Décohérence et raisonnement

Bon, je suis un peu pressé, mais je tiens à lancer cet appel à l'aide avant de me déconnecter. J'essaie de faire vite et clair. Cette demande s'adresse à des personnes qui éventuellement s'y connaitraient bien. Je sais qu'elles sont rares sur le forum, mais toute contribution est bonne à prendre. La question que je vais poser est assez simple et me fera économiser l'achat d'éventuels nouveaux livres.

1) J'ai un gros défaut. Quand j'entends parler d'un truc, j'ai la flemme de le lire. Je préfère le reconstruire seul. Des fois, j'y arrive, des fois non.

2) Par contre la TQ (théorie quantique), je ne l'ai bien évidemment pas inventé seul :-D Bien au contraire, j'ai, rien que pour elle :-D fait tout le tour du labyrinthe avant de résoudre le problème (à l'opposé des gens qui résolvent un truc en prenant le bon chemin, généralement considérés comme "forts", mais du coup ne visitent pas le labyrinthe)

3) In fine, vers 1997-1998, je suis abouti à une vision à peu près formelle et précise, jusque dans les moindre détails, de ce qu'est le paradigme quantique (on pourrait appeler ça "la logique quantique", mais il y a hélas, un espèce de machin peu pertinent qui s'appelle déjà "logique quantique", donc je préfère "paradigme quantique). J'ai publié un horrible article (sur la forme), sur mon site et m'en suis tenu là. Plus tard, j'ai subi de grosses pressions pour en corriger les défauts typographiques et le mettre en format thèse, ce qui fut fait aussi (je ne sais pas comment "on a réussi cet exploit" avec moi, mais bon, peu importe, de toute façon "on" a mis 16ans à me faire céder)

4) Depuis cette époque (98 environ), je lis parfois quelques ouvrages ou article en diagonale, mais on ne peut pas dire que je m'investisse énormément.

5) Or j'ai réellement commencer à attacher de l'importance à la décohérence quand j'ai appris dans un café que c'était une liste de théorèmes de maths, et non une énième interprétation à la "mords-moi le noeud"

6) Fidèle à mes défauts, sortant du bar, j'ai d'abord essayé de la retrouver seul (la décohérence). Et hélas, "j'ai réussi". Je mets des guillemets car je devrais plus modestement (mais la modestie est un truc qui m'est étranger*) dire "j'ai cru avoir réussi".

7) Je m'en suis tenu là, et quand je croisais des gens qui me demandaient ce que c'est je le leur expliquais. Je leur expliquais "la cc-décohérence"**

8) J'étais "raffermi" dans cette attitude car en plus, à une soirée arrosée, j'avais demandé à Etienne Klein, qui, même s'il est considéré comme un vulgarisateur frénétique, a quand-même des compétences relativement reconnues en "vraie physique", si la "cc-décohérence" est bien la même chose que la décohérence et il m'avait dit "oui"

9) Lors de controverses philosophiques récentes, j'ai googlé sur "décohérence". Or je n'arrive pas à retrouver mes petits. Nulle part, je ne vois des descriptions, même si compliquées, équivalentes à la "cc-décohérence"

10) Qu'à cela ne tienne, je suis descendu à ma cave et j'ai remonté quelques classiques. A là, encore, je ne retrouve pas la "cc-décohérence". Je trouve (d'ailleurs je soupçonne les auteurs des livres que j'ai d'être "modérément formés") essentiellement toujours les mêmes explications un peu trop basées sur des exemples de grains de poussière, de matrices densité et de déphasage "bordélique" (comprendre entropique) que je ne peux pas "vérifier moi-même" car ils invitent trop la partie de la TQ "non logique" (ie résolution (partielle) de l'équation de Schrodinger, ondulatoirité des fonctions d'onde, etc), autrement la partie "non sûre et spéculative" de la TQ

11) Je commence donc à m'inquiéter d'être passé à côté de quelques chose. J'ai fait quelques calculs avec les matrices densité, mais je ne vais pas loin (ma dyscalculie est paralysante pour ça).

