Dualité de Lawvere.
Bonsoir à tous,
Je souhaite comprendre comment Lawvere avait démontré sa fameuse dualité définit comme suit :
$$ \mathrm{Syntax} \ \simeq \mathrm{Semantics}^{ \mathrm{op} } $$
Et comment interpréter avec des phrases cette dualité pour que je puisse saisir son sens ?
Merci d'avance.
Je souhaite comprendre comment Lawvere avait démontré sa fameuse dualité définit comme suit :
$$ \mathrm{Syntax} \ \simeq \mathrm{Semantics}^{ \mathrm{op} } $$
Et comment interpréter avec des phrases cette dualité pour que je puisse saisir son sens ?
Merci d'avance.
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Réponses
Est ce parce que le sujet ne vous dit rien ? ... ne vous intéresse pas ? ... ne fait pas partie de vos centres de préoccupation ?
Bizarre ça.
L'équivalence que tu écris est une heuristique, donc pas un résultat précis. Il y a des résultats précis qui incarnent cette heuristique, i.e. des théorèmes qui nous font dire "ah ouais c'est pas bête cette heuristique quand même".
L'idée sous-jacent tout ça est une évidence : si j'impose plus de règles (donc "j'augmente la syntaxe") je diminue le nombre de machins qui satisfont ces règles (donc "je diminue la sémantique"), d'où l'équivalence avec un $^{op}$.
Je pense qu'historiquement, l'un des premiers résultats de Lawvere qui rentre dans ce cadre (qui n'est certainement pas le premier résultat tout court qui rentre dans ce cadre) est le suivant : si je prends une théorie algébrique $T$ (c'est-à-dire j'ai un ensemble de symboles de fonctions, avec pour chaque symbole $f$ une arité $a(f)\in \N$; et un ensemble d'équations qui les relie - voir mon post où je parle d'objets libres avec Homo Topi à ce sujet [si possible, sans le perturber/détourner] pour plus de détails), je peux construire une catégorie syntaxique $C_T$ (qu'on appelle théorie de Lawvere) : ses objets sont les entiers $n\in \N$ et un morphisme $n\to m$ c'est une suite $(t_1,...,t_m)$ où chaque $t_i$ est un terme de ma théorie $T$ à $n$ variables, et on décrète que deux termes $t,s$ sont égaux si la théorie $T$ prouve qu'ils sont égaux, en symboles $T\vdash t=s$. On compose ces morphismes de manière évidente : en substituant.
En particulier on remarque que dans cette catégorie $m$ est le produit (au sens catégorique) de $m$ copies de $1$ (eh oui, un morphisme vers $1$ c'est un terme, et un morphisme vers $m$ c'est une suite de $m$ termes).
On peut définir comme d'habitude un modèle de $T$ comme un ensemble muni d'opérations blabla (comme dans mon post avec HT); la remarque de Lawvere c'est qu'on peut le faire "plus conceptuellement" en remarquant que c'est pareil qu'un foncteur $C_T\to \mathbf{Set}$ qui préserve les produits : à un tel foncteur $M$ on associe l'ensemble $M(1)$, et pour chaque symbole $f$ d'arité $n$ on a un terme $f : n\to 1$ dans $C_T$ qui nous donne un morphisme $M(1)^n\cong M(n)\to M(1)$; et bien sûr l'identification des termes dans $C_T$ entraîne que $M(1)$ muni de ces opérations est un modèle de $T$.
Inversement, si on part d'un modèle $M$ de $T$, on a un foncteur $n\mapsto M^n$ qui est défini de manière évidente sur les morphismes; et qui préserve bien les produits. Ensuite on vérifie facilement que ces deux constructions sont quasi-inverses l'une de l'autre : $Mod_T \simeq Fun^\times(C_T,\mathbf{Set})$ où j'ai noté $Mod_T$ la catégorie des modèles de $T$ (oui bien sûr je n'ai pas précisé au-dessus mais ces constructions sont bien fonctorielles) et $Fun^\times(C,D)$ est la catégorie des foncteurs $C\to D$ qui préservent les produits.
