Représentation régulière, algèbre de groupes

Hello,
Ici je m'inspire d'une part du fil http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,1590352,1590352#msg-1590352, et en particulier du post http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,1590352,1590352#msg-1590372 de MathCoss. Et d'autre part, de la proposition 8, section 2.7 (Décomposition explicite d'une représentation linéaire), pages 35-36 de J.P. Serre (Représentations linéaires des groupes finis). Je vais d'ailleurs essayer d'en suivre un peu près les notations, ou plutôt d'être cohérent avec ses notations, car le contexte n'est pas tout-à-fait de même.

De quoi s'agit-il ? Un groupe fini $G$ est fixé. On considère une représentation irréductible $(W, \rho_W)$ de $G$ sur $k = \C$ et on veut EXPLICITER $d$ représentations isomorphes à $W$ qui figurent dans la représentation régulière en utilisant l'algèbre de groupe $k[G]$ :
$$
k[G] = \bigoplus_{g \in G} k\varepsilon_g
$$
Il s'agit de quelque chose de classique. Sauf que je n'ai pas envie de dire ``d'après le théorème de Wedderburn sur les algèbres semi-simples, alors patati-patata''. J'ai envie de reprendre des choses en charge mais pour l'instant, je ne sais pas dans quel ordre procéder. Je pense tenir les bons ingrédients mais reste à réaliser le plat.

Je note $\chi$ le caractère de la représentation $\rho_W$, $d = \chi(1)$ la dimension de la représentation et
$$
e = e_\chi = {d \over \#G} \sum_{g \in G} \chi(g^{-1}) \varepsilon_g
$$
D'où sort ce $e$ ? Bonne question. Je réponds : vu par exemple dans http://www.maths.gla.ac.uk/~abartel/docs/reptheory.pdf, th. 3.15 page 17.

Des propriétés à montrer et des questions (que je me pose) :

1) $e$ est un idempotent central de $k[G]$. Je note $J = k[G]e = ek[G]$ l'idéal engendré ; c'est un $G$-module (on verra plus tard que $J$ est de dimension $d^2$ avec une base explicite).

2) Comment amener $e_\chi$ ? Note : au début, j'avais pris $\chi(g)$ au lieu de $\chi(g^{-1})$ i.e. $\chi^{-1}$ à la place de $\chi$ et cela n'a pas fait ce que je voulais.

On se donne une base de $W$ ce qui permet de voir $\rho_W(g)$ comme une matrice $d \times d$. Cela a donc du sens de parler du scalaire $\rho_W(g)_{i,j}$. En suivant Serre, on pose :
$$
e_{i,j} = {d \over \#G} \sum_{g \in G} \rho_W(g^{-1})_{j,i}\ g\cdot e
$$
Attention à l'inversion $(j,i)$.

Je liste en vrac des propriétés (je n'en ai montré aucune). Elles ne sont peut-être pas dans l'ordre.

3) $e_{i,j} e_{j,k} = e_{i,k}$ et $e_{i,j} e_{j',k} = 0$ si $j \ne j'$. En particulier, les $e_{i,,i}$ sont des idempotents deux à deux orthogonaux.

4) $e = \sum_{i=1}^d e_{i,i}$.

5) On a :
$$
J = e_{1,1}k[G] \oplus \cdots \oplus e_{d,d} k[G] \qquad
\hbox { et les $e_{i,j}$ pour $i$ fixé forment une base de $e_{i,i}k[G]$}
$$

6) De la même manière :
$$
J = k[G] e_{1,1} \oplus \cdots \oplus k[G] e_{d,d} \qquad
\hbox {et les $e_{i,j}$ pour $j$ fixé forment une base de $k[G]e_{j,j}$}
$$
Et d'autres propriétés liées à l'action de $G$ sur les $e_{i,j}$.

