Limites épointées

L'énoncé ci-dessous est-il vrai ou faux?

Soient $d\in \N$, $(a_1,a_2...,a_d),(b_1,b_2,...,b_d)\in \R^d$ et $f_1,...,f_d:\R\to \R$ des fonctions telles que pour tout $k\in \{1,...,d\}$, $b_k$ est la limite de $f_k(x)$ lorsque $x$ tend vers $a_k$.

Soit $F$ l'application de $\R^d$ dans lui-même qui à $(x_1,x_2,...,x_d)$ fait correspondre $\left (f_1(x_1),f_2(x_2),...,f_d(x_d)\right )$.
Alors $F(v)$ tend vers $(b_1,b_2,...,b_d)$ lorsque $v$ tend vers $(a_1,a_2,...,a_d)$.
Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.

Réponses

  • Si $d\ge2$ et si on prend des limites épointées dans l'hypothèse, il est faux parce que pour assurer que $f_k(x_k)$ tend vers $b_k$, il faut être sûr que $x_k$ est différent de $a_k$ pour tout $k$, ce qui n'est pas garanti par l'hypothèse que $(x_1,\dots,x_d)$ est différent de $(a_1,\dots,a_d)$.

    (Par exemple, prenons pour chaque $f_k$ l'indicatrice de $\{0\}$ et $a_1=\cdots=a_d=0$, $b_1=\cdots=b_d=0$. Alors $b_k$ est bien la limite de $f_k(x)$ lorsque $x$ tend vers $a_k$ en étant différent de $a_k$. Cependant, la suite définie par $x^{(n)}=(2^{-n},\dots,2^{-n},0)$ pour tout $n$ tend vers $(a_1,\dots,a_d)$ et est différente de $(a_1,\dots,a_d)$ pour tout $n$ mais $F(x^{(n)})=(0,\dots,0,1)$.)
  • Bonjour Math Coss. Effectivement c'est l'épointage qui vient faire échouer cet énoncé tout simple de maths "naturelles".

    Il a été inspiré par la consultation du "Frido", un livre de mathématiques collaboratif libre trouvable sur ce site : https://linuxfr.org/news/le-frido-et-giulietta-la-mathematique-libre

    Dans ce texte, l'auteur principal (je crois) fait le choix de construire l'analyse à partir des limites épointées, en se justifiant de façon assez ferme par les pires poncifs entendus et débattus il y a quelques années sur ce même forum: "c'est la définition que tous les étrangers utilisent" (tous? vraiment?), ou, plus grave, par des arguments de pertinence mathématique "l'information est dans le voisinage épointé blabla". C'est de ce dernier point qu'il va s'agir dans la suite

    Il était déjà connu que la notion de limite épointée fait capoter une propriété aussi simple que la composition des limites (contre-exemple avec la fonction indicatrice d'un point), ici ce sont les produits cartésiens qui sont touchés, toujours avec ce type de fonction.

    L'auteur rappelle à bon droit que la notion la plus générale de limite se formule avec des filtres (la lecture du reste du présent message suppose maîtrisées les définitions de filtre, de base de filtre, de limite de ces objets ainsi que les liens entre eux, n'hésitez pas à me dire si c'est un problème).

    La notion de limite épointée est une abomination méritant un petit procès à charge B-)

    1°) Définitions:
    (i) Soit $(X,\tau)$ un espace topologique et $p$ un élément de $X$. On notera $\mathfrak V^{\tau} (p)$ le filtre des voisinages de $p$.
    (ii) Soit $q$ un point d'accumulation de $X$ (i.e. pour tout $V\in \mathfrak V^{\tau}(q)$, $V\backslash \{q\}$ est non vide). On appellera base épointée de $(X,\tau)$ en $q$ l'ensemble (noté $\mathfrak B^{\tau}_{\mathfrak E}(q)$ dans la suite) des parties de $X$ de la forme $W\backslash \{q\}$ où $W$ est un voisinage de $q$.

    Avant d'aller plus loin, remarquons tout de suite que pour un point d'accumulation $r$ quelconque de $X$, $\mathfrak B^{\tau}_{\mathfrak E}(r)$ est une base de filtre mais non un filtre (puisqu'il ne contient pas $X$) ce qui veut dire d'ailleurs que dans les développements formels des précautions devront être utilisées dans son maniement. Nous noterons $\mathfrak E^{\tau} (x)$ le filtre engendré par $\mathfrak B^{\tau}_{\mathfrak E}(x)$ pour tout $x\in X$.

    (iii) Soient $(X,\tau),(Y,\sigma)$ deux espaces topologiques, $u\in X$, $\ell \in Y$, $f$ une application de $X$ dans $Y$.
    On dit que $\ell$ est une limite pointée de $f$ en $u$ si $f$ converge vers $\ell$ suivant $\mathfrak V^{\tau} u$. On dit que $\ell$ est une limite épointée de $f$ en $u$ si $f$ converge vers $\ell$ suivant $\mathfrak E^{\tau} u$ (c'est-à-dire suivant la base de filtre $\mathfrak B^{\tau}_{\mathfrak E}(u)$).

    ########################
    Etant donnés $A_1,...A_k$ des ensembles et, pour tout $i\in \{1,...,k\}$, $\mathfrak A_i$ une base de filtre sur $A_i$, il est clair que $\left \{\prod_{i=1}^k B_i \mid \forall i \in \{1,...,k\}, F_i \in \mathfrak A_i \right\}$ est une base de filtre sur $\prod_{i=1}^d$ dite "produit des bases de filtres $\left (\mathfrak A_i \right )_{i=1...k}$" et que l'on notera $\otimes_{i=1}^k \mathfrak A_i$ dans la suite.

