Comment faire comprendre ces notions ?

Bonjour,

J'ai une amie qui se trouve encore au lycée et qui a de très mauvais résultats en maths. Même si je suis moi-même débutant j'ai essayé de la faire un peu progresser mais il y a toujours les mêmes points très "profonds" qui la bloquent. Je précise déjà qu'elle partait de rien du tout, elle ne savait même pas factoriser correctement alors qu'elle est en terminale et me sort des méthodes tout-en-un bizarres pour me "démontrer" des résultats qui ne demandent a priori rien de tout ça.

Elle n'arrive pas vraiment à comprendre qu'une écriture est une juste écriture si elle est censée représenter un entier alors ce sera un entier point. Pas besoin que ça soit explicitement la lettre "n" où les symboles qui désignent les constantes qu'elle connaît pour ça (genre "34"). Par exemple en ce moment elle est sur les suites, donc si je lui donne une application de $\mathbb{N}$ dans $\mathbb{R}$ telle que pour tout entier n, $f(n+1)=4f(n)$ et $f(0)=1$ et que je lui demande de montrer pour tout n entier $f(n)=4^{n}$ elle panique complètement c'est du charabia. Déjà, elle accepte qu'elle peut remplacer n par 2 et que si l'un est vrai pour tout entier n alors ce sera vrai pour 2 mais remplacer toutes les occurrences de n par n+3 ou x+23+n pourvu que ce soit un entier elle y arrive plus du tout et c'est pas faute d'insister sur le pour tout entier n... ce problème de "l'écriture c'est un vrai truc c'est pas pareil d'écrire x ou n ou en tout cas si c'est vrai c'est parce que les profs me le disent mais moi j'y crois pas" est super récurrent chez elle, si elle a "f(3)=f(2)+3" et "f(2)=blabla" ça lui pose vraiment problème de remplacer f(2) par blabla et en fonction du contexte ça peut passer "d'en fait oui bien sûr c'est évident que j'ai le droit de le faire" à "bah nan là je sais pas" et c'est corrélé directement à l'habitude qu'elle a de le faire avec telle écriture plutôt qu'une autre... et bien sûr la récurrence elle comprend pas du tout du tout mais bon déjà qu'elle bute sur ça... j'ai l'impression qu'il y a une "barrière" d'abstraction qu'elle a jamais passée et maintenant ça devient grave, d'autant plus qu'en fait c'est faux qu'elle l'a jamais passée, en fonction du contexte ou du langage, en expliquant en français par exemple, elle a l'air de comprendre de toute façon ça n'a rien de difficile je pense en soi mais dès que c'est écrit en maths tout devient un gros charabia où elle ne s'en sort plus et se noie dans un verre d'eau. Et encore je parle même pas du fait qu'elle applique des règles quand ça l'arrange pourvu que ça soit esthétique ou que ça "tombe sous le sens typographique" (bah oui après tout à écrire $x^{2}+y^{2}=(x+y)^{2}$ ça fait plus harmonieux ...)

Je suis pas prof donc je dois pas être bien placé pour l'aider j'ai pas trop l'habitude d'essayer de faire comprendre des choses aux gens mais j'aimerais vraiment essayer de l'aider sur ce point. Comment vous faites pour faire passer ce genre de difficultés ?
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Réponses

  • Cela rejoint partiellement ça : http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?18,1530320

    Pour l'instant je n'ai pas vu de recette miracle, mais sûrement certains auront des idées.
  • Je me souviens, une fois, en L3, on avait démontré $\forall x \in [0,1]\quad \mathcal{P}(x)$.
    Il y a une étudiante à qui je n'ai jamais réussi à faire comprendre qu'alors $\forall x \in [0,1]\quad \mathcal{P}(x^2)$.
    La classe était scotchée. J'ai fini par dire à l'étudiante que j'étais arrivé au bout de mes compétences pédagogiques.
  • À l'impossible nul n'est tenu. C'est plutôt cette étudiante qui devrait de poser des questions sur son orientation.
    Bonne journée.
    Fr. Ch.
  • Il peut arriver qu'on se braque stupidement sur un point aveugle momentané. Espérons qu'avec un peu de recul elle aura réagi.
  • Mouais. Le problème constant, c'est le tabou de l'absence de sélection à l'entrée de l'enseignement supérieur. Comme d'ailleurs à l'entrée du secondaire.
  • Skyffer: ah oui effectivement je l'avais pas vu. Du coup niveau modération c'est censé faire doublon ou ça passe ?

