Intuitionnisme et fonctions continues

J'ai entendu qu'en maths intuitionnistes, il n'est pas possible de démontrer qu'il existe une fonction non continue de $\mathbb{R}$ dans $\mathbb{R}$, et je voudrais le démontrer avec vos indications.

0) C'est "facile" ? GaBuZoMeu a parlé une fois d'un modèle avec des faisceaux, ce que je ne considère pas comme "facile", même si atteignable avec du travail.

1) J'imagine qu'il s'agit de construire un modèle où toutes les fonctions sont continues. Mais un modèle, pour la logique intuitionniste, qu'est-ce que c'est ?

2) L'énoncé dont je veux montrer qu'il n'est pas démontrable, dans quel langage faut-il le considérer ? Dans un langage à trois sortes, réels, ensembles de réels et fonctions, avec $0,1,+,x,\leq, \in, \subseteq$, un symbole de fonction correspondant à l'évaluation d'arité $(fonction, réel)$ et donnant des réels (d'ailleurs, dans ce cas, qu'est-ce que je prendrais comme axiomes, en plus de demander que les réels forment un corps ordonné archimédien complet ?), ou alors dans le langage de ZF ? Ou encore autre chose ?

Je ne cherche pas de solution toute faite, mais des pistes, sans quoi ça me gâcherait le plaisir !
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Réponses

  • De mon téléphone : GBZM parlait d'un topos ou un certain objet est revendiqué s'appeler IR. Par ailleurs un article que j'ai trouvé je ne sais plus par qui il y a 2ans de mon téléphone écrit en 1980 construit (en le disant vite) un modèle de ZF à partir de l'univers et d'un topos dedans stable par "petites limites)

    Je te precesireai ça d'un PC.

    Il reste les questions documentaires que je n'ai moi même (de l'HP) pas résolues à l'époque: l'énoncé du langage L(in) habituel qui traduit formellement exactement ton énoncé concerne-t-il et est-il vraiment ce que par ailleurs les algébristes "voient" avec leur "IR" ad hoc. (Autrement dit la évaleur dans l'algèbre de Heyting du topos évoqué par GBZM de ton énoncé telle que définie dans l'article de 1980 est-elle "le pur vrai" du topos? En principe ça devrait car c'est un énoncé presque borné mais bon le diable est dans les détails.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • @G.A. : tu faisais référence à cette discussion ?
  • Il y a eu plusieurs autres fils j'essairai de te les retrouver. Bon en tout cas la question de ZFI => Ceci ou cela (ça formalise ta question) n'est pas évidente. A moins de trouver des articles qui ont repris celui dont je te parle et fait un bilan plus complet puisque cet article à lui seul est un peu léger pour pouvoir prétendre que "si ZFI démontre P alors tout topos ("complet") donne*** la valeur vraie pur à l'énoncé P ".

    Cela est dû au droit qu'on a de ne pas juste manipuler des énoncés bornés.

    ZFI abrégé ZF - tiers exclus

    *** au sens défini dans ce 1980 article (le nom était proche d'un truc du genre "Fournier")
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • C'est cet article ?
    christophe a écrit:
    si ZFI démontre P alors tout topos ("complet") donne la valeur vraie pur à l'énoncé P

    C'est pas la "base" de ce qu'on voudrait pour un ensemble d'interprétations ? Le mot est "correction", non ?
  • Voilà, bravo à toi, c'est très exactement cet article!!! Bon ce n'était pas Fournier mais Fourman, mais pour un truc vécu entre 2 électrochocs il y a 2ans ma mémoire ne m'a pas trop trahi.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • GA a écrit:
    C'est pas la "base" de ce qu'on voudrait pour un ensemble d'interprétations ? Le mot est "correction", non ?

    Oui, mais la littérature n'est pas du tout claire à ce sujet (ou alors ma manière de jouer au documentaliste est mauvaise) de la relation "topos" et "modèle de ZF". La preuve d'ailleurs dans l'article, un tel article ne pourrait pas exister si les choses allaient bien (1980 quand-même).

    Attention, je ne dis pas que ça ne marche pas, mais je dis que tous les échanges que j'ai eus avec les gens n'ont jamais permis d'aboutir (à moi) à la conclusion que "tout va bien").