    Soient désormais $d\in \N$, $(X_1,\tau_1), (X_2,\tau_2), ... (X_d,\tau_d)$ des espaces topologiques et $(a_1,...,a_d)\in \prod_{i=1}^d X_i$.
    2°) Alors le produit $\otimes_{ i=1}^d \mathfrak V^{\tau_i} (a_i)$ engendre le filtre des voisinages de $(a_1,...,a_n)$ pour la topologie produit des $\tau_1,\tau_2,...,\tau_n$. On notera $\tau$ cette topologie produit.
    Ceci est l'application directe de la définition de topologie produit.

    En revanche (et lorsque $a_i$ est un point d'accumulation de $X_i$ pour tout $i$):
    3°) Le filtre engendré par $\otimes_{i=1}^d \mathfrak B^{\tau_i}_{\mathfrak E} (a_i)$ est différent de $ \mathfrak E ^{\tau}(a_1,a_2,...,a_d)$; en fait il le contient strictement.
    C'est la raison du problème évoqué dans ce fil.
    Par exemple quand $d=2$ et $X_1=X_2=\R$, ce filtre admet pour base des parties de la forme $V\backslash C$ où $V$ est un ouvert de $\R^2$ contenant $0$ et $C$ est la "croix" $\{(x,y) \in \R^2 \mid x=0 \text{ ou } y=0\}$

    A suivre ...
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Bonjour,
    En fait tu connaissais déjà la réponse à ta question et c'était juste un prétexte pour taper sur les limites épointés. B-)

    Histoire de donner un procès équitable aux limites épointées, je porte à la barre la parole de la défense, représentée par son avocat maître Frido (page 427, cf. le lien donné par Foys) :

    « La notion de limite pointée ne diffère de la limite que du fait que pour calculer la limite pointée en a, nous tenons compte des valeurs de f sur tout le voisinage de a, y compris le point a lui-même. Le choix entre la limite pointée ou épointée a été discuté en de nombreuses occasions [151, 152,
    153, 154]
    .
    1. Dans la majorité des cas, la limite pointée donne le même résultat que la limite parce que, fondamentalement, si nous voulons calculer une limite de f au point a, c’est que f n’est pas définie en a. C’est en particulier toujours le cas pour les limites en l’infini ou les limites définissant les dérivées.
    2. La limite pointée est un peu plus simple au départ.
    3. La limite épointée est un peu plus riche. Par exemple si on dit « la limite de f en a existe », ça donne une régularité pour f autour de 0 que la limite pointée ne parvient pas à exprimer.
    4. La limite pointée n’est connue qu’en France.
    Le point (1) est le plus important parce qu’il explique pourquoi il y a moyen de finir l’agrégation, et même de faire de la recherche en ne tombant jamais sur un cas où la différence est importante.

    [...]

    Dans le Frido, nous choisissons de prendre la limite épointée comme définition de limite. Nous donnons ici quelques raisons pour ce choix.
    1. C’est la définition unanimement acceptée dans la communauté mathématique hors France.
    2. La limite pointée ne donne à peu près rien de nouveau par rapport à la continuité.
      Ce que le concept de limite apporte est la possibilité d’étudier le comportement de f pour les points « proches » de a, sans regarder la valeur en a lui-même. Si l’idée est de regarder le comportement « proche » de a y compris au point a lui-même, c’est la notion de continuité qui fait le travail.
      Donc les contextes dans lesquels le concept de limite est intéressant sont justement les contextes dans lesquels la fonction étudiée n’existe pas au point étudié. Dans ce cas, les limites pointées et épointées coïncident.
    Que devez-vous faire ?

    Enseignement en France : La notion de limite pointée est celle nommée « limite » dans les programmes, et ce que nous nommons ici « limite » est nommé « limite épointée ». Peut-être pour induire en erreur tout le reste de la planète ?

    Recherche : Si vous faites de la recherche où que ce soit y compris en France, la seule définition de limite est la limite dite « épointée », celle qui sera toujours utilisée dans le Frido.

    Doctorat : Vous commencez un doctorat en math, et vous avez vu la limite pointée comme seule définition de limite durant vos études ? Oubliez-la. Ou alors attendez-vous à vous à de sérieux quiproquos lorsque vous discuterez de mathématique avec des étrangers.
    Disons clairement que si vous utilisez la limite pointée devant des non Français, ils se diront juste que vous devriez relire vos cours de base. Et si vous leur expliquez, il y a de bonnes chance qu’ils ne vous croient pas. »
  • Incidemment je me rappelle que quelqu'un avait donné sur ce forum un texte infra filtre/ base filtre d'un prof connu (Warusfel ? Perrin ?) détaillant la question.

    Edit : j'ai retrouvé c'est Perrin, effectivement avec le problème que tu évoques Foys.
    "J'appelle bourgeois quiconque pense bassement." Gustave Flaubert
  • Sans « filtre » si je puis me permettre, c’était un texte de Perrin notamment à destination des capésiens.
    Aussi, un lien pointait vers un article plutôt controversé (enfin, en plein dans le thème plutôt).

    Est-ce cela que tu évoques ?

    Ici : https://www.imo.universite-paris-saclay.fr/~perrin/CAPES/analyse/fonctions/definitiondelimite.pdf
  • Bonsoir,

    L'article controversé ne serait-il pas celui de Bertrand Rungaldier discuté ici-même ?
  • @Dom oui c'est ça, en fait c'est grosso modo ce qu'on faisait comme déf. de la limite dans les années 80 avant que ça disparaisse et que la continuité soit définie avec le suivi de la représentation graphique de la fonction avec le doigt.
    Tiens d'ailleurs limite / continuité c'en est où dans les nouveaux programmes ?
    "J'appelle bourgeois quiconque pense bassement." Gustave Flaubert
  • brian: oui il s'agit de cet article.

