Pourquoi enseigner les mathématiques ?

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Réponses

  • Bof ces histoires de nombre dérivé/coefficient d'application linéaire c'est kif-kif.
    Le problème de la physique (scolaire mais pas que...) c'est le massacre ininterrompu de la dichotomie variables libres/liées (qui est $x$ dans $\Delta x$ ?)
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • A quoi sert d'enseigner les maths ? Je dirais, idéalement:

    Nommer une idée, un concept pour être en capacité à la/le réinvestir sans même s'en apercevoir
    Débusquer les erreurs (plus ou moins grossières) de raisonnement, les graphiques trompeurs qu'on peut balancer (par le truchement du choix des échelles par exemple)
    Être habitués à détecter certains biais cognitifs ("dépendance n'est pas causalité" pour ne citer que celui-là).
    Admirer la beauté de la pensée et sa force pour résoudre des problèmes utiles ou parfaitement inutiles.

    Si on veut qu'au moins 10% de la population coche une bonne moitié de ces cases, il faut bien l'enseigner à un maximum d'élèves.

    On peut tourner la question différemment, "à quoi ressemblerait une société où on n'enseignerait les mathématiques à personne ?"
  • À quoi ca sert d'enseigner les maths : à rien, 95% des élèves n'y comprennent rien et ne font qu'appliquer des recettes, et les 5% restant peuvent très bien se débrouiller tout seuls. la faute à qui ? à personne bien entendu, c'est tellement particulier les maths, on est tombé dans la potion quand on était petit ou pas. D'ailleurs qui a produit les résultats importants depuis Euclide : une centaine d'individus tout au plus ; von [large]N[/large]eumann avait raison, on ne comprend pas les maths, on s'y habitue et il se fout des majuscules von [large]N[/large]eumann !

    [John von Neumann (1903-1957) mérite la majuscule que tu lui dénies. AD]
  • "Je dirais, idéalement:
    [...]"

    Idéal, je ne suis pas sûr ; tout ça renvoie à une question d'utilité des maths, mais on oublie comme toujours qu'il faut préciser de "quelle utilité" on parle, parce qu'il n'y a pas d'utilité absolue.
    Par contre, on peut se poser la question : est-ce réalisable, est-ce que ça marche ? Plus précisément, est-ce que toutes les personnes qui ont fait des maths, même jusqu'au master :
    - savent "débusquer les erreurs (plus ou moins grossières) de raisonnement, les graphiques trompeurs qu'on peut balancer (par le truchement du choix des échelles par exemple)",
    - sont "habitués à détecter certains biais cognitifs ("dépendance n'est pas causalité" pour ne citer que celui-là)",
    - ont la capacité, ou ne serait-ce que l'envie d'"admirer la beauté de la pensée et sa force pour résoudre des problèmes utiles ou parfaitement inutiles" ???

    Quand on voit dans les rapports de tous les concours ou durant les oraux les horreurs que des "spécialistes" des maths peuvent commettre (confondre ou ne pas distinguer condition nécessaire et condition suffisante par exemple), comment peut-on espérer que tout le monde puisse arriver aux exigences ci-dessus avec un simple niveau terminale "littéraire" ?

    Il ne s'agit pas de dire que les gens sont bêtes en général, mais que les mathématiques, la rigueur et la logique sont difficiles et n'ont rien d'innée et qu'on n'arrivera pas à un tel résultat (à part dans certains pays où même les ouvriers agricoles savent calculer l'intégrale de Gauss de tête...).
    Sans compter qu'une autre dimension est rarement prise en compte (cf. le troisième tiret ci-dessus) : les gens le veulent-ils ? Parce que dans ce cas, comme le rappelle le proverbe, on ne peut pas faire braire un âne contre sa volonté, et quand l'individu a décidé d'être un âne dans un domaine...

    Alors certes, c'est un beau programme qui est donné, mais est-il réaliste ? Pour ma part, la réponse est claire : c'est non.
  • Bonjour Curiosity,

    Mon message était en trois parties:

    1. ce qu'idéalement les maths peuvent apporter (c'est un point de vue personnel non exhaustif pour esquisser une réponse à la question initiale du fil)

    2. pour espérer au moins la moitié de ces compétences chez plus de 10% des citoyens il est nécessaire de les enseigner au plus grand nombre (relativisation de la réponse donnée en première partie)

    3. à quoi ressemblerait une société où l'on n'enseigne pas les mathématiques ? (cette question m'intéresse davantage car je la trouve plus directe)
  • curiosity a écrit:
    Par contre, on peut se poser la question : est-ce réalisable, est-ce que ça marche ? Plus précisément, est-ce que toutes les personnes qui ont fait des maths, même jusqu'au master :

    Si on juge que l'enseignement est inefficace dès lors qu'il n'a pas fonctionné pour tout le monde alors forcément ça va être compliqué de proposer quelque chose.

    Tu peux te poser la question autrement: "ces gens qui malgré l'enseignement reçu ne cochent pas toutes les cases de l'idéal décrit plus haut, où en seraient-ils sans enseignement des maths du tout ?" Pour moi la question est plutôt là.

    Dans une société dont le modèle de réussite repose pour la plupart sur la capacité à consommer, quelle place donne-t-on à la philosophie, aux mathématiques ? La façon dont le pays regarde récemment ses intellectuels n'incite pas le lambda à cultiver sa pensée. L'enseignement hérite de cet état de notre société, il est le reflet de ce que nous sommes collectivement.

    Maintenant, même si je vois l'état de délabrement général alarmant, je me réjouis qu'on y enseigne encore les maths, la philo, l'histoire etc
  • Pour le point 2., je crois que c'est prendre le problème à l'envers. Plutôt que vouloir enseigner des choses "inutiles" (pour la vie quotidienne, je précise...) à tout le monde, en espérant que ce sera utile à 10 % seulement, autant l'enseigner seulement à ces 10%. Cette population apte à recevoir un tel enseignement n'émerge pas "aléatoirement" au fur et à mesure qu'on enseigne les maths au plus grand nombre. La question est donc plutôt : comment détecter cette population ? Question largement débattue sur ce forum avec pas mal d'avis pas toujours convergents.
    Au passage, un système qui a un rendement de 10%, bah... ;-)

    Pour le 3., je crois que l'on a déjà plein d'exemples : il n'y a qu'à voir la diversité des pays à travers le monde où les taux d'éducation sont bas ! La question que je me pose pour ma part est plutôt de savoir si l'on y vit plus mal (ou de façon plus précise : si l'on vit moins heureux) qu'au Japon, en Corée, ou à Taïwan. Ce qui élargit considérablement le débat et le reporte sine die vu qu'il faudrait commencer par savoir mesurer le bonheur. Et apparemment, la richesse telle qu'on la mesure aujourd'hui (PIB et compagnie) n'a pas l'air d'être le meilleur indicateur vu que les pays les plus avancés en la matière ne brillent pas vraiment par bonheur qui en émane, si vous voyez ce que je veux dire...
  • Curiosity, les gens pour qui tu penses que l'enseignement des maths a été un échec, comment sais-tu que ça ne leur a vraiment servi à rien ? Je veux dire par là "comment seraient ces gens s'ils n'avaient strictement rien reçu ? identiques ?". Pas certain. Et à quel âge tu fais le test ? Et quel test ?

    Ensuite, effectivement, une fois tenu ce genre de discours, on arrive rapidement comme tu le fais au tri de la population pour savoir qui aura droit à l'éducation et qui n'y aura pas droit. Personnellement, je trouve qu'on dérape très dangereusement et ce genre de discours me fait extrêmement peur.

    Un pays comme ça, je le fuis au plus vite ou je le combats de l'intérieur (je ne peux pas savoir).
  • On peut retourner la question : à quoi ça servirait de ne pas enseigner les mathématiques.
    Je rejoins le point de vue de troisqua.
    Algebraic symbols are used when you do not know what you are talking about.
            -- Schnoebelen, Philippe
  • Je n'ai aucune réponse à toutes ces questions. Je ne fais que des constats, notamment celui que parmi les gens autour de moi, certains qui ont eu un bac "littéraire" dans le temps où l'on imposait les maths jusqu'en terminale, d'autres qui sont ingénieurs, je peux attester qu'aucune de ces deux catégories n'est exempte de ces "biais" ou erreurs de raisonnement qu'on pense qu'un bon et gros cursus avec plein de maths permet d'éviter !

