théorème de Gödel pour les nuls

Amis mathématiciens, bonjour !

Je suis philosophe, et je travaille sur la philosophie de Hegel. Celle-ci, dans la ligne du néoplatonisme, se pose en particulier le problème des repports de la limite avec l'ensemble qu'elle limite; C'est ainsi que j'en suis venu à m'intéresser au théorème dit d'incomplétude, de Gödel. Malheureusement, je ne parviens pas à comprendre les (deux ?) énoncés de ce théorème, que je me contente alors de comprendre à travers un penseur des religions, Régis Debray. Celui-ci décrit la loi d'incomplétude comme ceci : "Un tout ne peux se compléter lui-même". Autrement dit, la limite est toujours extérieure à ce qu'elle limite.

Voici mes questions :
1) Cet énoncé compréhensible par les non-mathématiciens est-il recevable ? Et en quoi peut-il bien différer des énoncés authentiques ?
2) Un mathématicien compréhensif aura-t-il la patience (d'essayer de) de m'expliquer les énoncés authentiques du théorème de Gödel ?

Avec mes remerciements...

Réponses

  • Le théorème de Gödel, porte sur la consistance des mathématiques.

    Pour définir une mathématique il te faut un ensemble d'axiomes de départ. Ces axiomes sont des "vérités". Par exemple pour construire les nombres entiers (ceux dont on se sert pour compter) Peano (1889) donne la liste suivante d'axiomes :

    1/ 0 est un entier naturel.
    2/ Tout entier naturel a possède un successeur, noté S(a).
    3/ Il n'existe pas d'entier naturel dont le successeur est 0.
    4/ Des nombres entiers distincts ont des successeurs distincts.
    5/ Si une propriété est vérifiée par 0 et si, pour tout entier naturel a qui la vérifie, S(a) la vérifie également, alors la propriété est vraie pour tous les entiers naturels.

    Une fois une mathématique définie, il peut se passer deux choses :
    - on arrive à démontrer par un raisonnement logique qu'il y a une contradiction entre les axiomes ce qui interdit l'utilisation de ces axiomes pour définir une mathématique (dans la mesure ou les axiomes sont sensés être tous vrai) on parlera alors de mathématique inconsistante.
    - ou bien la mathématique est consistante.

    Le théorème de Gödel dans cas où la mathématique est consistante dit qu'il existe des résultats vrai qui peuvent être formulé dans la mathématique, mais dont on ne pourra pas démontrer la validité dans la mathématique (on peut penser au théorème de Fermat) : des résultats qui se définissent à partir des axiomes de la mathématique sans que la démonstration soit accessible par ces mêmes axiomes. Ca veut dire entre autre qu'il n'existe pas de système mathématique consistant dans lequel on puisse exprimer toutes les vérités mathématiques, ou qu'il n'y a pas de vérité absolue ou toute dérive new age de ton choix...


    En espèrant avoir été clair.

    Cordialement,

    YomGui.
  • Oui, plutôt clair pour un cancre comme moi ! L'ensemble d'axiomes dont tu parles est comme une sorte de règle du jeu qui doit être capable, pour donner lieux à un jeu possible, de ne générer aucune contradiction, est-ce bien cela ?

    Mais alors, quid de ma définition "bricolée" qui proposait initialement qu'un tout, une totalité, un ensemble donné ne peut pas, sans contradiction, se compléter lui-même ? Cette proposition est-elle malgré tout valable ?
  • On peut voir les axiomes comme tu le dis, à partir du moment où ils définissent des vérités ils ne doivent pas être contradictoires.

    "un tout peut il sans contradiction se compléter lui même? "

    Avec quoi peux tu avoir envie (besoins) de compléter un tout? tout c'est tout, pas presque tout non?
  • Voici effectivement quelques éclaircissements sans doute utiles sur ma question : Prenons un exemple (qui n'est pas anodin, c'est une grande partie du problème que je -me-pose) : Soit l'ensemble de toutes les choses qui sont, quelles qu'elles soient, concrètes, abstraites, matérielles, spirituellles, fugaces ou non, etc, toutes choses absolument parlant.
    Ma question est alors celle-ci : la pensée de celui qui pense actuellment cet ensemble peut-elle appartenir à l'ensemble total qu'il pense. Voila ma torture !...
  • Fragguy, si je comprends tu cherches à évaluer la pertinence de l'énoncé de Debray comme interprétation légitime du théorème de Gödel. Sans avoir lu Debray - quelle perte de temps ! - ni être expert en gödelite, je m'étais beaucoup amusé de lire ce que disaient les auteurs d'"impostures intellectuelles" dans leur livre sur la compréhension de Debré de ce sujet. Evidemment il n'en comprenait rien et ses généralisations en dehors du domaine de la logique à la sociologie révélaient la simple sottise de l'ancien compagnon du terroriste Ernesto Guevarra.