    Aléa: j'imagine que "si $x\in [0,1]$ alors $x^{2}\in [0,1]$" posait pas du tout problème ? Parce que je m'imagine très bien lui dire à l'oral "tu vois comme c'est vrai pour n'importe qui dans $[0,1]$ ... blabla... donc on a bien $\forall x\in [0,1], P(x^{2})$" et elle acquiescera en expliquant bien en français, la SECONDE d'après sur le même exercice devant la phrase que je viens d'expliquer elle n'y arrivera plus. Et en fait c'est très général chez elle, si je lui montre un principe général qu'elle comprend bien, j'applique ce principe à un cas particulier et c'est fini elle comprend plus. Ça fait vraiment dialogue de sourd et j'insiste elle est pas plus bête qu'un autre, elle a absolument aucun problème mental ou de handicap. Je me sens vraiment con parce que j'ai l'impression que les mécanismes derrières doivent pas être très durs à comprendre et qu'il est évident qu'elle comprend ce que j'essaie de lui expliquer au fond d'elle. En fait je crois même qu'un animal peut tout à fait comprendre en ramenant le problème à son univers (peut-être pas les nématodes mais un chien un pigeon etc). Ces mécanismes la bousillent littéralement en maths c'est rageant ....

    Pour ton problème, t'as démontré "formellement" le résultat ? Quitte à remonter sur les trucs de base de logique ?
  • Grothenbite:

    Evite la notation $f(n)$ quand tu parles de suites.
    Pour la suite définie par $u_0=1$ et pour tout $n>0$, $u_{n+1}=4u_n$
    Tu peux commencer par lui demander de calculer plusieurs termes: $u_1,u_2,u_3$

    Sur des exemples simples montre lui comment on vérifie qu'on n'a pas $f(x)=g(x)$
    Par exemple pour $"(x+y)^2=x^2+y^2"$

    On prend $x=1,y=2$
    On calcule $(x+y)^2=(1+2)^2=9$
    On calcule $x^2+y^2=1^2+2^2=5$
    On constate que $9$ n'est pas égal à $5$ donc il est faux qu'on ait pour tout $x,y$, $(x+y)^2=x^2+y^2$

    Je crains qu'il n'y ait pas de recette miracle.

    PS:
    Le x en mathématiques est parfois une variable, parfois une inconnue ce qui peut troubler un élève.
    Dans les petites classes pour désigner une inconnue on utilise parfois un point d'interrogation.

    PS2:
    Grothenbite a écrit:
    Pour ton problème, t'as démontré "formellement" le résultat ? Quitte à remonter sur les trucs de base de logique ?

    Je ne suis pas sûr que la logique soit le problème dans cette incompréhension.
    Dans la forme $x$ et $x^2$ ne sont pas visuellement la même chose.
  • Question à deux sous.

    Si tu pars de ça : $f(n+1)=4f(n)$ et que tu lui montres tranquillement les valeurs à 0, 1, 2, 3 etc. En faisant les calculs plutôt que de prouver que cela vaut $4^n$ et en cherchant un schéma. Est-ce que cela passerait mieux ?

    HS : Je me rappelle qu'au lycée, j'avais un peu bloqué sur les suites car je ne comprenais pas pourquoi on avait le droit à une nouvelle notation $(u_n)_{n \in \N}$ pour parler d'une fonction dont le domaine de définition valait $\N$
  • Chaurien: certes mais même en dehors du cursus, juste comme ça, j'aimerais essayer vraiment de lui faire comprendre ce genre de choses parce qu'elle en souffre y compris pour son ego. À la rigueur elle aurait vraiment l'incapacité cognitive de comprendre ça d'accord mais j'ai l'impression (mais je suis d'accord c'est juste une impression) que ça demande peu de choses pour être compris par quelqu'un de normal (pas atteint de troubles spécifiques) du coup je me demande si le problème est pas d'ordre psychologique ou dans ma façon de présenter les choses (ce qui est possible, c'est pas parce que j'ai l'impression de m'évertuer à expliquer qu'en fait j'explique vraiment). Après encore une fois j'en sais rien au fond, c'est que mon avis.

