Badiou : collé !

Hello,

donné hier en colle de maths :

Dans son livre Eloge des mathématiques, Alain Badiou écrit :

"Soit une suite de nombres réels $S_n$, $n$ variant de 0 à l'infini. On dira que le nombre $L$ est limite de cette suite, si, pour tout nombre réel donné $\varepsilon$, si petit soit-il, il existe un nombre entier $n$ tel que l'ont ait $|L-S_n|<\varepsilon$. Cette définition fait disparaître l'intuition supposée - et initialement active - dans les eaux du calcul symbolique."

Qu'en pensez-vous ? Vous vous demanderez notamment s'il existe des suites non convergentes au sens mathématiques mais convergentes au sens de Badiou.

Réponses

  • Magnéthorax a écrit:
    Vous vous demanderez notamment s'il existe des suites non convergentes au sens mathématiques mais convergentes au sens de Badiou.

    Hélas, ce n'est pas pour le concept de Badiou-limite que Badiou passera à la postérité, car les Badiou-limites sont déjà connues en mathématiques sous un autre nom : lequel ? (Mais le malheureux étudiant collé par Magnéthorax ne le découvrira que plus tard s'il est en première année, car les vilains programmes de classe préparatoire le mentionnent explicitement comme étant hors-programme en première année.)


    Edit : en fait le mot explicitement hors-programme n'est pas la bonne réponse (mais presque), qui est également hors-programme (mais non explicitement).
  • J'adhère entièrement à ce que dit Nîmes-man, que salue bien volontiers.

    e.v.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • Je conjecture que $L$ est une Badiou-limite ssi $L$ est une valeur d'adhérence ou est un terme de la suite.

    En particulier, $S_0$ est toujours une Badiou-limite.
  • Prix Tangente 2016 : lol

    L'édition en poche n'a pas corrigé.
  • Heu ... pour $\varepsilon = -1$, je ne vois pas beaucoup de n qui puisse convenir.
    Il y a deux passages de la définition habituelle qui ont sauté.

    Cordialement.
  • Bravo gerard0 je n'avais même pas vu cela ...
  • Oui, bravo gerard0 ! J'avais pourtant repéré le "tout réel $\varepsilon$" au lieu de "tout réel strictement positif $\varepsilon$" mais je m'étais stupidement dit que ça ne changerait rien. Je bats ma coulpe et en retraite.
  • Mais ça va, ce monsieur a enseigné à l'ENS, nous devrions poser nos candidatures (:P)
  • Il a enseigné à Ulm, mais en philosophie.

    Bruno
  • Il y a pas beaucoup de matheux à Ulm, vous comprenez...

    Quand on parcours son ouvrage théorique "L'être et l'événement", comme je m'y suis risqué, on est frappé par l'utilisation de la logique formelle et de la théorie des ensembles.

    Mais si le formalisme pose déjà problème sur une définition simple de mathématiques élémentaires...
  • Soyez un peu indulgent,

    c'est un littéraire qui s'est intéressé de près aux mathématiques, et qui n'écrit pas un document mathématique. Croyez-vous que vous feriez mieux dans un texte philosophique ? Ce qu'on lit sur le forum de réflexions pseudo-philosophiques est encore pire que la définition de Badiou.
    Sauf erreur de ma part, ce texte est à destination du "grand public", non ?

    Cordialement.
  • Les réflexions pseudo-philosophiques du forum ne sont pas destinées à être publiées dans un livre. Badiou aurait pu faire relire son manuscrit par un mathématicien.
  • Hello gerard0,

    je trouve piquant le fait que le philosophe mathophile qu'il se déclare être et qui accorde une place essentielle aux mathématiques dans l'histoire des idées puisse se planter ainsi. Dans ce texte effectivement destiné au grand public, l'exemple est choisi à des fins pédagogiques et se doit donc d'être éclairant. Ce que cela éclaire, c'est, selon moi, qu'il ne connaît pas cette définition. Or son propos est justement de dire quelque chose à propos de la difficulté de formaliser mathématiquement une chose intuitive. Effet pédagogique involontaire : son erreur illustre finalement assez bien son propos (:P).

    J'ai du mal à faire preuve d'indulgence envers un penseur de métier (ce qui n'est pas la même chose qu'un homme de lettres) qui, par ailleurs, peut se révéler sentencieux.

    Pour ma part, j'y vois toujours les mêmes travers que ceux mis en évidence il y a plus de 20 ans par Sokal et Bricmont (Badiou était déjà épinglé par eux).

    Bon, cette petite blague n'a pas empêché un public d'amateurs et de profs de maths de lui attribuer le prix Tangente et l'éditeur de la version poche de reproduire l'erreur.

    Comme l'écrivait un auteur cher à Badiou, l'éducateur a lui-même besoin d'être éduqué.
  • gerard0 a écrit:
    Sauf erreur de ma part, ce texte est à destination du "grand public", non ?
    Je comprends qu'un auteur qui n'a pas de formation technique essaie de partager son enthousiasme mais ca n'interdit pas aux gens dénoncer les informations incorrectes contenues dans ses livres, surtout s'ils touchent un public plus large que des textes écrits par des mathématiciens. La définition de limite ennuie tout le monde mais ça ne rend pas service de ne pas donner la bonne (cette erreur-là, n'importe quel étudiant la commet, c'est dommage de la propager encore un peu plus).

    Et de dire aussi que ce qu'appelle Badiou limite n'est pas non plus une valeur d'adhérence (l'ensemble des Badiou-limites est l'adhérence de l'image de $S$: ainsi tout entier est Badiou-limite de la suite $n\mapsto n$).

    gerard0 a écrit:
    Ce qu'on lit sur le forum de réflexions pseudo-philosophiques est encore pire que la définition de Badiou.
    Comme dit plus haut, on est sur un forum donc on peut se permettre bien plus, dans les limites de la modération. Dès que l'intervenant qui dit des choses fausses n'est ni grossier ou ouvertement malhonnête, qu'est-ce qui empêche de lui répondre.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Je ne connais pas Badiou, je n'ai pas de contentieux avec lui. Mais je reconnais bien volontiers qu'il aurait dû être plus sérieux en reprenant la définition de la limite. Et je trouve regrettable le manque de précision de certains philosophes quand ils parlent de science ou de technique. Donc, après avoir dit ce que je voyais, de loin, je laisse le débat.

    Cordialement.
  • D'après le texte de Shapira la définition de la continuité par Badiou (page 79) pourrait aussi valoir le détour. Un possesseur du livre pour nous la copier ici ?
  • Je ne puis hélas répondre à la question de mojojojo, mais pour la défense de notre ami « penseur », eût-il donné une définition correcte, d'aucuns lui auraient sans doute fait reproche de diffuser une définition fausse. Dès lors, comment lui en vouloir ? :-D
    correction d’une faute dans la définition de la limite ; j’avais recopié trop rapidement la définition fausse très discutable fausse donnée sur Wikipédia
  • p 79, c'est l'erreur que je pointe.
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