    Les toposeurs n'utilisent pas les topos pour y évaluer des énoncés mathématiques normaux, ils se restreignent DRASTIQUEMENT aux seuls énoncés "vides" c'est à dire "bornés" (qui sont absolus, donc "vides" pour les ensemblistes). D'où la pertinence de la publication de l'article de Fourman (il annonce bien quelque chose qui a un "gros conetnu"). Bien sûr, leur justification est que les matheux hors logique du quotidien font des maths-à-énoncés-bornés, donc ils sont légitimes. Mais du point de vue logique, ça ne résout pas le problème de la consistance de ZFI + machintruc que des gens comme toi voudraient peut-être savoir.

    J'ai eu aussi (et hélas, ma vélléité m'a conduit à reporter depuis 14 mois au lendemain) un indice très très fort qu'il y a un bug dans tout ça, donc certainement (à moins que ZF ne soit contradictoire) un passage subtil et discret qui fait se séparer deux visions de la problématique, mais je n'ai pas trouvé où avec mon survol philosophique superficiel, voici cet indice: l'été 2016, un intervenant alesha m'a fait remarquer que $a=b$ implique linéairement $(a=b$ ET $a=b)$ au sens du "et" comment dire "fort", à savoir le produit tensoriel logique (l'autre "et" est inoffensif, $a=inf(a,a)$)
    Or on peut exprimer très facilement et robustement toutes les surlogiques (affines, intuitionnistes, classiques) à partir de la linéaire (en fait la "bonne" logique est la linéaire et les autres sont des "théories axiomatiques", c'est ça "la bonne" vision des choses disons). Mais mais mais, la remarque d'Alesha conduit, en rajoutant une tout petit petit petit truc à

    [size=x-large]$$ZFL^*\Rightarrow ZF\ (Alesha's\ theorem)$$[/size]

    petit truc qu'a priori personne n'aurait l'idée de nier. (ZF désigne ZF + logique classique, et ZFL désigne ZF linéaire et l'étoie est une espèce d'ajout d'un "rien du tout du genre affine" qui change tout)

    Or, comme il n'est pas vrai que tous les topos (complets**) sont des modèles de ZF (ZF classique), et comme il est vrai que ZFL implique ZFI ZFI => ZFL (edit: coquille), il y a un problème quelque part quand on dit et quand l'article semble confirmer que $ZFI\subset \cap_{T\in ToposComplets} TheoriePurVrai(T)$

    ** stable par "petites limites" (et pas juste par limites finies)

    * Précision: grace à l'extensionnalité, toute phrase peut se mettre sous la forme $a=0$
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Précision pour gagner du temps (pour pas que tu vois le théorème d'Alesha comme un truc ultralong à prouver): si $P$ est une phrase quelconque alors "classiquement" (je ne précise exprès pas la logique), $P$ est "très proche" de la phrase $1 = \{x\mid x=0\ et\ P\}$. Je ne précise exprès pas le "et".

    Par ailleurs (je recopie l'argument de alesha de l'été 2016) le fait que $a=b$ entraine $(a=b$ et $a=b)$ vient du fait que si $a=b$ alors si $a=a$ et $a=a$ alors $a=b$ et $a=b$.

    Concernant le fait que $non(non(a))$ => $a$ est automatiquement récupéré sans effort, cela provient du fait que $non(non(a))$ est linéairement automatiquement vrai (le truc n'est pas appelé non), donc il n'y a rien à faire et qu'avec $\forall X: X$ => $X\otimes X$, non seulement ça devient le "non" habituel, mais en plus on a le tiers exclus. Donc tu vois, ce n'est pas simple de s'y retrouver, il y a un vrai recensement à faire. C'est un travail de fourmi.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Il semble que le livre de MacLane et Moerdijk, Sheaves in Geometry and Logic, répond à ma question, page 324 !
    Je posterai un compte-rendu de ma lecture si j'en ai le courage.
  • Bonjour Georges,

    j'ai hâte que tu nous dises comment ce livre présente qu'on a besoin de sortir de l'intuitionnisme pour justifier l'existence de la fonction f telle que pour tout réel r : f(r) est la borne supérieure de l'ensemble des rationnels s tels que ((s<0 et s<r) ou (s>1 et s<r))

    cordialement. Talal
  • @talal : je ne m'y connais pas assez, mais attention : en plus d'exhiber une fonction il faut réussir à prouver intuitionnistement qu'elle est non continue ! C'est peut-être là que se cache la difficulté. Sinon je fais pareil pour l'hypothèse du continu : j'exhibe $\omega_1$, et dans un modèle où HC est fausse, c'est bel et bien un contrexemple à HC.
  • Bon, je n'ai pas compris grand chose... Comme tu as l'air intéressé.e, je partage au moins mes idées vagues sur tout ça.