    Je ne m'exclus pas du lot d'ailleurs car je sais bien que pour dire cela, je me place d'un point de vue pragmatique qui n'a aucun poids "scientifique". Mais j'en suis conscient et je ne prétends pas prouver quoi que ce soit, même si l'expérience m'a souvent montré (avec confirmation par des tiers) que souvent une bonne dose de bon sens vaut mieux que plein d'expériences de pensées foireuses avec des gros raisonnements pourtant bien logiques...

    Aussi, pour ce qui est de l'enseignement, je ne trie personne. Je suis pour que chacun fasse ce qu'il lui plaît, et non pas qu'on contraigne chacun à faire ce qu'une prétendue éducation pour le "bien-être du PIB" voudrait. Pourquoi diable vouloir faire apprendre des math à une personne que cela écœure ? Pourquoi aussi ne pas forcer tout le monde à manger des salsifis, des lentilles, des blettes et de la cervelle ?? A obliger les enfants à apprendre le solfège (clé de sol, de fa, d'ut et compagnie), à lire le sanscrit littéraire dans le texte, à monter à cheval ? Pour savoir faire des pourcentages de tête ? Mais le ministre de l'économie actuel ne sait pas ! (Il ne savait pas non plus ce que représentait un hectare quand il était ministre de l'agriculture...) C'est bien la preuve qu'on peut "réussir" et gagner plein d'argent sans les maths, non (:P) ?
  • Ne pas enseigner les maths à ceux qui ne le veulent/peuvent pas ? Eh bien je réponds par les questions de mon message précédent : à quoi ça servirait de ne pas faire manger de la cervelle ? de ne pas faire apprendre le solfège ? Etc.
    Indice : déjà, ça servirait à ne pas dégoûter les gens des maths, et donc donner de celles-ci une image moins négative ;-)...
  • Pensons à toutes ces personnes pour qui la barre fixe et le cheval d'arçons étaient un supplice. Et qui se sont fait suer à cent sous de l'heure à faire d'interminables séances de lancers de javelots. On les a dégouté du sport, il est donc urgent de supprimer l' E.P.S.
    Karl Tremblay 1976-2023, je t'appréciais tellement.
  • Encore une fois, non ! Pas supprimer mais : ne pas imposer des exercices stériles à des gens qui n'en retirent rien ! Alors oui pour supprimer le cheval d'arçon pour ceux qui n'aiment pas et ne se sentent pas à l'aise. Il y a plein d'activités physiques pour que chacun puisse y trouver son compte.
    (Sinon, oui, ces séances de sport où l'on force un(e) adolescent(e) parfois mal dans son corps à "s'exhiber" devant les autres, c'est une très mauvaise idée, et peu de gens imaginent les ravages que ça provoque. Alors supprimer l'EPS telle qu'on la pratique dans les collèges et les lycées, pourquoi pas ? :-o)

    Et la cervelle, toujours pas d'adepte ??
  • Tout le monde est victime des biais. La question c'est "à quelle fréquence ? petit ou gros biais ?".

    Je pense qu'une population qui ne reçoit aucune éducation mathématique va plus fréquemment être victime de biais, et sur des biais plus "gros". Sinon c'est que les profs de math sont tous des gros nuls et que les élèves en face sont tous des abrutis. Mon expérience personnelle me dit que ce n'est pas du tout ça. Pourtant je sais comme nous laissons couler l'enseignement dans ce pays.

    Mais je ne suis pas non plus nostalgique de la France que me raconte ma mère où, je cite "on ne m'a jamais donné la chance d'apprendre ce que tu as appris". C'est une souffrance pour elle. Idem pour mon père. Je pense que la population a globalement progressé sur le plan cognitif (et non je ne suis pas naïf, je connais les tests pisa, j'en ai fait passer, j'en ai analysés, j'ai vu le volume de connaissances exigibles en terminale diminuer depuis 40 ans, je connais bien ces faits qui me désolent et pour autant je dis que sur l'ensemble de la population, il y a du mieux).

    Ensuite, l'accession au bonheur étant une vision du développement personnel de l'individu je n'irais pas par là. Par contre, sur le plan collectif, un pays où les gens n'ont aucune formation aux sciences me semble être parfaitement rétrograde (au moins en terme d'humanisme).

    Il y a une forte corrélation statistique entre voter Trump et être sous-diplômé. Bien évidemment, les raisons de voter Trump sont multi factorielles, mais je suis persuadé qu'il y a aussi causalité dans la majorité des cas. En tout cas, quasi à chaque interview d'un Trumpiste c'est ce que je comprends.
  • @nounours22, quand un mathématicien dit cela, il parle des démonstrations. Je traduis. Quand il disait "95% des élèves n'y comprennent rien", il parlait du fait que 95% d'élèves ne savent pas les axiomes, les définitions, les théorèmes et les démos de ce qu'ils apprennent. Et ce pourcentage dépend des pays et de l’appréciation de l'auteur qui balance cette phrase. Par exemple je connais les russes qui disent la même chose (95%-99%-99.99%), alors que la géométrie est très très bien enseignée et de nombreux âmes littéraires savent démontrer le théorème de Pythagore sans aucune difficulté et comprennent tout. Ces 95% élèves qui ne comprennent rien, savent normalement résoudre les équations, savent calculer, connaissent les nombres etc.
    et les 5% restant peuvent très bien se débrouiller tout seuls.
    Je ne suis pas d'accord! La situation actuelle en France montre très bien que "se débrouiller tout seuls" c'est se débrouiller sans école... avec l'aide des parents, d'Yvan Monka, d'animaths et des cours particuliers. Et ce 5% fond comme la neige.

    @curiosity
    Pour le point 2., je crois que c'est prendre le problème à l'envers. Plutôt que vouloir enseigner des choses "inutiles" (pour la vie quotidienne, je précise...) à tout le monde, en espérant que ce sera utile à 10 % seulement, autant l'enseigner seulement à ces 10%.
    Je suis d'accord avec @troiqua. Pour obtenir "10% des matheux", il faut enseigner les choses aux nombreux élèves afin qu'une partie d'eux (10%) puisse se former. Et on oublie trop facilement en France, qu'on ne peut pas obliger une personne à devenir un mathématicien. Il y a des élèves forts en maths et qui aiment cela, mais qui ne veulent pas faire une carrière basée sur les maths.
    Je n'ai aucune réponse à toutes ces questions. Je ne fais que des constats, notamment celui que parmi les gens autour de moi, certains qui ont eu un bac "littéraire" dans le temps où l'on imposait les maths jusqu'en terminale, d'autres qui sont ingénieurs, je peux attester qu'aucune de ces deux catégories n'est exempte de ces "biais" ou erreurs de raisonnement qu'on pense qu'un bon et gros cursus avec plein de maths permet d'éviter !
    Les maths se sont les erreurs perpétuels. Si on fait les maths, on se trompe souvent. Les mathématiciens parfaits, qui ne font jamais erreur de raisonnement, cela n'existe pas! Et il ne faut pas non plus oublier, que les mathématiques en France sont très marquées par le courant Bourbaki (ultra symbolisme, ultra précision et maths déconnectée des autres sciences). Ailleurs, certaines choses considérées comme fausses/non précises en France, ne le sont pas à l'étranger.
    Pourquoi diable vouloir faire apprendre des math à une personne que cela écœure ?
    Ce qui écœure cette personne, c'est la mauvaise pédagogie ou la pédagogie inadaptée. A cause d'elle, la personne ne comprend pas les maths. Une matière dans le secondaire ne doit pas écœurer, ce n'est pas normal, surtout au collège où les notions mathématiques sont à la porté de la TRES grosse majorité (j'exclus ici les démonstrations et le rigoureux raisonnement mathématique).
    Pas supprimer mais : ne pas imposer des exercices stériles à des gens qui n'en retirent rien !
    Pourrais tu donner un exemple d'un exercice stérile?
  • En effet, je vois un gros biais dans les messages précédents (pas que les miens, je veux dire ;-)), c'est celui qui consiste à lire ce que je n'ai pas écrit, à savoir : "ne pas enseigner les maths à tout le monde = ne plus rien enseigner à la majeure partie de la population" ! Où cela a-t-il donc été écrit ??

