d'EVT localement convexe non séparé (d'où ma question si on connait déjà un intérêt aux EVT non séparés). Quelqu'un en a un ?
- Je devrais demander aussi s'il y a des EVT séparés non localement convexes, mais pour le coup, je voudrais restreindre aux EVT séparés, non métrisables et non localement convexes. Mais là... ni distance, ni norme, ni semi-normes... ça ne m'a pas l'air très sympathique !
Je me ferai un joli diagramme de Venn avec tout ça :-D
En premier lieu, j'aimerais comprendre les interactions entre les EVT métrisables et les EVT localement convexes. Mais avant même d'aller là, la première question que j'ai, c'est : connait-on un intérêt aux EVT non séparés (Hausdorff) ? Dans le sens, est-ce qu'on s'y intéresse ailleurs (analyse, géométrie...) qu'en topologie générale "pure" ?
Je vais supposer que oui.
1) Métrisable/Localement convexe :
- Je connais déjà un exemple d'EVT localement convexe non métrisable, trouvé par exemple ici.
- Dans l'autre sens, existe-t-il des EVT métrisables mais non localement convexes ? Si oui, quelqu'un peut me donner un exemple ?
2) Métrisable/Séparé :
- Je sais que tout espace métrisable est séparé, donc en particulier les EVT métrisables le sont.
- Dans l'autre sens, j'ai trouvé le théorème de Nagata-Smirnov. Un EVT séparé est régulier, comme tout groupe topologique, mais je ne comprends pas trop ce qu'est une "base dénombrablement localement finie". Est-ce qu'un EVT séparé admet forcément une telle base ?
3) Localement convexe/Séparé :
- Il y a un critère de séparation pour les EVT localement convexes ici, mais je ne connais aucun exemple d'EVT localement convexe non séparé (d'où ma question si on connait déjà un intérêt aux EVT non séparés). Quelqu'un en a un ?
- Je devrais demander aussi s'il y a des EVT séparés non localement convexes, mais pour le coup, je voudrais restreindre aux EVT séparés, non métrisables et non localement convexes. Mais là... ni distance, ni norme, ni semi-normes... ça ne m'a pas l'air très sympathique !
Je me ferai un joli diagramme de Venn avec tout ça :-D
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Réponses
1) Si $E$ est métrisable alors sa topologie est engendrée par une distance $d$ et les $B(0,1/n)$ pour cette distance forment une base (dénombrable) de convexes équilibrés, absorbants, etc. voisinages de l'origine. $E$ est donc localement convexe.
2) Bizarre ce terme de "dénombrablement localement finie" pas très clair en tout cas... D'après le wikipédia anglais il faut comprendre "union dénombrable de familles localement finies".
3)-Un EV muni de la topologie grossière est localement convexe mais non séparé.
-De bons exemples d'espaces non localement convexes sont les $L^p(0;1)$ avec $0\leq p <1$. On définit facilement les voisinages puisqu'il y a une "norme" dessus (l'inégalité triangulaire n'est pas vérifiée pour cette "norme"). Ces espaces ont la propriété d'avoir un dual réduit à la forme linéaire nulle !
Il y a un exercice de topologie classique qui demande de montrer qu'une boule donnée par une norme est nécessairement convexe. Pour une norme ça vient de l'inégalité triangulaire plus l'homogénéité, ce que ne vérifie pas forcément une distance... Idem pour la partie équilibré.
Donc oui j'ai dis des bêtises ! En fait les espaces $L^p([0;1])$ avec $0\leq p <1$ sont métrisables donc ils fournissent aussi une réponse à la question 1), mais à l'opposé de ce que j'avais raconté dans mon premier message...
Déjà, il faudrait que $f \longmapsto \displaystyle \bigg( \int_0^1 |f(x)|^p d\mu(x) \bigg)^{1/p}$ ne soit pas une norme. Non seulement, j'ai la flemme de démontrer que ça ne vérifie pas l'inégalité triangulaire maintenant, mais en plus, apparemment on peut démontrer que $L^p([0;1])$ n'est pas localement convexe sans ça. Et s'il n'est pas localement convexe, il n'est en particulier pas normable, donc cette application ne peut pas être une norme.