    Soit $(X,\tau)$ un espace topologique.

    On appelle filet (un "net" en anglais; il s'agit surtout d'une notion anglo-saxonne. Pour le coup le ministère de l'éducation nationale française n'y est pour rien) un triplet $(I,\leq,u)$ où $I$ est un ensemble,$u$ est une fonction de $I$ dans $X$ et $\leq$ est une relation d'ordre sur $I$ telle que pour tous $i,j\in I$ il existe $k\in I$ tel que $i\leq k$ et $j\leq k$ (en bref: toute partie finie de $I$ possède un majorant).

    Soit $\ell \in X$; on dit que $u$ converge vers $\ell$ si pour tout voisinage $V$ de $\ell$ dans $(X,\tau)$, il existe $i\in I$ tel que pour tout $j\in I$ tel que $j\geq i$, $u(j)\in V$. Dans le cas particulier où $I=\N$ muni de son ordre usuel, cette notion coïncide exactement avec la convergence des suites au sens usuel. En fait les filets généralisent les suites.

    #############
    Exo: Soient $(X,\tau)$, $(Y,\sigma)$ deux espaces topologiques, $a\in X$, $b\in Y$ et $f:X\to Y$ une fonction.
    Quelle est la notion de limite à employer pour que les deux énoncés ci-dessous soient équivalents?


    (i) Pour tout filet $(I,\leq, u)$ de $X$, si $u$ converge vers $a$, alors $f \circ u$ converge vers $b$
    (ii) $b$ est une limite de $f(x)$ quand $x$ tend vers $a$


    Fournir un contre-exemple pour l'autre notion de limite.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Bonjour à tous.

    Pour les limites à droite (resp à gauche) en \( a \), le point \( a \) vous le prenez ou vous l'épointez ?

    Mmmh ?

    C'est pour un sondage...

    e.v.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • ev : Moi je ne compte pas le point $a$ pour les limites à gauche et à droite. Ça permet de décrire des situations où les limites à gauche et à droite existent et sont différentes.

    Foys : Il faut remplacer $u\circ f$ par $f\circ u$ dans ton exercice.
  • ev a écrit:
    Pour les limites à droite (resp à gauche) en $a$, le point $a$ vous le prenez ou vous l'épointez ?
    Ca dépend de ce que je veux faire.

    Pour définir la continuité à droite d'une fonction, je pointe.
    Pour définir la continuité par morceaux j'épointe.

    NB: dans les mathématiques françaises "du ministère de l'éducation nationale" (mais apparemment pas que mais chut),
    il y a la notation $\lim \limits_{\begin{align} x & \to a \\ x & \neq a\end{align}} f(x)$ pour la limite épointée de $x$ en $a$.

    @Calli: Merci pour le signalement de la coquille!
    Merci aussi à Dom ;-)
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • NB: le site nlab emploie les expressions "limite française" et "limite anglaise" pour désigner respectivement les limites pointées et épointées: voir ce lien pour une comparaison intéressante.
    nlab a écrit:
    It would be nice to have notation to distinguish the French and English versions of limit. One way would be to adopt the French definition by default and add the restriction $x \neq c$ to produce the English version. Unfortunately, the English definition is the default in most of the world, and then there is no slick way to denote the French version.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Si on épointe pour gauche et droite, la partie entière a une limite à gauche et à droite.
    Très naïvement, ça m’embête.
    Bon, on a quand même la continuité à droite mais pas à gauche, ça toute la planète le dit.

    Cela doit faire la même chose avec les fonctions de répartition d’une probabilité si je ne m’abuse.
  • Dans les situations où le concept de fonction continue par morceaux est employé, les valeurs de la fonction aux bornes des intervalles de continuité ne servent à rien. Pour ce qui est des fonctions de répartition d'une probabilité sur $\R$:
    une application de $\R$ dans lui-même est la fonction de répartition d'une probabilité si et seulement si elle est continue à droite, croissante et de limites respectives $0$ et $1$ en $-\infty$ et $+\infty$. Il s'agit de cas particulier d'une mesure de Stieljes.
    On peut montrer le sens non trivial de ce résultat à l'aide du théorème de Riesz comme suit: soit $\varphi$ une telle fonction. Etant donnés $a,b\in \R$ on pose $I\left(\mathbf 1_{[a,b[}\right):= \varphi(b) - \varphi(a)$. Pour tous $n \in \N$ et $c_0,c_1,...,c_n$ réels tels que $c_{i-1}<c_i$ pour tout $i\in \{1,...,n\}$, on a $$I \left(\mathbf 1_{[c_{0},c_n[}\right) = \varphi(c_n)-\varphi(c_0)=\sum_{i=1}^n \varphi(c_i)-\varphi(c_{i-1}) = \sum_{i=1}^n I \left(\mathbf 1_{[c_{i-1},c_i[}\right) \tag 1$$ Cela entraîne, en utilisant des subdivisions d'intervalles appropriées, qu'on peut prolonger $I$ au sous-espace vectoriel $\mathcal E$ de $\R^{\R}$ engendré par les fonctions de la forme $\mathbf 1_{[a,b[}$ avec $a,b\in \R$ tels que $a<b$, en une forme linéaire qui prend des valeurs positives sur les fonctions positives (et qui va donc être continue pour des normes infinies idoines).
    Soient $a,b\in \R$ avec $a<b$. Soit $\mathcal E_{a,b}$ l'espace des éléments de $\mathcal E$ dont le support est contenu dans $[a,b[$. Alors la restriction de $I$ à $\mathcal E_{a,b}$ est continue pour la norme infinie $\|\cdot\|_{\infty}^{a,b}:=f \mapsto \sup_{x \in [a,b]} \left | f(x) \right |$ et donc cette forme linéaire se prolonge à l'adhérence de $\mathcal E_{a,b}$ pour cette norme, or cette adhérence contient toutes les fonctions continues à support dans $[a,b]$. On définit ainsi une forme linéaire positive sur les fonctions continues à support compact de $\R$ dans $\R$. La mesure de Radon correspondante obtenue par le théorème de Riesz est la mesure cherchée.