    Donc pour répondre à ta question 1) non, cet énoncé n'a rien à voir avec ce qu'on peut tirer du théorème de Gödel. Celui-ci est un théorème de logique mathématique, toute interprétation de celui-ci dans un autre champ relève de l'imposture.

    En tout cas, bravo pour faire l'effort de vérifier la légitimité de certains philosophes à parler de mathématiques.
  • "la pensée de celui qui pense actuellment cet ensemble peut-elle appartenir à l'ensemble total qu'il pense"

    Là c'est à mon tour de pas comprendre...
  • Bonjour franggy

    tu écris : "la pensée de celui qui pense actuellement"
    Mais que veut dire "actuellement" ? Penser n'est pas instantané. Il faut un certain temps pour construire une pensée. Alors le fameux "tout" dont tu parles est-il celui qui existait avant que cette pensée n'ai été crée ou après ?
    - Si c'est avant, elle ne faisait pas partie du "tout" et c'est bien normal puisqu'elle n'existait pas.
    - Si c'est après, elle fait partie du "tout" puiqu'elle a été crée et que le "tout" contient tout.
    Alors où est le problème ?
    Ceci, bien entendu, pour le malin plaisir d'ergoter sur le "sexe des anges" comme on disait à une certaine époque...
  • Je réponds aux trois derniers messagers...

    Le problème, en effet, ne se pose pas dans le temps "éclaté" du regard qui voit du point de vue de Sirius, c'est-à-dire d'un point de vue inexistant ou, ce qui revient théoriquement au même, d'un point de vue situé à l'indéfini (pas à l'infini, car en philosophie, les deux sont très différents).

    Bref, il y a un "temps" d'existence pour la pensée. Ce temps est celui de sa présence, ou de son mouvement, il est celui de l'intériorité de la pensée, qui n'est pas une abstraction, même si elle est peu visible dans la vie ordinaire, ou dans la vie extraordinaire de la pensée lorsqu'elle se fait mathématique.
    Je situe donc ma question dans ce temps de présence de la pensée, ce temps qui, il est vrai est fuyant à l'approche, et doit faire, pour être maintenu malgré cette attitude centrifuge, l'objet d'un certain effort qui n'est pas habituel.
    Dit assez grossièrement, il est le temps "durant" lequel la pensée pense, mais cette expression n'est toutefois pas satisfaisante, il est en réalité le temps "de" la pensée, sans qu'il soit nécessaire de préciser si ce temps est mesurable, par exemple, avec une montre. Si j'osais, je dirais, mais ce qualificatif est très mal (con-)noté, il est le temps métaphysique de la pensée. En tout cas, ce temps-présence ne doit pas être négligée. Si on ne la néglige pas, alors, on peut se poser la question logique de savoir "où", dans quel "endroit" se trouve la pensée qui pense le tout, et si elle peut se trouver dans l'ensemble qu'elle pense.
    Il est alors certain pour moi, mais c'est la question que je pose ici, qu'elle ne peut être, dans l'état, à l'intérieur de l'ensemble qu'elle pense. Dans "ma" philosophie (qui est la philosphie spéculative de Hegel), cette position n'est que le premier stade d'un mouvement qui peut se poursuivre et s'intérioriser. J'irai plus loin, s'il y a des amateurs...
  • "beaucoup amusé de lire ce que disaient les auteurs d'"impostures intellectuelles" dans leur livre sur la compréhension de Debré de ce sujet"

    Te souviens-tu des ou du titre des ces ouvrages ?
  • Titre : Impostures intellectuelles
    Auteurs : Jean Bricmont et Alan Sokal

    Je crois qu'il y a tout un chapitre sur les théorèmes de Gödel et les non-sens interprétatifs de philosophes à leur sujet
  • Voici deux articles écrits par un logicien (Girard) à l'usage de l'honnête homme:

    http://iml.univ-mrs.fr/~girard/wtls.pdf.gz

    puis (en le commençant directement aux chapitre 2, page 17)
    http://iml.univ-mrs.fr/~girard/cours/hermann.pdf.gz

    Il y aussi la page wikipedia mais je ne sais pas si elle est de qualité
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Théorème_d'incomplétude_de_Gödel
  • Au fait, c’est Debray, pas Debré.