Bon, alors pour la métrisabilité. Sans faire exprès, j'ai trouvé sur Wikipédia qu'il fallait considérer $d(f,g) := \displaystyle \int_0^1 |f(x) - g(x)|^p d\mu(x)$ comme distance, alors allons-y (d'ailleurs, ça donne une idée de ce qui va coincer dans l'inégalité triangulaire pour la quasi-norme). La seule difficulté est l'inégalité triangulaire, mais elle vient du fait que la fonction $x \longmapsto x^p$ est sous-additive sur $\mathbb{R}_+$ (chose que je dois réapprendre à démontrer, toujours ces calculs d'analyse qui reviennent me mordre les fesses) pour $p \in ]0;1[$. Donc $L^p([0;1])$ est métrisable. Apparemment, il est même complet (j'essaierai de vérifier ça).
@Corto : pour $p=0$, on n'aura pas $d(f,g)=0 \Longleftrightarrow f=g$, puisque $0^0 \neq 0$. Il faut donc considérer les exposants $0 < p < 1$, et non pas $0 \leqslant p < 1$... mais bon, pour ce que ça change :-D.
Pour montrer qu'il n'est pas localement convexe, je ne suis pas encore très inspiré à l'heure qu'il est. Il faut que j'y réfléchisse.
pour montrer que ce n'est pas une norme on peut se restreindre à un sev de dimension 2:
par exemple le sous-espace des fonctions constantes sur les deux demi intervalles de [0;1]
cet espace est isomorphe à un sev de dimension finie où la boule unite induite n'est pas convexe
et par contraposition on conclue.(:P):-S
J'ai mis la démonstration sur la non convexité locale des $L^p$ en pièce jointe, c'est tiré du livre de Komornik dont j'ai parlé plus haut. Il y a quelques coquilles :
-il faut lire $0<p<1$ au lieu de $0<p\leq 1$ dans la première moitié de la page (même si c'est l'exemple en bas de page qui nous intéresse ici).
-Les seuls ouverts convexes sont $\emptyset $ et $L^p$, pas $\{0\}$ et $L^p$.
Mais au moins ça donne des exemples/contrexemples intéressants !
J'ai d'abord essayé de montrer qu'une suite de Cauchy de (classes de) fonctions $(f_n)_n$ était forcément convergente. Je n'ai pas réussi comme ça, parce que je ne vois pas comment trouver la limite éventuelle d'une suite abstraite de fonctions dans cet espace métrique. En tentant par l'absurde (considérer une suite de Cauchy qui ne converge pas et trouver un truc qui coince), je n'ai rien trouvé non plus, je tournais en rond. Je ne vois pas trop comment utiliser la propriété des fermés emboîtés ici, donc je suis bloqué...
Je considère un espace $\mathcal{L}^p$ avec $p \geqslant 1$. C'est l'espace des fonctions, et pas encore l'espace-quotient $L^p$ des classes de fonctions. Alors $||.||_p$ est une semi-norme sur $\mathcal{L}^p$, et c'est une semi-norme stricte (dans le sens : ce n'est pas une norme).
Donc, si on considère $\mathcal{L}^p$ comme un EVT muni de la topologie engendrée par l'application $||.||_p$, c'est un EVT qui est :
- localement convexe, puisque sa topologie est engendrée par une famille de semi-normes (qui ne contient, ici, qu'une seule semi-norme)
- non séparé (si j'ai bien compris : parce que la semi-norme, n'étant justement pas une norme, n'est pas séparée)
...donc, muni de cette topologie, il ne peut pas être métrisable (et a fortiori, il ne peut être ni complet, ni normable). C'est donc un EVT "strictement" localement convexe et non séparé.
