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Mort de Sécante et Cosécante

Selon l'air du temps de ce janvier 2020, il y a trois fonctions trigonométriques circulaires : sinus, cosinus, tangente. Quand j'étais jeune, élève puis professeur, il y en avait une quatrième, la cotangente. J'ai déjà raconté ici ma surprise lors d'une colle en Math-Spé il y a trois ou quatre ans, de constater que l'élève n'avait pas entendu parler de la cotangente.

Mais il y a plus. Lorsque je regarde des traités français de la fin du XIXème siècle, ou des publications anglo-saxonnes, j'en découvre deux autres : la sécante et la cosécante.

Il y a quelques années, un collègue professeur de Math-Spé m'avait signalé ingénument ces deux fonctions, comme une découverte qu'il avait faite dans Maple. Bon, me suis-je dit, voici quelqu'un qui n'a jamais ouvert un livre un peu ancien ni étranger, il y en a, des braves gens comme ça, qui sont quand même agrégés...

En 1893, le dessinateur Christophe avait publié L'Idée fixe du savant Cosinus, une série de bandes dessinées mettant en scène un savant distrait. Ce savant a deux filles, prénommées Sécante et Cosécante. Dans son Dictionnaire de mathématiques, Lucien Chambadal, pour le mot « sécante » donne la définition « prénom féminin ».

Et puis pfuit, au XXème siècle, Sécante et Cosécante ont défuncté. Je les ai retrouvées, mentionnées incidemment dans : H. Commissaire, Leçons d'Algèbre et de Trigonométrie, Classes de Mathématiques A et B, Masson & Cie, 1911, p.325, où elles sont dites « peu employées ».

Loin de moi l'idée de surcharger la mémoire de nos élèves, mais chacune de ces six fonctions a son intérêt. Il est vrai que les trois premières font l'objet de formules qui doivent être connues, ce qui n'est pas le cas sans doute des trois autres, mais ces dernières sont utiles, ne serait-ce que du point de vue de l'Analyse.

J'avais autrefois trouvé la mention de la décision qui a mis fin à la vie de Sécante et Cosécante en République Française mais j'en ai perdu la référence et je n'ai plus l'énergie de reprendre les recherches. Alors si des érudits, comme par exemple Piteux_gore (ou bien d'autres), pouvaient nous éclairer, ce serait une bonne chose. Les historiens-des-mathématiques pourraient pour une fois s'intéresser à leur pays et faire une recherche à ce sujet.

Et ceux qui connaissent les mathématiques qui se font dans d'autres pays pourraient aussi nous dire ce qu'il en est à ce sujet, par exemple en Russie, vorobichek. Ou bien d'autres : je suis toujours curieux de ce que font nos voisins (et cousins) européens.

Bonne journée.
Fr. Ch.

https://fr.wiktionary.org/wiki/Annexe:Conjugaison_en_français/défuncter95228

Réponses

  • J'ai beau en avoir entendu parler, je ne connaissais pas leur lien avec le triangle rectangle.

    Je lis ici qu'elles sont (encore ???) utilisées en navigation maritime ou aérienne. Et j'y apprends l'existence de sinus verse, haversine et exsécante.
  • Bonjour,

    le vrai nom de Christophe est Colomb, il a été professeur de Proust au Lycée Condorcet.

    Bien cordialement.

    kolotoko
  • ... et le nom du chien Sphéroïde, vient du fait que c'est un Boule...dogue.
  • Chaurien écrivait:
    J'ai déjà raconté ici ma surprise lors d'une colle en Math-Spé il y a trois ou quatre ans, de constater que l'élève n'avait pas entendu parler de la cotangente.
    Et quelle ne fut pas ma surprise, assistant en 1975 à un oral de ce que l'on appellerait aujourd'hui un M1, j'ai constaté qu' un examinateur dûment patenté par l'Université Paris 7 n'avait jamais entendu parler de l'expression des fonctions trigonométriques hyperboliques réciproques à l'aide du logarithme népérien.

    Ma bonne dame, tout se perd et rien ne va plus.
  • Bonjour,

    Je suis un peu curieux de découvrir comment s'exprime le développement limité au voisinage d'un point des deux fonctions : sécante et cosécante. ça existe d'après vous ?

    Cordialement.