12) Par conséquent, je vous donne, à l'astérisque ** ce que je considère depuis au moins 10-15ans comme la décohérence et demande à ceux qui connaissent le fond du problème, mais ont aussi bien exploré l'état d'esprit de la TQ de me dire si je rate un truc important ou si, pire, je me trompe complètement. Merci d'avance.

* de toute façon, on est des pseudo sur le forum, l'utilité d'être modeste ou le sexe des anges...

** <<cc-décohérence>>

Le paradigme de la TQ est très simple et accomplit son oeuvre, si j'ose dire , très en amont de la science, car il consiste tout simplement à jeter la logique élémentaire (celle qui nous sert à écrire des preuves irréfutables!!!!!) à la poubelle pour adopter une autre manière de parler du monde.

Tout, en TQ, (ou en PTQ (paradigme TQ) pour utiliser un sigle non breveté :-D ) est élément (ou sous-ensemble) d'un espèce de suranneau de $\C$, pas forcément commutatif et dont il est assez pertinent de noter $\otimes$ le produit, même si ce n'est que purement psychologique. Tout, y compris les phrases, et même surtout les phrases. Les signes de base des maths y ont un comportement relativement "décoiffant". Par exemple les valeurs possibles de la phrase $a\neq b$ vivent dans un sous espace vectoriel de cet anneau plus popularisé sous le nom de "noyau du produit scalaire (enfin hermitien). Etc, etc. De toute façon tout est dit quasiment une fois qu'on a dit ça, le reste "se déduit presque entièrement" de cet "presque unique" axiome (j'exagère, mais ce n'est pas important). Bref....

Ce que ça induit en TQ, qui ne se passait pas dans la vision classique qu'on avait du monde est que deux objets peuvent être "un peu égaux" sans l'être "totalement". Lorsqu'ils sont "un peu égaux", il n'y a strictement rien qui permette de les distinguer à coup sûr.

Un autre truc induit par la TQ est que toutes les superpositions sont possibles. Par exemple, si vous prenez une histoire $H_1$ qui raconte que vous avez pris un chocolat à 15h21 à la Terrasse de l'Escolier et une autre $H_2$ qui raconte que vous avez pris une suze cassis à 15h21 à la Terrasse de l'Escolier, vous avez tout bêtement une histoire $H:=3H_1+2H_2$ comme vous avez une histoire $70H_1-iH_2$ (où $i^2=-1$), etc, qui sont autant d'histoires physiques parfaitement réelles et possibles.

De plus, LA GRANDE LOI de la TQ est que cette superposition est TOTALEMENT INAMOVIBLE! Una mnière de le dire de façon "politiquement correct" en physique est de dire que toute forme d'évolution (ie tout objet mathématique qui représente l'évolution d'une situation à une autre) doit être choisi comme étant une application linéaire respectant le produit scalaire (le respect du produit scalaire est en fait juste la traduction de l'axiome $x=y\to f(x)=f(y)$ de la logique élémentaire)

Aux alentours des années, je crois, alors que tout le monde se demandait pourquoi on n'observe jamais $H_1+H_2$ dans "la vraie vie" et que l'interprétation de Copen-Hague avait inventé une espèce "d'axiome complémentaire magique" appelé "réduction du paquet d'onde" (qui dit que $H_1+H_2$ va, sous l'effet d'un regard de physicien se transformer instantanément en $H_1$ ou en $H_2$), de nombreux progrès ont été faits par d'autres théoriciens pour déduire (à la place de supposer) que les objets macroscopiques sont bien prédits par la TQ (sans lui ajouter d'axiomes) comme se comportant comme nous les voyons se comporter. Ces recherches s'appellent globalement "la décohérence". (En ce qui me concerne j'y mets jusqu'au théorème de Gleason, mais ce n'est pas consensuel dans la communauté)

