Stabilité par déterminant

Bonjour,

Il y a un exo classique qui dit que si $K$ est un corps infini, alors si $T$ est un endomorphisme de $\mathcal M_n(K)$ qui conserve le déterminant, alors $T$ conserve le rang.
Je me demande si c'est encore vrai pour $K$ fini... et je sèche...

Michal

Réponses

  • Comment procède-t-on lorsque le corps est infini ?
    (J'ai essayé de chercher sur internet comme tu dis qu'il s'agit d'un résultat classique, mais je n'ai rien trouvé).

    EDIT : En fait, j'ai trouvé. Je pense qu'il faut passer par le polynôme caractéristique. Comme le corps est infini, les fonctions polynomiales s'identifient aux polynômes, donc c'est gagné.
  • Ce qui laisse penser que pour avoir un contre-exemple, il faut considérer une matrice à coefficients dans $\mathbb F_p$ qui a pour polynôme caractéristique $X^p-X$ ;-)
  • Soit $M\in \mathcal{M}_n(K)$ de rang $r$. Si $r=0$, alors $M=0$ et donc $T(M)=0$ puisque $T$ est linéaire. Dans ce cas $\mathrm{rg}\,(T(M))=\mathrm{rg}\,(M)$. Si $r\geqslant 1$, alors $M$ est équivalente à la matrice $J_r$ :
    $$
    \exists P,\, Q\in \mathrm{GL}\,_n(K)\ /\ M=PJ_rQ\quad \ \text{où }\ J_r=\left(
    \begin{array}{cc}
    I_r & 0 \\
    0 & 0 \\
    \end{array}
    \right)\in \mathcal{M}_n(K)
    $$
    Posons également $N=P(I_n-J_r)Q$. Prenons $\lambda\in K$ et calculons le déterminant de $\lambda M + N$. On a :
    \begin{align}
    \det(\lambda M+N) & =\det(P((\lambda-1)J_r+I_n)Q)\\
    & =\det P \det((\lambda-1)J_r+I_n)\det Q \\
    & =\lambda^r \det P\det Q\qquad (1)
    \end{align}
    Par ailleurs, puisque $T$ conserve le déterminant, on a :
    $$
    \det(\lambda M+N)=\det(T(\lambda M+N))=\det(\lambda T(M)+T(N))
    $$
    Posons $s=\mathrm{rg}\,(T(M))$. Il existe alors deux matrices $R,\, S\in \mathrm{GL}\,_n(K)$ telles que $T(M)=RJ_sS$ (où $J_s$ est la matrice nulle si $s=0$). Il vient :
    \begin{align}
    \det(\lambda M+N) & =\det(R(\lambda J_s+R^{-1}T(N)S^{-1})S) \\
    & =\det(\lambda J_s+R^{-1}T(N)S^{-1})\det(R)\det(S) \qquad (2)
    \end{align}
    La relation (1) nous apprend que la fonction $\lambda \mapsto \det(\lambda M+N)$ est polynomiale de degré $r$, alors que (2) montre que $\lambda \mapsto \det(\lambda M+N)$ est polynomiale de degré au plus $s$. $K$ étant infini, on peut identifier polynômes et fonctions polynomiales, ce qui montre que $r\leqslant s$. On a donc obtenu :
    \begin{equation}
    \forall M\in \mathcal{M}_n(K),\quad \mathrm{rg}\,(M)\leqslant \mathrm{rg}\,(T(M))
    \end{equation}
    On en déduit que l'endomorphisme $T$ est injectif. En effet, soit $M\in \ker T$ ce qui signifie que $T(M)=0$. Alors $\mathrm{rg}\,(T(M))=0$ donc $\mathrm{rg}\,(M)\leqslant 0$ donc $M=0$. Comme $\mathcal{M}_n(K)$ est de dimension finie, l'endomorphisme $T$ est bijectif et comme $T$ conserve le rang, $T^{-1}$ conserve également le rang. Alors, en prenant $T^{-1}$ à la place de $T$, on a :
    \begin{equation}
    \forall M\in \mathcal{M}_n(K),\quad \mathrm{rg}\,(M)\leqslant \mathrm{rg}\,(T^{-1}(M))
    \end{equation}
    En remplaçant $M\in \mathcal{M}_n(K)$ par $T(M)$, on obtient :
    \begin{equation}
    \forall M\in \mathcal{M}_n(K),\quad \mathrm{rg}\,(T(M))\leqslant \mathrm{rg}\,(M)
    \end{equation}
    et finalement, on a :
    \begin{equation*}
    \forall M\in \mathcal{M}_n(K),\quad \mathrm{rg}\,(T(M))=\mathrm{rg}\,(M)
    \end{equation*}
    $T$ conserve donc bien le rang.
  • Je pense que le résultat reste vrai dans $M_n(\mathbb{F}_q)$ avec $n<q$ en utilisant la même démonstration (avec le polynôme caractéristique). Il faudrait donc chercher si le résultat est encore vrai si $n\geq q$. Si le résultat est faux, trouver un contre-exemple ne sera pas facile, étant donné que tout les endomorphismes faciles à construire de $M_n(K)$ préservent le rang.
  • Merci pour cette excellente intervention. En "dépliant" en anneaux***, je pense que ça peut se prouver en quelques lignes sans calcul (une intuition, ou plutôt un ressenti). J'essaierai de le poster si je trouve une rédaction acceptable (aucune garantie!!! J'espère ne jamais oublier ce théorème en tout cas, il est "collector" (sauf s'il est trivial et que je ne m'en suis pas aperçu))

    *** on rajoute des infiniment petits et on obtient que le rang est une fonction du déterminant.
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
  • Je vais surement dire une ânerie, mais j'ai des prédispositions pour ça.

