Connexité par arc / Banach complexe

Question du soir...

Est-ce que dans un espace de Banach complexe, le sous-ensemble des opérateurs linéaires continus inversibles est connexe par arc? C’est vrai en dimension finie. Qu’en est-il en dimension infinie?

Merci par avance pour votre éclairage !

Réponses

  • Le "par arc" te fait courir un risque inutile** que ce soit faux. Par contre "connexe" tout court, tu peux "tranquillement" y réfléchir (avec proba forte de succès).

    ** les chemins ont des longueurs finies qui se marient mal avec un passage continu de Truc à Machin "à distance finie". Mais je ne crois pas que ça te gêne que ce soit "ok, à distance infinie du moment que c'est continu"
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Dans un EVT quelconque complet, je ne parierais pas, mais là tu as le théorème de l'application ouverte qui peut aider. (Je n'ai aucune idée de la réponse, sinon je te l'aurais donnée)
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Mais c’est bien la connexité par arc qui est ma question.
  • Peut-être en considérant l'espace de Banach $E$ des fonctions continues de $U(1)$ dans $\C$, et l'opérateur $G$ de $E$ dans $E$ qui à $f$ associe $G(f): z \in U(1) \mapsto zf(z) \in \C$ ? Alors $G$ ne pourrait pas être relié à l'identité de $E$.
  • En tapant dans un moteur de recherche "un espace de Banach dont le groupe linéaire n'est pas connexe", on trouve un article. Dans un espace de Banach, être ouvert connexe est équivalent à être ouvert connexe par arc, car tout ouvert est localement connexe par arc.
  • Ce qui devrait permettre de montrer que ton contre-exemple prouve la non connexité "tout court"!

    En effet, "a priori", je dirais que si $f$ est inversible, et $h$ superproche de $0$ (au sens de la norme sur les opérateurs) alors $f+h$ est inversible, via le calcul:

    $$ (1-g)^{-1} = 1+g+g^2+g^3+\dots $$

    réalisable dans un Banach et où $g$ s'obtiendrait facilement à partir de $h$.

    Ce qui ferait des inversibles un ouvert. Pas connexe par arcs, donc pas connexe du tout. Bravo Marco!!
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Encore faut-il montrer que le contre-exemple de marco en est un (peut-être que c'est évident, mais sans y réfléchir je ne vois pas - vous me direz, il faut que j'y réfléchisse :-D )
  • Oui, les inversibles de l'algèbre de Banach des opérateurs forment bien un ouvert. L'idée, c'est que relier $G$ c'est-à-dire $f \mapsto (z \mapsto zf(z))$, à l'identité c'est-à-dire $f \mapsto (z \mapsto 1.f(z))$ impliquerait de relier $z \mapsto z$ à $z \mapsto 1$ ce qui est impossible sans passer par $0$.
  • marco : oui j'ai deviné l'idée, le problème c'est que tu peux passer par $0$, tu ne peux juste pas passer par un truc non inversible. Alors naturellement une homotopie bête entre les deux ne suffit pas, puisque le moment où tu passes par $0$, tu n'es plus inversible en tant qu'opérateur, mais sans plus de réflexion, c'est pas évident qu'on ne puisse pas y échapper.
  • Soit $t \in [0,1] \mapsto G_t$ un chemin d'opérateurs inversibles qui relie $G$ à l'identité $I$ de $E$.
    Soit $h$ une fonction continue de $U(1)$ dans $\C$
    Si $h$ s'annule, alors on peut l'approcher par une suite de fonctions continues $u_n$ faisant $0$ tour autour de $0$. Alors $G(u_n)$ fait $1$ tour autour de $0$. Donc il existe $t_n \in [0,1]$ et $z_n$ tel que $G_{t_n}(u_n)(z_n)=0$.
    Donc en prenant de suites extraites, il existe $s \in [0,1]$ et $z \in U(1)$ tels que $G_s(h)(z)=0$.

    De même, si $h$ ne s'annule pas: elle fait un certain nombre de tours autour de $0$, et $G(h)$ en fait un de plus. Donc il existe $s,z$ tels que $G_s(h)(z)=0$.