Voilà, en espérant avoir résumé ce que veut un peu dire "paradigme TQ". J'en viens maintenant à la "cc-décohérence". Chez moi, c'est un phénomène très simple et "évident". Je vais simplifier parce que sinon problème latex, sans changer l'esprit. quand on s'intéresse à du "oui/non", on étudie souvent les choses dans $\C^2$ (pour caricaturer). Même si on n'a aucune certitude que l'objet étudié ne peut avoir que deux états (ou si on a été obligé de le supposer, comme il en va pour les spins par exemple). Le nombre "2" est la dimension du Hilbert et correspond au cardinal de ses bases et à la "granularité" de l'ensemble des réponses. Autre exemple: si vous avez un oeil qui ne peut en tout et pour tout ne voir que 10 réponses possibles, vous représenterez votre analyse dans $\C^{10}$. Etc, etc.. (Les physiciens ne disent pas "oeil", ils disent "machine qui mesure" et parlent de "base d'appareil").

Le fait que deux objets soient "même pas un peu peu égaux" se dit "ils sont orthogonaux" quand on cause PTQ. Ca se traduit par la nullité de leur produit scalaire (hermitien).

[large]Voici maintenant le slogan que j'appelle "la cc-décohérence":[/large] quand la dimension est grande (à la limite quand elle est infinie), si vous prenez deux vecteurs unitaires, ils seront pour ainsi dire presque toujours***** orthogonaux ( à la limite ils seront même orthogonaux vraiment) et les apparences seront classiques (ce seront des superpositions d'histoires sans interférence, ie comme les superpositions d'éventualités inventées par les utilisateurs des probabilités).

Ceci est dû MATHEMATIQUEMENT à la vérité toute bête que le produit scalaire de $E\otimes F$ est défini par $$<x\otimes x'|_{E\otimes F} \ y\otimes y'> := <x|_Ey> FOIS <x'|_F y'>$$

Voilà, c'est tout. bon désolé pour ceux qui restent frustrés sur la description du paradigme quantique. J'en aurai eu à poster trop long si j'avais dû les décrire entièrement avec les habituelles exemples d'intrication de mesure à choix retardés, etc.

J'insiste bien sur le fait que cette explication est "complète" pour moi, ie elle me PROUVE à moi, qui suis maintenant habitué au PTQ que les apparences macroscopiques ne peuvent être que classiques. Autrement, dit, et tant pis si je décois quelques personnes, je viens de donner LA TOTALITE de ce que veut dire "cc-décohérence".

Et je répète ma question: est-ce que je me suis trop fumé la moquette et que j'ai imaginé un truc complètement simpliste depuis 10-15ans, comme explication de "pourquoi les apparences macroscopique sont classiques", ou au contraire est-ce que je ne me trompe pas, ou ne me trompe que très légèrement en oubliant de mentionne 2-3 petits détails, mais que dans le fond, j'ai "parfaitement compris" ce qu'on appelle "officiellement" "décohérence"?


Merci d'avance aux experts qui répondront (et aux autres participants, mais merci de préciser si vous êtes expert de la question ou pas, lors de votre intervention).

***** au sens habituel de la théorie de la mesure
Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi

Réponses

  • Ce que tu racontes à la fin me fait penser aux histoires de concentration de la mesure (sur les sphères de dimension de plus en plus grande, par exemple).
  • Merci effectivement, ça y ressemble (j'ai mis du temps à pourquoi ils appelaient epsilon un nombre qui grandit, mais c'est bon). Je vais investiguer et lire les liens qui partent de la page wiki que tu m'as mise.