    [size=x-small](edit: Exo: écrire une preuve beaucoup plus courte de ce résultat avec le pseudo-inverse d'une fonction de répartition).[/size]
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Exo: montrer qu'il existe une fonction de $f$ de $\R$ dans $\R$ telle que pour tout $x\in \R$, la limite épointée de $f$ en $x$ existe, mais telle que l'ensemble des points où $f$ est discontinue est dense dans $\R$.

    Question subsidiaire: peut-on carrément avoir $f$ discontinue en tout point? (je n'ai pas la réponse).
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • La réponse à ta question subsidiaire, Foys, est non. Si $f$ est une fonction $\Bbb R\to \Bbb R$ qui a une limite épointée en chaque point, alors son nombre de points de discontinuité est dénombrable. En effet, les ensembles $$E_n := \{a\in \Bbb R\mid | f(a)-\lim\limits_{\substack{x\to a\\ x\neq a}} f(x) |>\frac1n\}$$ sont tous dénombrables, car si un $E_n$ était indénombrable, il aurait un point d'accumulation $a$ et $f$ n'aurait pas de limite épointée en $a$.
    C'est avec une méthode similaire qu'on montre que les fonctions réglées (celles qui ont une limite à gauche et à droite en tout point) ont un nombre dénombrable de discontinuités.
  • Bravo Calli!
    Je sors de mon bain et envisageais des tentatives (usines à gaz) à base de Baire mais non, c'est très simple en fait.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Oui bravo Calli c'est simple et élégant.

    En ce qui concerne le Frido c'est quand même sympa qu'un ancien agrégatif mette gratuitement à la disposition du public le PDF d'un livre qu'il vend par ailleurs (2300 pages !). Si ça pouvait servir d'exemple ...
    "J'appelle bourgeois quiconque pense bassement." Gustave Flaubert
  • Ah mais je ne nie pas que la rédaction d'un tel livre a dû représenter un travail considérable et je salue la générosité et l'investissement des auteurs. D'autant que les règles de rédaction des mathématiques sont essentiellement respectées, à quelques passages près où les variables ne sont pas quantifiées, alourdissant la lecture. Mais je suis contre certains choix (assumés et complètement explicites, la suite du livre est cohérente par rapport à ces choix mais à quel prix- faut voir comment ils doivent ajuster certains résultats par la suite).
    L'emploi de limites épointées comme base de la théorie des limites est une faute conceptuelle (pourquoi? c'est ce dont il est question dans ce fil), déjà trop répandue dans le monde anglo-saxon. Encore une fois la France Bourbakiste avait raison B-)
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Apparemment l'auteur principal s'appelle Laurent Claessens, tu pourrais lui envoyer un mail sur les oublis de notations il l'indique sur sa page http://laurent.claessens-donadello.eu/
    "J'appelle bourgeois quiconque pense bassement." Gustave Flaubert
  • Le Frido[1] contient un énoncé assez similaire (et complètement équivalent dans ce qu'il enseigne) en le lemme "LEMooYLIHooFBQyzC".

    Le contre-exemple donné par Math Coss est dans la même veine que "EXooHSYNooBZhDbE".

    Si on change l'hypothèse «limite pointée» par l'hypothèse (moins forte) «limite épointée», alors il faut compenser par une restriction sur l'ensemble dans lequel on prend la limite.

    C'est la vie. Quand on affaiblit une hypothèse, soit on a moins de résultats, soit il faut fortrifier une autre hypothèse.
    Dans ce cas-ci, sans surprises, le théorème avec les hypothèses les plus fortes est le plus simple à énoncer.

    [1] https://laurent.claessens-donadello.eu/pdf/lefrido.pdf
  • Révérence gardée, les objections soulevées par Foys me semblent difficiles à écarter pour choisir finalement la définition épointée.
  • En fait c'est une erreur de penser en terme de «il faut choisir une définition de limite». Il faut penser en termes de «quelle généralité je veux pour mes théorèmes ?»

    La subtilité avec la limite épointée est qu'elle est moins «stable» que la limite pointée sous diverses manipulations usuelles.

    Il existe quelque énoncés de la forme
    «Si truc a une limite pointée, alors machin a une limite pointée»
    pour lesquels l'énoncé
    «Si truc a une limite épointée, alors machin a une limite épointée»
    est incorrect.

    D'une part les énoncés parlant de limite pointée ont un domaine d'application plus petit que les énoncés parlant de limite épointée. D'autre part les énoncés sur les limites épointées n'extraient pas toute l'information possible dans le cas où, de plus, la limite pointée existe.

    Si on veut un théorème qui traite tous les cas et qui, en même temps, extrait l'information maximale dans tous les cas, il n'y a pas de magie : il faut bosser plus.
    Par exemple comme ceci :
    «
    Si machin a une limite épointée et si <hypothèse supplémentaire>, alors truc a une limite épointée.
    Si de plus machin est continue, alors truc est continue.
    »

    Il me semble que le couple (limite épointée, continuité) permet de couvrir tous les cas de façon optimale. J'ai des doutes que le couple (limite pointé, continuité) puisse faire le même travail. Et en particulier, que ce couple puisse faire le même travail plus simplement.