    Soit $F$ l'ensemble des fonctions continues de $[0,1] \times U(1)$ dans $\C$. Et $A$ de $E$ dans $F$, qui à $h$, associe $(s,z) \mapsto G_s(h)(z)$.
    Alors toutes les fonctions de l'image de $A$ s'annule. Et l'image de $A$ est un $\C$-espace vectoriel de fonctions continues sur un compact à valeurs dans $\C$.
    Donc (?) il existe $s_0,z_0$ tels que toutes les fonctions de l'image de $A$ s'annulent. Donc pour tout $h \in E$, $G_{s_0}(h)$ s'annule, donc l'image de $G_{s_0}$ n'est pas $E$, donc $G_{s_0}$ n'est pas inversible: contradiction.
  • marco : ça a l'air stylé, il y a deux points qui ne me sont pas évidents :

    1- Une fonction qui s'annule peut être approchée par des fonctions d'indice $0$. Intuitivement, je crois que je vois (disons plutôt que les dessins que je fais dans ma tête s'accordent avec ça), mais est-ce vrai ?

    2- Le "donc" que tu as fait suivre d'un point d'interrogation. J'ai l'impression que tu dis : "soit $X$ un compact, $F$ un sous-espace vectoriel de $C(X,\C)$ tel que tous les éléments de $F$ s'annulent. Alors il existe $x\in X$ tel que les éléments de $F$ s'annulent tous en $x$".

    (supposons le contraire, et pour $x\in X$ soit $f_x$ un élément de $F$ ne s'annulant pas en $x$; soit $U_x = \{y\in X\mid f_x(y) \neq 0\}$, c'est un ouvert qui contient $x$. Les $U_x$ recouvrent $X$ donc on peut en extraire un sous-recouvrement fini, $U_{x_1},...,U_{x_n}$. On voudrait alors créer, certainement à partir des $f_{x_i}$, un $f\in F$ qui ne s'annule pas. Pas sûr de comment faire. Si $F$ était un idéal, alors ok, avec $\sum_i \overline f_{x_i}f_{x_i}$, mais ce n'est qu'un sev.
    Tu sais conclure ?)
  • Pour le 1), soit $h$ une fonction de $[0,1]$ dans $\C$ qui s'annule telle que $h(0)=h(1)$
    Si $h$ est nulle, c'est facile.
    Sinon, soit $\epsilon >0$ plus petit que la norme de $h$, on veut approcher $h$ à $2\epsilon$ près par une fonction (ne s'annulant pas donc) qui fait $0$ tour. Soit $B$ la boule ouverte de centre $0$ de rayon $\epsilon$, soit $C$ le cercle de centre $0$ de rayon $\epsilon/2$. Soit $h^{-1}(B)$, c'est une union dénombrable disjointe d' "intervalles" ouverts de $[0,1]$.
    Soit $O_n=]a_n,b_n[$ chacun de ces intervalles, alors $h(a_n)$ et $h(b_n)$ sont de modules $\epsilon$.
    On approche $h$ restreinte à $O_n$ par une fonction affine $g_n$ sur $[a_n,b_n]$ telle que $g_n(a_n)=h(a_n)$ et $g_n(b_n)=h(b_n)$. Si $g_n$ passe par $0$, on fait un demi-tour d'un côté ou de l'autre (peu importe) sur $C$.

    Soit $f$ qui est égale à $g_n$ sur $[a_n,b_n]$ pour tout $n$ et $h$ en dehors.

    Alors $f$ est continue et approche $h$ à $2 \epsilon $ près et ne s'annule pas. Donc elle fait un nombre fini $k$ de tours.
    Ça suffit en fait pour la première partie de la démonstration.
    Pour faire $0$ tour, on choisit l'intervalle $[a_1,b_1]$ et on compense en faisant, sur $[a_1,b_1]$, $-k$ tours supplémentaires autour de $0$. en restant dans $B$.
  • Pour le 2), je ne sais pas faire. On peut considérer seulement un compact du type $[0,1]^2$.
  • Merci Marco pour les détails sur ton point 1; construction amusante.

    Et effectivement, il semble que le problème ait été résolu par Adrien Douady (cf. le lien que tu mentionnes). À défaut de ne pouvoir lire ce papier, j’ai parcouru la biographie d’Adrien Douady. Ça devait être passionnant un cours de maths avec lui!

    Sinon, je pense que je n’ai pas le niveau pour faire avancer la question...
  • Étant intrigué par la question, j’ai posé la question sur MathOverflow.

    Il semble Marco que l’espace cité soit contractile. Et qu’une preuve en soit donnée dans l’article suivant... en russe!
  • D'accord, merci !
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