Physique et téléphones

EDIT : Ce qui suit contient des grosses erreurs. Je ne sais pas si on peut les corriger...

Bonjour,

j'ai passé du temps à essayer de comprendre les téléphones de Christophe, et les liens avec la physique.
J'avais promis de rédiger un compte-rendu de ma lecture, le voici.

Cela va s'organiser le long de plusieurs posts, j'espère que la modération n'y verra pas d'inconvénient.

Tout a commencé dans le fil Fondements de la physique, qui m'a donné envie de m'y mettre.
Le paradigme téléphonique, du nom de la thèse de Christophe contient déjà "tout". Je tente ici d'apporter des éléments de contexte, et de clarifier certaines choses qui ne me paraissaient obscures dans le texte original. Je vous demande pardon par avance s'il y a de la paraphrase ; j'ai la conviction profonde qu'on ne peut comprendre qu'en reformulant sans cesse.

Le point de départ est peut-être celui de la mécanique quantique, où des expériences très simples mettant en évidence des machines se présentant en deux morceaux pouvant être immensément éloignés l'un de l'autre qui pourtant donnent l'impression de communiquer entre eux, chacun des termes précédents devant être pris avec des pincettes.

On va donc imaginer des objets idéaux, que Christophe appelle téléphones. Ces objets ne seront jamais définis (sauf dans certains cas), mais ils apparaîtront toujours en filigrane du contenu mathématique. Je vais donc vous dire en quelques lignes "comment il faut sentir" ces téléphones, mais cela n'a évidemment strictement aucune valeur mathématique. C'est un peu comme quand les catholiques représentent Dieu en un vieil homme barbu : j'imagine que peu leur importe de savoir à quoi Dieu ressemble, mais je pense que le fait de dépeindre certaines de ses caractéristiques physiques les aide à mieux y penser.
Les deux (il peut y en avoir plus, mais je ne traiterai jamais ce cas ici, au moins pour l'instant) morceaux du téléphone seront appelés combinés, et chaque combiné sera composé d'un clavier et d'un écran. Il faut s'imaginer que le tout est à usage unique : sur chaque clavier, on ne peut appuyer que sur une touche, et une fois que cela sera fait, il ne sera plus possible de rien appuyer du tout. Par contre, on peut décider de ne pas utiliser les deux claviers en même temps, pour autant que cela veuille dire quelque chose. En tout cas, sur l'écran correspondant, quelque chose apparaît juste après l'appui sur une touche.
On considère de plus qu'on n'aura jamais accès au fonctionnement du téléphone, un peu comme quand on achète une voiture et qu'on ne s'y connaît pas en mécanique. Rien n'empêcherait par exemple qu'il y ait un petit être dans chaque combiné qui décide d'afficher n'importe quoi selon sa propre volonté.
On suppose tout de même que chacun des combinés d'un téléphone vient avec un petit dépliant (c'est le même pour les deux combinés) qui décrit un ensemble $R$, tel que si l'appui de $e_1$ sur le premier clavier et de $e_2$ sur le deuxième clavier déclenche l'apparition de $f_1$ sur le premier écran, $f_2$ sur le deuxième, alors $(e_1,f_1,e_2,f_2) \in R$.
Ce $R$ s'appelle la garantie du téléphone. Il faut voir $R$ comme la certitude que quand vous achetez une voiture et que vous appuyez sur la pédale de frein, la voiture doit ralentir. En ce sens, la garantie offre un pouvoir. Toutefois, si l'on est un.e ingénieur.e qui participe à la conception de la voiture, la garantie est plus envisagée comme des contraintes que comme un pouvoir. Ainsi, il faut voir la garantie du téléphone comme une chose positive ou négative selon qu'on soit dans la situation de profiter du téléphone ou qu'on doive le construire.
Tout ceci suggère que c'est la garantie qui doit être le concept central de tout ce paradigme.
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Réponses

  • Maintenant, place aux maths.

    Soient $E_1, E_2, F_1, F_2$ quatre ensembles.
    Les éléments de $E_1$ seront appelés entrées du premier combiné,
    ceux de $E_2$ entrées du deuxième combiné,
    ceux de $F_1$ sorties du premier combiné, et
    ceux de $F_2$ sorties du deuxième combiné.
    Une garantie téléphonique de signature $E_1,E_2,F_1,F_2$ est un sous-ensemble $R \subset E_1 \times F_1 \times E_2 \times F_2$. Ses éléments s'appellent les configurations entrée-sortie possibles. Cela revient au même de se donner une garantie $R$ qu'une application $E_1 \times E_2 \rightarrow \mathcal{P}(F_1 \times F_2)$ qui à chaque couple d'entrées associe un ensemble des couples de sorties, dits possibles.

    Les problèmes qu'on doit tenter de formuler, et résoudre, sont les suivants :
    1) étant donnée une garantie $R$, si on veut fabriquer un téléphone $R$-garanti, à quel point faudra-t-il faire communiquer les deux combinés ?
    2) si on dispose d'un téléphone $R_1$-garanti, est-ce qu'on peut simuler un téléphone $R_2$-garanti, en ne s'autorisant que des modifications localisées sur chaque combiné ?

    Ces deux questions sont en fait très liées : si l'on arrive à formaliser le niveau de communication entre les deux combinés de toute garantie $R$ par un élément d'un ensemble ordonné, alors il est clair que si la fabrication d'un téléphone $R_1$-garanti nécessite plus de communication que ce qu'un téléphone $R_2$-garanti peut offrir, alors on ne pourra pas simuler un $R_1$-téléphone avec un $R_2$-téléphone.
    Christophe prend alors le contrepied de cette idée et choisit de définir la relation de simulabilité, appelée relation de réduction ludique dans sa thèse (je ne la rappelle pas, je n'en ai pas besoin tout de suite), qui est une relation de préordre ; il dira ensuite que deux garanties offrent (ou demandent, selon que l'on se place du point de vue d'une personne qui construit ou qui profite) autant de communication l'une que l'autre si chacune est réductible ludiquement à l'autre ; enfin, le quotient par la relation d'équivalence que l'on vient de définir, muni du préordre quotient, sera un authentique ensemble ordonné, que l'on pourrait appeler ensemble des niveaux de communication (et on dirait que la classe d'une garantie est son niveau de communication), mais Christophe choisit de les appeler degrés ludiques.
  • Une notion très importante est celle de garantie triviale. C'est le concept mathématique qui est censé représenter une garantie réalisable par une paire de combinés qui ne communiquent pas du tout entre eux.
    Une garantie $R$ de signature $E_1,E_2,F_1,F_2$ sera dite triviale s'il existe $f_1 : E_1 \rightarrow F_1$ et $f_2 : E_2 \rightarrow F_2$ telles que $\forall e_1,e_2 \quad (e_1,f_1(e_1),e_2,f_2(e_2)) \in R$. L'idée est que pour fabriquer un téléphone dont la garantie est triviale, il suffit d'implémenter $f_1$ et $f_2$ sous quelque forme que ce soit, et s'arranger pour que le premier écran affiche l'image par $f_1$ de ce qui est tapé sur le premier clavier, et que le deuxième écran affiche l'image par $f_2$ de ce qui est tapé sur le deuxième clavier. De cette façon, on construit un téléphone $R$-garanti et qui est tel que ses combinés ne communiquent absolument pas.

    Voici un exemple de garantie non triviale. Posons $E_1 = E_2 = \{1,2,3\}$, et $F_1 = F_2 = \{\pm 1\}^{\{1,2,3\}}$.

    Soit $R$ l'ensemble des quadruplets $(e_1,f_1,e_2,f_2) \in E_1 \times F_1 \times E_2 \times F_2$ tels que
    1) $f_2(e_1) = f_1(e_2)$,
    2) $f_1(1) \cdot f_1(2) \cdot f_1(3) = 1$ et
    3) $f_2(1) \cdot f_2(2) \cdot f_2(3) = -1$.

    On peut baptiser cette $R$ du nom de garantie de Mermin-Peres pour des raisons qui seront apparentes plus loin.

    Exercice : Démontrer que $R$ n'est pas triviale.

    Solution (mettre en surbrillance) : Supposons qu'il existe $g_1 : E_1 \rightarrow F_1$ et $g_2 : E_2 \rightarrow F_2$ telles que $\forall e_1,e_2 \in E_1,E_2$, $(e_1,g_1(e_1),e_2,g_2(e_2)) \in R$.

    On a, $\forall e_1,e_2 \in E_1,E_2$, $g_1(e_1)(e_2) = g_2(e_2)(e_1)$.