    Je suis très ouvert à la discussion si c'est pour avoir quelque chose de plus simple produisant les mêmes résultats. Je ne suis par contre pas très ouvert pour avoir quelque chose de plus simple, mais donnant moins de résultats. C'est toujours facile d'avoir des résultats plus courts, plus simples et plus intuitifs quand on se contente de moins.

    Pour moi, l'optimalité du résultat est le premier critère, la simplicité est le deuxième.

    Encore une fois, la question n'est pas de choisir une définition. La question est de savoir à quel point on est prêt à se compliquer la vie pour avoir des théorèmes un micro-cheveu plus complets. Le choix du Frido est de recevoir la difficulté avec résignation et de l'endurer avec courage, pour le plaisir d'avoir des théorèmes qui donnent un peu plus d'information.
    C'est un choix fait un peu partout dans le Frido : on est prêt à se pourrir la vie pour avoir un théorème plus général, quitte à écrire deux théorème au lieu d'un seul, pour extraire toute l'information dans le cas «facile».

    C'est par exemple le cas pour de nombreux théorèmes parlant de tribus dans R^n. Tous ces théorèmes sont doublés : une fois pour Borel et une fois pour Lebesgue.
  • @Foys
    «
    Mais à quel prix- faut voir comment ils doivent ajuster certains résultats par la suite ?
    »
    À mon avis le prix n'est pas très lourd; il ne m'est arrivé qu'une seule fois de tomber sur un cas où effectivement je devais complexifier un énoncé. C'est le cas du lemme que je cite dans une autre réponse.

    Pour être tout à fait certain du prix, il faudrait faire un fork, supprimer la définition de limite et revoir tous les théorèmes qui en dépendent directement ou indirectement. Ce n'est pas très compliqué : grâce au système de label/ref de LaTeX, on trouve facilement tout l'arbre de descendance d'une définition.


    À part ça, je peux retourner la question : à quel prix, en termes de perte de généralité des résultats, paye-t-on la simplicité de départ du choix pointé ?

    Sans doute pas très cher non plus, vu qu'il me semble que le seul exemple de fonction sur lequel une différence soit visible soit la fonction indicatrice et quelques variations sur le thème.


    Bref, la vraie question est : est-ce que le prix en complexité (pas lourd) vaut la récompense en généralité (pas lourde non plus) ?
    Là ce n'est pas une question de mathématique, mais une question de niveau pédagogique auquel on veut se mettre.
    Le Frido a tendance à être prêt à payer un prix exorbitant pour avoir un cheveu de généralité supplémentaire.


    Et enfin, comme je l'argumente dans l'autre réponse, la bonne comparaison n'est pas

    «limite pointée Vs limite épointée»

    aucune des deux notions n'est satisfaisante seule.

    La bonne comparaison est:

    «le couple (limite pointée, continuité) Vs le couple (limité épointée, continuité)».

    Moi je dis que :
    (1) en termes de précision/généralité des résultats exprimables, le second couple est plus fort.
    (2) en termes de simplicité, le premier est plus fort.

    Je fais le choix de privilégier le critère (1).
  • Bonjour,

    Dans ce message, on montre que la notion de limite pour tous les filtres (notamment ceux donnant les limites épointées) est un cas particulier de celle de limite pointée d'une fonction en un point.

    1°) Soit $E$ un ensemble. Il existe un ensemble n'appartenant pas à $E$.
    Ce n'est rien d'autre qu'une reformulation du théorème de Russell. Le schéma de compréhension garantit l'existence de $\omega_E:=\{x\in E \mid x\notin x\}$ qui ne peut appartenir à $E$ sous peine d'avoir $\omega_E\in \omega_E \Leftrightarrow \omega_E \notin \omega_E$, entraînant une contradiction.

    On note dans la suite $\widehat E:= E \cup \{\omega_E\}$
    Soit désormais $\mathcal F$ un filtre sur $E$.

    On pose $\mathcal I_{\mathcal F}:=\left \{ A \cup \{\omega_E\} \mid A\in \mathcal F\right \}$ et $\mathcal T_{\mathcal F}:=\mathcal P(E) \cup \mathcal I_{\mathcal F}$

    2°) $\mathcal T_{\mathcal F}$ est une topologie sur $\widehat E$ telle que $\mathcal I_{\mathcal F}$ est exactement l'ensemble des ouverts de cette topologie contenant $\omega_E$.
    Evident d'après les définitions.

    Soit maintenant $(X,\tau)$ un espace topologique, $\ell$ un point de $X$ et $f:E\to X$ une fonction.
    Pour tout $x\in \widehat E$, on pose $\widehat f_{\ell} (x):=f(x)$ si $x\in E$ et $\widehat f_{\ell} (\omega_E):=\ell$

    3°) $\widehat f_{\ell}(x)$ tend vers $\ell$ quand $x$ tend vers $\omega_E$ dans $\widehat E$ au sens des limites pointées, si et seulement si $f$ tend vers $\ell$ suivant le filtre $\mathcal F$. Cela provient de ce que pour tout voisinage $V$ de $\ell$ dans $(X,\tau)$ et tout $B\in \mathcal F$, $\widehat f_{\ell} \left (B \cup \{\omega_E\} \right) \subseteq V$ si et seulement si $f(B)\subseteq V$ (rappelons que les ouverts de $\left (\widehat E, \mathcal T_{\mathcal F}\right)$ sont exactement les parties de $\widehat E$ de la forme $A\cup \{\omega_E\}$ où $A\in \mathcal F$ d'après 2°).

