Sens du mot "numérique" (programme, livre...)

Bonjour,

Suite aux échanges lors d'une discussion sur une leçon d'agrégation (cf. message http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?6,1610964,1612162#msg-1612162 et suivants), je pose la question : comment comprendre l'adjectif "numérique" dans des expressions comme "suite numérique", "fonction numérique", "série numérique", voire "analyse numérique" dans un intitulé (concours, énoncé, livre, etc.) ?

Si vous avez des avis pour alimenter la discussion, des références précises (livres, cours, etc.), c'est le bon moment !
Voici en particulier ce qu'un membre m'a écrit suite à la discussion, et qui en effet peut semer le doute :
Dans Gourdon, il parle de suites numériques pour apporter des précisions pour les suites réelles, dans un livre d'analyse pour le CAPES (Dufetel, Lacroix-Sonrier, Lemberg, Richard), il est clairement précisé dans la définition R ou C, dans un Dantzer et un de Biasi, on parle de suites réelles, mais pas de suites numériques, dans un chapitre intitulé "suites numériques et applications" d'un livre de DEUG (Azoulay, Avignant et Auliac) sont traitées les cas R et C (avant les applications). Quant au programme de l'interne, la notion est évoquée dans le chapitre "analyse réelle et complexe"...

Merci pour votre contribution :-) !

Réponses

  • Je pense qu'il ne faut pas chercher un sens profond à ce mot, traditionnellement ça désigne des choses à valeurs réelles ou complexes, au moins pour "suite, fonction, série numériques". On a le droit de donner plusieurs noms au même objet non ? Pour ce qui est de l'analyse numérique, le sens désigne un domaine bien déterminé des maths, le domaine de l'analyse de solutions approchées d'équations (dans un sens général) et l'analyse des algorithmes permettant de construire de telles solutions approchées.
  • Il s'agit moins de chercher un sens profond qu'un sens précis, non ?
    "Traditionnellement", au contraire, j'ai l'impression que numérique renvoie à $\R$ "point barre" (i.e. et non à $\C$ et à tout ce qui est appelé nombre : nombre "complexe" ou "hypercomplexe" etc.).

    Bourbaki dans TG IV.17 §5 "Fonctions numériques" semble réserver le mot numérique à ce cas :
    "Les applications d'un ensemble $E$ dans la droite numérique sont appelées fonctions numériques (ou fonctions réelles) définies dans $E$."
    (la droite numérique étant bien $\R$ et seulement elle, définie dans les paragraphes précédents).

    Pour ce qui est de l'étude des applications, l'espace d'arrivée importe peu (en dimension finie) car ça se passe en général très bien quitte à décomposer composante par composante (on a des équivalences). Ce qui pose problème, c'est la variable au départ et on sait que passer de $\R$ à $\C$ change tout !

    Pour les suites, idem : l'étude n'est pas la même (bien que le complexe soit à l'arrivée) en raison des outils spécifiques et de tout ce qui a été développé pour l'étude des suites ("dynamique holomorphe" des systèmes dynamiques complexes, etc.).
    On connaît aussi les raisons de tout cela, à savoir que la structure de corps de $\C$ n'est justement pas la structure canonique de $\R^2$ (qui n'est pas un corps). Cette spécificité fait que je tique quant à étendre l'emploi de numérique à ce cadre...
  • Ça n'a pas de sens de chercher un sens précis à l'adjectif "numérique" en le séparant du substantif qu'il accompagne.
    Suites ou séries numériques s'oppose par exemple à suites ou séries de fonctions. Les nombres peuvent être réels, complexes, p-adiques ...
  • En effet, et «fonction numérique » s'oppose de même à « fonction vectorielle ».
  • C'est bien la question ! Mais sur quoi te bases-tu pour affirmer que "série numérique" renvoie à des séries à valeurs dans R ou C ou ... ? Si ce n'est défini nulle part, n'est-ce pas l'usage qui fait foi ?

