Questions sur le livre de Dehornoy

Bonsoir,

une petite question (technique) me taraude et plutôt que d'em...bêter l'auteur, quelques collègues excellents exégètes ne manqueront pas d'éclairer ma lanterne.
Je ne veux pas rentrer dans les débats épistémologiques entre CC et Patrick Dehornoy, trancher quoi que ce soit entre eux deux nécessitent bien plus que mes maigres connaissances.

Dans l'axiome de la réunion, P.Dehornoy donne plusieurs versions, en particulier pp 33, 34 et 35 et je reviens rapidement sur ces deux dernières:
p 34: $y=\cup x$ équivaut à $\forall z(z\in y \leftrightarrow \exists t(z\in t \text{ et } t\in x))$

l'axiome proposé p35 pour la réunion est
$\forall a\exists b \forall x(\exists y(x\in y\text { et }y\in a)\longrightarrow x\in b)$

J'ai (quand même) ouvert mon Krivine pour voir qu'il proposait (exactement) la définition "informelle" vue p 34.

Je sais que c'est une mauvaise habitude de définir par des équivalences mais ici est-ce légitime de revenir à une implication? suis-je bouché ou juste idiot?

Merci d'avance de vos explications (je prendrai le temps de me faire expliquer où est l'opposition entre messieurs Dehornoy et Leruste ultérieurement ;-) )

Bien amicalement,

F.Desnoyer
PS: j'ai l'impression que mes mauvaises manies d'enseignant commencent à influer sur ma compréhension des maths, j'aimerais m'en séparer (de tout ou partie si possible) :-D

Réponses

  • N'y a-t-il pas auparavant le schéma d'axiome de compréhension ?
  • Bonsoir,

    réponds-tu à mon PS en forme de calembour ou est-ce une réelle question?

    et non, il donne un axiome dit d'extension, celui de la paire, de l'union (objet de mon interrogation), des parties puis le schéma d'axiome de séparation en chaque formule d'une signature donnée

    Merci

    F.D.
  • De mon téléphone : exactement comme le remarque GBZM : ZF est très redondante. Il suit que peut être PaDe a préféré une version moins redondante pour faire voir au lecteur que la compréhension permet de récupérer les version usuelles. Du coup au lieu de dire "la collection machin est un ensemble" tu dis " il existe un ensemble dans lequel machin est incluse" pour tous les axiomes autre que la compréhension. Ça donne "l'illusion-vraie information" que la théorie suppose peu ce qui en soi est un gain pour le lecteur.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • L'axiome tel qu'il est écrit dit que pour tout ensemble $a$, il existe un ensemble $b$ qui contient tous les éléments d'éléments de $a$. Du coup, pour démontrer qu'il existe un $c$ qui contient tous les éléments d'éléments de $a$ et que ceux-là, tu peux peut-être te renseigner sur ce qu'est le schéma d'axiome de compréhension (pour ne pas trop te spoiler !).
  • Si ce qu'il appelle "separation" est énoncé sous la forme toute relation fonctionnelle donne à tout ensemble une image directe qui est un ensemble ça implique la compréhension à titre de cas particulier (exercice simple en te précisant qu'une fonctionnelle n'a pas l'exigence de donner une image à tout le monde).
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  • Le schéma d'axiome de compréhension est souvent appelé schéma d'axiome de séparation. Ma question n'avait rien d'un calembour, il ne faut pas être parano ! :-D
  • Dans son livre, Dehornoy explique à de nombreuses reprises que quand il introduit ses axiomes, ceux-ci ne disent pas "il existe un ensemble qui est exactement l'ensemble des tels trucs" mais "il existe un ensemble contenant les tels trucs", mais que l'on s'en sort par séparation, et qu'on a aussi l'unicité grâce à l'extensionnalité.

    @CC : ce que Dehornoy appelle séparation c'est la compréhension restreinte correctement pour éviter Russell.
  • @Poirot, merci pour cette information (je n'ai évidemment pas feuilleté les pages où il introduit ZF ;-) ) . Je connais (enfin je suis censé :-D ) connaitre parfaitement tout ce qu'il y a dedans, mais je précise que je ne connais pas du tout le sujet sur les tables de Laver qui sont son dada concernant + ou - son études des tresses. De même, j'ai pu voir qu'il signale quelques résultats récents (sans démonstration), il me semble y compris Shelah-Maliaris, mais surtout Shelah sur la limitation du $card(Aleph(\omega_0))$.

