Condition pour même table de caractères

Bonjour, il est bien connu que la table de caractères d'un groupe fini ne détermine pas la classe d'isomorphie du groupe en question, par exemple $D_4$ et $Q_8$ ont la même table de caractères mais ne sont pas isomorphes.

Sait-on donner une condition pour que deux groupes non isomorphes aient la même table de caractères ? Et auriez-vous d'autres exemples que celui que j'ai cité ? Merci d'avance pour vos réponses.

Réponses

  • Hello,

    D'un point de vue théorique deux groupes ont la même table de caractères si et seulement si leurs algèbres de groupes sont isomorphes en tant qu'algèbres 'quasi-Hopf'. Ce sont des algèbres de Hopf dont la propriété d'associativité a été affaiblie. Pour plus de détails il y a ce papier https://arxiv.org/abs/math/0001119.

    C'est assez technique, mais on peut facilement voir qu'on ne peut pas échapper à ce niveau de généralité. En effet, si les algèbres de deux groupes finis sont isomorphes en tant qu'algèbre de Hopf, alors les groupes sont isomorphes car le groupe se retrouve comme l'ensemble des éléments `group-like' de l'algèbre de Hopf.

    De plus le théorème de Wedderburn implique que si deux groupes abéliens ont même ordre alors leurs algèbres de groupes sont isomorphes. Donc pour caractériser la table de caractère il faut quelque chose de plus fort que algèbre associative et plus faible qu'algèbre de Hopf.

    Malheureusement, la condition quasi-Hopf n'est pas évidente et je ne crois pas qu'on n'ait de critères simples pour décider quand c'est le cas.

    Pour des exemples de groupes non-isomorphes ayant la même table de caractères : tous les $p$-groupes non abéliens d'ordre $p^3$ ont la même table de caractères. De plus si $G$ et $H$ ont la même table de caractère et que $K$ est un groupe fini, alors $G\times K$ et $H\times K$ ont la même table de caractères. Donc si l'ordre de $K$ est premier à l'ordre de $G$, alors les groupes $G\times K$ et $H\times K$ ne sont pas isomorphes et ont la même table de caractères.

    P.S. On ne peut pas non plus caractériser les groupes ayant les mêmes tables de caractères en regardant la catégorie des représentations comme catégorie abélienne. En effet, en combinant le théorème de Wedderburn et le théorème de Morita, on peut voir que deux groupes finis $G$ et $H$ ont leurs catégories de $\mathbb{C}$-représentations équivalentes si et seulement si ils ont le même nombre de classes de conjugaisons, c'est-à-dire le même nombre de caractères irréductibles.
  • Bonjour Poirot,
    Je ne vais pas répondre exactement à ta question mais j'espère pour autant que je ne serai pas banni. D'abord est ce que vraiment les deux groupes que tu cites ont même table de caractères ? Cela dépend .. Regardons bien

    > G8 := SmallGroups(8) ;
    > Q8 := G8[4] ;
    > TransitiveGroupDescription(PermutationGroup(FPGroup(Q8))) ;
    Q_8(8)
    > D4 := DihedralGroup(4) ;
    > CharacterTable(Q8) ;
    Character Table of Group Q8
    ---------------------------
    -----------------------
    Class |   1  2  3  4  5
    Size  |   1  1  2  2  2
    Order |   1  2  4  4  4
    -----------------------
    p  =  2   1  1  2  2  2
    -----------------------
    X.1   +   1  1  1  1  1
    X.2   +   1  1  1 -1 -1
    X.3   +   1  1 -1 -1  1
    X.4   +   1  1 -1  1 -1
    X.5   -   2 -2  0  0  0
    []
    > CharacterTable(D4) ;
    Character Table of Group D4
    ---------------------------
    -----------------------
    Class |   1  2  3  4  5
    Size  |   1  1  2  2  2
    Order |   1  2  2  2  4
    -----------------------
    p  =  2   1  1  1  1  2
    -----------------------
    X.1   +   1  1  1  1  1
    X.2   +   1  1  1 -1 -1
    X.3   +   1  1 -1 -1  1
    X.4   +   1  1 -1  1 -1
    X.5   +   2 -2  0  0  0
    []
    

    On voit qu'il y a une différence dans la colonne Frobenius-Schur indicators (la colonne 2 avec des signes). Evidemment, je ne sais pas ce que c'est mais toi peut-être que si. Voilà ce que dit la documentation

    The second column of this section contains the Frobenius-Schur indicators. The symbols are interpreted as follows: A $+$ indicates that the character is real; a $-$ indicates that while the character is real, it is not afforded by a real representation; and, finally, a 0 indicates a character that is not real.