    Par ailleurs, le lien entre l'éducation par les mathématiques forcées et l'absence de biais est une affirmation qui n'est pas "sourcée" (comme on dit), ce à quoi j'ai répondu de la même façon non sourcée en me basant sur mon expérience. Et discriminer petit ou gros biais ne change rien. Un petit biais peut avoir des conséquences désastreuses (et inversement !).

    Je me demande comment faisaient nos ancêtres qui ne savaient rien du calcul différentiel ou des statistiques : étaient-ils intrinsèquement plus "cons", et surtout moins "heureux" que nous ? (Je suis prudent, je mets des guillemets autour des mots pas bien définis :-D.)
    Ici encore, comme on va faire de la rhétorique (biaisée), je précise : je ne suis pas non plus pour que le monde revienne 400 ans en arrière, hein... ;-)
  • "Pourrais tu donner un exemple d'un exercice stérile? "

    Calculer la dérivée de $x\mapsto 3x^2+4x-5$, par exemple. On a demandé ça à une connaissance au bac littéraire il y a plusieurs années. C'est le prof qui a fait le calcul au tableau et qui a mis 15 à la personne (enfin qui s'est mis 15 à lui-même :-D).

    Je peux t'assurer qu'aujourd'hui cette personne ne sait pas calculer un pourcentage (et merci l'i-phone pour faire des additions et multiplications de base), ne connaît aucune démonstration du théorème de Pythagore (qu'elle ne pourrait même pas énoncer je pense), et pourtant gagne deux à trois fois plus que tous les profs de ce forum... Est-elle pour autant plus ou moins heureuse, ça je ne sais pas. Mais si elle avait fait des maths, je suis à peu près certain que son bonheur n'aurait pas augmenté pour autant, et je doute que le PIB mondial y aurait gagné quelque chose...

    Sinon, par "exercice", je veux dire plus généralement : une tâche, un domaine, une matière.
  • On s’en fiche pas mal, du PIB. Par ailleurs, est-ce que son métier est vraiment utile ? À elle, probablement, mais tout court ?
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            -- Schnoebelen, Philippe
  • Nos ancêtres vivaient dans une société où il était moins fondamental d'être éduqué pour survivre ou, à tout le moins, survivre dans des conditions agréables.

    Dans une société où le numérique détient tout le pouvoir (financier et connaissance), ne rien comprendre aux mathématiques ne retire aucunement la possibilité de choisir tel ou tel politique à l'élection, mais cela retire une bonne partie de son discernement. Cela favorise grandement sa fragilité politique (traduire "naïveté / capacité à tomber dans les biais les plus grossiers" etc).

    Ne pas comprendre comment fonctionne vraiment l'intelligence artificielle (dans le milieu communément appelée "connerie naturelle"), c'est aussi ne pas bien comprendre les dangers, c'est potentiellement consommer des outils qui l'utilisent sans savoir tout ce que cela induit. Or pour comprendre comment ça marche, même dans les grandes lignes indispensables, c'est très très compliqué quand on a 0 base de maths.
  • Et pour en rajouter, je suis souvent surpris par la perméabilité du milieu enseignant à tout un tas de pseudo-sciences.
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            -- Schnoebelen, Philippe
  • "est-ce que son métier est vraiment utile ?"

    Utile pour quoi ? Pour la société ? Comment définit-on l'utilité pour la société ? Comment évalue-t-on qu'un métier est utile et pas un autre ? Le jour où quelqu'un pourra donner une réponse ici, je pourrai répondre autrement que par retourner encore la question : et un prof de maths (même des années 90), ça sert quoi ? On n'a pas beaucoup avancé on dirait !

    "Nos ancêtres vivaient dans une société où il était moins fondamental d'être éduqué pour survivre ou, à tout le moins, survivre dans des conditions agréables."

    C'est encore une affirmation qui a une grande portée mais ne me semble pas fondé sur grand chose. Surtout quand on la qualifie à grands coups de "conditions agréables". Les diplômés bac+4/5/8 qui font caissiers à Lidl ou équipier chez Mac Do, ils survivent dans des conditions agréables ? Hum, on va me dire : ce n'est qu'une petite partie. Mais alors, les bacs pro, les CAP, les BEP qui sont artisans et sous-éduqués par rapport à ces bac+4-8, et qui gagnent deux ou trois fois plus, on les considère comment ?

    Idem pour le "numérique" : c'est un phantasme de croire que les ingénieurs (y compris ceux qui ont fait de l'informatique, comme c'est mon cas), comprennent mieux l'IA ou les objets technologiques que la moyenne, pour la simple et bonne raison que cela demande du temps, de l'investissement, et qu'on préfère faire autre chose que savoir comment fonctionne un smartphone ou une puce dans les détails (ce qui nécessite réellement beaucoup d'investissement au passage). Combien de profs de maths bien éduqués ici pourraient dire comment fonctionne un serveur PHP qui est pourtant nécessaire au bon fonctionnement de nombre de forums internet (et peut-être celui-ci) ?
    C'est encore une belle idée (dans le sens "bel idéal") de croire qu'il suffit d'être éduqué pour connaître. Cela donne des bases, certes, mais l'essentiel du boulot vient après. J'aimerais bien savoir ici qui a lu tous les rapports contradictoires sur les dangers des ondes (wifi entre autres, et la 5G qui arrive), et qui ont changé un iota de leurs habitudes. Ha ha ha... Je me Gauss (;-)), non par méchanceté, mais parce que je constate depuis des années qu'à côté d'une certaine croyance en la toute-puissance des mathématiques et de la logique, il y a la réalité des faits qui vient régulièrement tout foutre par terre.

    Une fois pour toute : croire qu'avoir un niveau d'éducation élevé en maths ou en sciences protège de quoi que ce soit est un leurre. J'ai eu un colleur en prépa qui avait fait Ulm et qui militait au FN (non, pas lui, un autre...). Non, on peut voter Trump et être très éduqué... Et ce n'est pas d'avoir appris des démonstrations du théorème de Pythagore qui y changera quoi que ce soit. Sans parler des frasques déjà évoquées de tous les grands patrons polytechniciens qui sont reconnus pour avoir été mauvais dans leur domaine ! Un ancien ministre de renommée internationale un brin climato-sceptique, ce serait impossible ? Bah non. Parce qu'à côté de l'éducation, il y a tout simplement l'individu. (Souvenez-vous : celui qu'on a forcé à se ridiculiser au cheval d'arçon quand il avait 14 ans.)