    Je ne suis pas chez moi, mais je vérifierai s'il a reproduit la preuve de Boban que $PFA\to continu = \omega_2$ (qui de mon point de vue flingue l'espoir que $PFA$ soit un axiome "raisonnable" pour les platoniciens.

    Bref, ce n'est pas le sujet du fil, je documentais juste sur quoi je peux aider éventuellement. Je signale que l'axiome de la paire est inutile grâce à $(x=0\wedge t=u)\vee (x=1\wedge t=v)$ qui fait exister $\{u;v\}$ à partir des schémas et de $P(\emptyset)$, l'ensemble vide existant, lui, grâce à l'axiome de ... l'infini. Par contre, à première vue, je n'ai rien qui me vient (ou dont je me rappelle) pour faire sauter l'axiome de la réunion. Une remarque: l'axiome de l'ensemble des parties est l'axiome le plus court que je crois n'avoir jamais vu, et qui soit aussi "plein de polémiques":

    $$ \forall x\exists y\forall z\exists t : ((t\in z\to t\in x)\to z\in y)$$
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  • De mon téléphone : en fait je pense qu'on peut se limiter au schéma de remplacement + ensemble des parties + tout ensemble est inclus dans un ensemble transitif infini (par exemple) . Une manière courte d'affirmer l'infini est de dire qu'un ensemble est transitif et stable par P. Il faut bien sur exiger l'existence de l'ensemble vide :-D
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  • @cc : l'exigence d'un ensemble en fait suffit comme tu le sais; mais celle-là découle des règles dites "logiques" souvent imposées par la notion de démonstration qu'on a à côté
  • Oui maxtimax cette convention a cours (entre autre je pense pour avoir forall => exists j'ignore s'il y a d'autres raisons). Bon mais ce qui va sans dire allait mieux en le disant :-D
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  • Etant sur un PC, j'explicite comment exprimer ZF en peu de lignes.

    1) il existe un ensemble

    2) tout ensemble est élément d'un ensemble transitif stable par P

    3) Axiomes de remplacement


    Formellement:

    1) $\exists x: (x\in x\to x\in x)$

    2) $\forall x\exists y [x\in y\wedge (ok(y))]$

    3) pour chaque relation $R$, avec éventuellement des paramètres, et chaque ensemble $a$ la collection $\{x\mid \exists y\in a: (x$ est l'unique élément à vérifier $R(y,x)) \}$ est un ensemble (je laisse le lecteur formaliser)


    $ok(e)$ est abrège $[(\forall x\in e\forall y\in x: y\in e)$ et $(\forall x\in e\exists y\in e\forall z\exists t: ((t\in z\to t\in x)\to z\in y ))]$

    Remarque: ça n'empêche aucunement de soulever l'intéressante remarque de foys dans un autre fil. On pourrait évidemment tout concentrer en un seul schéma, mais ça finirait par prendre des allures un peu "malhonnêtes" dans le sens que le schéma ne serait pas une "intuition évidente" qu'un univers vérifiant ZF est un truc très simple: toutes ses sous-collections qui ne sont pas des ensembles sont ultra-grosses (en gros, aussi grosses que l'univers lui-même, mais ça dépend si on veut ou pas de l'axiome du choix).
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  • @christophe : Une autre raison de cette convention vient du théorème de complétude : on veut (sémantiquement) que tous les modèles soient non vides, de sorte que $\exists x, (x=x)$ est universellement valide. Elle doit donc être prouvable à un moment ou à un autre
    (Pourquoi veut-on que les modèles soient non vides ? Pour le théorème de robustesse : si on a la théorie $\forall x, x\neq x$, alors on a une preuve formelle qui fait comme suit :
    $\forall x,x\neq x$ (axiome)
    $y\neq y$ (instanciation)
    $\forall x, x=x$ (axiome logique [ils sont mis dans le système de preuve])
    $y=y$ (instanciation)
    $y=y \implies (y\neq y \implies \bot)$ (tautologie propositionnelle)
    $\bot$ (modus ponens deux fois)
    Donc $T\vdash \bot$, pourtant $T$ a le modèle vide. En fait cela vient de ce que dans les systèmes souvent utilisés, on peut déclarer une variable ($y$) sans jamais la "généraliser" ou "l'existentialiser" après sans que ça pose problème. Maintenant pourquoi est-ce qu'on veut pouvoir faire ça ? Ça simplifie grandement la notion de preuve je pense; ce serait compliqué de devoir à chaque fois tenir compte des variables déclarées)
  • Je suis d'accord. Et j'en profite pour dire que j'ai oublié l'extensionnalite dans mon dernier post.
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  • Bonjour,