    Edit :

    Voir ici : http://serge.mehl.free.fr/anx/sec.html
  • Bonjour,

    Il y a aussi toute la "trigonométrie verse", même si Wikipédia ne semble connaître que le sinus verse.
    On peut en faire tout un formulaire.
  • A mon avis, il est inutile d'ajouter les fonctions sécante et cosécante à la liste des fonctions trigonométriques à coté des fonctions : $ \sin , \cos , \tan $ pour la simple raison, est que, ces deux fonctions s'expriment comme composés de fonctions trigonométriques : $ \sin , \cos , \tan $ et la fonction : $ x \to \dfrac{1}{x} $. Alors, si on connait, $ \sin , \cos , \tan $, on peut en déduire les fonctions sécante, et cosécante.
  • La remarque de Pablo_de_retour, je l'attendais celle-là. C'est probablement l'argument qui a présidé à la disparition de la sécante et de la cosécante en France, puis de la cotangente.
    Pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? La tangente est inutile puisque c'est $\sin / \cos$. Le cosinus est inutile, puisque co-sinus, c'est le sinus du complément. Le sinus lui-même est inutile puisque ce n'est qu'une combinaison linéaire d'exponentielles complexes. Au fond toutes les maths sont inutiles, puisqu'elles partent toutes de $1+1=2$. Soyons sérieux, chaque fonction a son intérêt et ses propriétés spécifiques, bien sûr un intérêt plus ou moins grand, mais un intérêt tout de même.
  • Mieux inspiré, Pablo_de_retour demande plus haut le développement limité de ces fonctions.

    Parlons plutôt de développement en série entière. Les développements des fonctions tangente, cotangente et cosécante en $0$ s'expriment au moyen des nombres de Bernoulli et le développement de la fonction sécante en $0$ s'exprime au moyen des nombres d'Euler, dont la théorie ressemble fort à celle des nombres de Bernoulli.

    Les coefficients du développement de la fonction tangente donnent les nombres tangents et ceux de la fonction sécante donnent les nombres sécants, qui sont des entiers dénombrant les permutations alternées, en anglais « alternating permutations » ou « zigzag permutations ». Je ne donne pas de référence, mais une recherche sur ces mots permet d'en savoir plus, très rapidement.

    Une raison de plus pour ne pas négliger ces fonctions.

    Bonne soirée.
    Fr. Ch.
  • Chaurien écrivait:
    La remarque de Pablo_de_retour, je l'attendais celle-là. C'est probablement l'argument qui a présidé à la disparition de la sécante et de la cosécante en France, puis de la cotangente.
    Les tables de Laborde fournissent les valeurs des fonctions sinus et tangente (et par suite du cosinus et de la cotangente), mais ni de la sécante, ni de la cosécante. Il en était de même d'une table, présentée sur une feuille en carton marron et repliable en trois volets, qui était utilisée dans les « petites classes », c'est-à-dire avant de passer à la règle à calcul qui, elle aussi, ne donnait que les sinus et les tangentes, l'évaluation de ces dernières via le sinus du complémentaire étant peu pratique sur cet instrument.

    Je n'arrive pas à remettre la main sur ma vieille Bouvart et Ratinet ; je suis certain qu'elle donnait les \(\log \sin\), mais donnait-elle les \(\log \tan\) ?

    Toujours est-il que l'argument d'inutilité est utilisé depuis longtemps.
  • Les tables "Bouvard et Ratinet" de 1957 donnaient les logarithmes des sin, cos, tan et cotg en grades (100 pages) et en degré (45 pages). Rien sur sec et cosec (logarithmes calculables immédiatement par complément à 0). La présence de cos et cot venait du fait que ça ne coûte rien à l'auteur en calcul, et que ça remplit mieux la page.
    Enfin sur ma vieille Rietz (règle à calcul), une seule ligne pour tan et cot, une pour sin et cos, et une supplémentaire pour les tout petits angles et sin et tan (très peu différents en dessous du demi degré).

    Cordialement.
  • Bonjour,

    Dans ma Bouvard et Ratinet, il y a les $\log \sin$, les $\log \cos$, les $\log \tan$ et la cotangente que je n'ai pas trouvée en $\LaTeX$, ainsi que dans ma Laborde.

    Cordialement,

    Rescassol
  • Merci pour ces compléments sur le contenu des tables de valeurs numériques.
  • $\rm\LaTeX$ semble connaître $\cot$ par défaut, de même que $\sec$ mais pas $\cosec$, ainsi que les "log-like symbols" suivants :
    \arccos   \arcsin   \arctan   \arg      \cos      \cosh     \cot      \coth     
    \csc      \deg      \det      \dim      \exp      \gcd      \hom      \inf      
    \ker      \lg       \lim      \liminf   \limsup   \ln       \log      \max      
    \min      \Pr       \sec      \sin      \sinh     \sup      \tan      \tanh     
    
    À titre personnel, j'ai dû découvrir la sécante et la cosécante dans des livres anciens ou à l'occasion d'un voyage aux États-Unis, et elles ne m'ont jamais manqué.
  • La cosécante en $\rm\LaTeX$, c'est : \(\csc\).
  • Chaurien a écrit:
    Mais il y a plus. Lorsque je regarde des traités français de la fin du XIXème siècle, ou des publications anglo-saxonnes, j'en découvre deux autres : la sécante et la cosécante.