    L'équation est complexe, j'ai bien peur qu'en réaction à la situation actuelle (concernant les maths et la formation scientifique), on tombe dans l'excès inverse avec une sorte de pensée où l'on va imposer au monde un fonctionnement rigide, froid, rigoureux, basé sur sa sainteté la logique et sur ses sbires, dont les mathématiques, en croyant ou espérant qu'alors tout deviendra rose. Les gens ne voteront plus selon leur affinité (c'est le cas, ce sont les conclusions de chercheurs) mais selon la raison, le niveau global s'élèvera et la population sera "heureuse". Hum... 8-)
  • @curiosity
    En effet, je vois un gros biais dans les messages précédents (pas que les miens, je veux dire winking smiley), c'est celui qui consiste à lire ce que je n'ai pas écrit, à savoir : "ne pas enseigner les maths à tout le monde = ne plus rien enseigner à la majeure partie de la population" ! Où cela a-t-il donc été écrit ??
    Les programmes actuels sont poreuses et n'enseignent pas les bases qui sont indispensables à tout le monde : nombres, calculs, pourcentage, fonctions et graphiques, équations. Je ne parle pas des programmes qui font semblant d'enseigner, mais de la réalité. Si on prend les programmes de maths des BAC techno et Pro, il est souvent marqué "la maitrise n'est pas demandée" ou, pire, "calculer avec l'aide de la calculatrice". Tu proposes encore alléger les choses. Pour moi cela signifie "ne plus enseigner à la majeure partie de la population".
    Calculer la dérivée de $(f(x) = 3x^2 + 4x -5$, par exemple.
    Ce genre d'exercice a deux buts :
    1) pratique-pratique-pratique, les fameux automatismes. Cela permet dans les études post-BAC de passer direct à l'application et les choses plus poussées. C'est comme les tables de multiplications : il faut maitriser pour avancer.
    2) à l'examen vérifier que le point 1) a fonctionné et l'élève est prêt.
    D'ailleurs, les études DEPP montre que les exercices stériles sont plus efficaces que les problèmes et les exercices contextualisés. Les élèves apprennent mieux, alors que les exercices contextualisés mettent en échec les élèves (surtout les élèves de REP).
    Je peux t'assurer qu'aujourd'hui cette personne ne sait pas calculer un pourcentage (et merci l'i-phone pour faire des additions et multiplications de base)
    Et? A l'examen, une des mes étudiants a été assez intelligente pour remarquer qu'il y a quelque chose qui cloche. Nous avons des calculatrices simples où il faut taper le nombre puis la touche de racine carré. L'étudiante faisait l'inverse : racine puis le nombre puis racine puis le nombre... en boucle :-D Une personne qui sait ce que c'est un carré, peut facilement comprendre le fonctionnement de la calculatrice. Tu tapes racine => 4 et 4 => racine pour vérifier. La même chose pour multiplier par un nombre négatif. Si tu connais les règles de signes, tu déduis toi même quel est le signe, puis tu calcules le reste avec la calculatrice.
    et pourtant gagne deux à trois fois plus que tous les profs de ce forum...
    Pourquoi comparer aux professeurs? Et si on compare aux ingénieurs? Aux statisticiens? Aux économistes/gestionnaires? Et si ton élève, une fois le BAC L en poche, aurait décider de faire la licence d'économie-gestion où il faut savoir dériver ce genre de fonction?
  • @curiosity
    Les diplômés bac+4/5/8 qui font caissiers à Lidl ou équipier chez Mac Do, ils survivent dans des conditions agréables ? Hum, on va me dire : ce n'est qu'une petite partie. Mais alors, les bacs pro, les CAP, les BEP qui sont artisans et sous-éduqués par rapport à ces bac+4-8, et qui gagnent deux ou trois fois plus, on les considère comment ?
    Il ne faut pas être jaloux. Pourquoi comparer? Pourquoi un CAP/BAP/Bac Pro doit-il gagner moins qu'un BAC +5??? Chacun a choisi son chemin. Je n'aurais pas pu faire le travail qu'ils font et je n'échangerai pas mon job contre le leur juste pour gagner plus.
  • Je vais extraire ça:
    curiosity a écrit:
    J'ai eu un colleur en prépa qui avait fait Ulm et qui militait au FN

    Donc ????

    Donc il ne suffit pas d'être bon en math pour ne pas voter FN. C'est bien ça et uniquement ça qu'on peut conclure. Donc ça ne contredit rien de ce que tu annonçais contredire.

    En fait ton post est un long enchaînement de biais similaires. Heureusement que tu as eu droit à une éducation aux maths dans ce pays, sinon ça aurait été probablement pire.

    La question statistique que tu soulevais était plutôt "y a t-il une sur représentation des sous diplômés chez les électeurs du FN" et la réponse est :

    Diplôme et vote FN


    Je pourrais aussi extraire le passage tentant de contredire que le diplôme n'est pas important pour survivre relativement agréablement mais ça va rallonger le post pour rien: on est exactement sur le même type de biais:

    Diplôme et pauvreté
    curiosity a écrit:
    C'est encore une belle idée (dans le sens "bel idéal") de croire qu'il suffit d'être éduqué pour connaître.
    Sauf que personne n'a dit ça. Encore un biais cognitif. Ce qui a été plutôt dit, c'est que la proportion d'éduqués chez ceux qui connaissent est plus importante que la proportion des non-éduqués. Tu te rends compte que ce n'est pas du tout, mais alors du tout la même phrase ?

    On peut s'amuser à faire la même chose sur tous tes paragraphes. Tu fais toujours la même erreur (volontaire ?), invariablement. Je te conseille d'écouter monsieur Gérald Bronner. Tu es typiquement son sujet d'étude.
  • Les sous-diplômés votent peu, si je me souviens bien.
    Par ailleurs, les ouvriers votaient plutôt PCF il y a soixante ans plutôt que pour l’extrême droite.
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            -- Schnoebelen, Philippe
  • "Pour moi cela signifie "ne plus enseigner à la majeure partie de la population". "

    Ne plus enseigner les maths de ce style à la majeure partie de la population : OUI. Mais cela ne signifie pas : ne plus rien enseigner à la population ! Et encore une fois, non, non et non, rien n'autorise à affirmer qu'il y a des bases des mathématiques qui "sont indispensables à tout le monde". C'est une affirmation gratuite, non démontrée, basée sur un sentiment personnel (qui sera certes partagé sur ce forum vu sa population, mais qui est loin, très loin, de l'être dans la population générale).

    "Ce genre d'exercice a deux buts :"

    Il faut lire l'intégralité des messages (:P) ! Cet exercice peut avoir tous les buts du monde, il n'est d'aucune utilité pour la personne que j'ai citée, et pour environ 95 % de la population je pense (estimation avec une grosse louche) qui n'a que faire de la dérivée de $x$ carré !! Il faut revenir à la vraie vie de temps en temps...

    "A l'examen..."
    Et :-D ? Cela confirme bien ce que je dis, il me semble.

    "Il ne faut pas être jaloux."

    Décidément, même les chercheurs n'échappent pas (malgré leur lourd bagage mathématique ;-)) aux attaques, aux mauvaises compréhensions de la langue, aux biais, etc. Je me demande comment on peut écrire ça après ce que j'ai écrit.
    Bref, si ça tourne à l'attaque personnelle et à la psychologie de comptoir, je préfère en rester là. Surtout quand je lis d'autres messages du style :

    "En fait ton post est un long enchaînement de biais similaires. Heureusement que tu as eu droit à une éducation aux maths dans ce pays, sinon ça aurait été probablement pire. "

    (C'est sûr qu'on a là un message sans biais, sans attaque, et qui n'échappe pas aux procédés rhétoriques malsains...)

    J'ai dis ce que j'avais à dire et je vais le redire une dernière fois parce que c'est la base de toute pédagogie et tout apprentissage : c'est un bon gros doux rêve de croire que les maths vont sauver qui que ce soit ou quoi que ce soit (la société, les gens, l'économie, la planète, etc.). Si je vais faire un tour sur histoire-géo.net, je vais tomber sur des tas de profs qui sont tellement collés à leur matière qu'ils jureront que sans enseignement de l'histoire et de la géo, le monde est foutu. Et sur svt.net ou sciences-eco.net, ce sera la même histoire.

    Rêvez bien, mais attention, le réveil pourrait être difficile :-(...

    c.
  • @curiosity c'est le discours essentialiste qui est tenu par l'école pédagogiste : puisque, forcément, "ils" ne peuvent pas suivre un vrai cours qui délivre des connaissances d'un bon niveau, on "leur" donne des choses à leur niveau.

    Comme évidemment l'intelligence moyenne ne varie pas dans des proportions telles que les différences de niveau d'enseignement observées, on crée à l'école, ab initio, dès l'école primaire, des inégalités qui ne se résorberont jamais (et la France est championne du monde aussi pour cela). J'ai remarqué que ce fait évident est particulièrement difficile à admettre même par des gens intelligents. Il est pourtant exprimé de façon tout à fait explicite, ainsi en maths.

    Pourquoi cela a-t-il décidé ? Probablement en sous-main par ceux qui prennent vraiment les décisions dans le milieu enseignant pour préserver les enfants d'une corporation qui auraient eu sans cela une trop rude concurrence avec "eux". En effet, l'escalator social s'étend arrêté (on est passé d'une croissance réelle de 5% à 1%), les "bons postes" et les "bonnes situations" sont comptés.
    Comment cela se fait en pratique ? Par le délabrement des programmes et les directives explicites "n'est pas exigé" "on ne vise pas le virtuosité" et patati et patata; ce n'est pas propre aux maths, j'ai même pu lire une étude relative à l'apprentissage de la lecture où c'est encore pire, car les choses se sont faites avec la complicité d'au moins un syndicat enseignant de façon totalement publique (diffusion des directives dans la revue syndicale). C'était un bien mauvais calcul car cela a été défavorable à tout le monde.