    Félix: c'est pas juste un point aveugle, ce problème de manque de consistance de ce qui lui paraît juste selon le contexte qui n'a rien à voir ou encore le fait que selon la façon d'écrire une même chose la formule dans laquelle j'écris cette chose va lui paraître fondamentalement différente ce sont des constantes et qui paralysent tout le reste.
  • Le problème avec l'utilisation de l'écriture $f(n)$ c'est que cela donne l'impression que les termes d'une suite $(u_n)$ peuvent s'écrire comme $u_n=f(n)$ avec $f$ une fonction pas trop compliquée (polynôme, fraction rationnelle).
    Cela fait écho au fait qu'on étudie surtout des fonctions dont on connait "une loi" de formation.
    Ce qui est ennuyeux quand on veut s'intéresser à des suites récurrentes pour lesquelles on n'a pas nécessairement de relation simple $u_n=f(n)$.

    PS:
    Je ne doute pas qu'on puisse écrire $u_n=f(n)$ pour une suite récurrente $(u_n)$ quelconque avec $f$ une fonction sortie de derrière les fagots et totalement artificielle.
  • @ grothenbite
    Waw ! « quitte à remonter sur les trucs de base de logique » !? ZFC à la rescousse pour prouver la trivialité citée par aléa ? La question me semble plutôt de savoir comment cette étudiante est arrivée en L3.
  • Merci de vos réponses et si rapides en plus !

    Fin de partie et millie me conseillez entre autres d'essayer sur des petites valeurs, en fait je l'ai fait et j'ai vraiment fait pire que ça, j'ai marqué en haut de la feuille la formule de départ quantifiée puis je lui ai demandé si telle formule était juste (je prenais des valeurs de n particulières ou alors je prenais 3n+2 ou x+12 etc etc) et elle répondait un coup juste un coup faux et le coup juste elle arrivait à justifier en disant qu'elle remplaçait bien les occurrences de n par ce qu'il fallait par contre elle ne disait pas qu'elle avait le droit de le faire parce que ce par quoi elle remplaçait était bien un entier (ou n'importe quel élément de l'ensemble après le "pour tout n") du coup je ne sais pas si c'est parce que ça lui paraissait évident ou pas du tout(et c'est pas rhétorique peut-être qu'elle aurait jamais osé le remplacer par $\pi$ mais j'ai pas pensé à lui poser la question, je le ferai). Mais c'est fou, qu'elle n'y a arrive pas du tout d'accord qu'elle y arrive tout le temps sauf inattention d'accord mais qu'elle alterne c'est vraiment bizarre elle est très dépendante du contexte en quelque sorte.

    Pour faire comprendre "l'intuition" de ça implique pour tout n "$f(n)=4^{n}$" à la rigueur elle comprend pas du tout le mécanisme de récurrence mais quand je parle de télescopage en français sur des choses floues et pas mathématiques elle comprend l'idée générale.

    Pour la notation, j'avais oublié de le mentionner mais la notation suite lui paraît très lourde, je me dis que pour commencer et qu'elle se dise pas que les suites sont des objets différents des fonctions, autant noter comme elle a l'habitude pour l'instant.
  • Chaurien: non non elle est au lycee en terminale, si j'ai écrit L3 alors c'est une coquille :-D
  • Il me semble que l'on peut essayer de faire passer les messages $« \forall x, P(x) \implies \forall x, P(x^2)»$ ou bien $« \forall n, u_n = 4^n \implies \forall n, u_{n+3} = 4^{n+3} »$ en évitant de ré-utiliser la même lettre.
    Essaie « $u_n = 4^n$ pour n'importe quel entier $n$, donc en particulier pour $n=m+3$ avec $m$ un autre entier », ou bien avec « $x = y^2$ ». Ainsi, on a $« \forall x, P(x) \implies \forall y, P(y^2)»$.

    Bien sûr, utiliser $x$ plutôt qu'$y$ ne change rien mathématiquement, puisque ce sont des variables muettes (changement de variable dans $\sum$ ou $\int$) ou liées. Mais ça, c'est le raisonnement de quelqu'un qui a déjà compris.

    Je ne dis pas qu'il faut absolument présenter les choses comme ça pour éviter tout blocage, mais je pense que c'est une source potentiel de blocage.
  • Je ne serai pas connecté de l'après-midi a priori, je ne pourrai répondre que ce soir.

    Le lui ou un autre: je note, toute façon j'ai un papier et je note toutes les idées que vous avez que j'ai pas déjà essayées.