    Mais alors $\Pi_{i \in \{1,2,3\}} \Pi_{j \in \{1,2,3\}} g_1(i)(j) = 1 \cdot 1 \cdot 1 = 1$.

    Mais d'autre part, $\Pi_{i \in \{1,2,3\}} \Pi_{j \in \{1,2,3\}} g_1(i)(j) = \Pi_{i \in \{1,2,3\}} \Pi_{j \in \{1,2,3\}} g_2(j)(i) = \Pi_{j \in \{1,2,3\}} \Pi_{i \in \{1,2,3\}} g_2(j)(i) = -1 \cdot -1 \cdot -1 = -1$, ce qui est absurde.


    Donc, pour fabriquer dans la vraie vie un téléphone qui soit $R$-garanti (pour cette $R$-ci), il faudra faire en sorte que les deux combinés communiquent au moins un peu.

    L'intuition derrière cette garantie est la suivante (cela spoile l'exercice) : si une personne venait vers vous et vous annonçait qu'elle connaît plein de matrices $3\times 3$ à coefficients $\pm 1$ telle que pour chacune de ces matrices, le produit des éléments sur chaque ligne fait $1$, et le produit des éléments sur chaque colonne fait $-1$, vous réfléchiriez un peu. Et vous constateriez bien vite que c'est impossible, car le produit de tous les éléments d'une telle matrice devrait être égal à $1$ et à $-1$, d'après l'argument précédent. Pourtant, cette personne vous tendrait un téléphone à deux combinés, chacun des claviers ne comportant que trois touches, chaque écran étant une matrice $3\times 3$ vide, et vous dirait que si vous appuyez sur $i$ sur le premier clavier, et sur $j$ sur le deuxième clavier, vous verriez sur le premier écran, la ligne $i$ de la matrice vide se remplir, et sur le deuxième écran, vous verriez la colonne $j$ de la matrice vide se remplir. Vous constateriez que le produit des éléments sur la ligne affichée sur le premier écran fait $1$, et que le produit des éléments sur la colonne affichée sur le deuxième écran fait $-1$, et que le coefficient "à l'intersection" de la ligne et de la colonne est le même. Eh bien, il est impossible de construire un tel téléphone sans faire communiquer un minimum les combinés, c'est ce que l'on vient de démontrer.

    EDIT : J'avais oublié de mettre la solution de l'exercice en surbrillance.
  • Le texte qui suit a pour but de définir ce que veut dire "téléphone fabricable par la physique classique", "téléphone fabricable par mécanique quantique", et de démontrer qu'il est impossible de construire dans un monde régi par la physique classique un téléphone $R$-garanti, alors qu'il est tout à fait possible de le faire dans un monde régi par la mécanique quantique.

    Il faut d'abord définir le mot "système physique". La définition qui va suivre provient de l'idée philosophique que ce qui constitue l'essence d'un système physique, c'est l'ensemble des expériences qu'il est possible de réaliser dessus, et, par extension, le langage des conclusions d'expériences que l'on pratique sur un tel système.

    On appelle donc système physique un treillis $\sigma$-complet orthocomplémenté, c'est-à-dire, un triplet $(T,\leq,\perp)$ où :
    1) $T$ est un ensemble ordonné par $\leq$ ;
    2) toute partie au plus dénombrable $A$ a un sup, noté $\vee A$ ;
    3) toute partie au plus dénombrable $A$ a un inf, noté $\wedge A$ ;
    (on écrit $p \wedge q$ pour $\wedge \{p,q\}$, et pareil pour $\vee$)
    4) $T$ a un plus petit élément, $\textbf{0}$, et un plus grand élément, noté $\textbf{1}$ ;
    5) $\perp : T \rightarrow T$ est une application (on note $p^\perp$ l'image d'un $p \in T$) qui est
    i) une involution (i.e. $\forall p \in T \ (p^\perp)^\perp = p)$) ;
    ii) décroissante ;
    iii) qui échange $\textbf{0}$ et $\textbf{1}$ ;
    iv) qui échange $\vee$ et $\wedge$ ;
    v) qui est telle que $\forall p \in T\ p \wedge p^\perp = \textbf{0}$.

    Dans un tel treillis, les éléments pourraient s'appeler propositions, $\vee$ est appelé disjonction, $\wedge$ conjonction, et $\perp$ négation.

    On ne suppose aucune hypothèse de distributivité (les fameuses lois de de Morgan) sur $\wedge$ et $\vee$.

    Deux exemples :
    I) Si $X$ est un ensemble, et $T$ est une tribu sur $X$, alors $(T,\subseteq, A\mapsto A^c)$ est un treillis $\sigma$-complet orthocomplémenté. Un système physique obtenu de cette façon-là est dit classique.
    Ici, $\wedge = \cap$ et $\vee = \cup$.
    II) Si $H$ est un espace de Hilbert réel ou complexe (en dimension finie, sur $\mathbb{C}$, cela s'appelle un espace hermitien, et sur $\mathbb{R}$ un espace euclidien) et $T_H$ est l'ensemble des sous-espaces fermés de $H$, alors $(T_H,\subseteq,F \mapsto F^\perp)$ est un treillis $\sigma$-complet orthocomplémenté. Tout système physique obtenu de cette façon-là est dit quantique.
    Ici, on rappelle que $F^\perp = \{v \in H \ \vert \ \forall w \in F\quad \langle v,w\rangle = 0\}$. On a, de plus, $\wedge = \cap$, mais $\vee = \overline{+}$, c'est-à-dire que si $A$ est un ensemble de sous-espaces fermés de $H$, $\vee A = \overline{+_{p \in A} p}$ (et non l'union !).

    Tous les exemples qui suivront conserveront les mêmes notations : chaque I) continuera le I) ci-dessus, et de même pour II). Il n'y aura que ces deux exemples.

    Remarque : On peut s'amuser à chercher des conditions nécessaires et suffisantes sur un treillis $T$ pour démontrer qu'il est de la forme I), ou de la forme II), ou des variantes. Le théorème de Loomis-Sikorski (lien en anglais) donne des conditions nécessaires et suffisantes pour qu'un treillis ressemble à un treillis du type I), et les théorèmes de Piron (lien en anglais) et de Solèr (lien en anglais) donnent des conditions nécessaires et suffisantes pour qu'un treillis ressemble à un treillis du type II). Dans le cas quantique, il y a une condition appelée "orthomodularité" qui est très importante, mais dont je ne parlerai pas tout de suite, faute de l'avoir bien cernée.

    EDIT1 : Ajout d'une remarque.
    EDIT2 : Modification typographique.
  • Deux propositions $p$ et $q$ sont dites orthogonales (au sens des treillis) si $p \leq q^\perp$. C'est une relation symétrique. On note $p \perp q$ si $p$ et $q$ sont orthogonales.

    Exemples :
    I) Quand $T$ est une tribu, deux parties sont orthogonales (au sens des treillis) si et seulement si elles sont disjointes (en tant que parties de $X$).
    II) Quand $T_H$ est l'ensemble des sous-espaces fermés de $H$, deux propositions sont orthogonales (au sens des treillis) si et seulement si elles sont orthogonales (au sens hilbertien). Autrement dit, $\forall p,q \quad p \perp q \Leftrightarrow \left(\forall v \in p\ \forall w \in q\ \langle p,q\rangle = 0\right)$.
    Si on note $P_p$ le projecteur orthogonal sur $p$, c'est-à-dire l'endomorphisme de $H$ qui vaut $id_p$ restreint à $p$ et $0$ restreint à $p^\perp$, on a aussi :
    $\forall p,q \quad p \perp q \Leftrightarrow P_p P_q = 0$.

    Deux propositions $p$ et $q$ sont dites compatibles (s'il y a risque de confusion avec le mot correspondant en probabilités "de lycée", on peut dire "comesurables", que j'aime bien aussi) si $\exists p',q',r\quad p' \perp q',\quad p' \perp r,\quad q' \perp r,\quad p = p' \vee r,\quad q = q' \vee r$.

    Exemples :
    I) Dans le cas classique, toutes les propositions sont compatibles.
    II) Dans le cas quantique, deux propositions $p$ et $q$ sont compatibles si et seulement si $P_p P_q = P_q P_p$. Une autre condition équivalente est qu'il existe une base hilbertienne $(e_i)_{i \in I}$, et deux sous-ensembles $I_p$, $I_q$ de $I$ tels que $p = \overline{\textrm{vect}(\{e_i \ \vert \ i \in I_p\})}$ et $q = \overline{\textrm{vect}(\{e_i \ \vert \ i \in I_q\})}$.