    La situation de la France est particulière parce qu'un plus grand nombre de facteurs défavorables se sont conjugués.
    D'où la stupéfaction de voir le pays des maths crasher totalement sont enseignement en une trentaine d'années. Cela a été d'autant plus visible que nous sommes tombés de haut.

    Il y a certaines inflexions dans le fil qui rappellent que les mathématiques font parties (même si les dénominations étaient différentes) des arts libéraux, dignes de l'homme libre, et que donc forcément, ne doivent être enseignées qu'avec force retenue pour les arts serviles (actuellement les filières méprisées de l'enseignement professionnel, mais pas seulement, puisque la ségrégation territoriale a créé une stratification éducative pour des filières qui portent le même nom mais dont les pratiques et le attendues sont évidemment différents).
    "J'appelle bourgeois quiconque pense bassement." Gustave Flaubert
  • Troisqua a écrit:
    Je pense qu'une population qui ne reçoit aucune éducation mathématique va plus fréquemment être victime de biais

    Hypothèse qui est invérifiable aujourd'hui puisque tout le monde reçoit une "éducation mathématique".
    L'identification des biais ne relève pas des mathématiques mais de la psychologie sociale.
    Et, à ma connaissance, il n'y a aucun enseignement de cette discipline dans l'enseignement secondaire.


    Et on nous reparle des ouvriers qui voteraient mal parce qu'ils ne sont pas diplômés.
    Je pense que ce n'est pas le bon point de vue.
    Les gens votent beaucoup quand ils pensent que ce vote à une influence sur leur conditions matérielles de vie.
    Le taux de vote n'est pas directement une affaire de diplôme mais une affaire de ce qu'on pense qu'on va perdre (ou gagner) après une élection. Quand on n'a rien ou pas grand chose à perdre, et qu'on pense qu'un vote n'améliorera pas nos conditions matérielles de vie, on est enclin à ne pas voter.

    Par ailleurs, les mathématiques sont actuellement un moyen utilisé pour sélectionner les gens.
    Ce moyen n'a rien de scientifique il est comme une mode qui pourrait passer un jour et être remplacée par une autre.
    La plupart des gens qui ont des bons revenus ont franchi cette sélection ce qui donne l'impression qu'il y aurait une corrélation entre les mathématiques et le vote des gens. Mais comme déjà indiqué la corrélation dans ce domaine est la richesse des gens très probablement. Plus on est riche plus on vote.

    NB:
    La psychologie sociale (également appelée sociopsychologie, à ne pas confondre avec la psychosociologie qui n’est qu’une forme de la psychologie sociale) est la branche de la psychologie expérimentale qui étudie de façon empirique comment les pensées, les émotions et les comportements des gens sont influencés par la présence réelle, imaginaire ou implicite d'autres personnes ou encore par les normes culturelles et les représentations sociales.

    PS:
    Il y a quelques personnes sur le forum qui montrent que l'éducation mathématique reçue n'est pas un barrage contre le fait de "mal" voter à des élections.

    PS2:
    Curiosity a écrit:
    Alors oui pour supprimer le cheval d'arçon pour ceux qui n'aiment pas et ne se sentent pas à l'aise.
    Quand j'étais enfant, c'était ma bête noire, j'avais très peur de me blesser en tombant par exemple.
    J'avais eu à l'école primaire un enseignant d'EPS brutal. Un jour il a lancé un medecine ball (ballon très lourd) dans la direction des élèves, je l'ai reçu dans la nuque, ce type aurait pu me blesser sérieusement. Après cela vous comprendrez que je n'avais pas une envie folle d'aller en EPS. Je détestais tout ce qui était gymnastique.
  • Fin de Partie, entièrement d'accord avec toi sur la "psychologie sociale". C'est pour ça que j'évoque Gérald Bronner (qui explique d'ailleurs qu'un des fondements de son activité de chercheur repose sur l'analyse des erreurs de raisonnement, les mathématiques (corrélation / dépendance / causalité : tout cela est formalisable en mathématiques)

    Ensuite tu fais un paragraphe où tu affirmes une causalité du vote (ce qu'on a à perdre ou gagner) quand je ne faisais que pointer une corrélation pour contrer le fait que diplôme et vote étaient non corrélés. Il y a bien une corrélation statistique mesurée, c'est la question de causalité qui fait débat. Toi tu affirmes avoir trouvé la cause (pas moi) et cette cause serait "ce qu'on a à perdre ou à gagner". Il ne te reste plus qu'à démontrer cette causalité (bon courage).

    Ensuite tu évoques à ton tour, comme moi, une corrélation "Plus on est riche plus on vote" (tout aussi vraie statistiquement que "moins on est diplômé plus on vote FN").

    Ces deux corrélations sont vraies sur le plan de la statistique ce qui ne veut pas dire qu'il y ait de la causalité directe (ni pour l'une ni pour l'autre). Ce que tu me reprochais de faire, tu le fais toi-même. Sauf que de mon côté je me suis abstenu d'en déduire une causalité.

    La question serait donc de savoir si ces causalités sont factuelles (voire vérifiables), et là on touche à l'opinion personnelle qui peut-être plus ou moins emprunte de colère (cf curiosity qui met de la causalité dans tous les sens pour exprimer sa colère, prévenir tous ces grands rêveurs d'un grand malheur qui approche etc).

    Ça termine donc en troll où chacun veut juste convaincre l'autre que sa vision personnelle du monde est la bonne et que les autres n'ont rien compris et ce avec plus ou moins d'optimisme. Ma conviction personnelle c'est qu'un état un tant soi peu humaniste doit organiser l'école obligatoire et y inclure un apprentissage obligatoire des mathématiques (qu'elle plaise aux élèves ou non est avant tout un problème de formation des enseignants).

    J'en profite pour ajouter qu'il faut aussi, dans le paragraphe précédent, remplacer Mathématiques par Histoire, Langues Vivantes, Informatique, EPS etc. Tous ces aspects doivent être enseignés selon moi que ça plaise à Kevin ou pas. Ça n'est qu'une conviction personnelle, ce n'est pas la Vérité tombant du ciel s'imposant à tous. En tout cas mon expérience personnelle et les messages que j'ai lus ici m'amènent tous à penser ça.
  • "on crée à l'école, ab initio, dès l'école primaire, des inégalités qui ne se résorberont jamais"

    C'est plus compliqué que cela. J'ai connu (et je suis sûr que c'est le cas de tout le monde ou presque) des personnes qui étaient "bonnes" en maths jusqu'en 6e, ou en 5e, ou 4e, 3e, 2nde etc. puis qui ont décroché à un moment de leur scolarité sans raison "apparente". Alors ces élèves qui avaient apparemment tout pour réussir ont flanché : est-ce une fatalité ? Je n'en sais fichtre rien, mais le fait est que c'est souvent irrécupérable. On voit alors des élèves s'orienter vers des filières non scientifiques, qui peuvent même y exceller, se détourner complètement des maths jusqu'à les voir comme leur bête noire.
    Souvent on entendra l'intéressée dire que c'est la faute du prof, mais le même prof a permis à d'autres élèves de prendre leur envol dans cette matière. C'est donc plus compliqué qu'un simple : "c'est la faute de l'enseignant qui s'y prend mal, qui n'a pas la bonne pédagogie, etc." Le fait est que tout le monde est différent et va suivre un parcours distinct de son voisin. Penser qu'on peut uniformiser la population et lui faire atteindre un même niveau élevé en maths, c'est illusoire, sauf peut-être à imposer de très fortes contraintes psychologiques, avec les résultats que l'on constate, dans les pays asiatiques notamment (suicide, anxiété, etc.). C'est étonnant comment tous les partisans de ces systèmes refusent de voir cette donnée du problème, et croient qu'on peut extirper ce que l'on veut d'un système aussi facilement qu'on sépare l'eau de l'alcool dans un distillateur...