    (Pour les lecteurs qui ont la flemme ou peinent un peu à "ressentir cette page", si on est dans un espace métrique "de grande dimension (bien choisi, comme l'exemple de la sphère du lien), disons "inconnue" ", et si on s'est donné disons un seuil de tolérance assez petit que l'on nomme $\epsilon$, que l'on n'a choisi sans connaitre la "grande dimension" (assimilable à l'infini en quelque sorte) et si en plus on a une probabilité alors quelque soit la partie Y mesurable de cet ensemble qui pèse au moins la moitié du poids de l'ensemble (ie de probabilité au moins 1/2), presque tout le monde est $\epsilon$-proche de $Y$ (autrement dit, $Y$ de quelque manière qu'on le choisisse, dès lors qu'il pèse la moitié du poids total, "semble" occuper tout l'espace: impossible de le faire à la fois peser et de le concentrer dans un coin en quelque sorte))

    Je profite de ce post pour dire que ce qui me fait douter de moi (de n'avoir rien oublié dans ma "cc-décohérence") est que tous les manuels que j'ai à portée de main semblent converger vers le fait que les nombres complexes sont essentiels à l'argumentation (addition de phases (ie partie imaginaire des nombres complexes) erratiques issues de l'environnement faisant disparaître les termes non diagonaux de la matrice densité. Or dans le slogan que j'ai titré en vert, nommé "cc-décohérence" au post d'avant, on voit bien que cet aspect n'est pas nécessaire à l'idée. Les coefficients pourraient tout aussi bien être des nombres réels, ça ne change pas le fait que 2 produits tensoriels
    $u:=a_1\otimes ..\otimes a_n$ et $v:=b_1\otimes ..\otimes b_n$

    avec $n$ grand et chaque $a_i,b_i$ unitaire, il suffit d'un seul $i$ qui traine tel que $<a_i|b_i>$ proche de $0$ pour que $<u|v>$ lui-même soit proche de $0$.

    A la limite idéal, ce n'est rien d'autre que la traduction quantique de l'axiome logique :

    $$(x\neq_{sur} y \ ou \ a\neq_{sur} b)\to [(x,y)\neq_{sur} (a,b)]$$

    où l'indice "sûr" que je rajoute dit juste "on est sûr, absolument sûr que machin est différent de Truc (je l'ai rajouté pour signaler qu'en TQ, deux objets peuvent être "un peu égaux").
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  • Je ne suis pas un spécialiste de mécanique quantique (j'ai même commencé à m'y intéresser à partir du fil "Fondements de la physique" !), mais vu que j'aimerais que ce fil ait plus de succès, je participe, car j'ai eu une idée, qui ne vaut peut-être pas grand chose, mais au moins, ça stimulera le dialogue.

    Si $(U_t)_{t \in \mathbb{R}}$ est un groupe d'opérateurs d'un espace de Hilbert $\mathcal{H}$, il est dit mélangeant si $\forall \xi,\eta \in \mathcal{H}$, $\lim_{t \to \infty} \langle U_t \xi,\eta \rangle = 0$.
    Ceci arrive dans différents contextes, dont un très visuel que je décris brièvement parce que je ne sais pas à quel point il est "classique" (il l'est probablement pour un certain nombre de personnes travaillant en théorie ergodique) : celui de la transformation de la boulangère ou du boulanger. Pour faire court, on considère un morceau de pâte bidimensionnel, de la forme d'un carré, on utilise le rouleau pour l'aplatir et faire en sorte que sa dimension horizontale double et que sa dimension verticale soit divisée par deux. Ensuite, on le coupe en deux en faisant une coupe verticale, et on replie le morceau de droite sur le morceau de gauche, de sorte que la pâte est à nouveau de forme carrée.
    On appelle $T$ cette transformation. Alors on peut démontrer que l'opérateur $U_T$ sur le Hilbert des fonctions $L^2$ d'intégrale nulle sur le carré défini par la précomposition par $T$ est unitaire, et que le groupe $(U_n)_{n \in \mathbb{Z}}$ est mélangeant. Ce théorème a pour conséquence que si on choisit n'importe quel borélien $A$ du carré, de mesure non nulle ("le beurre") et qu'après $n$ itérations de $T$, on coupe un petit morceau borélien $B$ du carré, et qu'on mesure la proportion $p_n$ de beurre dans ce petit morceau, alors $p_n$ tend vers la proportion globale de $A$ dans le carré (d'où le nom "mélangeant" !). Dans un langage un peu probabiliste, "après un grand nombre d'itérations, l'événement "trouver du beurre dans tel endroit" devient indépendant de l'endroit".
    Un autre exemple a été donné dans le fil "probabilités fréquentistes" par l'intervenant.e remarque ; il s'agit du flot géodésique sur une surface hyperbolique.