A partir de là on peut faire plusieurs remarques :
1- Si on remplace $\mathbf{Set}$ par une autre catégorie $E$ qui a des produits, on obtient naturellement quelque chose qui mérite de s'appeler "modèle de $T$ dans $E$": ça permet d'uniformiser les définitions, et de repérer pourquoi si on applique un foncteur qui préserve les produits à un modèle de $T$ on obtient un autre modèle de $T$ (parce que les foncteurs qui préservent les produits se composent). Exemple : c'est quoi un groupe de Lie ? Un groupe dans la catégorie des variétés différentielles, bim je n'ai besoin de rien dire de plus.
2- La catégorie $C_T$ a une forme très spéciale (ses objets sont les entiers), qui est liée à la forme de nos théories : ce sont des théories algébriques très simples, puisqu'elles n'ont qu'un type. Si on change un peu tout ça on obtient des notions plus générales, et les modèles seront simplement les foncteurs qui préservent les limites : pas besoin de refaire toute une théorie.
3- Le foncteur identité $C_T\to C_T$ préserve les produits : c'est donc un modèle de $T$ dans $C_T$ : le modèle universel - universel parce que tout modèle s'obtient comme $F($ lui $)$ pour un foncteur $F$ qui préserve les produits (cette idée que le modèle universel n'est pas ensembliste est souvent reprise, notamment - je le dis parce que tu aimes ça - dans les topoi : le topos classifiant d'une théorie géométrique contient un modèle universel de cette théorie, au sens où tout modèle s'obtient en appliquant un morphisme géométrique à ce modèle)
Mais le point fondamental, qui est en réalité très simple, et qui implémente notre heuristique de départ, est que la catégorie $C_T$ (qui mérite de s'appeler catégorie syntaxique, vu sa définition) est équivalente à l'opposé d'une catégorie qu'on connait bien : les modèles de $T$ libres sur un nombre fini de générateurs !
En effet, rappelons qu'on a un plongement de Yoneda $C_T^{op}\to Fun(C_T,\mathbf{Set})$ et qu'il arrive en fait (évidemment) dans $Fun^\times(C_T,\mathbf{Set})$, i.e. dans $Mod_T$. Explicitement $n\mapsto \hom(n,-)$. En particulier le modèle associé à $n$ a pour ensemble sous-jacent $\hom(n,1)$, soit l'ensemble des termes à $n$ variables, i.e. le modèle de $T$ libre sur $n$ générateurs. Le lemme de Yoneda nous dit que ce machin est une équivalence sur son image, qui est bien la catégorie des modèles de $T$ libres.
Ainsi $C_T^{op} \simeq Libre$ (ou encore, de manière équivalente, $C_T \simeq Libre^{op}$). Comme $C_T$ c'est la syntaxe, et $Libre$ c'est la sémantique, on a bien ce que l'heuristique nous disait.
Une question naïve : tu parles de groupe de Lie etc
En fait, je vois deux moyens de définir la notion "d'objet groupe dans une catégorie $\mathcal{C}$". D'une part, on peut dire que c'est un foncteur $F : \mathcal{C}^{op} \to \text{Grp}$ tel que le foncteur obtenu en composant par le foncteur oublie $\text{Grp} \to \text{Ens}$ soit représentable. La deuxième méthode (qui demande que $\mathcal{C}$ possède des produits (et peut être plus) c'est en terme équationnelle i.e traduire les axiomes de groupes en terme de diagramme !
Je n'ai pas réfléchit du tout a l'équivalence des deux points de vu ! Il me semble que dans ton message tu parles plutôt du point de vu numéro $2$, j'ai bon ?
Pour ce qui est de ton 2è, et de ta question d'équivalence, ce n'est pas équivalent mais c'est lié. En effet, quelle que soit $C$, si elle a un objet initial, et si j'ai assez de produits (paa besoin de tous !) pour définir ma multiplication $G\times G\to G$ et pour écrire les diagrammes d'axiomes, alors j'obtiens un foncteur comme tu dis.
La raison est simple : notre groupe $G$ devient un foncteur qui préserve les produits $C_{Grp}\to C$, et on le compose avec Yoneda, qui préserve aussi les produits, donc on obtient $C_{Grp}\to Fun(C^{op}, \mathbf{Set})$, donc par Currying et decurrying un foncteur $C^{op}\to Fun(C_{Grp}, \mathbf{Set})$, soit finalement un foncteur $C^{op}\to \mathbf{Grp}$.