    Si, par exemple, dans $\mathbb{R}^2$, $p$ et $q$ sont deux droites ni orthogonales ni égales, alors il n'existe pas de $p'$, $q'$, $r$ vérifiant les conditions ci-dessus. En effet, $r$, étant inférieur à la fois à $p$ et $q$, doit être $\{0\}$. Le seul $p'$ tel que $p = p' + \{0\}$ est $p$, et de même pour $q$. Or $p \not \perp q$.

    EDIT1 : Ajout du contre-exemple.
    EDIT2 : Amélioration typographique.
  • Définissons maintenant un état d'un système physique. La définition provient de l'idée que deux états qui ne peuvent être distingués par une expérience ne peuvent être considérés comme différents tout court. Donc, un état doit se caractériser par l'ensemble de ses propriétés.

    Soit $T$ un treillis $\sigma$-complet orthocomplémenté (je dirai treillis, dorénavant). On appelle état déterministe sur $T$ une application $s : T \rightarrow \{0,1\}$ qui vérifie :
    1) $s(\textbf{0}) = 0$ ;
    2) $s(\textbf{1}) = 1$ ;
    3) si $A$ est une partie dénombrable de $T$ telle que $\forall p,q \in A$, $p\not = q \Rightarrow p\perp q$, alors $s(\vee A) = 1$ si et seulement si $\exists p \in A \quad s(a) = 1$.

    Si $s$ est un état, et si $p$ est une proposition, on peut remplacer $s(p) = 1$ par la phrase imagée "si on faisait une expérience pour tester si $p$ est vraie, et qu'on se trouve dans l'état $s$, alors le résultat serait forcément positif".

    Exemples :
    I) Si $x \in X$, alors $s_x := p \mapsto \left\{\begin{array}{cc}1 &\textrm{si } x \in p\\0&\textrm{sinon}\\ \end{array}\right.$ (c'est le "Dirac en $x$") est un état déterministe. Si $X$ est un espace topologique séparé à base dénombrable (c'est le cas de $\mathbb{R}^n$ pour tout $n$ fini et de tous ses sous-espaces, par exemple) et que $T$ est sa tribu borélienne, on peut démontrer que tout état déterministe est de cette forme.
    II) Si $H$ est de dimension supérieure ou égale à $3$, il n'y a pas d'états déterministes, c'est le théorème de Kochen-Specker (qui est un corollaire d'un théorème mentionné plus loin).

    Pour pallier l'absence d'états déterministes dans le cas quantique, on définit les états probabilistes, qu'on appellera états tout court.

    On appelle état sur $T$ une application $s : T \rightarrow [0,1]$ qui vérifie
    1) $s(\textbf{0}) = 0$ ;
    2) $s(\textbf{1}) = 1$ ;
    3) pour toute partie dénombrable $A$ telle que $\forall p,q \in A\ p\not = q \Rightarrow p\perp q$, $s(\vee A) = \sum_{p \in A} s(p)$.

    Il est facile de voir que
    - tout état déterministe est un état ;
    - toute combinaison convexe d'états est un état.

    Un état qui ne peut pas s'écrire comme combinaison convexe non triviale est dit pur. Autrement dit, si $s$ est un état tel que si $s = t s_1 + (1-t) s_2$ avec $t \not \in \{0,1\}$ et $s_1,s_2$ deux états, alors $s = s_1 = s_2$.

    Tout état déterministe est pur.

    Si $s$ est un état, et si $p$ est une proposition, on peut remplacer $s(p) = t$ par la phrase imagée "si on faisait une expérience pour tester si $p$ est vraie, et qu'on se trouve dans l'état $s$, alors le résultat serait positif avec probabilité $t$" (le mot "probabilité" est là pour rendre la chose imagée, mais ce ne sont pas, stricto sensu, des probabilités au sens mathématique du terme).

    Exemples :
    I) Dans le cas classique, un état n'est rien d'autre qu'une mesure de probabilité sur $X$. Si $X$ est topologique séparé à base dénombrable et $T$ sa tribu borélienne, alors tout état pur est une mesure de Dirac.
    II) Dans le cas quantique, si $\phi \in H$ est tel que $\Vert \phi \Vert = 1$, alors l'application $s_\phi : p \mapsto \langle P_p \phi,\phi \rangle = \Vert P_p \phi \Vert^2$ est un état. En effet, $P_\textrm{0} = 0$, et donc $s_\phi(\textrm{0}) = \vert \langle 0,\phi \rangle\vert^2 = 0$ ; $P_\textrm{1} = id_H$, et donc $s_\phi(\textrm{1}) = \vert \langle \phi, \phi \rangle \vert^2 = 1$. Pour la dernière condition, si $A$ est une partie au plus dénombrable de $T_H$ telle que $\forall p,q \in A\ p\not = q \Rightarrow p \perp q$, alors il existe une base hilbertienne $(e_i)_{i \in I}$ et un ensemble de parties de $I$ indexé par $A$, $(I_p)_{p \in A}$ tel que $\forall p,q \in A\ p\not = q \Rightarrow I_p \cap I_q = \emptyset$ et $\forall p \in A\ p = \overline{\textrm{vect}(\{e_i \ \vert \ i \in I_p\})}$. Alors

    $s(A) = \langle P_{\vee A} \phi,\phi\rangle =
    \sum_{i \in I} \langle P_{\mathbb{K}e_i}\phi, \phi\rangle =
    \sum_{p \in A} \sum_{i \in I_p} \langle P_{\mathbb{K}e_i}\phi, \phi\rangle =
    \sum_{p \in A} \langle P_p\phi,\phi\rangle = \sum_{p\in A} s(p)$
    (ce dernier argument prend, d'habitude, le nom de Pythagore ou Parseval).
    On peut faire des combinaisons convexes de $s_\phi$ (qui ne sont plus, en général, de la forme $s_\psi$), et passer à la limite, dans un certain sens. Le théorème de Gleason (lien en anglais) affirme qu'en dimension supérieure ou égale à $3$, tout état s'obtient de cette forme, et les états purs sont exactement les $s_\phi$. Ce théorème implique le théorème de Kochen-Specker cité plus haut.

    Je fais une pause et je continue.

    EDIT : Grosse faute dans la définition des états associés à des vecteurs, c'est corrigé en rouge.
    EDIT2 : Suivant la mauvaise définition, j'ai écrit une démonstration fausse, mais maintenant que c'est corrigé, en rouge, ça devrait être bon !
  • Georges Abitbol a écrit:


    Deux propositions $p$ et $q$ sont dites compatibles (s'il y a risque de confusion avec le mot correspondant en probabilités "de lycée", on peut dire "comesurables", que j'aime bien aussi) si $\exists p',q',r\text{ } p'\perp q', p'\perp r, q'\perp r,p=p'\vee r,q=q'\vee r$.
    Il doit y avoir un poblème car ceci est vrai dans tout treillis avec $p'=q'=r=0$.

    (edit: rajout du $p$ manquant)
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Mmmh, dans ta citation, il manque un "$p$" à $p = p' \vee r$.
    Je ne vois pas trop ce que tu veux dire.
    Je rajoute un exemple dans le texte pour préciser.
  • On définit maintenant le mot observable.

    Soit $(E,B)$ un ensemble muni d'une tribu. On appelle observable $B$-mesurable à valeurs dans $E$ sur $T$ un morphisme de treillis $\sigma$-complets orthocomplémentés, i.e. une application $o : B \rightarrow T$ qui est telle que
    1) $o(\emptyset) = \textrm{0}$ ;
    2) $o(E) = \textrm{1}$ ;
    3) $o$ préserve $\wedge$ et $\vee$ ;
    4) $o$ commute à $\perp$ ;
    5) $\forall m,n \in B$, $o(m)$ et $o(n)$ sont compatibles.

    Si $o$ est une observable, et si $m$ est un élément de $B$, la proposition $o(m)$ prend le nom imagé de "si on mesure $o$, le résultat est dans $m$".