    Prenons une sous-catégorie pleine $T$ de la catégorie des espaces topologiques qui est fermée par limites finies, qui est telle que si $X$ est un objet de $T$, tout ouvert de $X$ est un objet de $T$, et tel que $T$ contient l'espace topologique $\mathbb{R}$.
    On définit une topologie de Grothendieck dessus, et ça donne un site. On considère alors $\mathcal{T}$, le topos des faisceaux sur ce site.
    Alors on parvient à démontrer que l'objet $\mathbb{R}_{topos}$ des réels de Dedekind de ce topos est isomorphe au faisceau qui à $X$ espace topologique associe l'ensemble $C(X,\mathbb{R})$ et qui à une flèche $X \rightarrow Y$ associe l'application de composition $C(Y,\mathbb{R}) \rightarrow C(X,\mathbb{R})$. De même, on arrive à démontrer (avec deux coups de Yoneda) que l'objet des "fonctions de $\mathbb{R}_{topos}$ dans lui-même" est en fait isomorphe au faisceau qui à un espace topologique $X$ associe l'ensemble $C(X\times\mathbb{R},\mathbb{R})$. Et après, on regarde ce que tout ça veut dire dans le "langage de Mitchell-Bénabou" et pouf c'est bon.

    Je suppose qu'il faut, en amont, un travail d'auto-persuasion pour accepter qu'un topos puisse représenter un univers d'ensembles et que les objets des réels de Dedekind soient les analogues de notre "bon vieux" $\mathbb{R}$.
  • Bonjour et merci Georges,

    j'essaierai de choper cet extrait du livre. Mais ta dernière phrase est vraiment essentielle. Du peu que je le connaisse, le langage interne est très limité (quantifications bornées uniquement), et le $\R$ évoqué n'est pas le $\R$ qu'on voudrait vraiment, mais c'est une question de gout. Ce qui serait plus intéressant c'est de savoir si on peut ou non prouver l'existence de fonctions discontinues sans utiliser le raisonnement par l'absurde, mais en ne supprimant rien d'autre (à part aussi l'axiome du choix bien sûr) de ce qu'on a l'habitude d'utiliser.

    Bonne journée, Talal
  • @talal : Ben si tu trouves une référence là-dessus, ça m'intéresserait beaucoup !
  • Ôtez-moi un doute: dans ZFI on peut tout de même définir de $\R$ dans $\R$ la fonction qui à $x$ associe $0$ si $\neg x > 0$ et $1$ si $\neg \neg x > 0$? Et pis cette fonction, elle va bien être intuitionnistement discontinue?
  • Bonsoir Shah,

    Ah naaaan, Shah if then else c'est du pure sacrilège en intuitionnisme!!!! enfin, on ne peut surtout pas le définir. C'est bien pour ça que j'ai "rusé" pour ma fonction précédente.

    Mais il y a un moyen simple de comprendre "ZFI" en première lecture, pas besoin des topos. imagine juste que $\{vrai; faux\}$ a été remplacé par une topologie $T$ fixée une fois pour toute. Les ensembles ne sont plus des applications à valeurs dans $\{vrai; faux\}$ , mais des applications à valeurs dans $T$. Rien ne change (à part l'extensionnalité que tu n'as plus, tu peux la retrouver de force, mais ça équivaut à ressusciter superman), en particulier, toute fonction de support "pas trop grand" est un ensemble (enfin "existe") comme dans ZF

    Avec ça, essaie de faire un "if..then..else", tu vas t'amuser.