Evidemment on peut le décrire plus concrètement sans toute cette histoire, mais là on voit les grandes lignes.
La réciproque est vraie, si $C$ a des produits, parce qu'alors la multiplication s'écrit $\hom(-,G)\times \hom(-,G)\to \hom(-,G)$, soit $\hom(-, G\times G)\to \hom(-,G)$, d'où par Yoneda $G\times G\to G$.
Mais évidemment si $C$ m'a pas assez de produits... il suffit de prendre une catégorie $C$ avec un groupe $G$ au sens naïf tel que $G$ n'est pas isomorphe à $G\times G$ (en tant qu'objets de $C$), et de retirer à $C$ tous ses objets isomorphes à $G\times G$. Alors $\hom(-,G)$ reste un foncteur en groupes, mais $G$ n'est plus un groupe dans $C'$.
Je ne sais pas s'il y a beaucoup d'exemples moins artificiels (il faudrait déjà une catégorie qui n'a pas tous les produits, et dans la nature c'est pas courant :-D )
Mais en fait ce qu'on fait c'est l'astuce usuelle de remplacer $C$ par les préfaisceaux sur $C$
Oui effectivement je préfère voir les choses plus terre à terre (pas assez solide en catégorie pour me permettre trop d'abstraction).
Donc $G$ un objet groupe au sens équationnelle sur un catégorie $\mathcal{C}$ qui possède les bonnes propriétés. Donc un groupe c'est la donnée de deux morphismes :
$$
e : \{ \star \} \to G \qquad \bullet : G \times G \to G \qquad \qquad \text{Avec $\star$ un objet terminal}
$$
Vérifiant des équations en diagramme (relou je zappe).
Donc on peut définir le foncteur associé à $G$ disons $\widehat{G} : \mathcal{C} \to \text{Ens}$ qui est simplement $\text{Hom}( \bullet, G)$. C'est le classique.
Pour faire le lien avec le 1er point de vu : " préfaisceau de $\mathcal{C}$ dans $\text{Grp}$ " il faut définir la loi de groupe sur $\widehat{G}(R)$ pour $R$ un objet de $\mathcal{C}$.
Pour $R \in \mathcal{C}$ et pour tout couple $(\alpha,\beta) \in \widehat{G}(R)$, on obtient (par la propriété du produit) un morphisme $R \to G \times G$ et qui donne un morphisme $R \to G$ par composition avec la multiplication $\bullet$.
Pour l'élément neutre, comme $\star$ est terminal, on dispose d'un morphisme (unique) $R \to \star$ et qui donne un morphisme de $R \to G$ en composant par $e$.
Bon ensuite faut vérifier que tout tourne bien :-D
Edit : bien sûr j'ai oublié le morphisme codant l'inversion dans le groupe !!!
Et ce que je disais c'est que si $C$ a des produits, Yoneda te fournit une réciproque; mais sans produits tu peux avoir plus de "préfaisceaux représentables qui sont des groupes" que de groupes.
(exo: vérifier que cette définition est équivalente à une autre plus répandue).
(edit: ah ça a été déjà dit! Et en plus, il faut que $g\times g \times g$ existe...)
Exemples: groupes de Lie pour la catégorie des variétés différentielles.
$$
R \mapsto \{x \in R \mid x^4-1 = 0\}
$$
C'est un pré-faisceaux sur la catégorie $\text{Ann}^{op}$ et je pense qu'on dit $\mu_4$. Bien entendu c'est représentable par $\Z[x] / (x^4-1)$.
Alors pour tout $R$, l'ensemble $\mu_4(R)$ peut être muni d'un structure de groupe (sous-groupe de $R^\times$), c'est bien fonctoriel. Du coup, si on y croit à la fin du fin on doit obtenir des morphismes entre anneaux (sauf connerie mais je pense que c'est classique) ! J'aimerais bien les voir !
Je pense que pour l'unité c'est simplement le morphisme de $\Z[x] / (x^4-1) \to \Z$ donné par $x \mapsto 1$. Si j'ai le courage j'essayerai de suivre la démonstration histoire d'y voir clair !