    [J'ai déjà fait la correction ;) AD]
    Algebraic symbols are used when you do not know what you are talking about.
            -- Schnoebelen, Philippe
  • Bonjour,
    S’agissant de livre "Impostures intellectuelles" les auteurs démontent de façon très convaincante l'utilisation faite par Debray du théorème de Gödel dans différents argumentaires.
    Cependant ils reportent en notes un mea culpa du philosophe qui déclarait en 1996 : "la gödelite est une maladie répandue" et "extrapoler un résultat scientifique, et le généraliser en dehors de son champ spécifique de pertinence expose (...) à de grossières bévues"...
    A méditer...
    Cette citation de Debray résume d'ailleurs assez bien l'objectif d' "Impostures intellectuelles".
    Cordialement, lionel.
  • Bonsoir,

    dans le premier message, je lis : "la limite est toujours extérieure à ce qu'elle limite".

    Il y a deux cas possibles:
    --> dans un terrain de foot, la ligne délimitant le terrain fait partie de l'aire de jeu,donc n'est pas extérieure à ce qu'elle limite.
    --> dans un terrain de rugby, la ligne délimitant le terrain ne fait pas partie de l'aire de jeu,donc est extérieure à ce qu'elle limite.

    Amicalement :)
  • Bien qu'Alain ait rectifié l'orthographe, j'abonde dans le sens de Nicolas (trois messages au-dessus) :
    ne pas confondre ce bon Régis Debray, normalien parfois un peu balourd, certes, mais sincère, avec l'inénarrable Michel Debré, premier "premier ministre" (de 1959 à 1962) de la 5ème République, tout aussi balourd et sincère lorsqu'il lança une énergique politique de natalité en déclarant : "il faut faire des enfants sur une grand échelle"..
  • Bonsoir,

    A la suite de "l'affaire Sokal", Jacques Bouveresse a écrit "Prodiges et vertiges de l'analogie", Raisons d'agir Editions, où il poursuit la dénonciation d'une utilisation abusive de concepts scientifiques en philosophie. Debray y passe un mauvais quart d'heure.

    Voir en particulier le chapitre 5 intitulé "Les malheurs de Gödel ou l'art d'accommoder un théorème fameux à la sauce préférée des philosophes".

    Nicodan
  • On trouve ce texte de Jacques Bouveresse en ligne qui évoque aussi ce sujet de la gödelite http://un2sg4.unige.ch/athena/bouveresse/bou_pens.html
  • Très intéréssant, je ne savais pas que je mettais les pieds dazns un tel marécage, merci encore pour ces excellents conseils, les maths sont les maths, la philo, la philo !
  • {\it je ne savais pas que je mettais les pieds dazns un tel marécage}

    C'est adorable! Bon je sui content d'avoir trouvé LE fil où on fume la moquette: je pense que tu ne pourras jamais avoir de réponses sérieuses à propos du théorème de Godel, essentiellement pour 3 raisons:

    1) Les logiciens ne 's'impliqueront pas à t'en donner des interprétations "philosophiques" (et, je pense, et ça n'a rien de péjoratif, ne se permettraient pas bcp d'interventions sur ce site: quand je les entends se lamenter sur les piètres qualité de wikipedia...). Donc, au mieux tu obtiendras des énoncés "bruts de pomme" et un bottage en touche sur comment l'interpreter.