    En fait je vais essayer de me concentrer sur le fait de lui faire passer la chose suivante:
    Soit $(u_{n})_{n\in \mathbb{N}}$,
    Montrer que $\forall n\in \mathbb{N}, u_{n+1}=4u_{n} \rightarrow u_{5}=4^{5}u_{0}$
    et montrer que $\forall n\in \mathbb{N}, u_{n+1}=4u_{n} \rightarrow \forall n\in \mathbb{N}, u_{n+3}=4^{3}u_{n}$
    et laisser tomber la récurrence.
  • Le L3 dont on parlait, c'est l'étudiante d'Aléa.
  • Aléa a écrit:

    A quand des modules d'assistant de preuve obligatoires pour les L1?
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Bon, c'était en d'autres temps (2003 ou 2004), en d'autres lieux. Ce serait sans doute impensable aujourd'hui. B-)
  • J'imagine que les suites passent d'autant plus mal que l'élève n'a pas une maîtrise suffisante de la notion de fonction.

    Un truc qu'on voit (souvent?):
    Si on définit une suite par , $u_0=1$ et pour tout $n\geq 0$ ,$u_{n+1}=3u_n+1$ certains élèves pensent que tu parles de la suite définie par $u_{n}=3n+1$.
    C'est une autre raison pour laquelle, selon moi, il vaut mieux éviter d'utiliser la notation $f(n)$ à la place de $u_n$.
  • Bonsoir,


    n'avez vous pas, des fois, l'envie de communiquer avec la forme ou l'être qui a donné naissance au langage ?
    Et d'autres fois, l'espérance d'une réponse à : quelle est la différence entre la syntaxe et la sémantique ?

    Vous n'avez pas droit aux guillemets pour répondre.

    S
  • Bonsoir,
    je crois que tout a été dit; je résume à ma façon:

    1° s'assurer d'abord que tout est bien exposé :
    Pour une fonction f écrire:
    f est définie comme la fonction qui a un quelconque n élément de N, associe f(n) élément de R, déterminé par la formule f(n) = <tant> (la notation un est à comprendre dans un deuxième temps)

    2° voir si le problème ne vient pas d'une maîtrise insuffisante de la notion de fonction (dont la notion de suite est dérivée).

    Une fonction se définit par son graphe. C'est l'ensemble des couples (x,f(x)) où x est un élément quelconque de l'ensemble de départ et f(x) l'élément de l'ensemble d'arrivée qui lui est associé par la formule f(x) = <tant>
    On peut, pour le faire comprendre, utiliser des diagrammes de Venn avec des flèches pour matérialiser la fonction et des points pour représenter les éléments.

    3° voir si le problème n'est pas plus profondément lié à l'emploi de x non plus comme variable, mais comme inconnue (dont l'usage comme variable est dérivé).

    Pour cela on peut revenir à des problèmes simples, qui se résolvent plus facilement "par l'algèbre", mais qui peuvent aussi l'être directement.
    Par exemple (cas classiques typiques):
    - si j'avais payé ma montre 3€ de moins, je gagnerais 8€ en la revendant 42€. Combien l'ai-je payée ?
    - on a 800g d'un lingot d'or pur à 84% (en masse). Combien faut-il y ajouter de cuivre pour abaisser la pureté à 75% ?
    - répartissez une allocation de 9400€ entre 3 personnes, en faisant des parts inversement proportionnelles à leurs salaires mensuels qui sont 900€, 1200€ et 1500€.
    - en 20 jours 15 charpentiers ont bâti la moitié d'une charpente. A ce moment 3 d'entre eux quittent le chantier. Combien les autres mettront-ils de jours pour établir l'autre moitié de la charpente ?

    L'emploi de x comme inconnue parait naturel avec l'habitude.

    4° L'apprentissage de la définition par récurrence ne vient qu'une fois toutes ces bases consolidées.
    Par exemple f(n+1) = 4 f(n) est une relation entre deux images de la fonction f, qui définit "implicitement" f par la relation entre les images des points n et n+1.
    La difficulté devient alors de trouver une forme "explicite".

    Cordialement
  • A Samok,
    j'aime quelquefois définir rapidement les mathématiques comme un langage dont la syntaxe sert de sémantique.
    Ce qui les distingue radicalement des autres langages.
    Cordialement.
  • Bon vous avez raison, je pense que je vais devoir insister beaucoup sur la notion de fonction alors. Et d'ailleurs fin de partie tu as visé juste, elle a fait typiquement l'erreur de remplacer $u_{n}$ par n quand ça l'arrangeait et c'était pas un oubli ou une étourderie.

