Classe propre

Bonjour à tous,
J'avais posé une question sur le forum et on m'avait répondu qu'un certain objet n'était pas un ensemble.
J'ai supposé qu'il était question d'une "classe propre" dont j'avais entendu parler sans vraiment savoir ce que c'était.
Ayant ressenti qu'il me manquait un peu de "background", j'ai commencé le Bourbaki théorie des ensembles (ch. 1 2 et 3 terminés, j'en suis à au début de "structures").
Sur Wiki j'ai vu que tout ceci était lié à la relation $x\notin x$... mais tout ce que j'ai vu dans le Bourbaki c'était que cette relation était "non collectivisante" donc disqualifiée pour définir un ensemble.
A priori ceci est lié au "paradoxe de Russell" qui est décrit là :

ParadoxeRussel

Franchement j'ai pas trop vu le rapport entre l'exemple du Barbier et la relation $x\notin x$. Si quelqu'un peut me confirmer qu'il n'y a pas de rapport... (ou qu'il y en a un !) Pour l'instant je vois simplement cette relation $x\notin x$ comme une sorte d'impossibilité pour un ensemble, d'où la distinction dans le langage entre un "élément" et un "ensemble".

Tout ceci étant dit, j'aimerais bien quelques réactions, et peut-être comprendre ce qu'est une classe propre au final !
Merci d'avance !

A+

Réponses

  • Alors attention déjà, Bourbaki est un très mauvais endroit pour commencer la théorie des ensembles. Ils ont fait leur fascicule juste pour que certaines choses soient écrites mais il est très mal fait...

    Alors ensuite ce n'est pas la relation spécifiquement $x\notin x$ qui pose problème; le paradoxe de Russell peut s'écrire avec n'importe quel relation binaire $R$: il n'existe pas de $z$ tel que pour tout $x$, $xRz$ si et seulement si $\neg (xRx)$ (sinon, si un tel $z$ existe on a $zRz\implies \neg (zRz)$ et $\neg (zRz) \implies zRz$)

    La rapport avec le Barbier est simplement de prendre $xR$ = $y$ rase $x$. Le théorème du dessus devient : il n'existe pas de personne telle qu'elle rase quelqu'un si et seulement s'il ne se rase pas: c'est exactement la même chose.

    Donc en fait $x\notin x$ n'a rien de spécial, d'ailleurs avec l'axiome de fondation tout le monde le vérifie, et sans l'axiome de fondation, il y a des gens qui ne le vérifient pas: rien de bien palpitant.

    Le problème qui apparaît dans le paradoxe de Russell est celui de la compréhension non restreinte : pouvoir dire que $\{x: \varphi\}$ est un ensemble pour toute formule $\varphi$ est ce qui pose problème (prendre $\varphi = x\notin x$ par exemple :-D )

    Les matheux du début XXè ont résolu ça en disant qu'on ne pouvait appliquer la compréhension qu'aux formules $\varphi$ de la forme $(x\in A) \land \psi$ (compréhension restreinte à l'ensemble $A$); cela permet (au moins ce qu'on en sait) d'éviter de tels paradoxes.
    La notion de "relation collectivisante" de Bourbaki est là aussi pour permettre d'éviter les paradoxes.


    Finalement, sur ce qu'est une classe propre... ça dépend de la théorie utilisée. Dans ZF(C), ça n'a pas de sens "dans la théorie", ça a un sens métathéorique, au sens suivant : une classe est une formule à une variable libre, éventuellement à paramètres $\varphi$ (qui représente cette entité $\{x: \varphi\}$), et une classe propre c'est une classe (donc une formule $\varphi$) telle qu'il n'existe pas de $z$ vérifiant $x\in z \iff \varphi(x)$.
    Dans NBG, qui est une théorie qui a été créée spécifiquement (en tout cas notamment) pour pouvoir parler de classes, une classe est un objet quelconque parmi ceux dont on parle; un ensemble est une classe qui appartient à une autre classe; et une classe propre c'est une classe qui n'est pas un ensemble (i.e. qui n'appartient à personne d'autres).
    Il y a d'autres théories, qui ont une autre interprétation du mot "classe" et du mot "classe propre" évidemment.