Par contre, dans mon bouquin d'Analyse L3, ils définissent quand même une notion de "complétude" pour les espaces vectoriels semi-normés, dont les $\mathcal{L}^p$ avec $p \geqslant 1$ sont justement LE prototype de base. Si je note $s$ une semi-norme sur un espace vectoriel $E$, un peu comme avec une vraie norme, ils définissent qu'une suite $(x_n)_n$ de $E$ est :
- de Cauchy au sens de $s$ si pour tout $\epsilon > 0$, il existe $N \in \mathbb{N}$ tel que pour tous $(m,n)$ supérieurs à $N$, on a $s(x_n - x_m) < \epsilon$
- convergente vers $x$ au sens de $s$ si pour tout $\epsilon > 0$, il existe $N \in \mathbb{N}$ tel que pour tout $n \geqslant N$, on a $s(x_n - x) < \epsilon$
...et ils disent qu'un espace semi-normé est "complet" pour (la topologie engendrée par) $s$ si toute suite qui est de Cauchy au sens de $s$ est convergente au sens de $s$.
Du coup, dans mon bouquin, ils démontrent qu'en ce sens-là, $\mathcal{L}^p$ est un espace vectoriel semi-normé "complet" au sens de la semi-norme $||.||_p$. C'est cohérent, ça me paraît logique de définir les choses comme ça, mais qu'un truc puisse être complet en un sens cohérent alors qu'il n'est pas métrisable, c'est confusant ! :-S
EDIT pour un lecteur qui découvre le truc comme moi (et mémo pour moi, du coup :-D ) : Tout comme les normes définissent des distances, les semi-normes définissent des écarts (essentiellement, presque une distance mais on n'a pas $d(x,y)=0 \Longleftrightarrow x=y$ avec un écart), une topologie engendrée par un écart est dite "pseudométrique" et n'est en principe jamais séparée (sauf si la semi-norme est en fait une norme, ou si l'écart est en en fait une distance), tout ceci donne lieu à la théorie des espaces uniformes, qui est donc une généralisation de celle des espaces métriques, et du coup la complétude au sens des espaces uniformes est une généralisation de celle au sens des espaces métriques. Du coup, c'est normal qu'il existe des EVT "complets" au sens d'une semi-norme (puisque la topologie engendrée par une semi-norme est uniformisable) alors qu'ils ne sont pas complets du tout au sens usuel des espaces métriques (puisque ça n'a aucun sens de parler de ça ici). Ouf !
La première chose à retenir est qu'une preuve de complétude pour un espace $X$ se passe souvent comme ça :
1)On prend une suite de Cauchy $(f_n)_n$.
2)On trouve un candidat pour la limite de $(f_n)_n$, notons le $f$.
3)On montre que $f\in X$.
4)On termine en montrant qu'on a effectivement $\lim f_n =f$ dans $X$.
Pour $L^p$ ce qu'on fait généralement c'est qu'on extrait une sous suite $(f_{\sigma(n)})_n$ telle que $\|f_{\sigma(n)}-f_{\sigma(n+1)}\|_p^p\leq 1/2^n$, on pose alors
$$g_{n+1}= \sum_{k=0}^{n} f_{\sigma(k+1)}-f_{\sigma(k)}= f_{\sigma(n+1)} - f_{\sigma(0)}$$
et on montre que $(g_{n}(x))_n$ est de Cauchy pour $\mu$-presque tout $x$. $\R$ étant complet ceci implique que $(g_n)_n$ converge $\mu$-presque partout, on note $g$ sa limite. Le candidat pour la limite de $(f_n)_n$ est alors naturellement $g+f_{\sigma(0)}$.
Ensuite pour les deux autres étapes si je me souviens bien c'est assez standard (théorème de convergence dominée, Fatou etc...).
Du coup, je vais juste me refaire un cours correct sur tout ce bazar (entre autres, avec ce qu'on m'a dit icià, je pense que ça me donnera pas mal d'exemples ou de contrexemples d'EVT vérifiant ou non l'une ou l'autre propriété.
Du coup, merci à ceux qui ont répondu, je vais essayer de me débrouiller tout seul avec ce bazar.