    Un point qui peut peut-être aider, au début elle avait du mal avec des choses aussi simples que la factorisation, quand elle voyait une expression de la forme "$ab+(a+1)$ elle écrivait $=a(b+1)$ ou quelque chose de très similaire. Elle raisonnait en terme de ressemblance visuelle entre les formules pas en "est-ce que ce que je vois est un cas de ma règle générale que je peux donc appliquer ?" Et j'ai eu la tres bonne surprise de la voir se débloquer complètement là-dessus au point de plus du tout la voir se tromper (outre étourderies). Je lui avais présenté la définition d'un corps commutatif sans utiliser les termes savants (j'ai défini l'associativité, la notion de neutre etc) et les tres peu de choses de base qu'elle pouvait faire avec les égalités et les relations d'ordre. Avec ça je lui ai fait démontrer le fait que 0 est absorbant, l'unicité des neutres des inverses jusqu'à introduire les notations fraction et puissance et retrouver les règles usuelles avec ces notations (pour les fractions de façon rigoureuse et pour les puissances seulement sur des petits exposants car on ne disposait pas de la récurrence) ça avait mis du temps mais j'étais vraiment content de la voir pouvoir démontrer seule des résultats en utilisant uniquement les règles données. Là où c'est amusant c'est que je lui avais présenté le ET le OU l'implication la
    Négation et le pour tout et il existe en expliquant rapidement l'idée en français et au final maintenant en calcul et résolution d'équations elle s'en sort vraiment bien je trouve. Honnêtement, quand je lui fais résoudre des systèmes un peu méchants pour son niveau elle ne se trompe pas au pire elle peut sécher mais elle inventera pas au moins. D'ailleurs au début j'étais très enthousiaste de faire comme ça parce que je voyais les résultats de sa progression vraiment vite. Mais le problème c'est une fois sortie de cette partie "manipulation calculatoire rigoureuse" où au final il n'y avait aucune écriture compliquée et de "notion" bizarre (une fonction par exemple) les règles semblaient évidentes et y en a assez peu finalement donc elle se sentait pas noyée en plus les "raisonnements" se cantonnent dans 90% des cas à aligner des implications en utilisant plus ou moins astucieusement les règles et en chapotant bien les ET et les OU qui passent. D'ailleurs les premières démo d'unicité des neutres et des symétriques et montrer pourquoi pour tout à b réels ab=0 ssi a=0 ou b=0 sont de loin ce qui lui a posé le plus de problème, même en guidant beaucoup elle y arrivait pas. Donc c'est rassurant en présentant tout avec peu de règles et qui sont tres naturelles pour elle, pas de notations particulières etc elle arrivait à s'ordonner et à reflechir. Mais comme par hasard là avec les fonctions et suites elle est un peu plus "lâchée" dans la nature et ça repart completement en vrille. j'aurais aimé m'inspirer de ce que j'ai fait avec le calcul mais je ne vois pas comment... vous pensez qu'on pourrait exporter un peu cette façon de faire pour parler des fonctions ? Ce qui m'embête c'est que du coup je me dis qu'il faudrait un préliminaire sur les ensembles etc etc qui serait trop long et le temps de digérer elle sera complètement larguée dans ses cours ...
  • Felix: oui pardon j'avais lu le post d'alea trop vite j'ai zappé le L3 je pensais que vous me répondiez ...

    Samok: je ne comprends pas vraiment où tu veux en venir ? Quelle est l' idée derrière ce que tu veux dire ?
  • MERCI mathurin, c'était une bonne idée de vraiment définir ce que c'était qu'une fonction. Ça paraît pourtant évident de le faire...

    Donc j'ai commencé par dire que c'était un ensemble de couples tels que "propriété de c'est quoi être fonctionnel" en donnant des exemples sur un ensemble fini. Elle devait me dire pour tel ensemble de couples si c'était une fonction ou pas, elle a compris assez vite. Je lui demandais d'elle-même de me donner des exemples de fonctions dans l'ensemble des couples de mon ensemble fini. Comme elle a bien compris qu'à membre de gauche du couple donné il n'y a qu'un seul membre de droite on peut se donner une notation par rapport à l'élément à gauche. Donc définir par exemple des fonctions avec des formules de type f(x)=.... et elle s'est pas embrouillée ça allait.

    Après finalement j'ai pu parler du cas des fonctions de $\mathbb{N}$ dans $\mathbb{R}$, j'ai parlé d'une autre façon de définir les fonctions en se donnant un couple (0,f(0)) et une formule qui lie les images de deux entiers consécutifs entre eux et elle a bien compris avec les couples ce que ça donnait. Elle a bien refait toute seule du coup le passage suite arithmétique définie par formule à définie par récurrence et elle a correctement "vu" le passage défini par récurrence à formule explicite. Pareil pour les suites géométriques.

