Incomplétude et modèles

Salut à tous,
Je souhaiterais avoir des commentaires sur le fait suivant. SI l'on considère en logique du premier ordre les axiomes de Peano, c'est une théorie incomplète d'après Gödel. Il y a donc des résultats vrais pour certains modèles et faux pour d'autres.

En revanche si je considère en logique du deuxième ordre les axiomes des réels, on montre que tous les modèles sont équivalents. Par conséquent, si je vois les entiers comme un sous ensemble de réel, il n'y a pas "vraiment" d'incomplétude, ce qui signifie que mes modèles pathologiques ne s'étendent pas aux réels. Dans ce cas, est-ce que l'incomplétude ne serait pas davantage un résultat sur les limitations de la théorie du premier ordre plutôt que sur l'axiomatique? D'autant plus que les démonstrations en logique du premier ordre sont, à ma connaissance, des démonstrations automatiques.

M.

Réponses

  • En fait c'est une illusion la complétude de deuxième ordre. Elle n'est pas accessible. D'ailleurs attention de ne pas confondre la syntaxe et la sémantique qui elle est inaccessible.

    Les règles de preuves du deuxième ordre n'ont rien à voir avec le fait que "tout modèle plein vérifié truc"

    Homonymement il n'y a pas ... complétude. Ce n'est pas parce qu'un truc est vrai dans tous les modèles pleins que le système de preuves appelé LUI AUSSI logique du deuxième ordre peut le prouver. C'est juste une homonymie.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Pas besoin d'aller chercher les réels d'ailleurs; il me semble que l'arithmétique du second ordre est déjà "complète" (guillemets par rapport à ce qu'a dit christophe, qui est très pertinent) au sens où elle a un unique modèle.
    Du fait de la distinction syntaxe/sémantique au second ordre on dit plutôt "catégorique" il me semble (comme $\kappa$-catégorique au premier ordre)

    Qu'appelles-tu démonstrationd automatiques ? La logique du premier ordre devient indécidable (au sens machines de Turing etc.) dès que tu as un symbole relationnel d'arité au moins $2$
  • Merci pour vos réponses.
    @Christophe: tu peux m'expliquer doucement ce que tu veux dire. Avec des exemples triviaux, par exemple?
    @Maxtimax: automatique je veux dire par élimination de quantificateurs, réalisables par un ordinateur. Où est-ce que je trouve ces axiomes du second ordre pour l'arithmétique?
    Mauricio
  • Un exemple où la logique du second ordre ne prouve pas tout est classiquement donné par la théorie "$<$ est un bon ordre" + "$c_n<c_m$" pour $n>m$; où on a un symbole de relation d'arité $2$ $<$ et une infinité de constantes $c_i$. Ce truc là n'a pas de modèle mais c'est un exercice assez facile de prouver que cette théorie ne prouve pas le faux.
    L'élimination des quantificateurs c'est tout un truc mais ça ne s'applique pas à toute la logique du premier ordre.
    Cherche "arithmétique du second ordre" ou "second order arithmetic" par exemple :-D c'est les mêmes axiomes qu'au premier ordre, sauf qu'on enlève la récurrence et on la remplace par un unique axiome de récurrence
  • Oui je peux, j'ai pris un aspirine et je respire mieux :-D (pardon pour le gloubiboulga d'avant)

    1/ Tu as les platoniciens et les non platoniciens.

    2/ Dans le passé j'adorai faire hurler Gérard en disant que tout le monde est platonicien

    3/ En caricaturant à peine, il n'y a pas de "logique du second ordre"

    4/ Il y a un BIG-FANTASME second-ordien qui "appelle de ses voeux" le père Noel (ou Dieu) pour connaitre la valeur de vérité de phrases comme "pour tout partie $X$ de $\N$, blabla"

    5/ A côté de ça et n'ayant pas grand-chose à voir, il y a des gens qui jouent à la poupée en ayant implémenté SYNTAXIQUEMENT un succédané de déductions second-ordre-formes, ce succédané étant d'ailleurs très simple et s'appelant chez les gens sérieux.... je te le donne en 1000.... l'axiome de compréhension:

    $$ [ \forall X:R(X) ]\to S$$

    où $S$ s'obtient en remplaçant, partout où apparait un truc de la forme $X(toto)$, une même formule de la forme $T(Toto)$

    6/ De manière purement homonymique, ce fantasme formel a été "aussi" appelé "faire de la logique du second ordre".