    Par ailleurs, on voit dans https://mathoverflow.net/questions/500/finite-groups-with-the-same-character-table que ce qui tourne autour de ta question semble compliqué. On croit comprendre que la colonne Frobenius-Schur indicator intervient dans un type d'isomorphie des modules attachés (dans des monoidal categories ou pivotal categories, à vos souhaits).

    Il y a aussi https://mathoverflow.net/questions/131064/on-finite-groups-with-same-complex-valued-character-table : on y raconte que $G$ et $H$ ont la même table de caractères (complexes) si et seulement si $\C[G]$ et $\C[H]$ sont des algèbres isomorphes en tant que quasi-Hopf algebras. Bigre. Et pour nous rassurer :

    This is a complicated question. A pair of non-isomorphic groups with the same character table is sometimes called a "Brauer Pair". There are many such pairs, especially among $p$-groups.

    Bon, mais peut-être que tu as déjà obtenu ces pointeurs via le web ?
    Bon courage.
  • @Poirot
    Il faut laisser tomber mon post. Un spécialiste a répondu à ta question pendant que je le tapais.
  • @commut : merci pour ces explications très précises ! C'est donc plus compliqué que ce que je pensais. Et merci pour l'exemple des groupes non abéliens d'ordre $p^3$, est-ce qu'il y a une démonstration élémentaire de ce fait ?

    @claude : merci aussi de m'avoir indiqué cette nuance avec les indicateurs de Schur dont j'ai déjà vaguement entendu parler. Je parlais de la table de caractères usuelle, mais ça permet de voir que "tout ne marche pas pareil" pour ces deux groupes.
  • @Poirot je pense que c'est pas trop difficile mais quand même un (tout petit) peu pénible. Je ne détaille pas tout et j'espère que c'est correct.

    Un groupe non abélien $G$ d'ordre $p^3$ a la propriété que son centre $Z$ est égal à son groupe dérivé et est d'ordre $p$. Par inflation on a donc $p^2$ représentations de dimension $1$.

    Le truc un peu technique est de montrer qu'il y a un groupe abélien d'ordre $p^2$ tel que $Z < A < G$. Il me semble qu'il faut séparer le cas $p=2$ du cas $p$ impair. Le groupe $Z$ est normal dans $A$ et le groupe $A$ est normal dans $G$ (ils sont d'indice $p$ à chaque fois). Pour $p$ impair ce groupe est isomorphe à $C_p \times C_p$.

    Si $\lambda$ est une représentation non triviale de $C_p$, on en déduit par inflation de $A/Z$ à $A$ une représentation de $A$, puis par induction de $A$ à $G$ une représentation $V_{\lambda}$ de dimension $p$ de $G$. Il faut maintenant montrer que chaque $V_\lambda$ est simple et que $V_{\lambda}$ est isomorphe à $V_{\lambda'}$ si et seulement si $\lambda$ est isomorphe à $\lambda'$. Ce qui peut se faire en utilisant la réciprocité de Frobenius et la formule de Mackey.

    Finalement, on a trouvé $p^2$ représentations simples de dimension $1$ et $p-1$ représentations simples de dimension $p$ et comme $p^2 + (p-1)\times p^2 = p^3$, ça veut dire qu'on a trouvé toutes les représentations simples.