    merci pour toutes vos réponses, en fait je me demandais si le fait de donner une implication ou une équivalence avait une réelle portée et P. Dehornoy lui-même donne une équivalence "informellement" p 34 (ce qui reprend mot à mot l'axiome écrit chez JL Krivine) pour revenir à une implication p 35.
    On m'a appris autrefois qu'il ne fallait pas mettre "ssi" dans une définition alors est-ce que le fait de l'attendre est une erreur de ma part?

    C'était vraiment une question formelle, je trouve que ce livre est excellent pour reprendre la th des ensembles même si, pour approfondir, il renvoit à Jech par exemple.

    Voilà,

    Bien amicalement,

    F.D.

    PS:@GaBuZoMeu j'étais très fier de mon P.S. en forme de calembour sur les axiomes de ZF :-( dommage!
  • Attention, là, il s'agit d'axiomes, pas de définition.
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  • Pourquoi interdire les "si et seulement si" dans les définitions ?
  • Parce que la condition suffisante parle de quelque chose qui n'est pas défini ?

    Exemple: Une fonction $f:R\to R$ est dite croissante si et seulement si blablabla.

    Si blablabla, alors on qualifie $f$ de croissante. Mais, peut-on vraiment dire que $f$ croissante implique blablabla, si le terme "fonction croissante" n'a pas de définition préalable ?

    Enfin, c'est comme ça que j'interprète l'objection (c'est comme ça qu'on m'a justifié cette interdiction, en tout cas )

    Ceci dit, le problème se pose aussi dans l'autre sens, en tout cas si on repsne la définition comme étant l'implication "si blablabla, alors $f$ croissante".

    C'est pour ça, que perso, j'aime bien définir un truc en écrivant "On dit que tel objet est truc"si ..." Ou alors Un "truc est un objet vérifiant blablabla"
  • @max: je ne pense pas qu'il s'agisse d'une grosse interdiction mais juste d'une tag-précaution pour boldfizer qu'on est dans une définition. Mettre "ssi" la transforme en axiome (en affirmation), de même que j'essaie de reprendre mes (meilleurs) élèves quand ils écrivent a=5+d^8 à la place de a:=5+d^8 puisque dans le premier cas ils commette t une faute en affirmant un truc a priori pas du tout garanti.
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  • Le mieux me semble être << machin(paramètres)>> abrège <<blabla>>. C'est le choix que j'ai fait et il donne entière satisfaction (avis du public concerné qui n'est pas tendre avec le reste de mes tortures)
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  • Maxtimax écrivait:
    > @christophe : Une autre raison de cette convention vient du théorème de complétude : on veut
    > (sémantiquement) que tous les modèles soient non vides, de sorte que $\exists x, (x=x)$ est universellement valide.

    Cette convention est vraiment mauvaise, et on s'en aperçoit dès qu'on prend des modèles qui ne sont pas bêtement des ensembles, mais des objets dans un topos, par exemple des faisceaux sur un espace topologique. Ça devient complètement idiot d'exiger des modèles non vides (les objets peuvent d'ailleurs être plus ou moins vides).
    La seule manière raisonnable de procéder est de travailler en déclarant le contexte (une liste finie de variables contenant les variables libres des formules du séquent, quand on formalise les déductions avec des séquents). On précise naturellement ce qui arrive au contexte dans les règles logiques.