    2) Effectivement, 1000 milliards de fumeurs de moquette se sont précipités sur le théorème de GOdel depuis une bonne cinquantaine d'année pour lui faire dire ce qu'ils avaient envie d'entendre. Des milliers de discours philosophico-mystiques ont été écrites

    3) Même si un logicien chevronné (comme Girard dont quelqu'un a mis une référence plus haut) te laisse l'espoir qu'il va "enfin" expliquer à l'homme de la rue ce qu'est le théorème de Godel, ses tenants, ses aboutissants, toi, tu ne le sais pas, mais en fait, un tel logicien (je parle de Girard, mais ca pourrait être Krivine, ou n'importe qui d'autre) va t'inviter dans son petit "paradis" personnel et t'assurer qu'il faut le voir comme si, et comme ca et pas autrement, et ce indépendamment du fait qu'ils le comprennent parfaitement bien (ils le comprennent tellement bien qu'ils ont fini par lui faire dire bien plus qu'il ne dit, aussi: ils ont juste l'avantage d'être passé par la bonne "entrée".

    Si tu veux te faire une idée personnelle (c'est à dire qui soit {\bf à toi} du théorème de Godel (ou plus précisément de son "aura"), j'ai essayé de le "saisir" à la fois dans sa profondeur et {\bf dans sa modestie} sur mon site, mais je peux te résumer, ce n'est pas très long.

    Appelle P une phrase qui dit "je ne suis pas démontrable". Au flou près de ce que veut dire "être démontrable", cette phrase dit, sur le monde, quelque chose de mathématique. Si tu préfères, {\bf elle est concrête!}

    Là, par exemple, je compte 26 caractères ASCII pour l'écrire. La liste des phrases "démontrables", c'est à dire la liste des suites finies de caractères ASCII qui sont "démontrables" est un objet (c'est un ensemble) mathématique plutôt concrêt en général (contrairement à ce que serait l'ensemble des phrases "vraies", par exemple).

    L'art godélique (j'abuse un peu, mais dans le bon sens) commence quand tu te rends compte que, bien que vraie (et même de contraire "incrédible") il ne serait guère satisfaisant de mettre P dans les phrases "démontrables"

    {\bf Toutes les variantes**} que tu pourras imaginer sur ce thème te mettront (certes avec ta non-spécialisation logico-mathématique) à égalité avec Godel et avec les logiciens pour réfléchir à cet aspect du "monde".

    ** L'une de ces variantes est celle de Godel lui-même: avoir choisi un ensemble acceptable et unanimement reconnu comme étant "le bon" ensemble dit "des phrases démontrables"

    Ne te laisse pas berner par ce que les gens disent: pense par toi-même autour des arguments précédents, car le reste de la "techonologie" et du folklore entourant le th godel ne lui est pas spécifique, et n'est que maths habituelles.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Mais qu’est-ce que c’est que ces procès d’intention ?
    Algebraic symbols are used when you do not know what you are talking about.
            -- Schnoebelen, Philippe
  • Hum, merci de ton effort, mais même un exemple qui devrait être simple et m'éclairer me reste opaque, je ne suis pas habitué à considérer des objets sans le mouvement de l'esprit qui y conduit, j'ai du mal avec "l'objectivité"...
  • fraggy Écrivait:
    > Très intéréssant, je ne savais pas que je mettais
    > les pieds dazns un tel marécage, merci encore pour
    > ces excellents conseils, les maths sont les maths,
    > la philo, la philo !

    Menteur, on t'avait prévenu !
  • A signaler: dans le dernier numéro des Notices de l'AMS* il y a justement une présentation élogieuse d'un livre récent sur les us et abus du théorème d'icomplétude

    http://www.ams.org/notices/200703/rev-raatikainen.pdf

    *revue généraliste destinée à la communauté mathématique (probablement la plus connue dans ce genre).
  • Bonjour,
    Pour en rajouter une couche , je dirai à Fraggy qu'en mathématique , un ensemble ne recouvre pas du tout la même notion que pour le commun des mortels, du moins pour les logiciens.Par exemple je ne peux pas parler de l'ensemble de mes pensées...
    La logique est une belle chose à condition de savoir en sortir.
    Bonnee journée.
    Jean-Louis.
  • Pourquoi ne "peut"-on pas parler de l'ensemble constitué de toutes mes pensées, passées, actuelles et futures ?:S
  • Bonjour Fraggy.