    Il reste à étudier les traces de ces représentations. Celles de dimension $1$ ne dépendent pas de $G$. Pour celles de dimension $p$ c'est un peu plus compliqué, mais on peut voir qu'elles s’annulent en dehors du sous-groupe $A$ et que la restriction de $V_\lambda$ au groupe $A$ est la somme directe des représentations de $A$ dont la restriction à $Z$ est isomorphe à $\lambda$... et donc le caractère de $V_\lambda$ ne dépend que de la table de caractères de $A$.

    L'autre possibilité est de construire dans un premier temps les deux groupes non-abéliens d'ordre $p^3$ et de construire explicitement leur table de caractères et de vérifier que ce sont bien les mêmes.
  • Merci beaucoup !
  • @Poirot
    Les deux groupes non abéliens d'ordre $p^3$, pour $p \ne 2$, sont décrits ici http://www.math.uconn.edu/~kconrad/blurbs/grouptheory/groupsp3.pdf. De manière élémentaire (je pense). Ainsi que le théorème d'unicité (th 4, page 4).

    Il y a un truc qui me turlupine à propos de ``avoir même table de caractères'', mais j'ose pas demander (je suis un peu timide).
  • @Claude Quelle est ta question ?
  • @Commut
    Cela veut dire quoi exactement que $G$ et $H$ (groupes finis) ont même table de caractères ? Est ce que cela signifie qu'il existe une bijection $u : H \to G$ telle qu'en désignant par $\chi_1, \chi_2, \cdots$ les caractères irréductibles (complexes) de $G$, alors $\chi_1 \circ u, \chi_2 \circ u, \cdots$ sont les caractères irréductibles de $H$ ? Je me demande si ce que j'écris a du sens (en tout cas, ce qui est sûr, c'est que je n'ai pas assez réfléchi).
    Si tu as le temps de préciser, merci.
  • Je crois que pour une bonne formulation il faut utiliser deux bijections qui permettent d'identifier les deux tables : une bijection $f$ entre l'ensemble des classes de conjugaisons des éléments de $G$ et celles des éléments de $H$ et une bijection $\phi$ entre l’ensemble des caractères irréductibles de G et ceux de $H$ telles que pour tout caractère $\chi$ de $G$ et toute classe de conjugaison $c$ de $G$ on ait $\phi(\chi)(f(c)) = \chi(c)$
  • @commut
    Ce que tu écris a l'air tout-à-fait raisonnable (alors que ma formulation ne l'est pas du tout !). C'est ce qui me turlupinait depuis le départ. Merci.
  • @commut (et Poirot).
    Je me suis amusé avec les deux groupes d'ordre $p^3$ en utilisant les modèles (matriciels) qui figurent chez K. Conrad in http://www.math.uconn.edu/~kconrad/blurbs/grouptheory/groupsp3.pdf. Et on peut facilement, que ce soit pour l'un ou l'autre, déterminer les classes de conjugaison, le centre ...etc..

    Et en ce qui concerne les caractères irréductibles, j'ai suivi ta stratégie in http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,1546016,1546140#msg-1546140. C''est du gâteau pour trouver un sous-groupe abélien $A \simeq C_p \times C_p$ coincé comme tu avais dit $Z \subset A \subset G$. On peut-même prendre $A$ de la forme $Z \times C_p$. Et on obtient ainsi dans les deux cas, $p-1$ caractères irréductibles de dimension $p$ indexés par $Z \setminus \{1\}$.

    Bref, le fait d'avoir ces deux modèles concrets sous le nez m'a permis de concrétiser ton post (comme ce n'est pas mon domaine, cela me foutait un peu la trouille).
    Tout est bien qui finit bien (pour moi).

    Poirot : au cas où cela t'intéresserait, je peux scanner une page manuscrite.
  • @claude : ça m'intéresse :-)
  • @Claude : le signe $+$ et le signe $-$ dans les tables de caractère ... enfin dans la deuxième colonne " Frobenius-Schur indicators " comme tu dis. Y'a un petit truc arithmétique ?
  • @Poirot
    J'attache juste une page pour l'un des deux groupes (non abéliens) d'ordre $p^3$, celui de Heisenberg i.e. celui noté $\text{Heis}(\mathbb F_p)$ par K. Conrad in http://www.math.uconn.edu/~kconrad/blurbs/grouptheory/groupsp3.pdf

    Cette page est plutôt un état des lieux sur les classes de conjugaison. Pas de preuve à proprement parler mais une description assez précise. Il y a aussi mention de la stratégie de Commut pour les caractères irréductibles de dimension $p$. Peut-être d'autres détails plus tard.