    Je n'ai pas encore trop trop insisté maintenant sur les changements d'indice mais du coup le fait de l'avoir débloqué sur les fonctions a rendu plus facile le fait de s'autoriser à changer les indices...

    Bref c'était franchement une bonne idée. C'est vrai qu'après coup présenter les fonctions comme dans leur bouquin comme "une machine à lier des trucs" c'est fumeux/pas précis.
  • C'est marrant, à mon époque (primaire dans les années 70) je me souviens très bien des "machines" qu'on étudiait en primaire : des jetons ou des objets passaient par exemple dans la machine à rendre rond ou dans celle qui colore en bleu... et on faisait même de la composition de fonctions.
    Avec ca on était paré pour l'abstraction et les fonctions au collège.
  • C'est pas un peu problématique dans le sens où du coup pour les élèves une fonction c'est forcément un "procédé" de transformation là où juste le voir comme un ensemble de couples est plus général, n'interdit pas quand on peut de dire que le membre de droite peut s'exprimer parfois par rapport au membre de gauche et fait moins buguer dans le supérieur quand on se trouve devant des fonctions pas du tout définie par des formules ?
    En plus ça fait voir le lien entre fonctions relations d'ordre d'équivalence etc (correspondance)
  • Les maths modernes ont eu très mauvaise presse, donc difficile de répondre.
    Ca ne m'a pas posé problème et quand j'essaie ce genre d'explications avec mes enfants ou neveux ils semblent comprendre assez vite comment on généralise aux fonctions. Et il faut se souvenir que ces "machines" c'était en primaire (dès le CP/CE1), donc difficile de faire plus de formalisme mathématique avec des enfants qui apprennent en même temps à lire.
  • Laurette:
    J'ai eu le même enseignement (j'ai 52 ans). Une fonction était envisagée comme une machine, une boîte noire. Un truc rentre et il en sort quelque chose sans qu'on sache toujours comment fonctionne la transformation.
  • Très franchement, à ce stade, c'est juste qu'elle n'est pas faite pour ça. Si elle dit « je n'y crois pas » à un concept mathématique, c'est qu'il faut qu'elle laisse définitivement tomber. La mauvaise foi et les mathématiques, ça n'est pas compatible.
  • Fin de partie a écrit:
    Laurette:
    J'ai eu le même enseignement (j'ai 52 ans). Une fonction était envisagée comme une machine, une boîte noire. Un truc rentre et il en sort quelque chose sans qu'on sache toujours comment fonctionne la transformation.

    J’utilise l’empilement des boîtes à effets en musique (la disto puis la wah-wah puis la Flanger…) :-D
    Algebraic symbols are used when you do not know what you are talking about.
            -- Schnoebelen, Philippe
  • Ce que je lis me semble très encourageant pour elle: jusqu'au lycée souvent en maths les choses ne sont pas définies ou alors définies avec les mains. Il y en a pour qui ça ne pose pas de problème: tant mieux pour eux.
    Dans le cas de ton amie, on dirait que tant qu'on ne lui a pas donné les règles précises qui définissent un objet, elle est désemparée, et qu'elle se débloque dès qu'elle a les axiomes.
    C'est très bon signe car c'est précisément cela les maths: non pas partir d'idées intuitives plus ou moins définies et se demander ce qu'on peut bien inventer à dire à leur sujet, mais au contraire partir d'axiomes et voir ce que l'on peut faire avec ces axiomes et rien d'autre.
    C'est quelque chose que certains ont du mal à acquérir, chez elle on dirait que l'idée était déjà là et que ce qui l'avait troublé c'est le fait que les maths ne soient pas présentées correctement au lycée.
  • De rien Grothenbite (:P)

    Je crois que Shah d'Ock a raison, c'est de très bon augure pour ton amie.

    Une fonction, c'est en effet un cas particulier de relation (parmi lesquelles celles d'équivalence ou d'ordre).
    Cela montre aussi l'intérêt d'enseigner les rudiments de la théorie des ensembles en collège et au lycée.
    Celle-ci n'est pas parfaite, on pourra ultérieurement lui préférer un autre exposé des "fondements", mais elle est bien utile face à des questions "métaphysiques" venant des meilleurs élèves.
    La définition d'une fonction par son graphe, on me l'a enseignée ... en 6ème en 1974; je ne l'ai jamais oubliée.