    4°) soient $(Y,\sigma)$ un espace topologique, $m\in Y$ et $\mathcal G$ un filtre de $Y$. $\mathcal G$ converge vers $m$ si et seulement si la fonction identité $t\in Y\mapsto t\in Y$ converge vers $m$ suivant $\mathcal G$.
    A nouveau, il ne s'agit que de déplier les définitions.

    Ainsi, il est possible de remplacer mécaniquement dans tous les énoncés, les affirmations de la forme "tel filtre converge vers ceci", "telle fonction converge vers cela suivant tel filtre" par des affirmations ne parlant que de limites pointées aux points considérés de fonctions idoines, fournis au point 3° ci-dessus, et obtenir des énoncés équivalents.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Ça c'est un cool théorème.

    À première vue (mais je suis très loin d'être fort en filtres), ça peut être inversé, non ?
    J'ai l'impression qu'on peut touiller l'espace, la topologie, le filtre et la fonction pour que la limite épointée suffise pour définir les autres limites.

    En gros, pour avoir la limite pointée en $a$, j'ajouterais un point $a'$ et mettrait une topologie pour que $a$ et $a'$ soient "au même endroit". Ensuite j'étends $f$ en disant $f(a')=f(a)$.

    Du coup la limite épointée en $a$ est obligée de tenir compte de la valeur en $a'$, et donc revient à la limite pointée.

    En tout cas, rien que pour voir ce théorème, ça valait le coup de pinailler. Ça m'a fait ma journée; merci.


    Quand je disais être enclin à accepter de payer un prix exorbitant pour gagner un petit quelque chose, j'avoue que je ne pensais pas à ce niveau-là ;)
  • Ceci n'a rien à voir avec cela, mais n'hésite pas à me faire savoir où sont les

    «passages où les variables ne sont pas quantifiées, alourdissant la lecture.»
  • Bonsoir,

    Définir les limites pointées à partir des limites épointées est plus simple: étant donnés deux espaces topologiques $(X,\tau)$, $(Y,\upsilon)$, $a\in X$, $b\in Y$ et $f:X\to Y$ une fonction, $f(x)$ tend vers $b$ quand $x$ tend vers $a$ au sens des limites pointées si et seulement si: $f(x)$ tend vers $b$ quand $x$ tend vers $a$ au sens des limites épointées et $f(a)=b$.

    en particulier, avec les notations de mon message précédent, $\widehat f_{\ell}$ admet $\ell$ en $\omega_E$ comme limite pointée si et seulement si elle l'admet comme limite épointée. On peut refaire tout l'exposé avec des limites épointées. Les deux notions engendrent les mêmes mathématiques, mais les complications ou simplifications ne sont pas aux mêmes endroits (il y a les compositions de fonctions qui sont touchées dans le cas épointé mais aussi les produits, affectant les fonctions de plusieurs variables, on y vient plus bas. Pour le cas pointé la dérivation est souvent citée en exemple).
    Ceci n'a rien à voir avec cela, mais n'hésite pas à me faire savoir où sont les

    «passages où les variables ne sont pas quantifiées, alourdissant la lecture.»
    Par exemple il y a le lemme 12.157 page 796 (qui est utilisé pour faire fonctionner les limites épointées sur des fonctions de plusieurs variables justement). Il commence par "$f(x,y)=g(x)$". Il vaudrait mieux quantifier pour décrire ce comportement.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Foys a écrit:
    Par exemple il y a le lemme 12.157 page 796 (qui est utilisé pour faire fonctionner les limites épointées sur des fonctions de plusieurs variables justement). Il commence par "f(x,y)=g(x)". Il vaudrait mieux quantifier pour décrire ce comportement.

    Corrigé. Merci.
  • Bonjour.
    Dans "Le Frido", il y a ce paragraphe, destiné sans doute à renforcer le sentiment du lecteur que la limite "épointée" est le bon choix :

    10.4.2.10 Et les filtres ?
    Si vous ne savez pas ce qu’est un filtre, vous pouvez sauter ces paragraphes. Sinon, vous pouvez
    vous dire que le débat « limite pointée » contre « limite épointée » n’a aucun sens parce que de
    toutes façons, la bonne façon de définir une limite passe par des filtres.
    Alors le mieux est de se demander comment on construit, à partir de la notion de filtre, le
    nombre limxÑa fpaq ?
    Pas de bol, ça dépend du filtre choisi. Le premier filtre auquel on pense pour trouver une
    définition raisonnable de la limite de fpxq quand x Ñ a est le filtre des voisinages de a. La notion
    de limite associée est la limite pointée. En ce sens la limite pointée est plus naturelle[232, 233]
    que la limite épointée. Cependant « naturel » signifie souvent « le premier qui nous tombe sous la
    main », ce qui ne signifie pas spécialement « le plus intéressant à utiliser ».
    La notion de limite épointée est la limite associée au filtre des voisinages épointés. Ce n’est,
    certes, pas le premier filtre qui nous tombe sous la main, mais il est, au moins dans le cadre de
    l’étude des fonctions sur Rn
    , le plus efficace ; celui qui donne le plus de nouvelles informations par
    rapport à la continuité.


    Dire que le filtre des voisinages est celui qui est utilisé pour définir la limite "pointée" est quelque peu approximatif.
    Etant donné une fonction (partielle) f d'un espace topologique F dans un espace topologique G (que l'on peut supposer séparé pour éviter les limites multiples) et de domaine D, la limite de f au point a, adhérent à D est définie, en accord avec Bourbaki, par la limite b, si elle existe, de l'image par f de la trace sur D du filtre des voisinages de a.
    Ce qui est strictement équivalent, si je ne dis pas de bêtises, à : pour tout filtre de D convergeant vers a, son image converge vers b. Difficile de faire plus simple, ni plus naturel.
    Du coup, la formule "Pas de bol, ça dépend du filtre choisi." perd un peu de sa force de persuasion !

