Indépendance entre axiomes

Bonsoir tout le monde,

Il y un petit moment, je lisais la partie sur les catégories du livre Algèbre et théorie galoisienne des Douady. Il est question dans ce livre d’univers, et de l’axiome des univers. Il est dit qu’à la connaissance des auteurs, cet axiome est indépendant de ZFC par exemple. J’imagine comment montrer qu’un axiome dépend finalement d’autres, mais concrètement, comment s’y prend-on pour montrer l’indépendance entre axiomes ?

Au plaisir de vous lire,
B&B

Réponses

  • Pour l'axiome des univers on ne peut pas (on espère) montrer son indépendance (le "on espère" veut dire que si on peut montrer son indépendance, alors ZFC est incohérente :-D )

    De manière générale, pour montrer qu'un axiome $A$ est indépendant d'une théorie $T$, on montre que $T+A$ et $T+\neg A$ sont cohérentes (souvent on doit aussi supposer que $T$ est cohérente, on parle donc de résultats de cohérence relative, et on dit que "si $T$ est cohérente, alors $A$ en est indépendant"; mais souvent comme le sous-entendu "si $T$ est cohérente" est clair, il passe à la trappe dans les compte-rendus). Pour montrer qu'une théorie est cohérente, il y a différentes techniques, comme en exhiber un modèle, ou faire une preuve syntaxique; cela dépendra vraiment de la bête à laquelle on a affaire.
  • Merci Maxtimax.
    Et en admettant que quelqu’un démontre que ZFC est incohérente, on a une roue de secours?
  • A priori, si une contradiction est trouvée, elle portera surtout sur des instances circonvolutées du schéma de remplacement, donc a priori on peut simplement brider encore ZFC et il faudra juste modifier quelques rares articles de théorie des ensembles.
    Si une contradiction plus profonde que ça est trouvée, dans la "nature même de ZFC", ça va compliquer beaucoup l'affaire et à ma connaissance rien n'est "prévu" (même si des théories "alternatives" se développent, a priori elles sont assez similaires à ZFC pour qu'une incohérence dans cette dernière y soit réplicable)
  • @Boole et Bill : à ma connaissance, l'axiome des univers est équivalent à l'existence d'une classe propre de cardinaux fortement inaccessibles.
    Il est donc facile de démontrer que cet axiome n'est pas conséquence de ZF.
    En effet, supposons qu'il existe au moins un inaccessible (ça suffit), et soit $\kappa$ le plus petit inaccessible.
    Alors $V_{\kappa}$ satisfait ZFC + "Il n'existe pas d'inaccessible".
    Par contre, il est impossible de prouver que la consistance de ZFC entraîne la consistance de ZFC + l'axiome des univers.
    En effet, d'après le théorème de complétude cela reviendrait à prouver l'existence d'un modèle de ZFC + l'axiome des univers.
    Je saute les détails, mais alors on aurait ZFC démontre Cons(ZFC), ce qui est interdit par le second théorème d'incomplétude de Gödel… sauf, comme dit Max, si ZFC est inconsistante, auquel cas elle démontre n'importe quoi.

    Quant à une inconsistance éventuelle de ZFC, je pense qu'elle rendrait malade pas mal de gens, dont moi.
    Je pense comme Max qu'il y aurait probablement moyen de rafistoler les ficelles en bricolant un truc chelou, mais si c'était plus grave ça mettrait au chômdu un certain nombre de personnes pour lesquelles j'ai beaucoup d'estime (dont pas moi, ce que j'enseigne devant assez peu à ZFC), ce qui n'est pas à souhaiter.
  • Toujours à propos de la consistance de ZFC, on peut faire le parallèle avec l'existence ou la non-existence de Dieu :
    *) Si Dieu existe, il finira bien par nous le faire savoir d'une façon ou d'une autre.
    En revanche, si Dieu n'existe pas, on n'arrivera jamais à le prouver.
    **) De même, si ZFC est inconsistante, on s'en apercevra probablement un jour.
    Si ZFC est consistante, on n'arrivera jamais à le prouver
  • Pour ma part (avis personnel), je pense que des théories bien plus faibles que l'arithmétique de Peano sont contradictoires.

    Je ne crois de toute façon pas, d'expérience, que la consistance des théories soit importante (il est utile de rappeler qu'on n'en fait jamais rien de cette consistance). Je ne suis même pas convaincu que ça ait beaucoup de sens***.

    Par contre, il est vrai qu'on garde d'une "belle époque" assez platonicienne cette espèce de rêve de se placer dans une théorie consistante "au démarrage de toute science". On sait depuis Gödel que c'est impossible: toute "bonne théorie" est contradictoire.

    *** je rajoute un symbole R au langage de Peano et les axiomes suivants (clôturés par $\forall$):

    1/ $R(x,0,x+1)$
    2/ $R(x+1,y,z)$ et $R(x,z,t)$ => $R(x+1,y+1,t)$
    3/ $non(R(999,999,x))$

    Et bé, ça donne une théorie contradictoire, mais personne ne la verra jamais ladite contradiction, dans la théorie plus faible où on a retiré l'axiome de récurrence (alors qu'elle s'y trouve tout autant).
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • moi même a écrit:
    On sait depuis Gödel que c'est impossible: toute "bonne théorie" est contradictoire.

    Je rappelle la preuve:

    $D$ signifie "est prouvable".

    Soit $W:= (\forall X: [(D(X)) \to X])$
    Soit $P$ telle que $P = (D(W\to (P\to Tout)))$

    Supposons $P$ et $W$. Alors
    $D(W\to (P\to Tout))$ donc
    $W\to (P\to Tout) $ donc
    $P\to Tout$ donc
    $Tout$.

    La preuve que je viens d'écrire atteste que $P$. Je laisse en exercice le lecteur prouver $P$ en affectant les propriétés basiques à $D$ qu'on attend de lui.

    On a donc prouvé $non(W)$ qui se lit généralement:

    $$ \exists X: (D(X) \ et\ (nonX))$$
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
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