    Et si on plongeait notre corps fini dans son corps des fractions rationnelles ?

    e.v.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • Cela pourrait marcher.

    Si on note $\Phi\in L(M_n(K(X))$ le prolongement du $K$-endomorphisme de $M_n(K)$ qui préserve le déterminant, il faut montrer que $\Phi$ préserve le déterminant.
  • Arf, je vois maintenant que ce n'est pas aussi tout droit que j'avais l'air de le suggérer. Il y a un quantificateur à faire grossir.

    Merci !

    e.v.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • Pour faire avancer le problème : soit $T:M_n(K)\to M_n(K)$ linéaire préservant le déterminant. Montrons que $T$ est injective.

    Quitte à remplacer $T(M)$ par $T(I)^{-1}T(M)$, on peut supposer que $T(I)=I$. Soit $M\in\ker T$. Déjà, $M$ n'est pas inversible. Pour toute matrice $A$, on a $\mathrm{det}(A+M)=\mathrm{det}(T(A+M))=\mathrm{det}(T(A))=\mathrm{det}(A)$, donc pour tous $P,Q$ inversibles on a $\mathrm{det}(PAQ+PMQ)=\mathrm{det}(PAQ)$. Soit $r$ le rang de $M$, alors il existe $P$ et $Q$ tels que $PMQ=J_r$, donc $\mathrm{det}(B+J_r)=\mathrm{det}(B)$ pour tout $B$. Ceci est impossible si $r>0$ car on peut prendre $B=\mathrm{diag}(-I_r,I_{n-r})$, donc $r=0$ et $M=0$.

    On remarque aussi que $T$ conserve le rang si et seulement si $T$ conserve l'ensemble des matrices de rang $1$, puisqu'une matrice de rang $r$ est somme de $r$ matrices de rang $1$ mais n'est pas somme de $r-1$ matrices de rang $1$.
  • Il me semble qu'en ligne -9 vous utilisez le résultat que vous voulez démontrer, en affirmant
    comme T conserve le rang etc.
  • Il faut lire "comme $T$ conserve le déterminant, $T^{-1}$ conserve également le déterminant".
  • JLT écrivait:
    > Pour faire avancer le problème : soit $T:M_n(K)\to M_n(K)$ linéaire préservant le déterminant. Montrons que $T$ est injective.

    Il me semble que j'ai une preuve simple
    Soit $M$ dans le noyau de $T$ donc $T(M)=0$ donc $rg(T(M)=0$ or $rg(M)\leq rg(T(M))$ (pourquoi ?) donc $rg M=0$ donc $M=0$
    Le 😄 Farceur


  • $rg(M) =$;-) $=\{\max\det(A) \mid A\, \text{ une sous-matrice de }\, M \}$ et utilise que $T$ conserve le déterminant.
    Le 😄 Farceur


  • Tu peux donner une demo complete comme celle de JTL ? Si on résume 10 lignes dans des "pourquoi" et 10 dans "utilise les hypothèses" , toutes les preuves sont "simples"
  • Dans la suite de l'idée de JLT, $T$ est injective donc inversible (dim finie). Le $T^{-1}$ conserve aussi le déterminant et donc $rg(T(M))\leq rg(M)$ d'où l’égalité des rangs.
    Le 😄 Farceur


  • D'accord avec le fait que $rg(M)\leq rg(T(M))$ implique l'égalité, par contre comment tu arrives à $rg(M)\leq rg(T(M))$??

    Je ne comprends pas pourquoi tu ne détailles pas ton argument ici :
    http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,1406810,1693784#msg-1693784
  • Pour quasiment paraphraser Mjr, l'idée d'ev marche si on arrive à prolonger $T$ à $M_n(K[X])$ avec la bonne propriété, car alors on en déduit un unique prolongement dans $M_n(K(X))$ et on obtient facilement le fait que $T$ conserve le determinant dans ce dernier (on réduit tous les coef au même dénominateur et c'est plié)

    Pour tout $M(X)$ dans $M_n(K[X])$ on a bien $det \, T(M(a))=\det \,M(a)$ pour tout $a\in K$ mais on ne peut pas en déduire l'égalité des polynôme. C'est encore $X^p-X$ évoqué par Poirot qui pose problème... mais c'est peut-être pas trop grave, je n'ai pas encore mis ma cervelle en mode cambouis^^ Peut-être que la bijectivité établie par JTL ainsi que les remarques périphériques conséquentes peuvent aider à conclure sans trop souffrir... sauf si c'est faux
  • @lesmathspointclaires

    J'ai repris mon raisonnement, il y a une faille. J'ai cru pouvoir donner une preuve plus simple du lemme 2 ( fichier joint) dans le cas d'un endomorphisme stabilisant le déterminant .

    N.B le lemme 2 démontre l’inégalité sujet de ta question pour un endomorphisme stabilisant les matrices inversibles avec $K=\C$
    Le 😄 Farceur


  • @michal
    Dans ce papier https://pdfs.semanticscholar.org/8f0a/843aa7f9592128302e14e567cfc3a132be29.pdf , on trouve une caractérisation des endomorphismes de $M_n(F)$, où $F$ est un corps quelconque, qui préservent le déterminant ou le rang théorème 3.1
    Le 😄 Farceur


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