    Dire que la fonction f est continue au point a de son domaine, c'est dire de façon intuitive et imagée que les valeurs que prend la fonction sont aussi proches de f(a) que l'on veut, pourvu que l'on choisisse des points suffisamment proches de a. Or, cela ne dit pas autre chose que : la limite de f(x) lorsque x tend vers a est f(a).
    Adopter la limite "épointée" comme définition de la limite reviendrait à dire que les valeurs que prend la fonction sont aussi proches d'une valeur b, pourvu que l'on choisisse des points suffisamment proches de a, À L'EXCEPTION de a, quand bien même c'est le point le plus proche de a qui se puisse imaginer ! Cela ne me semble pas participer d'une bonne intuition.

    Chercher la limite de f en un point a hors de son domaine, mais y adhérant, c'est chercher la valeur qu'il faut donner au point a pour que le prolongement à D U {a} de f soit continu au point a. C'est un prolongement par continuité.

    Chercher la limite au point a de D, non isolé (i.e. d'accumulation de D) de la restriction de f à D \ {a}, (cette fameuse limite épointée !), c'est chercher "la vraie valeur" de f au point a, celle qui rend f continue en a.

    La notion de continuité, C'EST la notion de limite.

    Justement, le lemme 12.157 est très instructif à cet égard. En accord avec Bourbaki, on pourrait le rédiger ainsi :

    Soit $ g : R \rightarrow R $ telle que $ \lim \limits_{\substack {x \to a \\ x \neq a}} g(x) = k $, et $ f = g \circ pr_1$ où $ pr_1 : (x, y) \mapsto x $ est la première projection (qui est continue).

    On considére la fonction g' égale à g sauf au point a où elle prend sa "vraie valeur" k.
    g' est donc continue en a et en notant $ f' = g' \circ pr_1 $ on a :

    $\lim \limits_{\substack{(x, y)\to (a,b) } } f'(x, y) = \lim \limits_{\substack {x \to a}} g'(x) = g'(a) = k $.

    Puisque pour tout b, (a, b) est adhérent à R \ {a} x R et que f et f' coïncident sur R \ {a} x R, on a

    $\lim \limits_{\substack{(x, y)\to (a,b) \\ x \neq a } } f(x, y) = \lim \limits_{\substack{(x, y)\to (a,b) \\ x \neq a } } f'(x, y) = \lim \limits_{\substack{(x, y)\to (a,b) } } f'(x, y) = k = \lim \limits_{\substack {x \to a \\ x \neq a}} g(x) $

    Il n'y a donc pas "de passage subtil" comme mentionné dans "Le Frido", mais seulement l'application de deux propositions élémentaires :

    1) Si $ f : F \rightarrow G $ est continue en a et que $ g : G \rightarrow H $ est continue en f(a), g o f est continue en a.
    2) Si $ f : F \rightarrow G $ est une fonction de domaine D et continue en un point a adhérent à une partie A de D, la restriction de f à A a une limite en a égale à f(a).

    Si j'ai bien compris, les deux arguments majeurs plaidant en faveur de la limite "épointée" sont :

    1) elle est utilisée par presque tout le monde,
    2) elle apporte des informations nouvelles sur la fonction par rapport à la continuité/limite (de Bourbaki).

    Personnellement, je ne trouve pas que 1) soit un argument de raison. Mais bien plutôt une incitation à la soumission, une sorte de dictature par le nombre.
    Quant à 2), il est, si l'on y réfléchit bien, quelque peu absurde, sachant que si l'on a besoin de ces nouvelles informations qui manqueraient soi-disant dans la conception Bourbaki, il suffit tout simplement d'écrire $\lim \limits_{\substack {x \to a \\ x \neq a}} f(x) $


    Mais comme toujours, à chacun de se forger sa propre conception des choses !

    Cela dit, je ne demande qu'à être convaincu, c'est d'ailleurs l'unique raison de ce message. Cela m'est déjà arrivé une fois, lorsque l'intervenant "troisqua" m'avait éloquemment convaincu que la notion de fonction n'est pas synomyme de celle d'application,en désaccord avec Bourbaki.
  • Il n'y a pas de bonne ou mauvaise définition de limite. Il y a plusieurs définitions possibles chacune desquelles est non contradictoire du point de vue mathématique. Chaque choix amène à faire comme disent les anglo-saxons des trade-offs, des compromis. C'est pareil pour la notion de compacité. C'est quoi un espace compact ? Un espace qui vérifie la propriété de Borel-Lebesgue ou un espace qui est séparé et vérifie la propriété de BL ? Les deux choix sont acceptables, et aucun des deux choix ne porte à des contradictions. Encore, est-il souhaitable de définir un voisinage de x comme un ouvert contenant le point x, ou comme un esemble d'intérieur non vide qui contient x ? Les deux choix sont acceptables. Ici aussi il n'y a pas de contradiction mathématique en choississant l'une ou l'autre définition.
    Faire des guerre de religion sur des choix arbitraires, ou pire avoir une approche dogmatique sur les définitions mathématiques est simplement stupide.