    Mais je reviens comme un leitmotiv à ce qui me semble le plus important. A la question "pourquoi enseigner les maths ?", je ne vois qu'une seule bonne réponse : parce que ça augmente le "bonheur" de celui qui les pratique, et si possible de l'ensemble de la population. Je ne suis toujours pas convaincu que le boulanger chinois, coréen, russe ou taïwanais qui sait résoudre des inéquations du 2nd degré est plus heureux que son homologue français ou américain qui ne sait pas/plus ce qu'est une inéquation. Je ne crois pas non plus que sa réflexion sur le monde soit plus profonde, et ses choix en matière de politique ou de société plus éclairés. Si c'était le cas, ces pays seraient naturellement devenus des champions du monde en termes de développement. Ce n'est vrai nulle part sur la planète pour une simple et bonne raison déjà évoquée : tout ceci est inséparable de l'aspect culturel local ! On ne peut pas transposer de façon brutale les us et les coutumes d'un pays dans un autre.

    Alors pour revenir de façon plus précise aux maths, à une logique purement commerciale ("on fait des maths pour avoir un meilleur rang mondial dans la course au PIB, ou pour soit-disant éduquer les foules (!!)"), j'en préfère une autre ("on fait des maths pour le "bien-être" que cela apporte à l'individu, donc on n'en fait pas si cela ne fonctionne pas").


    "Et on nous reparle des ouvriers qui voteraient mal parce qu'ils ne sont pas diplômés."

    Oui, c'est ce que j'ai essayé de dire à la fin de mon message précédent. On se sert des maths, et de l'éducation en général (mais surtout les sciences), pour dire que les autres qui ne pensent pas comme nous "votent mal". Dit autrement : il y a un "bon" vote, et un "mauvais" vote. Et on oublie au passage les fondamentaux de la démocratie : le "bon" vote, c'est celui qui conduit l'un des candidats à la victoire, et il est expressement demander aux "perdants" de se rallier à lui pour le bien de la nation. Mais c'est une autre histoire.
    Bref, ici, le raisonnement qui est fait implicitement est : si tu dis que les maths ne servent pas au bien-être collectif de la nation, et à la bonne marche du monde, alors c'est toi qui va tout faire capoter parce que ton vote sera "mauvais", parce que tes choix sociétés seront "mauvais", etc., alors que "nous", qui faisons des maths, savons raisonner, nous avons raison !
    Est-ce que ceux qui tiennent ce genre de discours (sans vraiment s'en rendre compte ?) en ont conscience, j'ai bien peur que non.
  • Quand j'ai écrit, en parlant de l'apprentissage obligatoire des mathématiques, "qu'il plaise aux élèves ou non est avant tout un problème de formation des enseignants" je n'ai pas écrit "uniquement". Le problème quand on veut débattre c'est de ne pas tordre ce que les autres disent pour avoir raison. C'est toujours les mêmes biais quand tu parles.

    J'explique mon point de vue, je ne cherche pas à dire que je détiens la vérité, mais quand tu me fais parler, ne transforme pas mes propos systématiquement.

    Tu as écrit : "Penser qu'on peut uniformiser la population et lui faire atteindre un même niveau élevé en maths, c'est illusoire"

    Je pense avoir lu tous les messages de ce fil et je n'ai jamais lu quelqu'un dire quelque chose d'approchant. Tu sembles contenir beaucoup de colère en toi et vouloir sans cesse reprocher telle ou telle pensée aux autres, mais ils ne l'ont pas cette fameuse pensée. Lis ce qu'ils disent, ne le transforme pas sémantiquement systématiquement.

    " On se sert des maths, et de l'éducation en général (mais surtout les sciences), pour dire que les autres qui ne pensent pas comme nous "votent mal""

    Personne n'a affirmé une relation de causalité entre "non éduqué en science" et "voter mal". Par contre la corrélation statistique entre "non éduqué tout court" et "voter FN" est mesurée, c'est ça qui a été dit. C'est totalement différent à la fois sur le choix des mots et sur le plan d'une éventuelle causalité.

    Tu fais dire à chacun de tes commentaires de la causalité à des gens qui te rappellent simplement qu'il y a corrélation statistique mesurée. C'est toi qui veux mettre de la causalité partout et décorréler ce qui est pourtant statistiquement mesuré pour que ça colle à ta vision du monde. Et pour ça tu prends des exemples de ton expérience (l'ulmard qui vote FN). Y aurait pas un problème de raisonnement du coup ?

    Avant de reprocher aux autres de penser ce que tu crois qu'ils pensent commence à lire ce qu'ils écrivent et ne pas le transformer quand tu les cites.
  • troisqua a écrit:
    Personne n'a affirmé une relation de causalité entre "non éduqué en science" et "voter mal". Par contre la corrélation statistique entre "non éduqué tout court" et "voter FN" est mesurée, c'est ça qui a été dit. C'est totalement différent à la fois sur le choix des mots et sur le plan d'une éventuelle causalité.
    Les statistiques sur le nombre de votants des partis de droite dits extrêmes sont très peu fiables (c'est un sujet sur lequel les gens mentent allègrement, un peu comme le nombre de partenaires sexuels). La preuve est à chaque fois la différence importante entre ce qui était prévu et ce qui arrive lorsqu'ils font un bon score électoral. Le dernier vautrage spectaculaire date de 2016 quand tous les médias américains y compris des sites sérieux comme 538 annoncaient Hillary ultrafavorite le jour même.
    Pour l'élection en 2017, la candidate perdante avait obtenu 33.94% mais quels étaient les pronostics?
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Je pense que beaucoup ici perdent de vue une chose importante, qui est la même quels que soient les enseignements qui sont, ou devraient être, prodigués par l'Éducation Nationale :


    Qu'est-ce que cet enseignement apporte à l'individu, au bout du compte ?


    En effet, ce micro débat que vous avez actuellement pourrait se faire aussi bien à propos de la Philosophie en terminale, du Français jusqu'en première, et pourquoi pas même à l'encontre de l'EPS ou encore aux Arts Plastiques au collège.

    Quel est l’intérêt de proposer tout cela à tout le monde ?

    Après tout, une grande majorité des boulangers du coin n'en ont sans doute rien eu à faire des cours d'Arts Plastiques au collège, pourquoi donc le leur avoir proposé ? Avoir rendu obligatoire leur présence à ces cours ?

    De même, pour moi qui n'aime absolument pas le sport et qui prenait chaque cours comme une punition aussi bien physique que mentale (ah les railleries sur le physique...), pourquoi diable ai-je été forcé à en faire jusqu'en terminale ?

    Tout cela tient en une petite phrase, que j'ai compris que bien plus tard : le bienêtre des individus.

    Ce bienêtre passe par plusieurs aspects :
    • l'aspect physique/santé : être bien dans sa peau, éviter des maladies dues à l'inactivité et à la prise de poids, etc...
    • l'aspect mental : être capable de faire ses courses en donnant le bon nombre d'argent à la caissière, être capable de gérer ses comptes, être capable (pourquoi pas pour les plus téméraires) de comprendre les discours politiques et sociales, de voter en connaissance de cause, etc...
    • l'aspect psychique : qui combine les deux précédant, auquel il faut rajouter le fait d'avoir un toit sur la tête, avoir de quoi se nourrir, vivre en paix, etc...


    Avoir tous ces cours et c'est très cartésien comme vision :
    Règle première
    Le but des études doit être de diriger l’esprit de manière à ce qu’il porte des jugements solides et vrais sur tout ce qui se présente à lui.