    Je me suis donc dit : "peut-être que le groupe d'opérateurs d'évolution $(U_t)_{t \in \mathbb{R}}$ donné par l'équation de Schrödinger est mélangeant", mais je ne connais pas de théorème qui relie des propriétés du hamiltonien aux propriétés de mélange du groupe d'opérateurs d'évolution associé, je vais me renseigner.

    Si le mot "décohérence" se réfère à l'idée "quand on prend deux vecteurs unitaires, ils sont très probablement orthogonaux", alors cette notion de "mélange" pourrait formaliser l'idée selon laquelle "si on prend deux vecteurs unitaires, et qu'on laisse évoluer l'un selon l'équation de Schrödinger, le temps les rendra de plus en plus orthogonaux" ou encore, pour en faire un slogan, "la décohérence se produit avec le temps", et ça, ça m'a paru intéressant. Après, est-ce intéressant, connu, banal, sans issue, à vous de me dire !
  • Merci beaucoup pour cette idée, j'y réfléchirai. Il faut tout de même remarquer que c'est assez ténu comme phénomène, car il se produit à la limite, il ne peut pas être "actuel" en ce sens qu'un mesurable de Lebesgue ne peut jamais avoir la propriété d'être homogène*** (ie la mesure de son intersection avec n'importe quel intervalle est proportionnelle à la longueur de l'intervalle. Il y aura toujours des grumeaux!. C'est un théorème de maths

    Mais merci!

    *** sauf cas triviaux (mesure nulle ou conulle)
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  • Je vais tenter de me renseigner, mais je crois bien qu'il y a des théorèmes qui peuvent renseigner sur la rapidité de la convergence $\langle U_t \xi,\eta\rangle \to 0$, ce qui peut être intéressant aussi !

    Et oui, je suis d'accord avec toi, cela ne donne rien d'"actuel", mais je ne savais pas que c'était un critère que tu recherchais.
    Si je retournais l'argument contre toi, je pourrais te dire que de toutes façons, un vecteur unitaire dont le module du produit scalaire avec tout le monde sauf ses multiples est zéro, ça n'existe pas :-D
  • Merci, non non t'inquiète je ne recherche pas "quelque chose d'actuel" spécialement. C'était juste que le "chaos" ne suffit pas à retrouver les points clé de la TQ donc je signa mais juste ce détail. De mon téléphone
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  • christophe a écrit:
    le "chaos" ne suffit pas à retrouver les points clé de la TQ

    Ben, c'est justement ça que je voulais comprendre avec le fil "probabilités fréquentistes", mais pour l'instant, c'est assez flou pour moi. Vois mon intervention comme une tentative d'objecter à ton affirmation ci-dessus. Mais à vrai dire, l'équation de Schrödinger est assez mystérieuse à mes yeux, et puis de toute façon, je ne sais pas ce qu'est le "temps".
  • J'ajoute une remarque pour clarifier mon propos. Certes, il n'existe pas de partie $A$ Lebesgue-mesurable homogène de densité $\frac{1}{2}$ dans $[0,1]$, (au sens où la mesure de l'intersection de $A$ avec tout intervalle serait la moitié de celle de cet intervalle), mais il y a une branche de la théorie ergodique dont la spécialité est d'exhiber des suites $(A_n)_{n \in \mathbb{N}}$ de parties asymptotiquement homogènes de densité $\frac{1}{2}$ (au sens où pour tout intervalle $I$ de $[0,1]$, $\lim_n \mu(A_n \cap I) = \frac{1}{2}\mu(I)$)

    Par exemple la suite des $(A_n)_{n \in \mathbb{N}}$ définie par $A_n := \{x \in [0,1] \mbox{ }\vert\mbox{ le }n\mbox{-ème chiffre de }x\mbox{ en base }2\mbox{ est }1\}$ est une telle suite.