Désolé pour le hors sujet ;-)
(petite remarque : ton foncteur n'est un foncteur en groupe que si dans "anneau" tu sous-entends "commutatif". Dans ce cas, je me permets de te rappeler que le coproduit dans $\mathrm{Ann}$, i.e. le produit dans $\mathrm{Ann}^{op}$ est le produit tensoriel. ça devrait t'aider à t'écrire ta "comultiplication")
Ton petit exemple est la remarque qui fait que pour étudier les schémas affines en groupes en géométrie algébrique, on se ramène à des algèbres de Hopf !
Que se passe-t-il si l'algèbre de Hopf n'est pas commutatif ? Que devient alors le foncteur en groupe dans la catégorie des anneaux ? (:D
Je m'attendais à une réponse du style : Lorsqu'une algèbre de Hopf n'est pas commutatif, c'est donc un groupe quantique. Or, à ma connaissance, jusqu'à présent, il n'y'a pas une définition standard de ce qu'est un groupe quantique. On le reconnait à travers des exemples. Donc, s'attendre à définir un foncteur de groupe dans cette catégorie de groupes quantiques, personne peut être ne connait la réponse. Personne n'a encore abordé ce sujet. Je ne suis pas un spécialiste du domaine.
Par ailleurs, je signale que "habituellement" on a plutôt que $a^b$ ressemble à $a$ et non pas à $b$, car $a^b = (b\to a)$, ce qui met $b$ en position négative (décroissante).
Un fil autonome (que je n'écrirai pas faute de temps et de compétence) sur une preuve plus UNE FOUILLE SOIGNEE du théorème $C$ petite => $V^C$ ressemble à $C$ et gagne un voyage au soleil ("est un topos") m'apparaitrait particulièrement pertinent. Et satisferait probablement un grand nombre de lecteur qui ne s'expriment pas, et visitent toutes ces discussions en ressortant frustrés.
Je rappelle que mon style brutal est pour concision, que tout ceci est amical et une simple "idée" à prendre ou pas, ça n'oblige personne à rien.
Ok j'ai vu les morphismes :
$$
\Z[x] / (x^4-1) \to \Z[x] / (x^4-1) \otimes \Z[y] / (y^4-1)
$$
donné par $x \mapsto x \otimes y$.
Niveau action de groupe. Ce groupe $\mu_4$ agit (par multiplication) sur $\mathbb{A}^1$ (par exemple) ce qui doit donner un morphisme d'anneau :
$$
\Z[x] \to \Z[x] /(x^4-1) \otimes \Z[y]
$$
Tiens je vais faire mumuse normalement y'a un objet groupoïde qui doit sortir :-D
Une question cependant : dans ton post ici tu dis théorie algébrique et ensuite tu parles de la catégorie syntaxique $\mathcal{C}_T$.
Je pense avoir compris $C_T$ et ton histoire de foncteur de $C_T \to \text{Ens}$ qui donne un modèle. Si j'ai pigé l'ensemble qui va être doté de lois codées par ta catégorie $C_T$ est $M(1)$. Mais le truc que je ne comprends pas c'est comment codes-tu une action de groupe sur un ensemble dans ce langage ? puisque tu as deux types différents : un groupe et un ensemble ? C'est peut être que c'est pas algébrique ?
Comme je n'y connais strictement rien, n'hésites pas a me dire si c'est du charabia :-D
1- si tu t'intéresses aux actions d'un groupe $G$ fixé, c'est facile, tu mets des opérations d'arité $1$ pour chaque élément de $G$ avec les équations évidentes.
2- si tu veux faire varier $G$ aussi, il.faut modifier le cadre un poil poir autoriser plusieurs types/sortes, mais c'est pas compliqué : tu prends un ensemble de types $S$, et au lieu de dire que les objets sont les entiers naturels, tu vas dire que les objets sont des listes à valeurs dans $S$, et les morphismes d'une liste $l$ de taille $n$ vers une liste $q$ de taille $m$ vont être les uplets de $m$ termes de "signature $l$" (i.e. des termes qui prennent $l$ comme "input) et tels que le type du $k$-ième est $q_k$.
Tu composes de manière évidente, et tu rajoutes les axiomes de ta théorie à plusieurs types, et tu obtiens aussi une catégorie symtaxique qui va aussi classifier lea modèles de $T$; et étant donné un foncteur $M$ qui préserve les produits et $s\in S$, bah $M(s)$ sera l'interprétation de $s$ associée