    Je n'ai pas l'impression que l'usage soit en faveur de R ou C. Mais je m'aperçois que les choses ont l'air moins tranchées, c'est pourquoi je creuse. Une série comme Deschamps-Warusfel parle de numérique pour R ou C, mais Arnaudiès semble réserver le mot aux séries à valeurs dans R. Et Bourbaki pour les fonctions (c'est le cas de tous les auteurs apparemment pour fonctions). Les choses ne sont pas si claires pour moi (pas encore en tout cas !)...
  • Est-ce si important de savoir si "suite numérique" veut dire suite à valeurs dans $\mathbb R$ ou bien suite à valeurs dans $\mathbb R$ ou $\mathbb C$ ? Tout ce qui compte c'est que, quand on rentre dans le vif du sujet (dans des démonstrations, ou correction d'exercice notamment), la convention utilisée soit claire. On donne bien le nom "transformée de Fourier" à plein de choses, liées, mais différentes...
  • Ce qui me paraît important, et c'est pour cela que je pose la question suite à la discussion initiale, c'est que dans un oral de concours, le jury ne sanctionne pas le candidat pour "hors-sujet" (si numérique doit être restreint à $\C$) ou au contraire pour ne pas avoir omis des points "importants" (si numérique doit absolument être compris comme $\R$ et $\C$ (*)).
    Cela a des conséquences assez importantes pour construire un plan de leçon et pour "l'investissement" à faire suivant qu'on se restreint à $\R$ ou qu'on doit élargir à $\C$ (cf. l'exemple des suites numériques définies par une relation de récurrence : le sujet change complètement, la place à accorder aux deux thèmes est à discuter, et les méthodes utilisées peuvent être franchement distinctes).

    Sinon, en effet, dans un cours ou un livre, on définit ce que l'on veut comme on veut (même si ça ne plaît pas à tout le monde), et puis basta ;-) !

    Je n'ai pas fait cette précision car l'origine de la question me semblait claire, mais c'est sans doute mieux ainsi.


    (*) Dans le cadre de l'interne, on peut se restreint à ces deux "ensembles de nombres" je pense...
  • Je répète, c'est vraiment un faux débat.
    La question a déjà plus de sens si on se demande ce que recouvre un intitulé "suites et séries numériques". Et là, je le répète, le "numérique" indique que l'on ne parle pas de suites et de séries de fonctions.
    Après, dans une leçon, on n'aborde pas tous les sujets en relation avec l'intitulé de la leçon. Il appartient au candidat ou à la candidate de préciser le cadre dans lequel il ou elle se place. Pour le cas des suites numériques, affirmer que "passer de $\R$ à $\C$ change tout" est grossièrement exagéré. Il y a quelques sujets où il me semble plus pertinent de se placer sur $\C$ que sur $\R$ (je pense aux suites homographiques). Mais il est parfaitement possible de construire une leçon consistante en restant dans le cadre des suites de nombres réels.
  • Je ne vois rien de nouveau par rapport à ce que j'ai écrit. Je comprends bien les nuances, mais j'ai donné des contre-exemples qui ne me semblent pas ridicules non plus. Numérique renvoie effectivement à nombre, mais ça renvoie tout autant à réel en particulier et ce n'est pas rare qu'on utilise un mot par restriction, parfois en précisant la restriction, d'autres fois non (exemple avec le mot nombre lui-même : "donne-moi un nombre entre 1 et 9"... ).
    J'ai signalé que plein d'auteurs (et non des moindres dans la littérature française !) restreignent numérique à réel. Pourquoi le jury prendrait telle acception plutôt que telle autre ? Voici encore un exemple tiré de l'intitulé des leçons d'oral : "Séries à termes réels positifs. Applications." (202) VS "Séries à termes réels ou complexes : convergence absolue, semi-convergence (les résultats relatifs aux séries à termes réels positifs étant supposés connus)." (203) La précision "à termes réels ou complexes" n'a pas été remplacée par "numérique" (alors que numérique apparaît pour les suites, le sujet à l'origine de ce questionnement - intense !!).