    Exemples :
    I) Soit $f : X \rightarrow E$ une application mesurable. Alors $f^{-1} : B \rightarrow T$ est une observable $B$-mesurable à valeurs dans $E$. Réciproquement, si $E = \mathbb{R}_+ \cup \{\infty\}$ et si $B$ est la tribu borélienne sur $\mathbb{R}_+ \cup \{\infty\}$, alors toute observable est de la forme précédente (cela doit se généraliser à plein d'autres $E$, peut-être que topologique séparé à base dénombrable suffit - ou même $E$ quelconque, avec une condition sur $B$). En effet, pour $n \in \mathbb{N}$, et $k \in \mathbb{N}$ tel que $k\leq n2^n$, posons $I_{k,n} := [k/2^n, (k+1)/2^n[$, et posons $I_{\infty,n} := [n2^n,+\infty]$. Alors pour tout $n$, $(I_{0,n},I_{1,n},...,I_{\infty,n})$ est une partition de $\mathbb{R}_+ \cup \{\infty\}$. Les images de ces parties par $o$ forment une partition de $X$. On définit $f_n$ comme étant constante de valeur $k/2^n$ sur $I_{k,n}$ et $n2^n$ sur $I_{\infty,n}$. Alors la suite des $f_n$ est une suite croissante de fonctions mesurables, qui converge donc vers une fonction mesurable $f$, qui est la $f$ recherchée.
    II) En dimension finie : soit $A$ un endomorphisme autoadjoint sur $H$. D'après un fameux théorème de réduction, il existe une base orthonormée de vecteurs propres pour $A$, avec des valeurs propres réelles. Notons $Sp(A)$ l'ensemble de ces valeurs propres. Si $P$ est une partie de $Sp(A)$, on pose $o_A(P) := +_{\lambda \in P} E^\lambda_A$ où $E^\lambda_A$ est le sous-espace propre de $H$ associé à $\lambda$. Alors $o_A$ est une observable $P(Sp(A))$-mesurable à valeurs dans $Sp(A)$. Réciproquement, toute observable à valeurs dans $\mathbb{R}$ est de la forme $o_A$ pour un certain endomorphisme autoadjoint sur $H$. En effet, si on pose $I_t := ]-\infty,t]$, alors $o(I_t)$ est une famille croissante de sous-espaces vectoriels de $H$. Comme $H$ est de dimension finie, il ne peut y avoir qu'un nombre fini de sauts de dimensions. Notons $t_i$ les moments où il y a saut. On pose $F_i := o(\{t_i\})$. Les $F_i$ sont en somme directe orthogonale. On pose alors $A := \sum_{i} t_i P_{F_i}$, qui est l'endomorphisme autoadjoint recherché.
    En dimension infinie, c'est plus compliqué. L'analyse fonctionnelle fait marcher le paragraphe précédent, mais avec des complications notables.

    EDIT1 : Correction d'une coquille.
    EDIT2 : Ajout d'une remarque.
  • Ok! C'était une erreur de ma part.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • En attendant chapeau pour ce crash course de MQ assez fourni.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Deux observables $o_1,o_2$ à valeurs dans $E_1,E_2$ (avec tribus $B_1$, $B_2$) sont dites compatibles si $\forall m \in B_1 \ \forall n \in B_2 \quad o_1(m) \textrm{ et }o_2(n)$ sont compatibles.

    Exemples :
    I) Dans le cas classique, toutes les observables sont compatibles.
    II) En dimension finie, deux observables sont compatibles si et seulement si les endomorphismes autoadjoints associés commutent.
    En dimension infinie, en partie en raison du fait que les opérateurs non bornés ne sont pas définis partout, il y a des contre-exemples.

    Dorénavant, on suppose que les treillis sont orthomodulaires, ce qui veut dire $\forall p,q \in T \quad p \leq q \Rightarrow q\wedge (p \vee q') = p$. Cela ne paie pas de mine, mais on a la proposition suivante :
    Dans un treillis orthomodulaire, toute partie dont les éléments sont deux à deux compatibles est telle que le sous-treillis engendré par cette partie est distributif (un sous-treillis est une partie stable par $\wedge$, $\vee$ et $\perp$, et le sous-treillis engendré par une partie est l'intersection des sous-treillis qui la contiennent).

    Dans ce fil, je demandais de l'aide pour construire, dans le cas général de deux observables compatibles, un moyen de construire l'observable "couple" ou "produit tensoriel". Comme je ne sais pas si c'est possible dans le cas général, je ne décrirai que le cas de deux observables compatibles n'ayant qu'un nombre fini de valeurs, ce qui suffira, pour le moment.

    Soit $E_1$ (resp. $E_2$) un ensemble fini, et soit $o_1$ (resp. $o_2$) une observable $P(E_1)$-mesurable (resp. $P(E_2)$-mesurable). On suppose que $o_1$ et $o_2$ sont compatibles.
    On définit $o_1 \otimes o_2 : P(E_1 \times E_2) \rightarrow T$ via : pour $D \subseteq E_1\times E_2$, $o_1 \otimes o_2 (D) := \vee(\{o_1(\{e_1\}) \wedge o_2(\{e_2\}) \ \vert \ (e_1,e_2) \in D\})$. On a alors, si $D_1 \subseteq E_1$, $D_2 \subseteq E_2$, $o_1 \otimes o_2(D_1 \times D_2) = o_1(D_1) \wedge o_2(D_2)$. En effet, $\vee(\{o_1(\{e_1\}) \wedge o_2(\{e_2\}) \ \vert \ e_1 \in D_1 \textrm{ et } e_2 \in D_2\}) = \vee_{e_1 \in D_1} \vee_{e_2 \in D_2} o_1(\{e_1\}) \wedge o_2(\{e_2\})$
    $= \vee_{e_1 \in D_1} o_1(\{e_1\}) \wedge (\vee_{e_2 \in D_2} o_2(\{e_2\}) = \vee_{e_1 \in D_1} o_1(\{e_1\}) \wedge o_2(D_2) = o_1(D_1) \wedge o_2(D_2)$ en utilisant la distributivité.
    De la même façon, on démontre que $o_1\otimes o_2$ est effectivement une observable, mais c'est un peu moins facile à écrire.

    Supposons maintenant que $E_1$ et $E_2$ sont des sous-ensembles de $\mathbb{R}$. Notons $+$ et $\cdot$ les applications de multiplication $+ : E_1 \times E_2 \rightarrow E_1 + E_2$ et $\cdot : E_1 \times E_2 \rightarrow E_1 \cdot E_2$. On pose, pour les $o_1$ et $o_2$ ci-dessus, $o_1 + o_2 := +^{-1} \circ (o_1 \otimes o_2)$ et $o_1 \cdot o_2 := \cdot^{-1} \circ (o_1 \otimes o_2)$. On les appelle observables somme et produit. Elles ne sont définies que quand les observables sont compatibles ! $+$ et $\cdot$ sont "associatives", si on formalise ce que cela veut dire.

    Exemples :
    I) Dans le cas classique, $o_1$ et $o_2$ sont $f_1^{-1}$ et $f_2^{-1}$ pour certaines $f_i$. $o_1 \otimes o_2$ est alors $(f_1 \times f_2)^{-1}$. $o_1 + o_2$ est alors $(f_1 + f_2)^{-1}$ et $o_1 \cdot o_2$ est alors $(f_1 \cdot f_2)^{-1}$.
    II) Dans le cas quantique, je ne sais pas trop quel sens donner à $\otimes$. Mais en dimension finie, si $o_1$ est associée à l'endomorphisme adjoint $A_1$ et $o_2$ à l'endomorphisme autoadjoint $A_2$, alors $o_1 + o_2$ est l'observable associée à $A_1 + A_2$, et on a la même chose pour $\cdot$.

    EDIT1 : Modification typographique.
  • Soit $T$ un système physique, $s$ un état de $T$, $E_1$, $E_2$, $F_1$, $F_2$ des ensembles finis, $O_1 : E_1 \rightarrow Obs(T,F_1)$ et $O_2 : E_2 \rightarrow Obs(T,F_2)$ deux applications ($Obs(T,Machin)$ désigne bien sûr les observables à valeurs dans $Machin$) telles que $\forall e_1 \in E_1\ \forall e_2 \in E_2\quad O_1(e_1) \textrm{ et }O_2(e_2)$ sont compatibles.

    On appelle garantie associée à tout ceci l'ensemble $R \subseteq E_1 \times F_1 \times E_2 \times F_2 := \{(e_1,f_1,e_2,f_2) \ \vert \ s(O_1(e_1)(\{f_1\}) \wedge O_2(e_2)(\{f_2\})) > 0\}$.