    C'est tassé pour que cela tienne en une page. J'espère que c'est lisible.

    Je compte faire la même chose pour l'autre groupe (non abélien) d'ordre $p^3$ noté $G_p$ par K. Conrad
  • @flip flop
    Tu m'en poses des questions. J'y connais rien moi à cette histoire de Frobenius-Schur indicators, pas plus que ce que j'ai cité de la documentation (je crois comprendre que c'est une histoire de réalité au sens de $\R$, $\C$).

    J'ai pas pu m'empêché de jouer quand j'ai relu les pages 16-17 de K. Conrad ''The Origin of Representation Theory'' in
    http://www.math.uconn.edu/~kconrad/articles/groupdet.pdf

    Etant donné un groupe fini $G$, tu t'alloues un système d'indéterminées $(X_g)_{g \in G}$ et tu joues avec le déterminant $\Theta(G) = \det(X_{gh^{-1}})$, the group determinant (page 4).
    Et également, pour une représentation $\rho$ de $G$, avec the determinant attached to $\rho$ (haut p. 14)
    $$
    \Theta_\rho(G) = \det\Bigl( \sum_{g \in G} X_g\rho(g) \Bigr) \qquad\qquad (\star)
    $$
    Il y a un lien entre les deux, cf K. Conrad.

    Et K. Conrad dit page 17 quelque chose qu'il faut que je relise encore. Il dit, pour les représentations irréductibles de dimension $2$ de $D_4$, et $Q_8$, que les polynômes quadratiques de $(\star)$ ne sont pas les mêmes. Un extrait de mon jeu. D'abord $D_4$ :

    > // Ordre choisi par K. Conrad
    > EltsD4 := [D4| 1, (1,3)(2,4), (1,2,3,4), (1,4,3,2), (1,3), (2,4), (1,2)(3,4), (1,4)(2,3)] ;
    > M_D4 := &+[X[ i] * Matrix(rhoD4(EltsD4[ i])) : i in [1..8]] ;
    > M_D4 ;
    [ X1 - X2 - X5 + X6     -X3 + X4 - X7 + X8]
    [ X3 - X4 - X7 + X8     X1 - X2 + X5 - X6]
    > Det(M_D4) ;
    X1^2 - 2*X1*X2 + X2^2 + X3^2 - 2*X3*X4 + X4^2 - X5^2 + 2*X5*X6 - X6^2 - X7^2 + 2*X7*X8 - X8^2
    

    Puis $Q_8$ (la représentation de dimension $2$ est définie sur $\Q(i)$) :

    > EltsQ8 := [g : g in Q8] ;
    > Ki := ChangeRing(K,Qi) ;
    > X := ChangeUniverse(X, Ki) ;
    > M_Q8 := &+[X[ i] * Matrix(rhoQ8(EltsQ8[ i])) : i in [1..8]] ;
    > M_Q8 ;
    [X1 - X2 + i*X5 - i*X6    i*X3 - i*X4 - X7 + X8]
    [i*X3 - i*X4 + X7 - X8    X1 - X2 - i*X5 + i*X6]
    > Det(M_Q8) ;
    X1^2 - 2*X1*X2 + X2^2 + X3^2 - 2*X3*X4 + X4^2 + X5^2 - 2*X5*X6 + X6^2 + X7^2 - 2*X7*X8 + X8^2
    
  • @Poirot
    Suite de mon post http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,1546016,1546946#msg-1546946