    7/ Mais il ne permet de démontrer que très peu de choses PARMI celles qui sont "vraies dans tous les modèles pleins", sachant qu'en plus ces histoires n'ont un sens que pour les platoniciens qui espèrent parler de ce qui se passe dans le monde des vrais ensembles.

    8/ "modèle plein $(E,...)$ " veut juste dire que la valeur de la phrase $\forall X: blabla$ se calcule en essayant... toutes les parties $X$ de $E$, donc .... en particulier.... en en essayant un nombre NON DENOMBRABLE quand $E$ n'est pas fini, ce qui, tu en conviendras, n'est pas encore accessible à l'être humain en dur :-D

    9/ Concrêtement, l'entier qui est une contradiction dans ZF apparait dans tout plein de "modèles syntaxiques" de la "logique du second ordre programmée chez IBM au sens de (6)", mais évidemment pas aux modèles pleins (fantasmés), sauf si $ZF$ est "réellement" (ha ha que veut dire réel) contraidctoire.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • @Maxtimax: "Exercie assez facile", il n'y pas beaucoup de phrases que l'on puisse écrire mais je ne vois pas trop comment démontrer l'affirmation. Ceci dit c'est un exemple bien intéressant. J'ai regardé arithmétique second ordre.

    @CC: En fait je n'y comprends plus rien. Tu sembles dire que le second ordre est une entourloupe car si je comprends bien, c'est déjà une sorte de modèle de supposer qu'il y a deux types d'objets ou quelque chose comme ça, mais ce n'est pas clair. Donc pour rendre ça plus clair, prenons un exemple "simple".

    Supposons que j'aie un énoncé Peano contradictoire que je note P et que je prenne deux modèles au sens de la théorie des ensembles X,Y. Dans l'un des deux P est vrai et dans l'autre il est faux..

    Dans la mesure où P peut aussi être vu comme un énoncé du second ordre et à supposer que tous les modèles soient isomorphes au second ordre (ce qui est vrai en supposant que les éléments du deuxième type sont les sous-ensembles de X si je comprends bien wikipedia). La valeur de P dans X et Y devrait donc forcément la même, mais j'ai supposé que ce n'était pas le cas.

    Je suis perdu :-S

    M.
  • Eh bien si tu as une démonstration du faux, elle est finie, donc n'utilise qu'un nombre fini de constantes $c_n$. Mais maintenant, la théorie des bons ordres plus un nombre fini d'inégalités strictes a un modèle ($\N$ en interprétant bien les $c_i$ si tu veux), donc elle ne peut pas prouver le faux. Donc il n'y a pas de démonstration du faux, pour autant t'as pas de modèle.
  • Pardon Mauricio, je te réponds tard. Bon je détaillerai, je te dis juste qu'il n'y a que très peu de choses qu'on peut prouver "syntaxiquement" avec des règles informatiques qui "miment" l'idée de second ordre.

    Autrement dit, presque tous les énoncés vrais dans tous les modèles pleins sont non prouvables en logique du second ordre syntaxique.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Mauricio a écrit:
    Supposons que j'aie un énoncé Peano contradictoire que je note P et que je prenne deux modèles au sens de la théorie des ensembles X,Y. Dans l'un des deux P est vrai et dans l'autre il est faux..

    Un énoncé Peano contradictoire, c'est un énoncé contredisant les axiomes de Peano? Par exemple, $0 = 1$? Pourquoi supposer alors qu'il peut exister un modèle dans lequel P sera satisfait?

    Je n'ai pas compris ta question, en fait.
  • @Maxtimax, Alesha : je ne suis pas sûr de m'être fait comprendre. Je prends un énoncé indécidable P dans l'arithmétique de Peano et deux modèles par exemple le modèle standard de la théorie des ensembles et un modèle exotique. De telle sorte que P soit démontrable dans le modèle standard mais pas dans la théorie exotique.

    Comme tous les modèles des entiers au deuxième ordre sont les mêmes, cela signifie que mon modèle exotique est un objet qui est incapable d'axiomatiser les entiers que l'on manipule dans la vie de tous les jours. Cela remet en question la portée du théorème de Gödel, non ?

    @CC. Ok je comprends la théorie du deuxième ordre est en quelque sorte inutilisable pour démontrer à cause d'une syntaxe trop complexe.