    Petit aparté : quand on a défini les états, on n'a défini que des "probabilités" de vérité de propositions. Et, par extension, on n'a pas défini la "valeur" d'une observable sur un état, mais seulement la "loi de probabilité" des valeurs possibles sur cet état.
    Dans le cas classique, et quand l'état $s$ est déterministe, c'est un point $x$ de $X$, et on dit qu'une propriété $p$ est vraie sur $x$ si $x\in p$, et fausse sinon. Pour une observable provenant d'une fonction mesurable $f : X \rightarrow E$, on peut dire que la valeur de cette observable en $x$ est $f(x)$. Dans le cas où $s$ n'est pas déterministe, on peut considérer une variable aléatoire $x : \Omega \rightarrow X$ de loi $s$, et la valeur de vérité de "$x \in p$" est alors une variable aléatoire à valeurs dans $\{0,1\}$ ; et la valeur de l'observable associée à $f$ est la variable aléatoire réelle $f \circ x$.
    Dans le cas quantique, on n'a que des lois, mais quand on effectue vraiment la mesure d'une observable $o$ sur un état $s$, on obtient une des valeurs possibles de $o$. Et si on répète la même opération un autre jour, sur le même état $s$, on peut obtenir une valeur différente. Et si on répète le procédé un grand nombre de fois, on constate que les fréquences des valeurs observées suivent la loi de probabilité de l'observable $o$ sur l'état $s$. Et, pour autant que je sache, on ne sait pas pourquoi.

    En quoi consiste la définition précédente ? Imaginons deux combinés, de claviers $E_1$ et $E_2$ et d'écrans $F_1$ et $F_2$. Sur le premier clavier, $E_1$, chaque touche $e_1$ correspond à une observable $O_1(e_1)$ à valeurs dans $F_1$, et sur le deuxième clavier, chaque touche $e_2$ correspond à une observable $O_2(e_2)$ à valeurs dans $F_2$. Quand on appuie sur les touches $e_1$ et $e_2$, chaque combiné effectue sur un système dans un état $s$ les mesures correspondantes, et les affiche sur l'écran : on voit apparaître $f_1$ et $f_2$. Comme $f_1$ et $f_2$ sont des valeurs possibles de $O_1$ et $O_2$, et que leur engendrement est supposé avoir suivi des lois probabilistes, c'est que la probabilité a priori de voir apparaître $f_1$ et $f_2$ était non nulle.



    Démontrons maintenant que si $T$ est un système classique, toute garantie obtenue de cette façon qui vérifie que $\forall (e_1,e_2) \in E_1 \times E_2\quad \exists (f_1,f_2) \in F_1\times F_2\quad (e_1,f_1,e_2,f_2) \in R$ est forcément triviale.

    Supposons toutes les $O_1(i)$, pour $i \in E_1$, de la forme $g_i^{-1}$. Soit $G_1 \in F_1^{E_1}$ et $G_2 \in F_2^{E_2}$ telles que $s((\wedge_{i \in E_1} O_1(i)(\{G_1(i)\}))\wedge(\wedge_{j \in E_2} O_2(j)(\{G_2(j)\}))) > 0$, cela existe, car $s \circ O_1(i_1) \otimes O_1(i_2) \otimes \cdots \otimes O_1(i_{\sharp E_1}) \otimes O_2(j_1) \otimes \cdots O_2(j_{\sharp E_2})$ est une loi de probabilité sur l'ensemble fini $F_1 \times \cdots \times F_1 \times F_2 \times \cdots \times F_2$ qui doit donc posséder un atome. Alors $G_1$ et $G_2$ vérifient les conditions de trivialité.

    Par contre, avec des systèmes quantiques, il est possible de fabriquer des téléphones de garanties non triviales. Par exemple, la $R$ de Mermin-Peres décrite en haut de ce fil peut-être obtenue par la construction décrite dans ce post avec des observables bien choisies. Je donnerai les détails une autre fois, mais, en gros, il suffit de contempler la matrice $3\times 3$ d'observables que l'on trouve en faisant Ctrl+F "Mermin-Peres magic square" dans la page wikipédia liée.
  • Il est à noter que la définition donnée par Christophe de garantie fabricable par mécanique quantique (FMQ) dans sa thèse est un peu différente, et, a priori, pas équivalente. La définition ci-dessus est "mienne", c'est-à-dire, pas forcément bonne, ou judicieuse, sur le plan physique. Mais, au moins, elle se formule dans le langage général des treillis.

    Je conçois tout ce qui précède comme un "morceau" entier, c'est-à-dire que je ne compte pas, pour l'instant, rédiger de choses concernant le reste des aspects évoqué dans la thèse de Christophe. J'apporterai les corrections que vous me signalerez, et je modifierai/étofferai/détaillerai selon les retours que vous m'apporterez ! (Par exemple, je pourrais essayer de comparer la définition de Christophe et la "mienne"...!)
  • Breaking News : Il y a quelque chose dans la littérature qui s'appelle les "nonlocal boxes", introduites par Popescu et Rohrlich. Cela a l'air de ressembler aux téléphones ! Voici un lien en anglais pour en savoir plus !
  • Bonsoir Georges Abitbol,

    merci de tenir parole.
    Je n'ai encore rien lu, un pdf ? un livre ? (j'aime bien cette dernière technologie)

    S
  • Ben la partie "physique" est traitée dans un très gros livre, "Spectral Theory and Quantum Mechanics" de Valter Moretti, dont je ne sais s'il est traduit en français.

    Maintenant que j'ai écrit tout ça, ben je t'encourage à me signaler si des passages te semblent obscurs, et dans ce cas je tâcherai de rendre le texte plus clair. Il y a, par exemple, des notations que je n'ai pas introduites, mais qui peuvent beaucoup faciliter la lecture de certaines formules. Je modifierai le texte en conséquence quand j'aurai le temps. Et je compilerai tout ça dans un pdf, à terme, oui !
  • Cela change quelque chose à la préhension de l'univers := on n'y comprend rien, c'est pas nous qui l'avons fait .
    ?

    question sincère

    S
  • Ben, "croire à la mécanique quantique", ça veut dire, à mon avis, "avoir la conviction que n'importe quel appareil de mesure sur n'importe quel système physique (un atome, une balle de ping-pong, ou nous-mêmes) donnera une réponse en choisissant au hasard (selon une loi déterminée par l'état du système au moment où on fait l'expérience) une valeur propre d'un certain opérateur autoadjoint sur un certain espace de Hilbert".
    Eh bien, apparemment, "croire à la mécanique quantique", ça permet de prédire correctement tout un tas de choses, et c'est parfois la seule hypothèse décrivant des choses qui se passent dans "la vraie vie".
  • rien à voir sieur Georges mais ce n'est pas du style de cc de ne pas dire merci.

    J'espère qu'il est au placard ou qu'il va bien. En tout cas je l'aime même si c'est mon meilleur ennemi.

    S
  • Ouais je remarque que Monseigneur non plus n'a rien publié depuis bientôt deux semaines. Espérons qu'il ne leur soit rien arrivé de pire qu'un départ en vacances.
  • Bonjour à tous ,
    Georges (je viens de m'apercevoir que ton pseudo est le nom d'un personnage de film!!!), quelque chose me gène , j'ai l'impression que la méca Q est purement abstraite, on a des observables qui sont des éléments d'un espace de Hilbert, etc...Qu'en est-il de la réalité (c'est quoi la matière?,) , quel rapport entre les téléphones de cc et la réalité....Peut-être suis -je à côté de la plaque, mais j'ose poser ces questions.
    Merci de ta réponse éventuelle.
    Cordialement.
    Jean-Louis.
  • C'est l'homme le plus classe du monde paraît-il.
  • @Jean--Louis : Je ne connais pas la réponse à ta question, mais je vais essayer de te dire ce que j'ai compris de mes lectures.

    Supposons que l'on modélise l'endroit où tout (tout !) se déroule par $\mathbb{R}^3$, que "tout" ne soit que particules (j'entends par là choses élémentaires qui constituent toute chose), et qu'il y ait un nombre fini $N$, très grand, de particules, et que tout ne soit déterminé que par la "position" et la "vitesse". Alors l'état de l'univers tout entier, à un instant donné, ne serait qu'un élément $x$ de $X := (\mathbb{R}^3 \times \mathbb{R}^3)^N$. L'histoire de l'univers serait donc une application $\mathbb{R}_+ \rightarrow X$ ($\mathbb{R}_+$ représente le "temps", et on suppose qu'il a un "début"). Et cette application satisferait des équations qu'on appellerait "lois de la nature".
    Dans ce cas, si l'on avait un moyen précis de connaître exactement ces équations, et exactement l'état $x_{t_0}$ de l'univers à l'instant $t_0$, on pourrait espérer connaître toute la suite de l'histoire, c'est-à-dire $(x_t)_{t \geq t_0}$.

    Evidemment, la réalité n'est pas une application $\mathbb{R}_+ \rightarrow X$, et il faut faire l'acte de foi consistant à espérer que ce que l'on peut comprendre sur l'objet mathématique correspond à peu près à la réalité.

    Des expériences ont démontré que ce modèle ne permet pas de décrire le monde correctement, car il exclut de manière théorique que des choses se passent alors qu'elles se passent vraiment en pratique.