    Tu peux toujours parler de "l'ensemble de toutes les pensées" ou de ce que tu veux d'autres, mais rien ne te dit que cet "ensemble" réponde aux critères de la théorie formelle des ensembles. Le mode de construction d'un ensemble est très codifié et cet "ensemble de toutes les pensées" n'y répond pas.
  • Quel sont ces critères ?
  • Dixit : "Pourquoi ne "peux"-t-on pas parler de l'ensemble constitué de toutes mes pensées, passées, actuelles et futures ? "
    Alors, de deux choses l'une :
    - soit mes pensées futures n'existent pas encore, donc cet ensemble n'existe pas. (S'il existe un jour, c'est que j'aurai terminé de penser. Donc je serai mort, ou à l'état de légume. Triste perspective. Mais, Dieu merci, je ne serais plus là pour m'en rendre compte, puisque j'aurai terminé de penser)
    - soit mes pensées futures existent déjà et ce merveilleux ensemble existe bien. Dans ce cas, "tout" est écrit d'avance. Je n'ai même plus la liberté de modifier mes pensées futures. Il y en a qui croient à cela...
    !!!
    Ceci, bien entendu, pour le malin plaisir d'ergoter sur le "sexe des anges" comme on disait à une certaine époque... et je vois qu'il n'y a pas beaucoup de changement, au vocabulaire près !
  • {\it Tu peux toujours parler de "l'ensemble de toutes les pensées" ou de ce que tu veux d'autres, mais rien ne te dit que cet "ensemble" réponde aux critères de la théorie formelle des ensembles. Le mode de construction d'un ensemble est très codifié}

    ???????

    Il n'y a pas de rapport entre l'ensemble de tes pensées et la théorie des ensembles, {\bf mais il n'y a pas non plus de raisons} que tu ne puisses pas {\bf supposer} que ton ensemble de pensées ne soit pas un {\bf vrai} ensemble.

    La "théorie des ensembles" ne "construit" pas des ensembles. C'est une liste d'axiomes, écrite avec le symbole $\in$ et d'inspiration intuitive, c'est tout. Donne le nom "toto" à l'ensemble de tes pensées et raisonne dessus à volonté en t'amusant le plus possible, et quoiqu'il arrive, en maths, la seule chose qui compte {\bf ce sont les preuves}. Si tu prouves un truc à propos de l'ensemble de tes pensées, et que ce truc est assez "excitant", il sera le bienvenu au "panthéon" des théorèmes de maths, au même titre que n'importe quel autre. Par contre, attention: utilise un standard correct! J'ai réçu (je ne sais d'ailleurs pas pourquoi c'est sur moi qu'ils se sont acharnés) un nombre incalculable de "papiers" de philosophes torturés ces dernières années qui n'avaient aucun sens et qui prétendaient avoir "cassé" ZF" ou le th de godel, bref... Peut-être que leurs raisonnements étaient valables, mais ils avaient une profondeur de 1: ie toutes les assertions intermédaires étaient des hypothèses (faute de mieux) et leur conclusion aussi du coup.

    Tout raisonnement est valable (on peut voir les choses ainsi) mais certains (je pense entre autre aux raisonnements non sincères enfantins) ne sont qu'une liste d'hypothèses.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Tiens, il me viens une idée lumineuse, un vrai breakthrough pour élargir le sujet philosophique :
    Parler de l'ensemble de "mes idées passées, présentes et futures" est vraiment si peu de chose, Pourquoi ne pas parler de l'ensemble des idées que j'aurais pu avoir, mais que je n'ai pas eues, de celles futures que je pourrais avoir et que je n'aurais pas ? Là, au moins, ce serait un bel ensemble et je peux vous dire que certaines de ces idées vaudraient leur pesant de caca(houète), si on s'en réfère à celle que je viens d'avoir et qui à partir de l'instant même, est incluse dans l'ensemble dont il était question initialement.
  • Monsieur Chalons, je vous dispense de vos points d'interrogations que je trouve offensants.