    On est donc aussi proche que possible du rêve de trouver des parties homogènes, non ?
  • GA a écrit:
    (1) Vois mon intervention comme une tentative d'objecter à ton affirmation ci-dessus.

    (2) Mais à vrai dire, l'équation de Schrödinger est assez mystérieuse à mes yeux

    Concernant (1). Oups, si j'avais su. En fait, je pensais que tu avais suffisamment investigué (même récemment) pour savoir que non, mais il est vrai que "le chat de Schrodinger" (qui est un exemple totalement idiot en ce qu'il ne contient rien de significatif sur la TQ, à part pour des spécialistes qui savent ce qui les ennuie derrière*** ) a fait beaucoup de mal à la vulgarisation.

    Pour répondre à ton objection, tu as l'embarras du choix: essaie de construire avec le chaos une machine de Lov Grover**** :-D, tu vas voir comme c'est dur. Ou un des téléphones évoqués dans ma thèse (dont certains ont été décrits dans l'autre fil). Le côté "indéterminé" de la TQ n'est vraiment rien comparé à la "magie" qu'elle offre en dehors de ça. L'indétermination est juste un corollaire presque négligeable de cette magie.

    *** Le récit du chat de S n'exhibe en rien que la TQ PROUVE sa propre indétermination, il ne fait que (et encore, "au mieux") l'affirmer.

    (2) Elle ne dit rien de bien intéressant, elle donne des noms** et introduit le temps t. Elle est d'ailleurs "essentiellement démontrable" à l'aide de l'ajout du temps dans le paradigme. Elle ne fait qu'abréger des théorèmes d'algèbre linéaire qui disent comment dériver des applications de $Temps$ dans $Etats$ (ou matrices si on veut regarder les choses "à la Heisenberg). Par contre, dans les cas particuliers où on essaie de modéliser des points matériels, elle prédit l'étalement dans le temps des amplitudes de présence de la particule "libre".

    ** comme $\sqrt{2}$ est un nom qu'on a choisi pour abréger "nombre réel positif qui au carré donne 2"

    **** Elle gagne au jeu suivant: tu penses à un nombre entier entre 1 et 1000000 (sans tricher, ie il existe une possibilité, quelle qu'elle soit, de te poser plusieurs fois des questions de la forme "est-ce que c'est tant?"). Elle te pose un certain nombre de questions de cette forme jusqu'à avoir trouvé. En moyenne, elle gagne en posant 1000 questions.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Waow, je crois que je viens de comprendre ce que je voulais comprendre au sujet de l'équation de Schrödinger, j'ai tilté en lisant ton message. Tout ceci, tu l'avais peut-être déjà écrit dans "Fondements de la physique", j'en suis conscient.e, mais comme je fais l'effort de rédiger ça proprement, je le poste, au cas où ça puisse servir.

    Définissons $Temps := \mathbb{R}$ et appelons ses éléments des instants. Notons $S_1(\mathcal{H})$ l'ensemble des vecteurs unitaires du Hilbert $\mathcal{H}$, que l'on appellera ici vecteurs d'état.

    On appelle histoire une application continue $Temps \rightarrow S_1(\mathcal{H})$, et notons $Histoires$ un ensemble d'histoires. Si $t \in Temps$, on introduit l'opérateur de décalage du temps qui à toute histoire $h$ associe $T_t(h) = (s \mapsto h(s+t))$.