    Bonne nuit
    Talal
  • Il me semblait que puisque pour tout $A$ on a $\neg A \lor \neg \neg A$ on pouvait faire un ifthenelse à condition de se placer dans ce cas-là.
  • oulaaaaaaa, comme tu y vas, bien sûr que non, on n'a pas nonA ou non non A en LI ;-)

    Peut-être pensais-tu à non(non(A ou nonA)), mais ce n'est pas du tout la même chose!
  • Ah peut-être me suis-je embrouillé les pincettes.
  • J'ai dû confondre avec $(\neg \neg \neg A) \to (\neg A)$.
  • Ouaos j'ai fait un gros mélange avec la traduction par double négation, désolé.
  • J'ai pensé à deux autres exemples:
    -la partie entière,
    -la fonction qui à $x$ associe le cardinal de $\{x,-x\}$.
    Pour la deuxième je me suis aperçu que je n'arrive pas à prouver intuitionnistement qu'elle est à valeur dans $\{1,2\}.
  • Exemples de quoi ?
    Comment définis-tu la partie entière sans test d'égalité ?
  • Ben le plus gros entier plus petit que l'argument.
  • C'est bien ce que je disais : tu utilises que $\vdash \forall x\ (x<0 \vee x=0\vee x>0)$, et s'il y a une chose sur laquelle les intuitionnistes sont d'accord, c'est que les réels ne satisfont pas ça.
  • Ok et avec l'astuce de Talal?
  • Et du coup on na pas non plus $\vdash \forall x |\{x,-x\}|=1 \lor |\{x,-x\}|=2$, où $|E|=n$ veut dire "il existe une bijection entre $E$ et $\{1, \dots, n\}$?
  • Bonjour Shah,

    de toute façon, il faut reprendre tout au départ. Dans la plupart des raisonnements classiques il y a de longs extraits intuitionnistes qui peuvent abuser.

    Mais la question de savoir comment toute la théorie des ensembles en mode intuitionniste est tout à fait différente puisqu'on n'a pas a priori les objets qui semblent les plus usuels.

    Un exemple que j'aime bien est la question (je n'ai jamais pris le temps de réfléchir à la réponse): existe-t-il un ensemble $E$ égal à $E^E$ et qui n'est pas inclus dans un ensemble fini? Peut-on répondre "non", même en ZF intuitionniste (on ne suppose pas AF)?

    On en a déjà parlé, le théorème $\forall x\in R: [x^2=0\to x=0]$ utilise un raisonnement par l'absurde assez inévitable par exemple. Le livre qu'on avait évoqué à l'époque, titre = "géométrie synthétique", fait toute l'analyse avec l'idée que toutes les fonctions sont non seulement continues, mais en plus de ça, localement affines, donc infiniment dérivables, ceci étant dû au fait que pour les "infiniment petits" $e$ tels que $e^2=0$, $f'(a+e) = f(a) + f'(a)\times e$. Je ne me rappelle pas le statut exact, s'il est connu, de cette théorie (je ne sais plus si elle est vraiment consistante avec ZFI ou si elle est juste "satisfaisante avec un modèle-topos".