    "Il n'y a pas de rapports entre l'ensemble de toutes les pensées et la théorie des ensembles" est une affirmation gratuite. Justement le risque de confusion réside dans le fait que l'on puisse vouloir appliquer à ce soi-disant ensemble les raisonnements formels mathématiques et l'on risque fort de parvenir à des antinomies à la Frege.
  • de deux choses l'une :
    > - soit mes pensées futures n'existent pas encore,
    > donc cet ensemble n'existe pas. (S'il existe un
    > jour, c'est que j'aurai terminé de penser. Donc je
    > serai mort, ou à l'état de légume. Triste
    > perspective. Mais, Dieu merci, je ne serais plus
    > là pour m'en rendre compte, puisque j'aurai
    > terminé de penser)
    > - soit mes pensées futures existent déjà et ce
    > merveilleux ensemble existe bien. Dans ce cas,
    > "tout" est écrit d'avance. Je n'ai même plus la
    > liberté de modifier mes pensées futures. Il y en a
    > qui croient à cela...


    Mais en quoi ceci a-t-il un rapport avec la logique, que quelque chose existe, ou non ?
  • JJ Écrivait:
    > Tiens, il me viens une idée lumineuse, un vrai
    > breakthrough pour élargir le sujet philosophique
    > :
    > Parler de l'ensemble de "mes idées passées,
    > présentes et futures" est vraiment si peu de
    > chose, Pourquoi ne pas parler de l'ensemble des
    > idées que j'aurais pu avoir, mais que je n'ai pas
    > eues, de celles futures que je pourrais avoir et
    > que je n'aurais pas ? Là, au moins, ce serait un
    > bel ensemble et je peux vous dire que certaines de
    > ces idées vaudraient leur pesant de caca(houète),
    > si on s'en réfère à celle que je viens d'avoir et
    > qui à partir de l'instant même, est incluse dans
    > l'ensemble dont il était question initialement.


    Ah, ca devient intéréssant : pour moi, cet ensemble est improbable et impossible, car l'idée qui pense cet ensemble ne peut s'y inclure DURANT LE TEMPS Où ELLE EXISTE. Qu'en pensez-vous, Messieurs les mathématiciens ? C'est pas pour rigoler, ceci est le début d'un déroulement très important, pas de blague, SVP ! L'existence n'est ici qu'un simple marqueur, ce qui compte, c'est que l'entité qui englobe soit dans l'impossibilité d'être incluse dans l'ensemble qu'elle englobe...
  • Bruno a dit: {\it Justement le risque de confusion réside dans le fait que l'on puisse vouloir appliquer à ce soi-disant ensemble les raisonnements formels mathématiques et l'on risque fort de parvenir à des antinomies à la Frege}

    Tu as parfaitement raison! Et justement, ce n'est pas un problème. Une antinomie est le "doux" nom donné à un raisonnement d'un certain style, et tu pourras t'y prendre comme tu veux, il sera soit non formel, soit valable. A mon avis, mieux vaut une preuve du faux et une recherche (subjectives) des hypothèses qu'on se fera un devoir de rejeter que pas de raisonnement du tout.

    Un préjugé encore répandu (surtout chez les philosophes, mais un peu aussi chez les mathématiciens "middle zone"***) est de croire que les antinomies et les paradoxes seraient fondés sur des erreurs de raisonnements: c'est absolument faux, et surtout subjectif. Ce sont des raisonnements (quand ils sont formels évidemment, sinon, c'est pas des maths) parfaitement valables qui établissent que telles et telles et telles hypothèses impliquent le faux.

    Par exemple:

    {\it Soit $n$ le plus petit entier non définissable en moins de 1000 mots. Il existe car il n'y a qu'un nombre fini d'entiers définissables en moins de 1000 mots.

    Par ailleurs la suite de symbole "le plus petit entier non définissable en moins de 1000 mots" est une définition de $n$. Elle contient moins de 1000 mots. Donc $n$ est définissable en moins de 1000 mots. Donc $n$ est et n'est pas définissable en moins de 1000 mots. Donc tout (ie "le faux")}

    est un raisonnement parfaitement écrit (les gens entrain de le lire voient bien qu'il est écrit et clair). Il établit que les hypothèses aussi bien tacites qu'explicites utilisées dedans impliquent le faux.

    Je donne une liste de ces hypothèses histoire d'être soigneux:

    (1) les entiers définissables en moins de 1000 mots forment un ensemble fini

    (2) Pour tout ensemble fini F, il existe un plus petit entier qui est en dehors de F

    (3) la suite de caractères $toto:=$ {\it ["le plus petit entier non définissable en moins de 1000 mots"]} est une définition de moins de 1000 mots
    (4) Si on note $n$ le plus petit entier non définissable en moins de 1000 mots, alors $toto$ est une définition de $n$

    Et quelques autres (inoffensives)...