    Maintenant, beaucoup de gens considèrent que les espaces de Hilbert sont la bonne façon de représenter le monde. Et ces personnes n'ont pas tort, au moins dans certains cas : par exemple, si tu arrives à fabriquer une boîte très, très étanche, et que tous les jours, tu arrives à y isoler une seule particule dans un état que tu as choisi à l'avance et que tu effectues tous les jours la même mesure (tout ceci est faisable de manière assez précise en laboratoire !) et que tu notes le résultat dans un petit cahier, alors les nombres dans ton petit cahier sembleront suivre une loi de proba que tu peux calculer de manière effective selon des produits scalaires dans un espace de Hilbert.

    Enfin, bref, je ne pense pas que des personnes affirment sérieusement "tout, tout, tout, n'est rien qu'un vecteur dans un espace de Hilbert", mais je crois qu'il y a beaucoup de personnes qui pensent que pour toute phénomène de la réalité, il y a un espace de Hilbert, et un vecteur de cet espace, qui décrivent suffisamment bien le phénomène pour que des calculs effectués sur ce vecteur permettent de prévoir vraiment le phénomène - le procédé d'association d'un vecteur et d'un espace de Hilbert à quelque chose de concret étant d'autant plus compliqué que la chose l'est.

    Je ne sais pas ce qu'est la matière.

    En ce qui concerne le lien entre les téléphones et la réalité, ben, de la même façon que la théorie de la relativité dit qu'il est impossible de construire des voitures allant plus vite que la lumière, la mécanique quantique dit qu'il n'est pas impossible de construire des machines qui font des trucs si étranges qu'on pourrait qualifier ça de télépathie (et les téléphones sont l'objet mathématique inventé pour formaliser ce genre de questions, même si tout ceci prend ses racines dans des choses très anciennes, comme le paradoxe EPR). Et en l'occurrence, il y a des machines vraiment très simples, comme le "carré magique de Mermin-Peres", qui sont vraiment fabricables dans la vraie vie.
  • Comme je ne me souviens plus si ça a été dit, je le redis pour Jean-Louis: les vecteurs représentent les superpositions d'état d'un système. Plus précisément, une base $e_1, \cdots, e_n$ corresponds aux $n$ états possibles, et le coefficient devant $e_i$ représente "à quel point" le système est dans l'état $e_i$ (c'est pas excatement une probabilité mais presque).
    En espérant n'avoir pas écrit de sottise.
  • Quand on a deux systèmes donnés on peut les considérer comme un seul gros système, dont les états possibles sont bien entendu les couples formés d'un état de chaque système. Le gros système est donc décrit par l'espace vectoriel dont une base est donnée par les $(e_i,e'_j)$, que l'on note $(e_i \otimes e'_j)$ pour faire savant.
  • Et l'Univers n'est autre que le trés gros système constitué de toutes les particules (=système élémentaire) qu'il contient.
    Là encore, sous réserve de sottise de ma part.
  • Merci Georges, merci Shah d'Ock Anonyme...
  • Par ailleurs, sauf erreur, une particule élémentaire est décrite comme une représentation irréductible d'un certain groupe de Lie.
  • Christophe, j'ai une petite question : quand tu démontres, dans ta thèse, qu'une physique déterministe qui garantit des téléphones non triviaux garantit automatiquement des téléphones TSD, j'ai une petite observation à faire.
    Quand tu dis que si une physique déterministe offre une garantie, elle offre en fait une sous-garantie qui est un graphe de fonction, j'ai l'impression que ton argument est le suivant :

    ----

    D'après l'hypothèse déterministe, si, dans une histoire $h$, on appuie sur la touche $A$ du premier combiné, et sur la touche $B$ du deuxième combiné, et que ce qui s'affiche sur les écrans, c'est $C$ et $D$, alors pour toute histoire $h'$ identique à $h$ sauf sur ce qu'elle raconte à propos de ce qui s'affiche sur les écrans, on voit aussi $C$ et $D$.

    Il vient que pour toute histoire $h$ qui raconte tout, sauf sur quelles touches on appuie et ce qui apparaît sur l'écran, alors on a une fonction $f_h$ qui associe à tout couple $(A,B)$ les résultats qui apparaissent sur les lors de l'appui de $A$ et $B$.

    On peut donc dire que dans l'histoire $h$, le téléphone est en fait $graphe(f_h)$ garanti.

    ----

    Si c'est bien cela, ton argument, j'ai envie d'objecter que "dans la pratique", ça manque d'intérêt, puisque la fonction $f_h$ dépend de l'histoire ambiante, et qu'il faut la connaître entièrement pour pouvoir en déduire un procédé pour envoyer de l'information instantanément !
    C'est un peu dommage, non ?
    Ou alors est-ce que j'ai loupé quelque chose ?
  • De mon téléphone : "manquer d'intérêt est une notion subjective. Chacun en pense ce qu'il veut. S'il EXISTE une fonction f telle que blabla alors la RR est violée point barre formellement. Et c'est tout à fait falsifiable de la manière suivante : au lieu de connaître f on en tire une au sort avec laquelle on essaie de violer la RR en faisant comme si "Dieu" nous avait dit "c'est f". On falsifie alors que c'est f. Une fois ça va mais comme il y a un nombre fin de f, si on recommence un nombre grand de fois et si on ne viole jamais la RR et bin on établit irréfutablement le non déterminisme.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Merci à AD pour la correction.

    Je suis sur un PC. @Georges.

    Soit E une expérience tout à fait triviale et concrète que tu peux faire et qui a comme propriété que sur le papier, tu as le théorème suivant: $<<\forall f\in A^B:[$ si la machine $M$ répond comme si elle appliquait $f$ alors RR est reproductiblement violée$]>>$.

    De plus $A,B$ sont finis. Il suit qu'il existe un entier $n$ (en fait assez petit) tel que $n=card(A^B)$.

    Je note $P:=[$ la RR (donc aussi la RG) est violée$]$.

    Tu me demandes la chose suivante: $<<$ comme on ne connait pas $f$, on n'est pas très avancé d'avoir prouvé que si $M$ suit $f$, alors $P>>$

    Je t'ai répondu la chose suivante:

    1) on tire au sort BANALEMENT une $f$ dans $A^B$.
    2) on réalise $E$
    3) On constate que $M$ n'a pas suivi $f$ (ou alors on constate $P$)
    4) On recommence souvent, jusqu'à avoir fait ça un nombre très grand de fois comparé à $n$.


    Admettons qu'on n'ait jamais constaté $P$. Supposons que lors de l'expérience $i$, la machine $M$ de cette expérience ait suivi $g_i\in A^B$. Notons $f_i$ la fonction qui a été tirée au sort lors de l'expérience $i$.

    Alors la conclusion est la suivante: à aucun moment on a obtenu $f_i = g_i$.

    Ca ne va certes pas plus loin, mais à pêu près n'importe quel scientifique admettra que l'hypothèse "lors de l'expérience $i$, la machine $M$ était déterminée à suivre $g_i$" a été falsifiée. (Il ajoutera "il faudrait vraiment qu'on n'ait pas de chance pour que la $f_i$ tirée au sort ait à chaque fois, été différente de $g_i$")
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • J'en profite pour poser une question HS. Je viens de relire ton premier post et tu mets un lien vers ma thèse. Je l'ai donc suivi. Et je vois qu'elle a été téléchargée 500 fois environ. Est-ce que quelqu'un sait si c'est beaucoup, peu, dans la moyenne, etc ? :-D (Merci, c'est vraiment une question peu reluisante de comère, mais sincèrement j'aimerais savoir, le rapporteur ayant prévu un "impact factor" (ses mots) à 2ans (recherche), puis 10ans pour le côté "grand public").

    Mode HS off
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Gosh ça a l’air vraiment passionnant la mécanique quantique je ne savais pas que c’était aussi « matheux » (enfin dans le fond si mais je pensais que c’était des maths très peu accessibles/proba des trucs comme ça...) flemme de lire franchement et vu mon niveau je mettrais trop de temps pour lire/comprendre j’ai juste parcouru un peu en diagonale sans rien comprendre mais les thèmes abordés sont super stylés je ne savais pas que c’était le genre de trucs qu’on faisait en mécanique quantique.Je n'ose pas demander un résumé des axiomes de la mécanique quantique parce que je n’ai pas du tout le temps en ce moment et dès que j’en aurai j’essaierai plutôt de progresser en logique mais christophe c ou George Abitol le genre de thème abordé là vu(?) vous savez où on peut trouver ça dans des bouquins éventuellement ? (je ne les achèterai pas avant un bon moment of course mais je sais que je le ferai quand même un jour et plus en moyen terme qu’en long terme aussi donc bon)
    Les cours que je trouve quand j’essaie un peu d’aborder le sujet ça demande un gros bagage algèbre et proba de ce que j’ai vu et franchement j’ai un mal fou à me motiver à apprendre tout ça or là de ce que je vois ça a l’air très « clean » je n’ai pas spécialement l’impression que ça requiert des connaissances hyper-poussées en algèbre (cohomologies et les trucs comme ça par exemple dont parle Alain Connes et qui demandent plein de théorèmes intermédiaires compliqués pour être compris)
  • Ah oui, je vois ! Bon et tout ceci, ce n'est pas "contre ton théorème", c'est juste que j'avais, a priori, à une vraie recette de cuisine utilisable pour envoyer de l'information de manière instantanée.