    Ben oui, j'ai eu ça au lycée. $1 + \tan^2 = \sec^2$ et $1 + \cot^2 = \csc^2$ par exemple.
    C'est aussi facile pour se souvenir des dérivées: $\tan' = \sec^2$ et $\cot' = - \csc^2$.
    Ce n'est pas essentiel mais ça simplifie pas mal de formules...
    J'avoue que plus tard, j'ai rarement rencontré ces fonctions.
  • bonjour

    les fonctions sécante, cosécante et cotangente en trigonométrie circulaire sont en effet peu utilisées
    avec séc(x) = 1/cos(x) et coséc(x) = 1/sin(x) et cotan(x) = 1/(tan(x)

    et pour éviter la surcharge des formulaires proposés aux élèves du secondaire
    on les a écartées des programmes (dans les années 1950)

    c'est une sage décision

    quant à dire qu'elles n'admettent pas de développement en série polynomiale, c'est faux :

    ces développements sont obtenus à partir des produits eulériens de $\frac{sin(\pi.x)}{\pi.x}$ et de $cos\frac{\pi.x}{2}$
    dont on va dériver les logarithmes pour aboutir à des séries rationnelles valables pour - 1 < x < 1 :

    $\frac{\pi}{sin(\pi.x)} = \frac{1}{x} + \frac{1}{1-x} - \frac{1}{1+x} - \frac{1}{2 - x} + \frac{1}{2+x}+.......+(-1)^{n-1}[\frac{1}{n-x} - \frac{1}{n+x}]+....$

    $\frac{\pi}{4cos\frac{\pi.x}{2}} = \frac{1}{1-x} - \frac{1}{1+x} - \frac{3}{3-x} + \frac{3}{3+x} + ......+(-1)^n[\frac{2n+1}{2n+1-x} - \frac{2n+1}{2n+1+x}] +....$

    on obtient finalement par développement en série pour - 1 < x < 1 :

    $\frac{\pi.x}{2sin(\pi.x)} = Z_a(0) + x^2Z_a(2) + x^4Z_a(4) + ........ + x^{2n}.Z_a(2n)+......$

    avec $Z_a(x) = 1 - 1/2^x + 1/3^x + ..........+ (-1)^{n-1}/n^x + ....$ fonction Zéta alternée de Riemann et $Z_a(0) = 1/2$
    nous savons que Zéta alternée des entiers pairs s'expriment avec des puissances pairs de pi et les nombres de Bernoulli

    et aussi avec - 1 < x < 1 :

    $\frac{\pi}{4cos\frac{\pi.x}{2}} = Z_{ai}(1) + x^2Z_{ai}(3) + x^4Z_{ai}(5)+........+ x^{2n}Z_{ai}(2n+1) +......$

    avec Zéta alternée des entiers impairs : $Z_{ai}(x) = 1 - 1/3^x + 1/5^x - .........$
    on sait que $Z_{ai}(2n+1)$ s'exprime avec les puissances impaires de pi et les nombres d'Euler comme le rappelait notre ami Chaurien

    tan(x) et cotan(x) admettent des développements polynomiaux dont les coefficients des monômes
    sont des séries de Riemann de base respective les entiers impairs et les entiers naturels :

    $\frac{\pi}{4}tan\frac{\pi.x}{2} = xZ_i(2) + x^3.Z_i(4) + x^5.Z_i(6) + ......$

    $Z_{i}(2n)$ s'exprime avec les puissances paires de pi et les nombres de Bernoulli

    $\frac{-\pi.x}{tan(\pi.x)} = Z_0 + x^2.Z_2 + x^4.Z_4 + ..........$ avec $Z_0 = - 1/2$

    $Z_{2n}$ s'exprime avec les puissances paires de pi et les nombres de Bernoulli

    cordialement
  • Math Coss a écrit:
    $\rm\LaTeX$ semble connaître $\cot$ par défaut, de même que $\sec$ mais pas $\cosec$,

    Parce que ce n'est pas cosec, mais csc.
  • jean lismonde a écrit:
    et pour éviter la surcharge des formulaires proposés aux élèves du secondaire on les a écartées des programmes (dans les années 1950)

    Comme j'ai déjà indiqué, moi je les ai eues au lycée dans les années 80 (en Belgique). On peut discuter de la pertinence, certes, mais c'étaient des notions connues, aussi bien dans les formules, que géométriquement.

    On pourrait, dans la même idée de simplification, enlever tan et sin aussi. Car finalement, il n'y a qu'une seule fonction trigonométrique, le cosinus, qui vient du produit scalaire, et à partir de laquelle les autres ne sont que des modifications...
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