    Cordialement.
  • Reste à la rendre à l'aise avec les "changements de variables" et lui faire éviter le problème qu'alea avait mentionné avec son élève de L3... j'ai confiance :-D
  • Fin de Partie a écrit:
    Je ne doute pas qu'on puisse écrire un=f(n) pour une suite récurrente (un) quelconque avec f une fonction sortie de derrière les fagots et totalement artificielle.
    On peut, mais la fonction n'est pas du tout artificielle: c'est juste la fonction qui à $n$ associe la $n$-ème valeur de la suite $u$: autrement dit, c'est $u$ elle-même.
    La façon dont elle est définie ne change rien au fait que c'est une brave fonction comme les autres.
    Ça me rapelle, avant que je comprenne ça, je me demandais si étant donné un graphe fonctionnel il existait toujours une fonction dont il est le graphe... la réponse est oui, par définition.
  • Imposer l'idée qu'une fonction est nécessairement un procédé (défini par une expression?) est stupide et rajoute pour rien une couche d'ontologie artificielle là où il n'y en a pas.
    Pour la énième fois: soit $E$ l'ensemble de toutes les expressions (mettons l'ensemble de toutes les suites finies sur un ensemble fini $A$ de caractères donnés). Soit $\sigma$ l'application qui à $t\in E$ associe la fonction partielle "définie par $t$" i.e. $\sigma_t: D_t \to E$ avec $D_t\subseteq E$. Soient $p,q\in E$ distincts (il y a au moins deux expressions différentes...).
    Soit enfin $f:E\to E$ définie par $f(x)=p$ si $x\in D_x$ et si $\sigma_x (x)=q$ et $f(x)=q$ dans tous les autres cas.

    $f$ est-elle une fonction? Noter qu'il n'y a pas de $u\in E$ tel que $\sigma_u=f$ (sans quoi on aurait $u\in D_u=E$, $f(u)=\sigma_u (u)\in \{p,q\}$ et $f(u)=p$ si et seulement si $f(u)=q$ avec $p\neq q$...)
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Dans l'enseignement secondaire il n'y a pas de théorie des fonctions. Le premier objet catalogué fonction vu par un élève est très probablement une fonction polynôme (Pour Euler et bien d'autres de ses successeurs une fonction était tout ce qui peut se développer en série entière). Une fonction dans l'enseignement secondaire a généralement une règle de formation bien identifiée (fonction polynôme....). Il faut attendre la classe de terminale pour voir des fonctions dont on ne connait pas à priori la règle de formation point par point mais on n'insiste pas sur cette question (cf variable aléatoire continue)
  • Une fonction polynôme est déjà bien plus compliquée que la définition générale de fonction (qui est un cas particulier de graphe: un ensemble u de couples tels que pour tous a,b,c, si (a,b) et (a,c) sont dans u alors b=c. La réformes des maths modernes avait raison pour le coup).
    Fin de partie a écrit:
    (Pour Euler et bien d'autres de ses successeurs une fonction était tout ce qui peut se développer en série entière). Une fonction dans l'enseignement secondaire a généralement une règle de formation bien identifiée (fonction polynôme....).
    Il ne faisait pas de valeurs absolues alors.
    Plus sérieusement pourquoi les élèves devraient-ils à nouveau endurer les errements du passé? Faudrait-il, pour prendre une analogie, enseigner l'astronomie de Ptolémée en physique avant les lois de Képler?
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Foys a écrit:
    Une fonction polynôme est déjà bien plus compliquée que la définition générale de fonction


    Pour toi peut-être mais un élève peut faire fonctionner une fonction polynôme (calculer des valeurs ce qui rend un peu plus concret la notion) La notion de fonction dans sa généralité est une notion abstraite.
    Tellement abstraite qu'elle ne s'est dégagée que tardivement historiquement.
    Foys a écrit:
    Faudrait-il, pour prendre une analogie, enseigner l'astronomie de Ptolémée en physique avant les lois de Képler?

    Ton analogie n'est pas bonne. Une fonction polynôme est bien une fonction au sens le plus général.
    Et tout ce qu'un élève peut voir durant sa scolarité dans l'enseignement secondaire qui est catalogué fonction est bien aussi une fonction au sens le plus général.
  • S'intéresser aux fonctions qui peuvent s'écrire "avec une expression explicite" (càd en fait comme composée des opérations de base et de constantes de base), ça peut être utile.

    Ainsi, une équation polynomiale est résoluble par radicaux ssi ses racines peuvent s'écrire $Z = \{ f_i(C) \}_i$ où $C$ sont les coefficients du polynôme et $f_i$ sont des fonctions composées à l'aide des opérations $+,\,-,\,\times,\,\div,\,\sqrt[n]{}$ et des constantes dans $\mathbb{Z}$.