    En tout cas, ton protocole me paraît très intéressant. Mais... comme on ne peut utiliser les téléphones qu'une seule fois, si jamais le téléphone répond comme la fonction $f$ tirée au hasard, ce ne sera que sur un couple de touches particulier, non ? Il faut aussi choisir des touches au hasard ?

    Enfin, j'aimerais bien que tu précises. Disons qu'on connaît un procédé physique pour fabriquer autant de téléphones qu'on le souhaite, qui soient tous $R$-garantis pour une garantie $R$ fixée et non triviale. A chaque fois $i$ qu'on fait une expérience, alors le $i$-ème téléphone va suivre une $g_i$ dont le graphe est inclus dans $R$, et cette $g_i$ dépend, en général, des conditions de l'expérience. On choisit, pour chaque $i$, une $f_i$ dont le graphe est inclus dans $R$ et on appuie sur des touches $a_i$ et $b_i$. Et alors ?
  • @grothenbiete : Non, en fait, ce n'est que de l'algèbre hermitienne et un langage un peu imagé. C'est vraiment frustrant quand on commence, parce que les livres parlent de particules, de machins, etc. Mais en fait le paradigme hilbertien n'est pas si compliqué, à mon avis.
  • Christophe: pour comparer ce qui n'est pas comparable, mon papier "A short remark" a été téléchargé 127 fois sur vixra http://vixra.org/abs/1508.0299
    J'y répondais à une question soulevée par le regretté remarque dans cette même rubrique. C'était ici: http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?16,1137927,1138077#msg-1138077
  • Merci shah.
    @GA : mais ton téléphone (utilisé une seule fois) ne va pas pouvoir appliquer f justement :-D Sauf si RR est falsifiée "sous tes yeux". Le montage est très simple: tu sais que s'il utilise f comment vierge la RR. Tu "supposes" qu'il applique f DANS TA TETE. Du coup tu te positionnes de telle et telle façon dans l'espace relativiste pour le falsifier (le supposé f-téléphone). Et tu CONSTATES qu'il n'a pas utilisé f. C'est tout (ou alors tu n'arrives pas à te positionner et conclus au viol EFFECTIF de la RR.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Christophe : si, une fois de temps en temps, l'écran de la personne qui est très loin affiche ce que je voulais vraiment lui envoyer, ça ne viole pas la relativité restreinte, ça peut juste être du hasard.
    Je ne comprends pas vraiment ton protocole.
    Sous l'hypothèse que le monde est déterministe, alors le téléphone doit marcher comme une fonction ; si on sait quelle est cette fonction, je suis d'accord qu'il suffit de faire plein d'essais et de voir si ça colle à chaque fois, auquel cas la relativité restreinte est violée ; sinon, c'est que le téléphone ne marche pas comme cette fonction.
    Mais si on ne sait pas a priori quelle est la fonction que le téléphone simule, comment arriver aux conclusions que tu tires ?
    C'est pas tes arguments que je ne comprends pas, hein, c'est vraiment ce que tu proposes ! Sinon, dans ton dernier message, à mon avis, tu ne voulais pas écrire "vierge".
  • De mon téléphone : GA, ça ne viole en rien la RR que l'écran affiche parfois (ni même toujours) le bon msg. Je te parle du protocole qui la viole VRAIMENT (deux trains qui se croisent dans llesquels blablabla). Autrement dit celui où on EMPECHE tout téléphone quelqu'il soit de transmettre un bit instantanément. Connais-tu cette expérience (célèbre et académique)? Car sinon il me faudra un PC pour te la decrire.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Non, cette histoire de trains, je ne connais pas. Je veux bien attendre que tu sois d'un PC pour détailler :p !
    Là, je nage un peu dans le flou.
  • Ok, je te la raconte, c'est la preuve académique que
    [RR => c(:=vitesse lumière) indépassable pour envoi signal].

    On peut choisir $v$ assez proche de $c$ et faire se croiser 2 trains $T_1,T_2$ de sorte que ce qui suit soit réalisé (sous RR ou RG). Chacun voit l'autre aller à la vitesse $v$.

    L'histoire de $T_2$ dans le repère de $T_1$ est que $T_2$ mesure 1m de long et a donc l'air tout écrasé. Et réciproquement, $T_2$ voit $T_1$ mesurer 1m et avoir l'air tout écrasé.

    Plaçons-nous dans le repère de $T_1$, qui dans ledit mesure 1 année-lumière (de même pour $T_2$, il mesure 1AL dans son repère à lui). Le conducteur Bil de la locomotive de $T_1$ voit passer la tête de $T_2$ à un instant que j'appelle $0$, puis la queue de $T_2$ quasiment aussitôt après à un instant $e$. Le voyageur Georgette du dernier wagon de $T_2$ envoie à Bil un élément de $\{0;1\}$ au moment où ils se croisent. Bil utilise alors son téléphone pour transmettre en une seconde (dans son repère) le bit reçu à la queue de $T_1$, la voyageuse $Lea$. Ceci se passe un peu après l'instant $e$, disons $e+5$ seconde. Lea reçoit donc le bit $x$ disons vers $e+10$ secondes. Puis elle attend (environ un an, un peu moins) qu'arrive à son niveau la locomotive de $T_2$. Quand ladite passe, elle envoie au conducteur de $T_2$ le message $1-x$.

    Plaçons-nous maintenant dans le repère de $T_2$. Lorsque son conducteur Tom croise la queue de $T_1$, il reçoit le bit $1-x$ de Lea. A ce moment, dans son repère, la tête de $T_1$ se trouve un mètre plus loin, et il faudra attendre au moins 8 mois (en fait près de 12) avant que la tête de $T_1$ croise la queue de $T_2$. Tom envoie tranquillement à Georgette (habitant la queue de $T_2$) le bit $1-x$ avec son téléphone. Georgette le reçoit quelques secondes après l'émission ces dates étant données dans le repère de $T_2$. Ensuite Georgette va se faire un café et dormir un peu, car elle a presque une année à attendre avant de transmettre à Bil le bit $1-x$. Presque 1an plus tard, au moment où elle croise Bil, elle transmet $1-x$. Donc $x=1-x$. Contradiction.


    Moralité: l'un des deux téléphones n'a pas marché.
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  • Merci pour cette histoire ! Mais mon problème est bien avant. Ce que moi je dis, c'est que je vois une grosse différence entre : avoir un dispositif $X$ qui envoie un bit plus vite que la lumière et avoir un dispositif $Y$ avec plein de touches dont je sais que si j'utilise les touches de la bonne façon (qui m'est inconnue), je peux envoyer un bit plus vite que la lumière.

    Pour concevoir une expérience qui essaie de prouver que $X$ ne marche en fait pas, on peut fabriquer plein de dispositifs comme $X$, essayer d'envoyer un bit plus vite que la lumière un grand nombre de fois. S'il y a un échec, on dit que la machine échoue, et sinon, on dit que la machine semble faire ce qui est annoncé.

    Pour concevoir une expérience qui essaie de prouver que $Y$ ne peut en aucune façon être utilisé pour envoyer un bit plus vite que la lumière, là, je ne sais pas comment faire. Tu sembles l'avoir expliqué, mais je n'ai pas compris.

    Mais bon, je ne suis même plus sûr que je vois où tu veux en venir. On peut reprendre du début ?
  • Je ne comprends pas trop ton problème. Dans le cas présent, on a beaucoup plus: on a que quelle que soit la touche $x$ du clavier, il existe un comportement tout à fait simple $f(x)$ qui, effectué dans un RR espace, va établir que $x$ n'est pas une bonne touche (j'ai remplacé "bonne façon" par "bonne touche" pour simplifier). La fonction $f$ est très simple et donnée par la preuve du théorème.