    cordialement, Talal
  • Le problème avec la fonction de talal, c'est : qu'est-ce que la borne supérieure d'une partie de $\Q$ ?
    Il y a un modèle qu'il est utile d'avoir en tête : l'objet "réels de Dedekind" dans le topos des faisceaux sur un espace topologique $X$. C'est le faisceau sur $X$ des fonctions continues à valeurs dans $\R$. L'objet "rationnels", c'est le faisceau constant $\Q$. Un sous-faisceau de ce faisceau constant n'a aucune raison d'avoir une borne supérieure. Par exemple, prenons $X=\R$, et le sous-faisceau du faisceau constant $\Q$ dont la fibre en tout $x<0$ est $]-\infty, 1] \cap \Q$ et la fibre en tout $x\geq 0$ est $]-\infty, 0] \cap \Q$. Aucun réel de Dedekind dans le topos n'acceptera d'être la borne supérieure de ce sous-faisceau, à cause de ce qui se passe au voisinage de l'origine.
  • Pardonne ma naïveté, mais donc en particulier intuitionnistement il n'est pas vrai que toutes parties majorée de $\R$ a une borne supèrieure?
  • Ce n'est pas vrai en général pour l'objet "réels de Dedekind" d'un topos.
    De même qu'on n'a pas de théorème des valeurs intermédiaires, du moins sous sa forme classique (par exemple un polynôme $P$ du troisième degré tel que $P(-1)<0$ et $P(1) >0$ n'a pas forcément de racine réelle).
  • Est-ce que, philosophiquement, il n'est pas un peu disons dérangeant de devoir passer par une construction classique pour donner une interprétation à la logique intuitionniste, alors que celle-ci est justement censée rendre compte de nos intuitions (historiquement)?
    Je pense que je ne m'énonce pas très clairement, pourtant je conçois bien ce que je veux dire.
  • Je n'ai pas de position philosophique à ce sujet. Je me contente fort bien d'avoir une sémantique avec laquelle je peux travailler.
  • @Shah : Si tu veux dire que l'objet des réels de Dedekind d'un topos n'est pas conforme du tout avec l'intuition qu'on se fait des "nombres réels", je suis bien d'accord avec toi...
  • Comme disait Lawvere, "The theory of topoi is the basis for the study of continuously variable structures" . Des réels qui varient continûment, autrement dit des fonctions continues à valeurs réelles, c'est ça l'objet des réels de Dedekind dans un topos de faisceaux.
  • C'est bien ce que je me disais : si on n'est pas potes de Lawvere, on ne peut rien y comprendre.
  • Moi qui croyais qu'une théorie, c'était un ensemble d'axiomes et le jus qu'on en tire. Mais non, c'est un slogan prononcé en petit comité !
  • Heu, Georges, pourquoi te mets-tu à dérailler ? Pourquoi parles-tu de "petit comité", de "potes de Lawvere" ? Quelque chose qui ne tourne pas rond ? La citation de Lawvere vient d'un article aux Proceedings de Logic Colloquium 73.
  • Ben, je n'ai pas compris à quel moment il est devenu acceptable d'utiliser un argument d'autorité dans une discussion mathématique.
    Quand j'utilise "petit comité", et "potes de Lawvere", c'est bien entendu pour désigner une forme d'isolement sociologique causant un faible ruissellement de certaines connaissances vers les néophytes
    Pourquoi ne pas avoir donné directement la référence ?
    Croyais-tu que le slogan nous convaincrait ? N'est-ce pas (plus ou moins) Lawvere qui a inventé les topos élémentaires ? Tu es en train de nous dire : "Lawvere voulait des réels qui varient continûment, voilà des réels qui varient continûment." Eh bien, moi, ça ne m'apprend rien du tout.
  • Tu te plaignais d'un défaut d'intuition, et j'essayais d'y remédier. Mais tu es tellement énervé et tu as une attitude si négative que je vois bien que ça ne sert à rien. Si ça continue comme ça, je quitte les fils sur ces sujets, et puis basta.
  • Ok, je me calme. J'ai la conviction que les meilleures intuitions sont celles qu'on acquiert soi-même. Je veux être convaincu (de ce qui suit ou du contraire, d'ailleurs) qu'un topos (objet formel) peut être considéré comme un "univers intuitionniste" (idée informelle) d'ensembles, et qu'un objet de Dedekind (objet formel) peut être considéré comme un ensemble de réels intuitionniste (idée informelle). Apprendre que Lawvere envisage les topoï comme des structures variables ne m'aide pas pour atteindre mon but. Mes réactions épidermiques ne sont évidemment pas dûes qu'au forum. Je vais me reposer un peu, je reviendrai à ces discussions ce week-end.
  • Georges a écrit:
    Je veux être convaincu (de ce qui suit ou du contraire, d'ailleurs) qu'un topos (objet formel) peut être considéré comme un "univers intuitionniste" (idée informelle) d'ensembles, et qu'un

    Et bin, j'ai essayé de m'en convaincre sans jamais y arriver :-D

    en fait, c'est plus compliqué que ça, j'ai même cru un jour que j'arriverais à m'en convaincre, en particulier grace à 2 articles , l'un de Forman en 1980 l'autre de (mince oublié) en 74. Et en fait, aucun ne m'a convaincu même si celui de 1980 était fort puisqu'il réalise ZF en imitant la construction cumulative des $V_\alpha$.

    Hélas, c'est ... alesha, intervenant dans l'autre fil qui m'a donné le coup de gràce et permis de prouver que ça ne marche pas (donc je suis définitivement convaincu du contraire par cette preuve), d'ailleurs faut que je la publie sur HAL, je l'ai vérifiée durant les dernières vacances de Toussaint.

