Démonstration du binôme

Bonsoir,

Si ma mémoire est bonne ce qu'on appelle le binôme de Newton est en fait un théorème dû à Pascal (1654), cependant quel en était sa démonstration ? Bien entendu je parle de la démonstration, car apparement le triangle arithmétique était connu bien avant.

Merci d'avance,

Siegfried

Réponses

  • Dans le binôme de Newton qui était le deuxième larron? X:-(

    Plus sérieusement cela m'étonnerait que personne avant Newton n'ait remarqué les propriétés des coefficients de $(1+x)^n$
  • Newton c'est la généralisation aux puissances rationnelles 1665, et Euler l'énonce dans son Introductio 1748 sans aucune preuve, c'est Abel qui est le premier à en fournir une preuve rigoureuse. Mais pour le fameux binôme, je voudrais connaitre la preuve de Pascal, et comme je l'ai dit le triangle était connu avant lui par les perses, chinois et j'en passe.
  • Bonjour @Siegfried,

    J'avais lu que Pascal avait écrit le triangle jusqu'à l'ordre $5$, puis avait démontré la formule des coefficients par la récurrence $\displaystyle C_{n}^k =C_{n-1}^{k-1}+C_{n-1}^k.$ Le triangle porte son nom, en France, parce qu'il a démontré de nombreuses relations lorsque l'on considère les nombres du triangle en ligne (plus ou moins droites), on trouve de tout : Fibonacci, nombres triangulaires, nombres pyramidaux, ... nombres naturels (dans l'ordre)...
  • Bonjour,

    La question est abordée par Pascal dans Divers usages du triangle arithmétique dont le générateur est l'unité dont la quatrième partie traite de l'«Usage du triangle arithmétique pour trouver les puissances des binomes et des apotomes». Voici sa conclusion dans la célèbre édition de Lafuma (P[small]ASCAL[/small], Œuvres complètes, Éditions du Seuil, Paris, 1963, p. 63) :

    Je ne donne point la démonstration de tout cela, parce que d'autres en ont déjà traité, comme Hérigone, outre que la chose est évidente d'elle-même.
  • Merci YvesM, et surtout merci gb, j'ajoute cela à mes petites connaissances en histoire des maths.
  • On peut consulter sur le site Gallica de la BnF l'ouvrage original : B. P[small]ASCAL[/small], Traité du triangle arithmétique, avec quelques autres petits traitez sur la mesme matière, Guillaume DDesprez, Paris 1645.

    L'ouvrage est accessible par ce lien ; je joins le fac-simile de la conclusion.53355
  • En fait, Hérigone ne prouve rien.

    Voici, toujours sur le site Gallica, le lien pour la première page où commence l'exposé de sa proposition cinquième : trouver promptement quelconque puissance on voudra d'un binome ou residu. Le triangle arithmétique apparaît sur la page suivante, mais aucune démonstration n'est donnée.
  • Tout dépend ce que tu appelles "théorème du binôme". Si tu ne l'énonces pas, il est difficile de répondre, puisqu'il y a une version évidente qui ne nécessite pas de démonstration (qui est la tautologique suivante):

    $$(a+b)^n=\sum_{(i,j)\in OK} Coef(i,j)a^ib^j$$

    où $Coef(i,j)$ désigne le nombre de fois que le monôme $a^ib^j$ apparait quand on développe $(a+b)^n$, c'est à dire le nombre de parties de $n$ qui sont de cardinal $i$, OK étant l'ensemble des couples $(i,j)\in n^2$ tels que $i+j=n$

    Le calcul de $Coef(i,j)$ peut être vu comme faisant partie (ou ne faisant pas partie) d'un truc qui s'appelle "théorème du binôme".
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Christophe: Je ne parle jamais du théorème du binôme, as-tu lu mon post ? Je voulais simplement connaitre la démonstration de Pascal.

    Bref, gb: Merci encore, je ne connaissais pas du tout ce site, au final on a donc une tentative d'arnaque de Pascal.
  • Comme le dit christophe c, tout dépend ce que l'on met dans le résultat à démontrer.

    Ce message a été l'occasion pour moi de me replonger dans les textes mathématiques de Pascal que j'avais étudié il y a une quarantaine d'années pour les présenter à un public d'agrégatifs de lettres.

    1. Traité du Triangle Arithmétique

    Le triangle arithmétique est défini comme une suite double \({(t_{m,n})}_{(m,n)\in\N^2}\) soumise à la seule condition :
    \[\forall(m,n)\in\N^{*2}\qquad t_{m,n} = t_{m-1,n}+t_{m,n-1}.\]

    Edit : corrigé d'après l'indication de Siegfried.

    Les propriétés des coefficients du triangle sont établies par des récurrences non formalisées, et ne concernent que des formules liant entre eux les coefficients \(t_{m,n}\)

    Le générateur \(t_{0,0}\) du triangle est un nombre quelconque et Pascal ne remarque à aucun moment la dépendance linéaire des éléments du triangle en fonction de ce générateur.