    Et la conclusion scientifique est qu'il n'y a pas de bonnes touches, c'est tout.
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  • Je vais numéroter mes questions :

    1) Qui est cette $f$ dont tu parles dans ton dernier post ? Dans la preuve du théorème, dans ta thèse, il y a bien une $f$, mais elle prend deux touches en argument. Je ne sais pas qui est $f$, je t'assure !
    Dans un de tes posts, plus haut, tu écris $ \forall f \in A^B$ et je ne sais d'ailleurs pas plus qui sont $A$ et $B$ (pour moi, $A$ et $B$ étaient des touches). Je n'arrive pas du tout à suivre ce que tu veux me dire, c'est pourquoi je voudrais qu'on reprenne depuis le début.

    J'ai relu le passage en question, dans ta thèse, et j'ai une objection :
    Christophe a écrit:
    Le fait qu'il n'existe pas plusieurs histoires possibles qui racontent les réponses possibles que $T$ offrira aux input est simplement l'expression "en français" que pour tout couple $(x,y) \in E^2$ il existe un unique couple $(r,s) \in F^2$ tel qu'il existe une histoire qui raconte que la réponse que $T$ fournit à l'input $(x,y)$ est $(r,s)$

    C'est là où je ne suis pas d'accord/comprends pas, d'où la question suivante :

    2) Si je fabrique deux téléphones comme $T$, est-ce que je suis sûr que si, sur le premier, on met comme input $(x,y)$ et que la réponse est $(r,s)$, et que si sur le deuxième, trois jours après, j'appuie sur $(x,y)$, je tomberai encore sur $(r,s)$ ? Bien entendu, c'est une supposition que tu fais ou non, a priori, sur ce qu'est un téléphone.

    3) Je reformule 2) : est-ce que ce qui s'affiche "ne dépend que" de ce qui est appuyé sur les touches, ou peut dépendre d'autres variables, éventuellement cachées ?

    Voici ce que je comprends :
    a) Si on me vend un téléphone (claviers : $\{0,1\}$ et $\{0\}$ ; écrans $\{0\}$ et $\{0,1\}$) comme garantissant une injection virtuelle de $2$ vers $1$, alors il est facile pour moi de démontrer qu'il ne marche pas comme prévu, et ce en un coup : je regarde d'abord ce qu'il affiche du côté récepteur (disons $x$), et j'appuie ensuite sur la touche $1-x$ du côté émetteur. Le téléphone n'a donc pas respecté la garantie.
    b) Si on me vend un téléphone comme $graphe(f)$-garanti où $f : E^2\times F^2$ m'est donnée, alors il est facile pour moi, en regardant la tête de $f$, de démontrer qu'il ne marche pas comme prévu, en appliquant le protocole avec Alice et Bob à la page 56 de ta thèse (tu peux cliquer ici pour y accéder :-D) qui est peu ou prou celui pour démontrer qu'un téléphone n'est pas $InjVirt(2,1)$-garanti.
    c) Si, par contre, on me vend cinquante téléphones ($T_i$ pour $i$ allant de $1$ à $50$) comme étant $R$-garantis avec $R$ m'étant donnée, qu'on me dit que le monde est déterministe et que par conséquent, pour tout $i$, $T_i$ est en fait $f_i$-garanti pour une $f_i$ qui peut dépendre de $i$, et qu'on ne me donne pas les $f_i$, eh bien, là, je vois mal comment me débrouiller pour faire un protocole qui démontre qu'au moins un des $T_i$ n'était en fait pas $f_i$-garanti.
    d) Si, enfin, on me vend cinquante téléphones ($T_i$ pour $i$ allant de $1$ à $50$) comme étant $R$-garantis avec $R$ m'étant donnée, qu'on me dit que le monde est déterministe et que par conséquent, pour tout $i$, $T_i$ est en fait $f$-garanti pour une $f$ qui ne dépend plus du téléphone mais qui m'est inconnue, alors peut-être que ce que tu décris dans ce fil peut permettre de se convaincre qu'il y a au moins un de ces téléphones qui n'est pas $f$-garanti. Mais je trouve que l'hypothèse que les téléphones soient en fait tous $f$-garantis très forte.

    Je ne sais pas si on est dans le cas c) ou d). Depuis le début, je pensais qu'on se trouvait dans le cas c). C'est peut-être ça, mon erreur ! Est-ce que tu te places dans le cas d) ?
  • GA a écrit:
    Je ne sais pas si on est dans le cas c) ou d)

    Ni l'un ni l'autre :-D , c'est (b)...
    GA a écrit:
    alors il est facile pour moi, en regardant la tête de f, de démontrer qu'il ne marche pas comme prévu, en appliquant le protocole avec Alice et Bob à la page 56 de ta thèse

    Et bin, là, tu remplaces ça par les trains relativistes.
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  • Dans les cas a) et b), c'est bon, j'ai compris. Je n'ai aucun problème là-dessus. Si tu me vends un téléphone $graphe(f)$-garanti et que tu me dis qui est $f$, si je prends un crayon et un papier, je vais vite arriver à trouver les touches sur lesquelles appuyer qui vont démontrer que ton téléphone n'est en fait pas $f$-garanti.

    Maintenant, si moi je te donne un téléphone $R$-garanti (pour la $R$ qu'on a décrite maintes fois et qui fait croire à l'existence d'une matrice $3\times 3$ tel que le produit sur chaque ligne fait $1$ et le produit sur chaque colonne fait $-1$), comment vas-tu t'en servir pour démontrer quoi que ce soit sur l'indéterminisme de la nature ?
    Attends, je crois que j'ai une idée :
    Supposons que moi, je croie au déterminisme, et donc que le téléphone en question est en fait $f$-garanti pour une certaine $f$, et que je te mette au défi de me prouver le contraire. Tu me dis "OK, très bien ! Bon, à supposer que notre monde soit déterministe, il existe bien une $f$, même si nous ne la connaissons pas. Je vais commencer par te laisser choisir une $f$ de ton choix, et je vais te montrer que ton téléphone n'est pas $f$-garanti". Moi, je choisis une $f$, toi, tu regardes la méthode que tu décris dans ta thèse, et tu annonces : "Bon, eh bien je suis capable de trouver des touches telles que si on appuie dessus, cela ne va pas suivre $f$". On fait l'expérience, et à moins de violer la relativité, ce que tu affirmes se produit. Je dis ensuite : "Ouais OK, bon ben c'était pas cette $f$-là, ça ne prouve rien !". Toi tu réponds "Ben si tu veux, on refait l'expérience ! Donne-moi un autre téléphone, et une $g$ de ton choix, et de nouveau je vais te prouver que ton téléphone n'est pas $g$-garanti, ou alors on verra sous nos yeux la relativité violée". Rebelote ! Et si on procède ainsi toute la journée, à la fin, je serai convaincu ou alors on aura vu sous nos yeux la relativité violée.
    C'est bien ça ?
  • Oui c'est ça. A vraui dire, pas besoin même de le refaire plusieurs fois, c'est un protocole central en sciences que de faire jouer le "vrai" contre le "faux". S'il y a une $f$ qui marche, il est du devoir de celui qui prétend ça de la fournir. Il devrait donc être en mesure de remporter le match en jouant bien. Et tu as bien compris qu'il ne peut pas.
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  • Bon, je suis content d'avoir compris ! Par contre, je ne comprends pas trop pourquoi on est en droit d'exiger de la personne qu'elle fournisse une $f$ qui marche si elle pense qu'il en existe une. Et si elle venait en affirmant qu'il n'est pas possible qu'il n'en existe pas une ?

    HS : Est-ce que ta messagerie du forum marche ? Je t'ai envoyé un message il y a une semaine, mais j'ai lu quelque part que tu disais qu'elle ne marchait pas.
  • Elle marche très mal, j'ai par exemple actuellement 6 MP que je ne peux pas lire car je ne peux accéder à la inbox. Par contre, quand je reçois une notif, je peux cliquer directement et lire.
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  • Bon, je reviens encore un coup à la charge : pourquoi cette sombre histoire de trains ? Si on me donne un téléphone prétendument $f$-garanti (avec $f$ fonction) qui n'est pas trivial, alors il existe $x$ tel qu'il existe $y$ et $y'$ tels que $f(x,y) \not = f(x,y')$ (ou alors la même chose en symétrique). Soient de tels $x,y,y'$. Pour démontrer que le téléphone n'est pas $f$-garanti, on appuie sur $x$ du bon côté, on voit apparaître $z$, et ensuite on appuie de l'autre côté celui $t$ parmi $y$ et $y'$ qui est tel que $f(x,t) \not = z$. Pas besoin de s'approcher de la vitesse de la lumière, ou autre !
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