    En fait, il y a une subtilité qui est la différence entre parler avec des fonctions qu'on compose (et rien d'autre!!!) ou parler avec $\in$. Les habitués ont donc, dans la mesure où ils viennent de "l'autre bord" (ie ne connaissant pas ou peu ZF, etc, mais connaissant bien les maths) trouvé ça magique. Ca semble l'être, mais on ne retrouve pas complètement la théorie des ensembles, même intuitionniste (autrement dit, il ne faut pas se tromper sur ce que dit l'article de Forman). Disons qu'on la retrouve partiellement et suffisamment pour que les diffuseurs ensuite disent "sans RPA, on ne peut construire de fonctions discontinues"

    En fait, tout le secret de ce pont infranchissable vient de l'extensionnalité. La "vraie" théorie des ensembles intuitionniste ne peut pas vraiment être extensionnelle (sauf à forcer tellement qu'on va gagner la logique classique avec). Or la technique toposique (et ne me demande pas pourquoi, je n'ai pas encore vraiment compris) permet d'avoir l'extensionnalité de manière transparente (mais on perd le vrai $\in$, le vrai $\R$, etc)

    D'où ce sentiment de malaise que tu ressens. Il manque de tout petits quelque choses d'un côté ou de l'autre pour faire se rejoindre les trucs, mais ils s'approchent tellement que pour aller vite on peut dire plein de trucs du genre de ceux qui t'ont attiré vers cette étude.

    A noter que c'est assez remarquable que le toposisme, en virant $\in$ et traitant les fonctions comme des flèches parvienne à ne pas être victime de extensionnalité => logique classique. Ce n'est pas une "faiblesse". Par contre, c'est platonicien, ce n'est pas du tout aussi "constructif que certains pourraient l'espérer.
  • Du coup si je comprends bien dans un topos certains axiomes de ZFI ne sont pas vérifiés, car sinon le topos serait soit non-extensionnel, soit classique, or il n'est ni l'un ni l'autre.
    À part ça, on sait précisément quels axiomes posent problème?
    Ou peut-être que je ne comprends pas bien. Ou peut-être qu'il est n'est pas vrai que (je comprends bien ou je ne comprends pas bien).
  • Bonjour shah. C'est pire que ça : dans un topos à strictement parler, la PLUPART des énoncés (à savoir ceux qui ne dont pas complètement bornés ne sont carrément PAS DU TOUT INTERPRETABLES OBJECTIVEMENT.

    Ce qu'on peut faire, mais c'est hélas connu depuis la nuit des temps, c'est construire DANS le topos (moyennant les habituelles hypothèses de grands cardinaux) des "zones" qui sont modèles de ZF(I) autrement dit c'est de la consistency strength. C'est exactement comme en arithmétique où tu peux construire des "modèles canoniques" (mais évidemment pas les bons) de ZFC + ce que tu veux (les branches les plus à gauche de tes theories préféreés).

    Et oui extensionnalite + logique linéaire => logique classique (or logique linéaire bien plus faible et incluse dans logique intuionniste). Ce fait nous avait été signalé par alesha qui navigue en ce moment sur le forum.

    Cordialement. Talal
  • Rebonjour,

    il y a une façon simple de ne pas se laisser trop abuser quand on a d'abord été familier avec les ensembles et non avec des théories appliquées.

    Le topos des ensembles, il vaut mieux ne pas le voir comme tous les ensembles comme objets et toutes les fonctions comme flèches. Il me semble préférable d'en prendre un squelette: les objets sont uniquement les cardinaux (ie les ordinaux ne s'injectant pas dans un de ses éléments, par exemple) et les flèches les applications d'un cardinal dans un autre.

    Le voir comme ça permet peut-être d'éviter des attentes chimériques excessives. Par exemple, si $a,b$ sont des cardinaux infinis avec $a\leq b$, le seul objet mobilisable dans un produit cartésien c'est $a$ lui-même. Ce sont les flèches qui assurent tout le travail et qui sont les chevilles ouvrières dans l'histoire. De même, c'est le même objet qui sert à la fois de $a^b$ et $2^a$ (noté $\Omega^a$ ou $P(a)$ dans un topos). Là encore, tout repose sur les flèches.

    Dans ce contexte la seule façon réellement honnête (ça ne veut rien dire) de se donner un ensemble, c'est de se donner un relation binaire sur un "support" (j'appellerai ça un "nom d'ensemble) , qui est un cardinal et d'imaginer en pensée qu'on s'intéresse au transitive collapse de ladite. Sauf que, par théorème, seuls les bien fondés ont un transitive collapse prouvable en théorie classique des ensembles et seul un axiome "arbitraire" par exemple peut forcer deux "atomes" (des ensembles $x$ vérifiant $x=\{x\}$) à être égaux.