    ***catégorie "sociologique" que je viens "d'inventer": les mathématiciens qui ne font pas de recherche mais qui sont "professionnels" à leur manière, et parfaitement compétents en maths "scolaires" (les inspecteurs généraux, les profs de prépa, les agrégés qui n'ont pas "abandonné" les maths après leur agreg, etc, bref tous les "matheux" qui savent parfaitement résoudre une intégrale triple ou diagonaliser une matrice mais qui ne connaissent de la logique (ou d'un autre domaine vraiment abstrait) que les UV de licence)

    PS (la description ci-dessus n'a rien de péjorative, c'est juste un ciblage sociologique pour dire que la séparation sémantique/syntaxique n'est pas forcément "élucidée" même chez des matheux chevronnés (il n'y a qu'à voir le nombre d'erreurs de raisonnement dans certains manuels de 2nd cycle (pourtant écrits par des gens reconnus))
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Salut fraggy,

    je me lance dans la discussion.

    Comme le dit Christophe Chalons, tu peux introduire l'ensemble de pensées que tu veux : philosophiquement cela ne pose pas de problème. Maintenant, si tu veux le voir mathématiquement, tu devras passer par une modélisation ou ajouter un ou plusieurs axiomes à la théorie des ensembles introduisant ton ensemble et de quel façon, on peut le manipuler. Dans les deux cas, il faudra que tu définisses également diverses opérations que l'on peut faire sur les pensées. Après cela, si tu démontres quelque chose à propos de cet ensemble, tu auras bien obtenu un théorème et tu auras bien fait des maths. Maintenant, je te souhaite bon courage pour définir une axiomatique sur les pensées qui soit, à la fois, incontestable, non contradictoire et consistante philosophiquement.

    Il faut bien comprendre aussi que lorsque l'on fait une modélisation, la modélisation n'a que peu de chose en commun avec la réalité : elle ne l'approxime que très grossièrement.

    Avant d'interpréter quelques théorèmes mathématiques à la philosophie, c'est une telle démarche qu'il faut faire. Cela me parait bien utopique.
  • Bonjour à tous!

    je fais un petit point quant au problème, et aux changements que cette discussion me suggère. Tout d'abord, je le confirme, c'est en toute naïveté que j'ai posé LA question concernant la compréhension de Sieur Debray Régis du Théorème de Gödel. Ce qu'il faut savoir, c'est que celle-ci ne provenait pas de ses écrits de sociologie ("médiologie", que d'après la colère de J. Bouveresse, on pourrait ou devrait appeler "médiocrologie"), mais d'un petit livre ("Pour en finir avec les religions"), et que cette allusion au théorème n'était, dans ce livre, qu'une toute petite note de page, mais qui a, effectivement, retenu mon attention. Bref, je ne connaissais pas vraiment le passé polémique de Debray, et quand J. Bouveresse critique l'application du théorème à des faits de sociologie, il est vrai, il y a de quoi se mettre en colère, tant le détournement semble grand... Cela dit, mon propos est différent, le rapprochement que je suggérais ne s'appliquait pas à un fait de science humaine, mais plutôt à un problème logique (voir plus haut), où l'on est déjà plus proche des mathématiques. Ma question ne touchait donc pas du tout l'affaire Debray, même si je m'appuyais sur sa "compréhension" (je devrais dire, d'après les spécialistes, sa mécompréhension) du théorème de Gödel, elle touche en réalité à un questionnement phénoménologique. Par rapport à la phénoménologie, je dois dire que ces divers aller-retour sur ce forum m'ont rendu un inestimable service, d'ailleurs, j'avais déposé la même question sur six forums de math, et celui-ci est le seul où une discussion s'est engagée. J'y ai trouvé beaucoup de références et de réponses, et je vous en remercie. J'ai pu, en particulier lire la conférence de J. Bouveresse, "Qu'appellent-ils "penser" ?", qui est parfaitement claire, ainsi que l'article de David Morisi, "Le fantasme de l'incomplétude". En ce qui concerne le théorème de Gödel lui-même, je n'ai toujours pas compris son sens, mais cette remarque n'est pas si négative qu'elle n'en a l'air, en effet, grâce à nos discussions, j'ai bien compris, ou tout au moins, j'ai pu admettre que les mathématiques sont un sport très particulier et tout à fait précis, que je "traduirais" (très mal) par l'activité consistant, en gros, à créer divers mondes, puis, à "jouer" avec les règles de ces mondes, afin d'observer ce qu'il s'y passe. C'est sans doute un peu cavalier, vous me le pardonnerez. En tout cas, l'important est ceci : cette démarche n'est pas du tout celle de la phénoménologie qui est la mienne. Effectivement, il est extrêmement dangereux de croiser les mathématiques avec une discipline dont les attendus et les méthodes ne se recoupent pas. Dans ce cas, la naïveté, dont je suis maintenant débarrassé, pour une grande part, est particulièrement néfaste ! La phénoménologie, en ce qui concerne sa propre démarche, est même, je crois, aux antipodes de celle des mathématiques. Elle ne consiste pas à créer des limites et des règles de toutes pièces, mais à observer le plus strictement possible le réel déjà existant, tel qu'il se présente à nous, le phénomène, c'est-à-dire la forme normalement invisible ou non pertinente des évènements qui constituent la pensée au sens large. L'activité la plus importante de la phénoménologie, c'est en quelque sorte sa passivité immédiate face à ce qu'elle observe. Cette démarche n'est rien d'autre que celle de la science objective, mais appliquée à l'outil de la connaissance qui est l'esprit humain. Je ne crois donc pas que ce soit là un souci pour les mathématiques, qui utilisent cet outil et manient des représentations. En conclusion, faute de comprendre un élément d'un savoir qui n'est pas le mien et auquel je n'ai pas accès, je m'abstiendrais, dorénavant de toute allusion directe au théorème de Gödel, ou tout au moins, sans le replacer dans ce contexte, où cette allusion ne serait qu'une simple et vague analogie. Je peux et je dois me passer du théorème de Gödel. Quel dommage !
  • {\it Je peux et je dois me passer du théorème de Godel}