    2. Usage du Triangle Arithmétique pour les Combinaisons

    Pascal établit comment les problèmes usuels de dénombrement utilisant des combinaisons de \(p\) objets parmi \(n\) peuvent être résolus grâce au triangle arithmétique dont le générateur est l'unité : il fait ici le lien entre les éléments \(t_{m,n}\) du triangle et les nombres \(\binom{n}{p}\) de combinaisons

    3. Usage du Triangle Arithmétique pour trouver les puissances de Binomes & des Apotomes

    Pascal se borne ici à rappeler des résultats «classiques et évidents» : l'exposé est peut-être plus clair chez Hérigone, mais cela se résume à remarquer que le tableau des coefficient des termes \(a^mb^n\) dans le développement de \((a+b)^{m+n}\) suit la règle de construction du triangle arithmétique pour en déduire que le développement du binôme est :
    [(a+b)^{m+n}=t_{m,n}a^mb^n.\]

    4. De numerorum continuorum productis, seu, de numeris qui producuntur ex multiplicatione numerorum serie naurali procedentium

    Pascal étudie ici les produits de nombres entiers consécutifs, que l'on appelait naguère les nombres \(A_n^p\) d'arrangements de \(n\) objets \(p\) à \(p\).

    5. Combinationes

    Pascal revient sur les nombres de combinaisons \(\binom{n}{p}\) pour lesquels il cherche une détermination n'utilisant pas le triangle arithmétique ; il obtient l'expression de \(\binom{n}{p}\) comme quotient de deux produits de nombres entiers consécutifs, l'équivalent de l'expression moderne en terme de factorielle.

    Mais Pascal ne relie à aucun moment cette expression des coefficients \(\binom{n}{p}\) aux puissances du binôme.
  • gb ne voulais-tu pas écrire $t_m,n=t_{m-1,n}+t_{m,n-1}$ ?

    Je parlais bien de $(a+b)^n=a^n+na^{n-1}b+\frac{n(n-1)}{1\dot 2}a^{n-2}b^2+\frac{n(n-1)(n-2)}{1\dot 2\dot 3}a^{n-3}n^3+\cdots$, la somme étant finie et s'arrêtant après n+1 termes. Donc en gros, il étudie les propriétés du triangle arithmétique en les reliant aux combinaisons, à la "tautologie" décrit pas christophe c, mais n'en donne pas l'expression en produit d'entiers ?

    Je suis entrain de lire le 2 "Lorsque que plusieurs choses, on donne le choix d'un certain nombre, toutes les manières d'en prendre autant qu'il est permis, entre toutes celles qui sont présentées, s'appellent les différentes combinaisons", je vais continuer cette lecture qui s'annonce passionnante.
  • Oui c'est ça : Pascal étudie les coefficients du triangle arithmétique pour eux-mêmes, puis il les relie d'une part au nombre de combinaisons, d'autre part au développement du binôme.
    Il revient ensuite sur les combinaisons pour en décrire l'expression sous la forme aujourd'hui usuelle \(\dfrac{n(n-1)(n-2)\dotsm(n-p+1)}{1.2.3\dotsm p}\).

    Pascal connaît bien évidemment la transitivité de l'égalité, et on ne peut pas imaginer qu'il n'ait pas vu la possibilité d'exprimer les coefficients du triangle sous cette dernière forme, mais il n'en fait jamais état dans ses écrits.

    Il est toujours hasardeux d'interpréter la pensée des anciens, mais je pense que Pascal n'aurait pas accordé une grande importance à la formule du binôme telle que nous la concevons aujourd'hui : pouvoir lire immédiatement les coefficients du binôme dans le triangle arithmétique devait lui paraître une méthode infiniment supérieure à l'expression utilisant des produits d'entiers consécutifs, produits qu'il n'avait pas les moyens de noter de façon efficace.
  • Merci à toi gb, sais-tu si dans leurs écrits les "anciens" décrivent l'histoire de leurs considérations mathématiques ? Comment sont-ils parvenus à leurs résultats, et pourquoi ils ont été amené à travailler dessus ? Je déplore souvent le manque d'histoire sur les intuitions de chacun.
  • En général, on n'explique pas le cheminement de sa pensée : il ne faudrait pas qu'un autre en profite pour obtenir des résultats par ce moyen.

    A la fin du traité des combinaisons (IX. Combintationes de l'édition Desprez), Pascal explique que la formule des combinaisons par quotient de produits d'entiers consécutifs lui a été communiquée par M. de Ganières, mais sans démonstration. Pascal reconnaît avoir été effrayé par la difficulté du problème, mais être finalement parvenu à une démonstration via le triangle arithmétique. Il n'explique pas pour autant sa démarche.
  • C'est pas faux, on pourrait penser que cela serait post mortem. Je ne connais pas du tout M. de Ganières, une recherche donne un certain Aimé de Gagnières, qui est-il ?
  • Je n'ai retrouvé aucun renseignement sur M. de Ganières dans mes papiers.
  • Merci d'avoir recherché gb,

    Cordialement
  • C'est super toutes ces précisions et tous ces commentaires historiques sieur gb, merci.

    S
  • bonjour

    Pascal faisait des recherches en calcul des probabilités :
    il est logique de penser qu'il a trouvé les nombres entiers que nous écrivons p dans n
    par un raisonnement combinatoire :
    il s'agit du nombre de façons de choisir p nombres parmi n sans ordre et sans répétition

    alors que Newton avait un esprit plus algébrique que probabiliste
    et a trouvé les coefficients des monômes dans le développement du binôme de degré n qui porte son nom
    à partir du binôme de degré n - 1, et par une méthode que nous appelons désormais "raisonnement par récurrence"

    Newton connaissait les travaux du chercheur français et Pascal donc a une antériorité incontestable
    même si son triangle arithmétique était en effet connu (comme le rappelle Siegfried) par les Mésopotamiens et les Chinois

    cordialement
Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.