    [...]
    En effet, nous étudions les sciences utiles ou pour les avantages qu’on en retire dans la vie, et pour ce plaisir qu’on trouve dans la contemplation du vrai, et qui, dans ce monde, est presque le seul bonheur pur et sans mélange. Voilà deux objets légitimes que nous pouvons nous proposer dans l’étude des sciences ; mais si au milieu de nos tra­vaux nous venons à y penser, il se peut faire qu’un peu de précipitation nous fasse négliger beaucoup de choses qui seraient nécessaires à la connoissance des autres, parce qu’au premier abord elles nous paroîtront ou peu utiles ou peu dignes de notre curiosité. Ce qu’il faut d’abord reconnoître, c’est que les sciences sont tellement liées ensemble qu’il est plus facile de les apprendre toutes à la fois que d’en détacher une seule des autres. Si donc on veut sérieusement chercher la vérité, il ne faut pas s’ap­pliquer à une seule science ; elles se tiennent toutes entre elles et dépendent mutuellement l’une de l’autre. Il faut songer à augmenter ses lumières naturelles, non pour pouvoir résoudre telle ou telle difficulté de l’école, mais pour que l’intelli­gence puisse montrer à la volonté le parti qu’elle doit prendre dans chaque situation de la vie. Celui qui suivra cette méthode verra qu’en peu de temps il aura fait des progrès merveilleux, et bien supé­rieurs à ceux des hommes qui se livrent aux études spéciales, et que s’il n’a pas obtenu les résultats que ceux-ci veulent atteindre, il est parvenu à un but plus élevé, et auquel leurs vœux n’eussent ja­mais osé prétendre.
    c'est potentiellement porter un jugement raisonné sur le monde et s'émanciper.


    Il est clairement urgent de se poser les bonnes questions, d'arrêter de faire l'autruche et surtout d'arrêter de voir le bien ou le mal à un seul endroit. Rien n'est blanc. Mais rien n'est noir non plus.
  • Foys: alors même si les statistiques sont fausses, on est mal barrés si on n'a même plus d'instrument de mesure de corrélation, on est encore plus loin que je pensais d'un établissement hypothétique de causalité ! Ce fil est définitivement foutu !

    Bon cela dit il me semblait que la stat INSEE que j'avais sourcée était réalisée après le vote, c'était pas basé sur des intentions. J'admets ne pas être allé chercher plus loin.
  • "Je pense que beaucoup ici perdent de vue une chose importante..."

    Autant je suis d'accord avec le début puisque c'est ce que j'exprime, autant la fin me laisse sur ma faim.
    Je ne comprends pas la référence à Descartes. Sa "règle première" est précisément ce qui est utilisé par certains partisans d'une éducation de tout pour tous à un haut niveau (ce qui est un leurre) avec, sous-jacent, une espèce de moraline qui indique ce qui doit être pensé ou fait : cet enseignement aura pour conséquence que les gens ne voteront par pour tel ou tel parti, qu'ils devront savoir faire des calculs savants pour le bien-être de tous, etc., sinon, c'est mal, les gens sont mauvais et méritent le blâme parce qu'ils ne pensent pas "droit"...

    Je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'aller chercher Descartes pour autre chose que sa méthode scientifique (à appliquer en sciences et pas partout, comme le théorème de Gödel n'a pas à sortir de la logique et des maths pour aller justifier tout et n'importe quoi en sciences sociales ou en philosophie par exemple) et ses coordonnées ;-). Sa "philosophie" lui est propre, on a mieux à faire aujourd'hui que s'imposer des règles rigides pour penser le monde de façon rigide.
  • @dp : entièrement d'accord.
  • @curiosity
    Sa "règle première" est précisément ce qui est utilisé par certains partisans d'une éducation de tout pour tous à un haut niveau (ce qui est un leurre) avec, sous-jacent, une espèce de moraline qui indique ce qui doit être pensé ou fait : cet enseignement aura pour conséquence que les gens ne voteront par pour tel ou tel parti, qu'ils devront savoir faire des calculs savants pour le bien-être de tous, etc., sinon, c'est mal, les gens sont mauvais et méritent le blâme parce qu'ils ne pensent pas "droit"...
    Je ne suis pas partisan d'une éducation à haut niveau pour tous. Quel intérêt pour le quidam moyen de savoir résoudre une EDP ?
    Je suis en revanche partisan d'une éducation qui permette à tous de s'émanciper. Par exemple, je suis pour l'ajout d'un cours (même juste une heure par semaine de la sixième à la terminale) de zététique afin de permettent cette émancipation aux individus.
    Aussi, on voit une morale là où on veut la voir. ;)
    Je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'aller chercher Descartes pour autre chose que sa méthode scientifique (à appliquer en sciences et pas partout, comme le théorème de Gödel n'a pas à sortir de la logique et des maths pour aller justifier tout et n'importe quoi en sciences sociales ou en philosophie par exemple) et ses coordonnées. Sa "philosophie" lui est propre, on a mieux à faire aujourd'hui que s'imposer des règles rigides pour penser le monde de façon rigide.
    Je suis tout à fait d'accord (c'est pour ça que j'ai précisé "et c'est très cartésien comme vision"). Toutefois, certes, des ajustements seront à penser et à réaliser mais dans le fond le gros de cette règle reste toujours d'actualité et applicable aujourd'hui.
  • troisqua a écrit:
    Foys: alors même si les statistiques sont fausses, on est mal barrés si on n'a même plus d'instrument de mesure de corrélation, on est encore plus loin que je pensais d'un établissement hypothétique de causalité ! Ce fil est définitivement foutu !
    Il faut distinguer les statistiques de l'usage qu'on en fait, de plus la citation de statistiques ou d'une production scientifique quelconque n'est pas une injonction ni même une simple invitation faite aux gens à mettre leur esprit critique en berne et à admettre sans réserve la parole officielle.

    Le biais d'échantillonnage est un problème qui dépasse en partie les mathématiques (ici: les sondés peuvent dire n'importe quoi; les gens qui portent les résultats à la connaissance du public aussi si parmi leurs objectifs se trouve celui de contribuer à établir un paradigme).
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Les corrélations issues des mesures statistiques sont peut-être issues elles-mêmes de statistiques mal mesurées ou manipulées par le pouvoir en place.

    Je n'avais pas encore entendu dire que que l'INSEE truquait ses statistiques. Je suis peut-être mal informé. Tu as des éléments pour étayer tes soupçons ? Aux USA, Trump n'arrive pourtant pas encore à influencer les statistiques qui montrent le même phénomène que chez nous (corrélation "peu de diplôme / vote extrême droite"). L'INSEE américaine ne collabore peut être pas autant avec Trump que l'INSEE française avec notre cher président:)

    Bref, peut-être je ne sais pas, je dirais que les gens qui font ces stats essayent de faire bien leur taf et qu'ils ne sont pas systématiquement téléguidés par le vilain au pouvoir. Je suis peut-être trop naïf.

    En tout cas si même les statistiques sont fausses alors il faudra se contenter de successions de témoignages d'expériences personnelles pas beaucoup plus propices à établir des causalités annoncées par certains sans coup férir.

    À ce niveau d'incertitude, je ne vois, à titre personnel, plus beaucoup beaucoup d'intérêt à discuter. J'ai peut-être aussi mal compris ta remarque.
  • "Je suis en revanche partisan d'une éducation qui permette à tous de s'émanciper."

    C'est le cœur du problème, mais ce n'est pas ce qui doit être recherché, contrairement justement à ce courant de pensée. Pour s'émanciper, il faut connaître précisément ses chaînes et décréter quelles sont nuisibles. Mais si l'on s'émancipe en brisant ses chaînes pour s'en coller de nouvelles tout aussi lourdes, c'est juste un travail sans intérêt. C'est pour cela que plutôt que parler émancipation, liberté ou je ne sais quoi, je reviens toujours à la question fondamentale du bonheur et du bien-être des gens.

    La plus grande émancipation qu'on ait connu en France reste sans doute le passage de l'ancien régime à la démocratie. Pour autant, les gens sont-ils plus heureux aujourd'hui qu'à cette époque ? C'est une question extrêmement difficile, mais on a tout de même quelques indices. En particulier, si le monde "libre" post-monarchie avait été un Eden pour les anciens paysans, serfs, etc., tous les grands écrivains du XIXe auraient été célèbres pour des romans d'amour à l'eau de rose décrivant Bisounoursland, et non pour des romans noirs montrant les atrocités des nouvelles conditions encore plus inhumaines de ces êtres devenus "libres" après le renversement de la noblesse. Et la situation actuelle du monde ne me semble pas présenter un tableau forcément plus idyllique par rapport aux siècles passés. C'est très difficile de comparer ce que l'on ne connaît que par ouï-dire et lecture de vénérables ouvrages. Mais il est clair que s'il y a eu des avancées, il y a eu aussi des reculs (voir les problèmes de santé chroniques et dégénératifs apparus après la 2ème guerre mondiale, avec une espérance de vie qui stagne et décline par endroits).