    Je pense que l'on obtient une représentation irréductible de dimension $p$ du groupe de Heisenberg d'ordre $p^3$ sur $\Q(\zeta_p) = \Q(\root p \of 1)$ en définissant deux matrices $X, Y$ sur la base canonique $e_0, \cdots, e_{p-1}$ de $\Q(\zeta_p)^p$ par :
    $$
    X(e_j) = \zeta_p^j e_{\sigma(j)}, \qquad Y(e_j) = \zeta_p^j e_j, \qquad \sigma = (0,1,2,\cdots,p-1)
    $$
    Et en réalisant $x \mapsto X$, $y \mapsto Y$ où $x,y$ sont les deux générateurs :
    $$
    x = \pmatrix {1 & 1 & 0\cr 0 & 1 & 0 \cr 0 & 0 & 1}, \qquad y = \pmatrix {1 & 0 & 0\cr 0 & 1 & 1 \cr 0 & 0 & 1}
    $$
    C'est encore à l'état de bricolage. Des choses à vérifier.

    Note : $X$ est, aux coefficients $\zeta_p^\bullet$ près, la matrice de la permutation $\sigma$.
  • @Claude : je regarde tout ça quand j'ai un peu de temps, mais merci !
  • Bien vu Claude.
    Pourtant $D_8$ et $H_8$ ont la même table.
    Et donc le déterminant (quel bijou !) de Dedekind serait un invariant plus fin que la table des caractères ?
    Comment se fait-ce ?
  • Bonjour,

    Je ne connaissais pas du tout le déterminant de Dedekind du coup j'ai fait un peu de recherche. Il semble que c'est un invariant beaucoup plus fin que la table de caractères puis qu'il semble (semble : parce que je n'ai pas lu la démonstration) qu'il détermine le groupe (voir http://www.ams.org/journals/proc/1992-116-04/S0002-9939-1992-1123661-6/S0002-9939-1992-1123661-6.pdf).

    Pour revenir à des choses élémentaires, quand on a une représentation de dimension finie d'un groupe $G$, on peut la composer avec le déterminant. Pour les représentations de dimension $1$, on obtient la même chose que la trace, mais pour les représentations de dimension plus grande, on obtient autre chose. Je ne sais pas si ça a un nom ni si ça sert à quelque chose.

    Dans le cas de $Q_8$ on peut voir que les valeurs de cette composée pour la représentation de dimension $2$ sont toujours $1$. Par contre dans le cas de $D_8$, il y a des signes $1$ et $-1$ qui apparaissent.
  • Hello,
    Avant le théorème 4 de K. Conrad in http://www.math.uconn.edu/~kconrad/articles/groupdet.pdf, on voit que le déterminant $\Theta(G)$ possède la propriété :
    $$
    \Theta(G) = \prod_{\rho\ {\rm irred.}} \det\left(\sum_g X_g\rho(g)\right)^{\dim \rho}
    $$
    Et le théorème 4 dit que $\det\left(\sum_g X_g\rho(g)\right)$ est un polynôme irréductible (si $\rho$ est irréductible) et que l'on peut retrouver $\rho$ à partir de ce dernier polynôme.

    Ce qui invite à réfléchir, c'est à la page 17 de K. Conrad, la dernière phrase de ce paragraphe

    Although $Q_8$ and $D_8$ have identical character tables, and all coefficients of an irreducible factor of the group determinant are determined by the corresponding character, the quadratic irreducible factors of $\Theta(Q_8)$ and $\Theta(D_8)$ are different. This illustrates that the determination of all coefficients of a factor from its character depends on the character as a function on group elements, not only on conjugacy classes.


    En ce qui concerne les deux groupes non abéliens d'ordre $p^3$, j'ai tendance à avoir un peu la tête dans le guidon mais je me soigne. Disons que pour le groupe de Heisenberg $H_p$, j'étais au ras des pâquerettes, mais en traitant l'autre $G_p$, cela va mieux. Et encore mieux pour les comparer au sens de ``avoir la même table de caractères''. Car il faut, entre les deux groupes, d'une part acoquiner les classes de conjugaison et d'autre part acoquiner les caractères irréductibles. J'ai fini par comprendre que deux éléments de $G \setminus Z(G)$ sont conjugués si et seulement si ils sont égaux dans l'abélianisé. Sauf que je n'arrive pas à trouver une preuve uniforme. Je dois traiter l'un et l'autre. Précision : ci-dessus, $G$ est un groupe non abélien ``abstrait'' d'ordre $p^3$ ; et on sait que $Z(G)$ est égal à $[G,G]$ et cyclique d'ordre $p$.