    Evidemment, on peut exprimer (c'est assez long) qu'un ensemble (désigné par son nom) appartient à un autre (idem), puisque ce n'est qu'une affaire de morphismes. Mais en l'absence de bonne fondation, il faut ajouter des axiomes, dont on ne sait pas s'ils seront supportés par le topos ou s'il les recrachera violemment (un topos n'étant pas une théorie mais un modèle, il décide de lui-même, on ne peut pas le forcer).

    Un article de 1974, écrit par Ozius, a exploité ça pour reconstruire l'univers à partir de son topos. Mais, dans mon souvenir, il ne s'étale pas ensuite sur l'extrapolation, à savoir "appliquons ce processus à n'importe quel topos pour regarder "l'univers exotique" que ça donne".

    Cordialement,
    Talal
  • Je trouve ça marrant de vouloir à toute force retrouver des ensembles dans un topos, comme si c'était le but ultime.
  • En fait c'est pragmatique plus que philosophique disons que ça peut peut être aider les personnes habituées aux ensembles.
  • Mais du coup tu n'as pas répondu à ma question: on sait (enfin, tu sais) quels axiomes ne marchent pas?
  • Ce ne sont pas les axiomes, c'est le langage. Mais de toute façon non je n'ai pas identifié au millimètre près ce qu'on ne peut pas utiliser dans les topos pour prouver que linéaire implique classique donc que intuitionniste implique classique. Entre autre car il y a DEUX façons de traduire : une bonne et une mauvaise, l'intuitionniste en linéaire, soit par prolongement pur et simple soit par réécriture du implique avec les exponentielles. Or les exponentielles déraillent (elles ne sont pas compatibles avec l'ensemblisme puisque, poussées à bout , elles impliquent qu'il y a au moins autant de valeurs de vérité que d'objets dans l'univers.
  • GaBuZoMeu a écrit:
    Je trouve ça marrant de vouloir à toute force retrouver des ensembles dans un topos, comme si c'était le but ultime.

    Je ne sais pas si tu parles pour moi, mais je vais répondre comme si. Ma question initiale était claire (j'espère) : je veux savoir ce qu'il y a sous le slogan "en maths intuitionnistes, on ne peut pas démontrer l'existence de fonctions non continues de $\mathbb{R}$ dans $\mathbb{R}$". Si, sous ce slogan, il n'y a que "ben tous les essais qu'on a envisagés utilisent le tiers-exclu, et on n'arrive pas à s'en débarrasser", je trouve que c'est un peu léger. Je ne pense pas que les logiciens et logiciennes de ce forum pourraient se satisfaire d'une réponse comme ça ; et j'espère qu'elles ou ils m'auraient mis au courant plus vite s'il ne s'agissait que de ça.

    La seule solution que j'ai imaginée, c'était de trouver un langage suffisamment riche et une théorie pour exprimer la phrase "toutes les fonctions sont continues", de définir une classe d'interprétations (correctes, c'est-à-dire qui donnent la valeur vrai aux trucs démontrables) de ce langage qui rende, dans certains cas, cette phrase satisfaisable par un modèle, et d'être convaincu que les choix que j'ai faits (langage+théorie+classe d'interprétations) soient suffisamment arbitraires, de sorte qu'on n'ait pas l'impression de tricher : si je prends un langage à deux sortes (réels et fonctions), et que je décide que ma classe d'interprétations n'interprète les symboles de fonctions que comme des fonctions continues, c'est de la triche, non ?
    De différentes sources, j'ai lu que les topos pouvaient être envisagés comme des "univers intuitionnistes d'ensembles" (en un sens informel). Ce n'est que pour ça que j'ai orienté ma recherche vers les topos ! Si c'est peine perdue, dites-le moi, et je laisse tomber. Je pense que c'est une piste intéressante, car je crois que les topos permettent de faire ce que je veux faire. Je ne retiens pas les objections de talal quand à la "faiblesse" des topos vis-à-vis de la bornitude des énoncés (je ne suis pas tout à fait sûr de savoir ce que ça veut dire) car je n'ai pas besoin de tout ZF pour exprimer la phrase "toutes les fonctions sont continues", puisqu'il me semble que de toutes façons, cette phrase ne met en jeu que des objets riquiqui.
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