    Mais non.... Un philosophe qui se passe de Godel, c'est comme un archéologue qui n'aime pas voyager

    Eclate-toi, le Th de Godel il est absolument délicieux, à tout point de vue
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Bonjour,

    A propos de ce génie que fût Kurt GÖDEL : C'est curieux, comme les mathématiciens et les philosophes (surtout ce Bouveresse, très frileux - et très prétentieux - sur ce sujet ! Serait-ce qu'en disciple du petit Witgenstein, il se soit aperçu des faiblesses de celui-ci par rapport à Gödel ? CQFD !) sont silencieux sur le fameux théorème de Gödel (non pas celui d'incomplétude, encore que ne préparait-il pas ainsi la voie ?...) de 1970 (8 ans avant son décès) à propos de la "preuve "de l'existence" de Dieu" d'après Anselme de Canterbury ?!
    Eh oui, Gödel estimait (contrairement au sieur Bouveresse athée par facilité et par paresse), ainsi qu'Einstein, Paul Davies, David Bohm, Roger Penrose (etc.,), que Dieu ou sous une autre approche la Conscience avec un "C" majuscule, (soit la Conscience de toute conscience individuée) cela pouvait se défendre après le nihilisme pseudo rationnel de ce minus habens de Kant et de son prédécesseur Descartes (qualifié à juste titre "d'inutile et d'incertain" par Pascal) ! Bref, que ce n'était en rien irrationnel de soutenir la possibilité de Dieu, puisque aujourd'hui, Alain CONNES soutien avec justesse (surtout quant on lit un débile comme "Chapi-Charpock-Charpapak" et son occultiste midinette "Bro-Broch") que l'origine des mathématiques constitue une Réalité indépendante du processus biologique neuronal, et il a entièrement raison. Dès lors, si l'on accepte qu'il existe cette réalité mathématique, (non réductible à des interactions synaptiques de cellules nerveuses) l'on se doit de concevoir que la Réalité (Métaphysique) de Dieu est également possible dans un autre degré ou un autre état d'Universalité...
    Avec mes compliments distingués,
    Gros-GROUINK


    [Grouink, reprends ta respiration ...
    Le sujet n'est pas encore classé HorsMath. Ce n'est peut-être pas la peine de le dénaturer. AD]
Cette discussion a été fermée.