    Bref, il faut une approche structurelle pour acoquiner les ``choses'' de $H_p$ (groupe de Heisenberg) et $G_p$ (l'autre). Commut l'avait fait pour les caractères irréductibles et peut-être que cela lui semblait évident pour les classes de conjugaison.

    Car si on n'a pas du structurel pour les rapprocher, bonjour la prise de tête

    > CharacterTable(Hp) ;          
    Character Table of Group Hp
    -----------------------------------------------------
    Class |   1    2    3   4   5   6   7   8   9  10  11
    Size  |   1    1    1   3   3   3   3   3   3   3   3
    Order |   1    3    3   3   3   3   3   3   3   3   3
    -----------------------------------------------------
    p  =  3   1    1    1   1   1   1   1   1   1   1   1
    -----------------------------------------------------
    X.1   +   1    1    1   1   1   1   1   1   1   1   1
    X.2   0   1    1    1   J-1-J-1-J   J   1   1   J-1-J
    X.3   0   1    1    1-1-J   J-1-J   J-1-J   J   1   1
    X.4   0   1    1    1   1   1   J-1-J-1-J   J   J-1-J
    X.5   0   1    1    1   J-1-J   J-1-J   J-1-J   1   1
    X.6   0   1    1    1-1-J   J   1   1   J-1-J   J-1-J
    X.7   0   1    1    1-1-J   J   J-1-J   1   1-1-J   J
    X.8   0   1    1    1   J-1-J   1   1-1-J   J-1-J   J
    X.9   0   1    1    1   1   1-1-J   J   J-1-J-1-J   J
    X.10  0   3-3-3*J  3*J   0   0   0   0   0   0   0   0
    X.11  0   3  3*J-3-3*J   0   0   0   0   0   0   0   0
    
    
    > CharacterTable(Gp) ;
    Character Table of Group Gp
    -----------------------------------------------------
    Class |   1    2    3   4   5   6   7   8   9  10  11
    Size  |   1    1    1   3   3   3   3   3   3   3   3
    Order |   1    3    3   3   3   9   9   9   9   9   9
    -----------------------------------------------------
    p  =  3   1    1    1   1   1   2   3   2   3   2   3
    -----------------------------------------------------
    X.1   +   1    1    1   1   1   1   1   1   1   1   1
    X.2   0   1    1    1   J-1-J-1-J   J   J-1-J   1   1
    X.3   0   1    1    1-1-J   J-1-J   J   1   1   J-1-J
    X.4   0   1    1    1   1   1   J-1-J   J-1-J   J-1-J
    X.5   0   1    1    1   J-1-J   J-1-J   1   1-1-J   J
    X.6   0   1    1    1-1-J   J   1   1   J-1-J-1-J   J
    X.7   0   1    1    1-1-J   J   J-1-J-1-J   J   1   1
    X.8   0   1    1    1   J-1-J   1   1-1-J   J   J-1-J
    X.9   0   1    1    1   1   1-1-J   J-1-J   J-1-J   J
    X.10  0   3-3-3*J  3*J   0   0   0   0   0   0   0   0
    X.11  0   3  3*J-3-3*J   0   0   0   0   0   0   0   0
    
  • @commut
    Dans l'article que tu as pointé (Mansfield, A Group Determinant determines its group), il y a une référence à Bourbaki Algèbre (I. p. 139), version en anglais. Je n'ai pas réussi à la retrouver dans la version française.

    Mais j'ai retrouvé d'autre chose : Bourbaki, Algèbre, p. 140, exercice 36 (section 6). Consacré aux groupes d'ordre $p^3$. Il faut avoir fait l'exercice précédent. Et l'exercice 36 est marqué difficile. Mais la solution est chez K. Conrad.