    La limite Bourbakiste n'est ni plus intuitive ni moins intuitive que celle de Weierstrass; et les mathématiciens qui adoptent la deuxième définition ne sont pas des hérétiques.
  • Je préférerais quand même que la séparation ne fasse pas partie de la définition de la compacité. Comme c'est secondaire par rapport à la propriété de Borel-Lebesgue qui est le truc caractéristique de la compacité, je l'oublie souvent et ça me fait dire des choses comme "la topologie cofinie est compacte". Et comme j'ai peur que les autres fassent la même confusion que moi, je préfère utiliser le pléonasme "compact séparé". Bon, vous avez le droit de me répondre que c'est ma faute et pas celle de la définition. :-D

    Pour la question de l'ouverture des voisinages, ça n'a effectivement aucune importance puisque le filtre engendré est le même.
  • Déclaration de conflit d'intérêt : je suis l'auteur principal du Frido, et c'est ce bouquin qui est explicitement cité au début du fil -- je ne gagne pas d'argent à la vente -- je défends dont uniquement mes choix, pas mon gagne pain. À part ça j'essaie de rester objectif.

    GG a écrit:
    Quant à 2), il est, si l'on y réfléchit bien, quelque peu absurde, sachant que si l'on a besoin de ces nouvelles informations qui manqueraient soi-disant dans la conception Bourbaki, il suffit tout simplement d'écrire $\lim_{\substack{x\to a\\x\neq a}}f(x)$.

    Excuses-moi de te prêter des intentions, mais je reconstitue ainsi le monologue intérieur:
    - ah ... c'est vrai que la limite pointée perd de l'information sur le comportement de la fonction au voisinage d'un point ...
    - comment résoudre ? voyons voyons ...
    - oh ! J'ai une idée !! On va épointer la limite !
    - génial! Problème résolu.

    Je suis prêt à parier qu'historiquement c'est ce cheminement qui a mené la communauté mathématique à adopter la limite épointée alors que la pointée est à priori plus simple, plus logique et plus naturelle.


    Quelle information est perdue ?

    Prenons la fonction indicatrice de $0$ (vaut zéro partout sauf en $0$ où elle vaut $1$).

    Avec la limite pointée, on peut dire deux choses :
    - la limite pointée n'existe pas en 0.
    - la fonction n'est pas continue en 0.

    Avec la limite épointée on peut dire deux choses :
    - la limite épointé existe et vaut 0.
    - la fonction n'est pas continue en 0.

    La première paire d'affirmations ne distingue pas notre fonction de 1/x.

    La seconde paire d'informations indique quelque informations supplémentaires:
    - $f$ est intégrable sur un voisinage. (peut-être qu'il faut ajouter qu'elle est mesurable ?)
    - $f$ peut être rendue continue en changeant la valeur en un seul point.

    Un seul point faisant «des pirouettes» fait passer tout son voisinage sous le radar de la limite pointée. C'est dommage pour les cas où les comportements individuels ne comptent pas.

    Donc bon ... En gros il y a deux types de fonctions :

    - celles où la limite pointée et épointée coïncident.
    - celles où elles ne coïncident pas. Pour celle-là, il est préférable d'épointer (en ajoutant $x\neq a$ en-dessous) pour ne pas rater d'information potentiellement utile.

    Il est possible aussi de se dire qu'il est tellement rare ces informations soient utiles qu'il sera toujours temps d'épointer au cas par cas quand on en aura besoin. Inutile d'anticiper ces subtilités au moment de définir la limite.


    Pourquoi épointer n'ajoute presque aucune complications ?

    Le cas du théorème de composition est l'exemple type où on accuse la limite épointée d'être plus compliquée. Comme je le dis plus haut, c'est juste que la limite épointée dit plus de choses. On n'a rien sans rien.

    Pourtant, c'est le seul cas de toute la vie d'un mathématicien dans lequel on voit une différence. Et il y a une raison à ça : si on calcule une limite, c'est précisément parce que la fonction n'existe pas au point étudié. Sinon on calculerait la valeur de la fonction et sa continuité.

    De l'utilité de la limite

    Cela rejoint la première partie sur les informations complémentaires que donne la limite par rapport à la continuité..


    La limite n'est pas très utile à utiliser là où la fonction existe. Pour ça, on a le concept de «calculer la valeur» et de continuité. La limite s'utilise surtout dans les cas où la valeur n'existe pas : pour voir ce que fait $\sin(x)/x$, pour calculer une dérivée ou pour étudier l'intégrabilité d'une fonction qui tend vers l'infini en un point.

    De ce point de vue, on considère la limite comme étant un outil pour seulement approcher un point *sans l'atteindre*. Si on veut insister sur cet aspect de la limite, on peut choisir la limite époitée. Ça enfonce bien le clou sur *approcher sans atteindre*.

    Si on estime que la partie importante du concept de limite n'est pas de "approcher" mais de ré-exprimer la continuité, alors l'épointement n'a aucun sens.

    Le seul mauvais choix est de ne pas prévenir

    On peut faire le choix qu'on veut; les deux se valent avec des avantages et des inconvénients.

    Le seul choix qui soit mauvais est, quand on prend l'option très minoritaire (limite pointée), le choix de ne pas avertir la lectrice du piège potentiel au cas où elle voudrait croiser avec d'autres sources (exemple)


    On peut dire ce qu'on veut sur les choix du Frido, mais c'est le seul bouquin à ma connaissance qui fait l'effort de définir les deux, et de prouver des théorèmes liant les deux notions en montrant leurs points forts et leur points faibles, exemples à l'appui.

    Une section spéciale intitulée « Quelques choix qui peuvent provoquer des quiproquos » est dédiée à discuter d'autres choix plus ou moins généralement acceptés ou non.

    Si vous trouvez d'autres trucs pas clairs ou d'autres usages dont la lectrice devrait être avertie, n'hésitez pas à me le faire savoir. En général l'auteur est sympa et tient compte des remarques :)
  • @SERGE_S, @Laurent Claessens,

    OK. Merci pour les réponses.
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