    Un exemple de classe propre est l'univers $V = \{x: x=x\}$ (dans ZF ça correspond à la formule $x=x$; dans NBG c'est $\{x: x$ est un ensemble $\}$) ou encore la classe des ordinaux (si tu sais ce qu'est un ordinal) qui ne peut être un de ses membres car sinon ce serait un ensemble, un ordinal, et donc un ordinal qui se contient lui-même, ce qui est absurde; la classe des groupes etc.
  • @JL, en étant plus précis, on pourra peut-être enrichir les échanges, pour l'heure, je ne sais pas si maxtimax t'a comblé ou pas, ni quel niveau tu as pour discuter (niveau formel veux-je dire).

    Après la crise des fondements, les maths ont opté pour le principe général suivant:

    1/ Utiliser $a\in \{x\mid R(x)\}$ comme étant égal à $R(a)$

    2/ Si on arrive à une contradiction, déclarer au public que l'une des utilisations de (1) a mobilisé une $R$ tel que $\{x \mid R(x)\}$ est trop gros.

    (Pour le dire autrement, c'est LA TAILLE qui joue. Tout ensemble "trop gros" conduit à des contradictions. En particulier, ce que te dit max à propos de $\{x\mid x\in a$ et $R(x)\}$ en est issu puisque cet ensemble est plus petit que $a$.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Pour poursuivre les précédents posts, tu peux te renseigner sur la théorie de Morse-Kelley.
    C'est une théorie alternative (et strictement plus puisssante) que ZFC pour fonder la théorie des ensembles.

    Je la trouve assez pratique car la théorie permet dans son langage de considérer N'IMPORTE QUEL "machin" de la forme $\{x : \varphi(x)\}$. Les objets de la théorie sont appelés "les classes".

    Il y a deux types de classes, les classes propres (gigantesques en taille) et les ensembles (petits). La définition est simplissimme. La phrase "$x$ est un ensemble" abrège $\exists y : x \in y.$ Autrement dit tu es petit si tu es contenu dans autre chose. Tout ce qui n'est pas ensemble est appelé classe propre.

    Tu peux définir les notions usuelles de théorie des ensembles, produits cartésiens, union, couple, etc ... mais ceux-ci n'auront les bonnes propriétés que sur les ensembles et non sur les classes propres. Il est donc commun dans les hypothèses des théorèmes de M-K de préciser que telles ou telles classes doivent être des ensembles. J'aime bien cette théorie car elle permet d'être très précis et de voir exactement où la petitesse doit intervenir.
  • Je ne m'attendais pas à des réponses aussi rapides et détaillées, merci !
    Déjà pour le coup du Barbier, wiki ne précisait pas qu'il s'agissait d'une autre relation que $x\notin x$ et on ne comprenait pas grand chose, c'est quand même dommage d'embrouiller un lecteur que l'on est censé éclairer... du coup c'est simple finalement ;-)

    Effectivement avec le Bourbaki on comprend bien à travers différents "critères de démonstrations" (bref des théorèmes) que toute appartenance à un premier ensemble va restreindre le champ des possibles et impliquer l'existence d'un autre ensemble (typiquement : la relation " $x\in A\text{ et } R\{x\}$" est collectivisante).

    Maxtimax appelle formule ce que Bourbaki appelle relation, why not.

    Sinon la notation $\{x:R\{x\}\}$ est intéressante puisqu'elle plonge la lettre $x$ dans l'anonymat à l'instar de $\exists$ (c'est l'histoire des cases vides et des liens dans la mathématique formelle de Bourbaki). C'est donc un symbole supplémentaire dans la mathématique formelle ?
    Quand la relation n'est pas collectivisante, on a une classe propre si j'ai bien compris.

    Ensuite je vais sans doute dire une énormité car je commence à peine le chapitre "structures" du Bourbaki, mais à un moment on parle de "l'ensemble des structures d'espèce $\Sigma$ sur $E_1,\ldots, E_n$ ". J'imagine qu'une structure de groupe est une "structure d'espèce $\Sigma$ blablabla" donc "les groupes" est un ensemble et non une classe propre ? (ce qui doit être faux d'après le message de Maxtimax : c'est l'exemple final)

    A+
  • Conseil: oublie les structures, n'étudie que les ensembles. Ces complications n'ont pas lieu d'être. L'époque de Bourbaki était une époque d'hésitation. Quand tu auras du recul tu pourras revenir aux structures.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • @JL : Non cet exemple est vrai car l'ensemble de base est fixé : c'est les structures d'espèces $\Sigma$ sur $E_1,...,E_n$; par "les structures d'espèces $\Sigma$".
    De la même manière "les groupes sur $E$" forment un ensemble; c'est la classe des groupes (sans restreindre l'ensemble sous-jacent) qui est une classe propre
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