    Enfin, expérimentalement, je viens de constater que pour $m \ge 1$, le groupe présenté par
    $$
    \langle x, y \mid x^m = y^{m^2} = 1,\quad (x,y) = y^m \rangle \qquad \hbox {est d'ordre $m^3$.}
    $$
    Et que pour $m = p$ premier, c'est le groupe $G_p$ de K. Conrad in http://www.math.uconn.edu/~kconrad/blurbs/grouptheory/groupsp3.pdf, sous-groupe de $\text{AGL}_1(\Z/p^2\Z)$ engendré par :
    $$
    x = \pmatrix {1 + p & 0\cr 0 & 1}, \qquad y = \pmatrix {1 & 1\cr 0 & 1}
    $$
    Quelle chance il a Poirot (quand il aura le temps de s'amuser).
  • @Claude, pour identifier les classes de conjugaison des deux groupes, j'ai triché parce que je connaissais des présentations par générateurs et relations.

    On montre qu'il existe des éléments $x$ et $y$ qui ne sont pas centraux et tels que $1\neq xyx^{-1}y^{-1} =z \in Z(G)$ et $x,y,z$ sont des générateurs du groupe. C'est le point de la démonstration qui dépend du groupe. Comme on a une bonne description des deux groupes je pense que ça ne doit pas être trop compliqué. On n'a même pas besoin de chercher les relations.

    Ensuite, le raisonnement marche pour les deux groupes. Il y a deux types de classes de conjugaisons. Celles des éléments du centre qui sont de taille $1$ (il y en a $p$) et les autres ($p^2-1$). Si un élément $g$ n'est pas central, son centralisateur n'est pas d'ordre $p^3$, mais il contient à la fois le centre et le sous-groupe engendré par $g$, donc il est d'ordre $p^2$. Autrement dit, les classes de conjugaison restantes sont de taille $p$.

    Grâce au choix de $x$ et $y$, on a $xyx^{-1} = yz$. Donc dans la classe de conjugaison de $x^\alpha y^\beta$ il y les éléments $x^{k}\cdot x^\alpha y^\beta \cdot x^{-k} = x^\alpha y^\beta z^{k \beta}$. Si jamais $\beta =0$ alors on conjugue par $y^{-1}$ à la place de $x$. Donc les éléments de la classes de conjugaisons $x^\alpha y^\beta$ sont les $x^\alpha y^\beta c$ où $c\in Z(G)$. On peut donc les décrire uniquement en terme du groupe quotient $G/Z(G)$.

    EDIT j'avais raté ton message, du coup on est sur la même longueur d'onde le $x$ et le $y$ permettent d'identifier les classes de conjugaisons.
  • @commut
    On est bien d'accord. Le tort que j'ai eu c'est de trop travailler sur les modèles matriciels, en particulier pour le groupe de Heisenberg $H_p$. J'ai compris en passant à l'autre groupe qu'il fallait prendre du recul. Et comme je suis pas à l'aise avec tout cela, j'ai poussé le bouchon, dans le cadre du groupe $H_p$, en construisant la représentation induite qui fournit une représentation irréductible de dimension $p$. Je parle de l'induction de $\rho \circ \pi$
    $$
    \xymatrix @C = 2.5cm {
    Z \times C_p \ar[r]^-{\textstyle {\pi}\ \rm (proj.) } & Z\ar[r]^{\textstyle{\rho}} & \mathbb U_p
    }
    $$
    Cf http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,1546016,1547016#msg-1547016. Ce qui m'a un peu étonné c'est de trouver un sous-groupe fini $\Gamma \subset \text{GL}_p(\Q\root p \of 1))$ fixe pour les $p-1$ représentations de dimension $p$ du groupe de Heisenberg $H_p$. Cela doit être dû à la présence de pas mal d'automorphismes non intérieurs de $H_p$.

    Et j'ai continué à me poser des questions sur ``avoir même table de caractères''. Par exemple, dans ton post http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,1546016,1546296#msg-1546296, la bijection $f$ qui doit acoquiner les classes de conjugaison entre les deux groupes, c'est sous-entendu qu'elle acoquine deux classes de conjugaison de même cardinal ? C'est automatique avec ta définition ? En tout cas, c'est vrai pour les deux groupes non abéliens d'ordre $p^3$.