    Les "hypothèses" suivantes font partie du paradigme de la théorie quantique (i.e. on exige de l'ensemble $Histoires$ qu'il soit assujetti aux conditions suivantes) :

    1) $Histoires$ est stable par tous les $T_t$ ("le temps peut se dérouler dans une histoire").
    2) Pour tout $\xi \in S_1(\mathcal{H})$, il existe une unique $h \in Histoires$ telle que $h(0) = \xi$ ("à toute condition initiale, il y a exactement une histoire qui raconte ce qui lui arrive").
    3) Pour tout $t$, il existe une application $U_t : S_1(\mathcal{H}) \rightarrow S_1(\mathcal{H})$ qui est
    i) telle que pour tous $\xi,\eta \in S_1(\mathcal{H})$, $\langle U_t \xi,U_t\eta \rangle = \langle \xi,\eta\rangle$ (préservation du produit scalaire)
    ii) telle que pour tout $t \in Temps$ et toute $h \in Histoires$, $[T_t(h)](0) = U_t(h(0))$ ("$U_t$ réalise l'évolution")

    Ces conditions forcent immédiatement :
    A) la famille des $U_t$ est unique
    B) $\forall t,t'\ U_{t+t'} = U_t \circ U_{t'}$ (et en particulier, les $U_t$ sont inversibles !)
    C) $U : Temps \rightarrow U(\mathcal{H})$ est continue pour la topologie forte opérateur sur $U(\mathcal{H})$ (qui est le groupe des unitaires de $\mathcal{H}$)

    (J'appelle un truc comme $U$ (je ne suis pas le.a seul.e à le faire !) une représentation unitaire de $Temps$ sur $\mathcal{H}$)

    D) Le théorème de Stone assure alors qu'il existe un (unique) opérateur auto-adjoint $A$ (qui est borné si et seulement si $U$ est continue pour la topologie normique) tel que $\forall t \in Temps \ U_t = e^{iAt}$. Ce $A$, on l'appelle hamiltonien.

    Le théorème de Wigner semble même affirmer qu'il est possible d'affaiblir l'hypothèse 3)i) en "préserver le module du produit scalaire".

    On obtient alors
    E) pour tout $\xi \in S_1(\mathcal{H})$, $(s \mapsto U(s)\xi)$ est dérivable et $(s \mapsto U(s)\xi)'(t) = iAU(t)\xi$ (pour autant que $A$ soit défini en $U(t)\xi$...), et on appelle ça l'équation de Schrödinger.

    Cela laisse plusieurs questions :
    Je devrais pas avoir une constante de Planck (je ne sais d'ailleurs pas ce que c'est) ?
    Pourquoi ne pas remplacer $Temps$ par n'importe quel autre groupe de Lie que $\mathbb{R}$ ? Il y a peut-être des analogues du théorème de Stone...

    EDIT : En fait, un des trucs qui m'ont fait avoir ce déclic, c'est aussi que je connais un théorème qui dit, pour certains groupes topologiques $G$, (mais pas $\mathbb{R}$) que toutes leurs représentations unitaires qui n'ont pas de vecteurs fixes non nuls (un vecteur fixe est un $\xi$ tel que $\forall g\in G$, $U_g \xi = \xi$) sont mélangeantes. Ca serait chouette pour nous... C'est ce que j'avais en tête quand j'ai parlé de trucs mélangeants, en fait.

    EDIT 2 : J'ai modifié une notation pourrie !
  • Félicitations !!! Et non je n'avais pas écrit des choses aussi savantes dans FDLP :-D. Il m'en faudrait du courage! Au pire si on me demandait avec insistance en période de pas vacances je scannerais le cours de Feynman qui fait la même chose que toi avec tendresse douceur et lentement pour ne pas brusquer ses étudiants de L1 de l'époque (tu) .

    Je peux indiquer les pages pour ceux qui ont le livre.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • christophe a écrit:
    avec tendresse douceur et lentement pour ne pas brusquer ses étudiants de L1 de l'époque

    Où est passé le temps où tu pestais contre les pédagogos :-D ?
  • Tu as incorporé la constante de Planck dans ta définition de l’opérateur Hamiltonien.
    Typiquement, on a $$
    U_t = e^{-\frac{i}{\hbar}tH}.
    $$ L’équation de Schrödinger s’écrivant $$
    i\hbar \partial_t |\psi(t)\rangle = H |\psi(t)\rangle.
    $$
  • @CC As-tu retrouve la preuve?
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