    Merci pour vos éclaircissements !
  • @Mauricio, pardon pour le délai. Mais non, ce n'est pas ça que j'ai voulu te dire.

    Je recommence:

    1/ Tu as deux théories du second ordre.

    1.1/ La première est constituée de l'ensemble $A$ des énoncés qui sont vrais dans tous les modèles pleins.

    1.2/ La deuxième est constituée de l'ensemble $B$ des théorèmes qu'on peut prouver en ajoutant quelques axiomes "typiques" qui ambitionnent de "simuler un peu" ce qu'on attendrait de la première.

    [small]En l'occurrence l'axiome dit de compréhension qui dit :
    $$ [\forall XR(X)]\to [R(<<x\mapsto S(x)>>]$$
    où $S$ est un énoncé "faisant office" de propriété, donc de "sous-ensemble" de l'ensemble base de la structure (mais peu importe en fait)[/small]


    2/ En dehors du fait que $B\subset A$, on n'a rien de plus. En fait, même, $B$ est NEGLIGEABLE dans $A$.

    3/ De plus, aucun être humain ne peut accéder à $A$. Même pas via ZF ou autre théorie plus forte***. L'ensemble $B$ nous est à jamais fortement et absolument inaccessible, quoiqu'on fasse.

    4/ La syntaxe qui définit qui définit $B$ dans le point (1.2) n'a rien de "trop complexe" pour reprendre tes mots.

    *** Exemple: tu as dans un univers ZFien, PLEIN (donc, pour les platoniciens "un vrai", qui n'oublie rien), où tu constates qu'il n'existe par exemple pas d'ensemble inaccessible (attention à l'homonymie!!! ) vérifiant un certain énoncé $P$. Et bien ça ne signifie rien !!!!!

    En particulier, ça ne signifie PAS que $P$ n'a pas de modèle inaccessible. La seule chose que ça dit c'est que ton univers est TROP BAS (il ne contient pas assez d'ordinaux) pour "voir $P$". C'est tout. Ce n'est même plus une question de LARGEUR (qui elle est assez bien appréhendée par le forcing), mais une question de hauteur (dont il est un théorème absolu qu'on ne peut "par définition" pas la dompter).
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • @Maxtimax: incroyable exemple de simplicité, merci.

    @CC: toujours du mal à comprendre, mais ça s'éclaircit doucement. Je reprends ma question que je précise légèrement.
    Je prends un énoncé indécidable P dans l'arithmétique de Peano au sens du théorème de Gödel. Supposons que l'on ait deux modèles du premier ordre I et II. Supposons que I soit le modèle standard de la théorie des ensembles et II un modèle exotique. De telle sorte que P soit vraie dans le modèle standard I mais pas dans la théorie exotique II.

    Mon modèle I passe au deuxième ordre puisqu'il est construit sur la théorie des ensembles. En revanche, comme tous les modèles des entiers au deuxième ordre sont les mêmes, cela signifie que mon modèle exotique est un objet qui est incapable d'axiomatiser les entiers que l'on manipule dans la vie de tous les jours. Autrement dit il est impossible d'y ajouter des axiomes pour en faire un modèle plein.

    Est-ce que ce que je vins d'écrire est exact?

    Ensuite Christophe tu sembles dire que tout ça est bidon. Est-ce que tu peux préciser ta pensée sur cet exemple? Est-ce que tu veux dire que je pourrais ajouter d'autre structures additionnelles de manière à rendre le modèle exotique tout aussi vrai ou quelque chose comme ça?
    Mauricio
  • M a écrit:
    En revanche, comme tous les modèles des entiers au deuxième ordre sont les mêmes

    C'est là qu'est ton erreur. Tu as raison pour ce qui concerne la théorie sémantique du second ordre, celle que personne ne peut voir.

    Mais je te le redis, il y a un homonyme syntaxique qui décrit un système déductif*** qui singe le second ordre, mais qui ne contient qu'un nombre infime d'énoncés vrais dans tous les "vrais modèles pleins" du second ordre.

    *** Par exemple, ce système est parfaitement équivalent (voire égal), pour ce qui concerne l'arithmétique, à travailler dans le fragment suivant de ZF:

    tous les axiomes sauf le remplacement et l'ensemble des parties (autrement dit pas grand chose :-D ) à quoi tu ajoutes qu'il existe au moins un ensemble infini dont l'ensemble des parties existe (et évidemment, ce sera $\N$ sans admis supplémentaire)
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
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