    Bon, je vais éplucher les rapports pour voir s'il est fait mention de ce point particulier dans les leçons. J'aurais peut-être plus de certitudes ainsi. Ça me rappelle la question sur la définition de ce qu'est une "application", les rapports faisant de subtiles distinctions entre "exemple (illustratif)", "illustration" et "application"... Et sanctionne les candidats, mais sans prendre la peine de définir ce que recouvrent ces mots, sans donner d'exemples !

    Merci en tout cas d'avoir pris le temps de donner ton point de vue. J'aurais aimé en voir d'autres, mais visiblement ça n'intéresse pas les foules et les principaux intéressés n'ont pas le temps de réfléchir à ce genre de "subtilité" (ce qui aurait tendance à confirmer ce que j'ai écrit au sujet de la préparation : d'abord colmater les lacunes les plus importantes, et puis les années suivantes si on est toujours là éventuellement se poser la question de ce qui est attendu au concours...).
  • Envoie un mail au webmaster de agreg.org (ou alors un MP sur le forum, il me semble l'avoir vu poster ici) en exposant la question et en demandant de préciser ce que le jury entend par numérique.
  • Déjà tenté le coup l'année dernière (en juillet 2017) justement pour avoir des précisions sur "application" : je n'ai jamais eu la réponse !
    Le ouebmaster m'a d'abord envoyé un mail pour dire qu'il ne répondait pas aux mails "anonymes" (c'est vrai que webmaster@agreg.org ça n'est pas anonyme ;-)), et quand j'ai écrit à partir d'une adresse non anonyme, je n'ai jamais eu de retour.
    Bref, si quelqu'un veut tenter sa chance...
  • Comme GaBuZoMeu, je pense qu'il est de l'intérêt du candidat de s'être posé la question... et d'avoir tranché par lui-même dans tel ou tel sens, en étant capable d'étayer son choix par des arguments convaincants.
    Peu importe que Pierre ou Paul pense autrement : dans une leçon, on te demande justement de faire des choix et des les motiver !
  • Entièrement d'accord ! Les miens sont déjà faits, motivés et expliqués à ce sujet ;-). C'est du reste ce que je fais pour toutes mes leçons, qui comprennent toujours une partie "philosophie/présentation du sujet" où je replace la leçon par rapport aux autres et où j'explique les choix, les orientations, le cadre retenu, etc.

    J'avais commencé à rédiger une réponse en ce sens, mais comme je me demande toujours si je suis lu... :-S
  • C'est assez essentiel que de commencer son exposé par ce que l'on entend par les termes utilisés dans le sujet.
    Je crois même que c'est bien vu. Dans le pire des cas, puisque le candidat a précisé ce qu'il allait traiter, il est quand même dans les clous. Sauf hors-sujet manifeste.

    Sans relancer une discussion : la leçon sur "les équations fonctionnelles" peut, ou pas, contenir un paragraphe ou un exercice sur des équations différentielles. Il ne faut pas que cela fasse le cœur du sujet, évidemment.

    J'imagine qu'en cherchant un peu, on peut certainement trouver d'autres exemples.
    Un, d'ailleurs, d'un tout autre genre me vient : c'était une discussion avec d'autres personnes :

    Quelqu'un : une fonction de $R^2$ dans $R$, est-ce une fonction forcément de deux variables ?
    Monsieur : bah oui !
    Madame : Heu...deux variables réelles mais aussi une seule variable dans $R^2$
    Monsieur : ah bah oui mais là...?!
    Un autre monsieur : on parle aussi de fonction de la variable complexe...
    L'échange se poursuit...
    Sans dire qui a raison, qui a tort, qui fait un amalgame etc.
Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.