    Il ne s'agit absolument et évidemment pas de nier ces avancées (scientifiques, médicales, sociétales, etc.), mais d'éviter de se leurrer ici sur un : "c'était pire avant" (:-D), en sous-entendant que les Lumières ont apporté la lumière et le bonheur à tous les étages. C'est tout simplement faux. Sinon on ne serait même pas là à en discuter...

    En quoi, donc, forcer toute une tranche d'âge à faire des maths à un certain niveau va-t-il les aider dans leur développement personnel ? Dur selon moi de se retrancher derrière un intérêt collectif qui n'a marché jusqu'à présent nulle part, et produit des pressions si intenses que des vies ("individuelles") sont brisées...
  • C'est pour cela que plutôt que parler émancipation, liberté ou je ne sais quoi, je reviens toujours à la question fondamentale du bonheur et du bien-être des gens.
    Le bienêtre et le bonheur passe aussi par une certaine émancipation. Alors certes, personne n'a demandé aux esclaves s'ils étaient heureux ou non de leur situation; mais bon… étant donné que beaucoup se sont révoltés afin de "s'émanciper" je suppose qu'on a une réponse même partielle. (:D
    En quoi, donc, forcer toute une tranche d'âge à faire des maths à un certain niveau va-t-il les aider dans leur développement personnel ?
    Je n'ai jamais dis ni demandé ça.
  • Non, je ne prétends pas cela, je ne réponds pas juste à l'un ou à l'autre (c'est ça qui amène les invectives et les attaques personnelles) mais j'écris pour le lecteur potentiel. S'il veut lire et prendre, il lit et prend, et sinon il laisse.

    Globalement, il me semble qu'on est d'accord. C'est sur la portée réelle de l'émancipation que je tique. Est-on plus libre dans une société où l'on ne peut pas se passer d'acheter des objets technologiques qui nous enchaînent (et avec des conséquences bien réelles : addictions, burn-out, etc.), je me pose la question...
  • Il semble en effet que nous sommes d'accord !
    Est-on plus libre dans une société où l'on ne peut pas se passer d'acheter des objets technologiques qui nous enchaînent (et avec des conséquences bien réelles : addictions, burn-out, etc.), je me pose la question...
    Ce n'est malheureusement plus tant du ressort de l'Éducation (quoi qu'elle y joue, c'est indéniable) mais plus un profond problème de société.
  • Troisqua a écrit:
    c'est qu'un état un tant soi peu humaniste doit organiser l'école obligatoire et y inclure un apprentissage obligatoire des mathématiques (qu'elle plaise aux élèves ou non est avant tout un problème de formation des enseignants).

    Je ne pense pas qu'ici on ait des gens qui pensent que c'est inutile d'apprendre à compter aux gens.

    Les mathématiques qui seraient la seule discipline qui apprend à raisonner aux gens est largement un mythe pour vendre un "produit", voire une publicité mensongère.
    Pierre Samuel a écrit:
    On a noté que la pratique des mathématiques induit souvent une rigidité d'esprit, une incapacité à traiter des situations floues et mal axiomatisables; partout, le mathématicien a tendance à chercher, ou à réclamer, "des critères nets et indiscutables".

    L'école a représenté un moyen d'émancipation à une époque.
    Une émancipation qui était économique: une femme "bien éduquée" pouvait obtenir un emploi qui lui donnait une autonomie économique et lui permettait de faire des vrais choix de vie (c'est à dire non dictés par des nécessités économiques).
    On avait la même chose avec ce qu'on appelait l'"ascenseur social": s'émanciper du milieu socio-professionnel de la famille. Je ne suis pas sûr qu'aujourd'hui l'école émancipe qui que ce soit et pire, cette école-là normalise les gens (ceux qu'elle n'arrive pas à normaliser sont exclus à la marge) pour les rendre compatibles avec ce qu'on attend d'eux.

    Le bonheur est tout relatif. Quand tu vis des trucs très difficiles il suffit que la pression se relâche un peu et tu éprouves un sentiment de bien-être qui peut être une forme de bonheur (mais la situation est inchangée, c'est seulement un répit bien souvent)
  • Fin de Partie a écrit:
    Je ne pense pas qu'ici on ait des gens qui pensent que c'est inutile d'apprendre à compter aux gens.
    Ça tombe bien, je suis parfaitement d'accord: personne ne l'a dit, et je ne l'ai fait dire à personne.

    Fin de Partie a écrit:
    Je ne suis pas sûr qu'aujourd'hui l'école émancipe qui que ce soit et pire[...]

    J'ai au moins des contre-exemples avec ma fille et ses amies qui adorent leur scolarité, tout ce que ça leur apporte. J'ai aussi des étudiants très heureux de faire ce qu'ils font, très heureux d'apprendre et qui se rendent compte de la chance qu'ils ont de pouvoir en France en 2020 suivre des études supérieures pour une somme dérisoire (voire gratuitement pour certains). On peut être critique, c'est nécessaire, mais de là à affirmer autant de généralités négatives sans prendre en compte toute la diversité des expériences c'est autre chose.
  • troisqua: pour l'élection américaine je l'avais suivie en direct et ça m'avait frappé à l'époque.
    https://fivethirtyeight.com/features/the-polls-missed-trump-we-asked-pollsters-why/

    L'incertitude autour des prévisions des scores du FN est un problème récurrent: https://www.caminteresse.fr/economie-societe/pourquoi-les-instituts-de-sondage-narrivent-pas-a-prevoir-les-resultats-du-fn-1137978/

    Et comme je l'ai dit, même en supposant la bonne foi des instituts de sondage, il reste le problème de la fiabilité des sondés (dont lesdits instituts sont conscients du reste).
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Troisqua:

    Pardon de te poser cette question, mais sais-tu ce que signifie le verbe EMANCIPER?
    Je te pose cette question car tu me cites et puis tu réponds quelque chose qui me semble n'avoir aucun rapport avec ce verbe.
    On peut avoir du plaisir à apprendre quelque chose, les études en France sont généralement moins chères qu'aux USA (ou en Grande-Bretagne) mais tout ceci n'entretient pas de lien direct avec l'émancipation des individus.
  • Émancipation sociale ? Émancipation féminine, émancipation des esclaves, émancipation juridique ? De laquelle parlais-tu toi ?

    Émancipation sociale peut-être ? Alors je vais répéter que pas mal d'étudiants que j'ai eus (souvent des boursiers), se sont émancipés à l'école. Et sur le plan de l'émancipation personnelle (développement d'un goût pour la culture par exemple), je dirais que l'école a très certainement participé à l'émancipation de nombreux citoyens. Certains des élèves de ma femme n'étaient jamais rentrés dans un musée avant l'école, ni n'avaient appris à nager, ni aller à la mer, ni n'avaient entendu parler de sciences ou d'Histoire avant l'école.

    Si tu as la preuve que l'école n'émancipe plus personne comme tu l'as dit, c'est sûrement une définition très personnelle de l'émancipation et, à coup que sûr, tu as dû sonder beaucoup de français.
  • @Foys, tu me parles d'intentions de votes, de sondages.

    Sur ça on est d'accord ! Ne jamais se fier à ce genre de chiffres, on le sait depuis que les sondages existent (c'est le fameux vote appelé "vote honteux").

    Non mais de mon côté, j'ai donné des stats post électorales.

    Par exemple, aux USA, les états où les citoyens sont le plus sous diplômés sont exactement les états où Trump a fait les meilleurs scores. On observe ça à toutes les élections dans tous les pays où on dispose de statistique sur les diplômés. C'est un phénomène connu. Chacun lui donnera la causalité qu'il souhaite. Par contre ceux qui prétendent que ces caractères observés dans la population sont statistiquement indépendants vont à l'encontre de ce qu'on mesure dans la réalité.

    Je n'ai rien dit de plus.
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