    PS : je ne vois pas en quoi utiliser les présentations des groupes d'ordre $p^3$, c'est tricher. Je dispose de celle du groupe $G_p \subset \text{AGL}_1(\Z/p^2\Z)$ mais pas du groupe de Heisenberg $H_p \subset \text{SL}_3(\mathbb F_p)$.

    PS2 : j'ai appris des trucs comme on dit.
  • Pour les générateurs et relations de $H_p$ on a $H_p = {<}x,y,z \ ;\ x^p=y^p=z^p=1, [x,y]=z, [x,z]=[y,z]=1 {>}$ avec $x$ la matrice $\left(\begin{array}{ccc}1 & 1 & 0 \\0 & 1 & 0 \\0 & 0 & 1\end{array}\right)$ et $y$ la matrice $\left(\begin{array}{ccc}1 & 0 & 0 \\0 & 1 & 1 \\0 & 0 & 1\end{array}\right)$

    Pour ta remarque sur le fait que la bijection doit conserver la taille des classes de conjugaisons, je pense que c'est vrai.

    1) La bijection doit envoyer la classe du neutre sur la classe du neutre. C'est parce que dans la table de caractères, c'est la seule colonne dont tous les éléments sont des entiers strictement positifs.

    2) En particulier si $G$ et $H$ ont la même table de caractères (avec notre définition) alors les groupes sont de même taille. C'est parce que $|G|= \sum_{\chi\in \mathrm{Irr}(G)}\chi(1)^2 = \sum_{chi\in \mathrm{Irr}(G)} \phi(\chi)(f(1))^2 = \sum_{\chi'\in \mathrm{Irr}(H)}\chi'(1) ^2= |H|$.

    3) Maintenant si $c$ est une classe de conjugaison, les relations d’orthogonalité des colonnes nous donnent $\frac{|G|}{|c|} = \sum_{\chi}\chi(c)^2 = \sum_{\chi}\phi(\chi)(f(c))^2 = \frac{|H|}{|f(c)|}$.
  • @commut
    Vu. Tout est bien qui finit bien. Juste un petit truc : je suppose qu'au lieu de $\sum_\chi \chi(c)^2$, tu as voulu dire $\sum_\chi |\chi(c)|^2$ ; en le sens $|z|^2 = z\overline z$.

    Et donc plus de question. Ah si. Pour un entier $m >= 1$, je considère la présentation :
    $$
    H_m = \langle x^m = y^m = z^m = 1,\quad [x,y] = z,\quad [x,z] = [y,z] = 1\rangle
    $$
    Avec $m = p$ premier, c'est celle que tu m'as fournie pour $H_p$. Et j'ai constaté expérimentalement que $H_m$ est fini d'ordre $m^3$. Je suppose que tu connais cela ?
  • Merci Claude, oui c'est exactement ça la formule est : $\frac{|G|}{|c|} = \sum_{\chi}|\chi(c)|^2 = \sum_{\chi}|\phi(\chi)(f(c))|^2 = \frac{|H|}{|f(c)|}$.

    Pour ta seconde remarque, je n'y avais jamais pensé. Je pense que c'est vrai parce que les relations entrainent que à un élément du centre près $xy = yx$. Donc les éléments du groupes sont tous les $x^\alpha y^\beta z^\gamma$ où les entiers $\alpha, \beta$ et $\gamma$ vont de $0$ à $m$.

    Mais je ne sais pas si ces groupes d'ordre $m^3$ sont spéciaux (sans jeu de mot car les deux $p$-groupes sont appelés extra-spéciaux), ou même s'ils ont un nom ?
  • Bien compris pour la structure des groupes non abéliens d'ordre $p^3$. Il faudra que je me plonge dans la détermination de leur table de caractères (bah oui y en a qu'une !) Et je n'ai pas eu le temps de regarder ces histoires de déterminant de Dedekind mais ça a l'air sympa.
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