    De même, on peut définir les polynômes $K[X]$ comme l'ensemble des fonctions composées à l'aide des opérations $+,\,-,\,\times$ et des constantes dans $\{X\} \cup K$.
  • Hum hum ... $\sqrt[n]{}$ comme fonction, c'est un peu délicat ...
  • Quelle est la définition de $\sqrt[n]{}$ ?
  • C'est toi qui prétend qu'il s'agit de fonctions, à toi de répondre. Prétendre que les racines d'un polynôme (même "résoluble par radicaux") sont fonctions des coefficients, ça me semble osé. Mais encore une fois, à toi de préciser ce que tu veux dire !
  • $\sqrt[n]{}:\mathbb{R_+} \rightarrow \mathbb{R_+}$ est l'inverse de la bijection $x \mapsto x^n$ définie sur $\mathbb{R}_+$.
    C'est une fonction tout ce qu'il y a de plus honnête, malgré le fait qu'elle n'est pas définie sur $\mathbb{R}$ tout entier (dans une moindre mesure, $\div$ n'est pas définie sur $\mathbb{R}\times\mathbb{R}$ tout entier non plus).

    J'ai pour habitude d'apprécier la fonction multivaluée $\sqrt[n]{}$ mais j'ai justement voulu utiliser sa définition la plus standard pour être mieux compris.
  • Le Lui ou un Autre écrivait:

    > Ainsi, une équation polynomiale est résoluble
    > par radicaux ssi ses racines peuvent s'écrire $Z = \{ f_i(C) \}_i$ où $C$ sont les coefficients du
    > polynôme et $f_i$ sont des fonctions composées
    > à l'aide des opérations
    > $+,\,-,\,\times,\,\div,\,\sqrt[n]{}$ et des
    > constantes dans $\mathbb{Z}$.

    Avec la définition de $\sqrt[n]{}$ que tu as précisée (on ne prend que des racines de réels positifs, et le résultat est un réel positif), tu maintiens cette affirmation ?
  • Non, effectivement, ça manque de complexe...
    Et avec $D_n:=\{0\}\cup\{z\in\mathbb{C^*} \mid 0\leqslant\arg(z)<2 \pi / n\}$ où $\arg$ est l'argument principal, puis $\sqrt[n]{}:\mathbb{C} \rightarrow D_n$ l'inverse de $z\in D_n \mapsto z^n \in \mathbb{C}$?
    Edit: avec cette définition, on peut effectivement accéder à toutes les racines n-ièmes d'un nombre $z$ : la $k$-ième racine n-ièmes est $(\sqrt[n]{-1})^{2k}\sqrt[n]{z}$.

    Mais tu ne sembles pas convaincu que ce soit même possible en principe, alors que c'est bien la définition usuelle d'équation résoluble par radicaux (ex. ici ou ). Me trompé-je encore?
  • Les références que tu cites ne sont pas très précises, et ce que tu racontes ne l'est pas du tout quand tu parles de fonctions.
    Regarde par exemple le cas de $x^3+px+q=0$, et demande-toi quelles sont les trois fonctions de $p,q$ qui donnent les racines.
    En tout cas, si tu donnais cet exemple pour clarifier le concept de fonction, c'est largement raté !
  • Bonjour,
    petit rappel évident de 6ème, pour les "âmes simples".

    quand je dis qu'une fonction f est définie par son graphe, je ne veux pas dire qu'elle est son graphe.
    En fait une fonction f est un triplet (E,F,G) où E est l'ensemble de départ, F l'ensemble d'arrivée et G inclus dans EXF, le graphe de f. C'est ce qui explique qu'une fonction a le même graphe que l'application sous-jacente tout en en étant distincte.
    Et c'est pareil pour une relation.

    Cordialement.
  • Mathurin a écrit:
    En fait une fonction f est un triplet (E,F,G) où E est l'ensemble de départ, F l'ensemble d'arrivée et G inclus dans EXF, le graphe de f.
    Ce triplet n'a d'autre intérêt que celui de rallonger la définition. de plus en maths il y a souvent des fonctions partielles (je sens qu'on va retomber dans une discussion d'il y a plusieurs jours).
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Je ne sais pas s'il (le triplet) rallonge la définition, mais ce qui est sûr c'est qu'il rallonge les débats à propos des ensembles de définition.
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