    Dans ton exemple, à partir de $\vdash_{[]} \forall x\;(x\neq x)$ on arrive à démontrer $\vdash_{[y]} \bot$, ce qui ne pose aucun problème.
  • @killersmile : oui mais dire "une fonction est croissante si" ne permet pas de dire "$f$ n'est pas croissante car $x\leq y$ mais $\neg (f(x)\leq f(y))$".. moi au contraire je mets tout le temps un "si et seulement si" (en symboles c'est le $\iff$ surmonté d"un "def" ou encore :=)

    @GBZM : oui je parlais uniquement de modèles "classiques", au sens par exemple de Cori et Lascar ou trucs du genre. J'ai d'ailleurs précisé qu'il y avait un truc au niveau de la déclaration de variables; ce que l'idée de contexte règle parfaitement.
  • @max de mon téléphone : je te présente GBZM le gardien du temple de l'ensemble vide du forum comme le qualifient certains parfois (ça n'a rien de péjoratif et d'ailleurs on lui doit des tas d'éclaircissements (bases vides etc) dans plein de posts).

    Mais évidemment passer par les topos en L1 relève du roman futuriste. Par contre je suis de don avis philosophico-politiquement (de même que je précise toujours "et séparé" après compact en topologie je précise toujours si je veux un truc non vide. Ça me gêne de voir un phénomène bien connu avec inf, sup piétiné sans vergogne par les desireurs logiciens de forall => exists).
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  • Bonjour,

    @killersmile38: je ne compends pas du tout ton exemple: il semble inférer le contraire de ton propos: on appelle croissante une pizza aux anchois, si j'ai une pizza aux anchois, puis-je dire qu'elle est croissante?

    Sinon la nuance entre définition et axiome... je réfléchis: une définition est un modus ponens déguisé (dès que je vois une pizza, je vérifie si elle a des anchois et hop! je l'appelle croissante) alors qu'un axiome dit plutôt comment on reconnaît une pizza ou en compte les anchois, j'ai bon?

    (ok je sors des maths pour les exemples mais ça me paraît contextuellement raisonnable, non?)

    @cc: je me suis fait défoncer la tête en inspection pour moins qu'une nuance entre a=f(...) et a:=f(...) et, littéralement, on m'a demandé de NE PAS enseigner d'informatique... ne dévions pas sur les injonctions contradictoires de notre institution commune mais bon... de là à avoir ta compréhension (même de façon schématique [calembour again]) des mathématiques, il y a un monde et même dans 20 ans le nez dans les bouquins et la biblio complète du Dehornoy, je n'en serai pas là :-)

    Merci de l'intérêt porté à ma question

    F.D.
  • et, littéralement, on m'a demandé de NE PAS enseigner d'informatique...

    Tu aurais dû filmer l'entretien, ça en aurait laissé bouche bée plus de 90% de la population des profs de maths de France. Bon, de toute façon, le corps des IPR va disparaitre, donc on ne discute plus guère que d'histoire de cette profession étrange (qui en est rendu à se servir de la dérision pour lutter contre sa dépression structurelle).
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  • François : Pour moi, une définition est une abréviation. C'est-à-dire que quand on dit "une fonction $f$ est dite croissante si $blabla(f)$", c'est qu'à chaque fois qu'on lit "$f$ est croissante", on doit remplacer par "$blabla(f)$"$ (ou "est aux anchois" pour reprendre ton exemple). Il est donc important qu'il soit clair qu'on entend par là que l'on déclare une commodité de langage.
  • Bonsoir,

    bonne et heureuse année à toutes et à tous!!!

    Bien amicalement,

    F.D.
  • Bonjour,

    p 212, je lis :

    La logique intuitionniste vise à mieux rendre compte de la nature de l'implication en évitant de déclarer vraie toute implication $\Phi \Rightarrow \Psi $ telle que $\Phi $ soit fausse comme le fait la logique booléenne.

    Confirmez-vous ce commentaire ?
  • Un grand merci à Poirot qui a pris beaucoup de son temps pour trier les posts un par un.

    @GG la réponse se trouve maintenant dans l'autre, fil mais comme elle fait une ligne je te la redonne: PaDE s'est trompé, ce qu'il raconte est faux. La logique intuitionniste, comme la logique classique (et même l'affine bien plus faible que l'intuitionniste) considèrent que $non(A)$ entraine bien $A\to B$.

    En fait, ça va même bien plus loin, on a : $non(A) \subseteq (A\to B)$, autrement dit, il n'y a rien à faire, même pas "une opération invisible": toute preuve de $non(A)$ est (et pas seulement "peut permettre de construire") une preuve de $A\to B$.
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