Réponses

  • Quelques remarques un peu vagues.
    • La présence de l'inverse dans $\chi(g^{-1})=\overline{\chi(g)}$ est liée au fait qu'on calcule le produit scalaire avec le caractère $\chi$ de $W$.
    • En comparant l'expression de $e_\chi$ avec la preuve du théorème de Maschke, on doit réussir à ce convaincre que ce $e_\chi$ est une sorte de version universelle du projecteur sur la composante isotypique de type $W$.
    • La décomposition d'une représentation en composantes isotypiques est canonique et s'écrit : $\displaystyle V\simeq\bigoplus_{W\in\mathrm{Irr}(G)}\mathrm{Hom}_{\C G}(W,V)\otimes W$. Le premier facteur est un simple espace (de multiplicité peut-on dire), sans action de $G$. Cela conduit à une autre interprétation de l'inverse : dans $\mathrm{Hom}_\C(W,V)$, l'action de $g\in G$ s'effectue par précomposition de $g^{-1}$ (et composition par $g$ après) ; plus précisément, $(g\cdot f)(w)=\rho_V\bigl(f(\rho_W(g^{-1})w\bigr)$.
    • L'algèbre de groupe se décompose, comme algèbre et comme représentation, comme $\C G\simeq\bigoplus_{W\in\mathrm{Irr}(G)}W\otimes W^*$. Comme $G$-module à gauche, ça donne $\C G\simeq\bigoplus_{W\in\mathrm{Irr}(G)}W\otimes(W^*)_{\text{triv}}$ -- c'est-à-dire que $(W^*)_{\text{triv}}$ ne subit pas d'action de $G$, il joue le rôle d'un espace de multiplicité.
    • En termes matriciels, $W\otimes W^*$ est une algèbre de matrice $\mathcal{M}_d(\C)$. Comme module sur elle-même, c'est la somme directe de $d$ copies de $\C^d$. Une décomposition est donnée par les colonnes : le sous-espace $M_j$ des matrices dont tous les coefficients sont nuls sauf éventuellement sur la $j$-ème colonne est un facteur direct ; la matrice $p_i=\mathrm{diag}(0,\dots,0,1,0,\dots,0)$ (le $1$ en position $j$) est le projecteur sur $M_i$ parallèlement à la somme des autres. Je suppose que les $\rho(g)_{ii}$ viennent de là, c'est-à-dire que $e_{i,i}$ doit être $p_i$ après identification convenable.
    • L'inversion $(j,i)$ doit venir du fait qu'on considère $\mathrm{Hom}_{\C}(W,?)$ ou $W^*\otimes?$, c'est-à-dire que c'est la représentation duale qui intervient avec ses matrices transposées.
    Je ne sais pas si ça éclaire ou si ça obscurcit...
  • Une remarque plus déplaisante : étant donné un groupe fini $G$, décrit comme on veut, les matrices $\rho_W(g)$ ne sont pas données. En même temps qu'un sous-espace explicite de $\C G$, ce serait bien de construire la représentation à partir du caractère seul. La difficulté du calcul illustre la différence entre connaître la table de caractères, qui en principe contient toute l'information, et connaître les représentations.
  • @MathCoss
    Disons que cela m'a permis de réfléchir et je pense avoir compris les premiers points de ton (premier) post. Et j'ai surtout constaté que j'avais brûlé une étape dans Serre : il faut d'abord être clair sur la section 2.6 (Décomposition canonique d'une représentation) avant de se frotter à la section 2.7. En conservant mes notations i.e. $\chi$ est un caractère irréductible de dimension $d=\chi(1)$, on introduit pour tout $G$-module $V$ un endomorphisme $p_\chi$ de $V$
    $$
    p_\chi(x) = {d \over \#G} \sum_{g \in G} \chi(g^{-1}) \ g\cdot x, \qquad x \in V
    $$
    Alors $p_\chi$ est un projecteur. C'est le théorème 8 p. 34 dans Serre. Cela se prouve en montrant que la restriction de $p_\chi$ à un sous-$G$-espace irréductible $W'$ de $V$, de caractère $\chi'$, est une homothétie de rapport
    $$
    {d \over \dim W'} \langle \chi | \chi' \rangle = \cases {1 &si $W' \simeq W$ \cr 0 &sinon}
    $$
    Et on a $\text{Id}_V = \sum_\chi p_\chi$, cf Serre.

    Et dans le cas de $V = \C[G]$, c'est facile de voir que $p_\chi$ est la multiplication par $e_\chi$ :
    $$
    p_\chi = e_\chi \times \bullet = \bullet \times e_\chi
    $$
    L'égalité de droite i.e. le fait que $e_\chi$ soit central résulte d'un simple calcul plus général : pour n'importe quelle fonction centrale $f : G \to \C$, l'élément $\sum_{g \in G} f(g) \varepsilon_g$ de $\C[G]$ est central.

    Bilan : ok sur le fait que $e_\chi$ est un idempotent central et la décomposition est acquise :
    $$
    \C[G] = \bigoplus_\chi \C[G]e_\chi
    $$
    Note : lorsque l'on écrit que $e_\chi$ est idempotent, on tombe sur l'identité, pour un caractère irréductible $\chi$ :
    $$
    {\#G \over \chi(1)} \chi(g) = \sum_{h \in G} \chi(h) \chi(h^{-1}g)
    $$
    Il me reste à décomposer chaque $\C[G]e_\chi$ en suivant la section 2.7 de Serre (le coup des $e_{i,j}$), en disposant de la représentation $\rho_W$ déterminée de manière matricielle sur une base de $W$.

    Ce que je veux obtenir, c'est l'équivalent de http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,1590352,1590352#msg-1590372, de manière automatique. Tu n'as pas expliqué d'où sortaient tes combinaisons linéaires ad-hoc d'éléments de $\C[S_3]$.
  • Bonjour,

    J'ai cherché hier soir une preuve directe du fait que $e_\chi$ est idempotent central.
    J'y étais parvenu, non sans mal, pour une représentation de degré $1$ de petit joueur. :-D
    Je vois que j'aurais pu chercher très longtemps le cas général !
  • Salut,

    C'est amusant que le fait que $\varepsilon_\chi$ soit idempotent ne viens pas tout seul. Je suis tombé également sur la relation
    $$
    {\#G \over \chi(1)} \chi(g) = \sum_{h \in G} \chi(h) \chi(h^{-1}g)
    $$
    Et j'ai essayé de la déduire directement comme Gai requin, et je n'ai pas réussi (avec la représentation trivial ça fonctionne bien :)) ! Et j'ai relu le théorème 8 (et tout viens du lemme de Schur ) Par contre, le caractère central, là ça va.

    Pour les premiers point de Math Coss, Serre renvoie à un exercice page 35. juste avant la section 2.7.

    @Math coss : Par contre, je n'ai pas compris l'histoire de sans action. Tu dis sans action et ensuite du défini une action $(g\cdot f)(w)=\rho_V\bigl(f(\rho_W(g^{-1})w\bigr)$. J'ai loupé un étage ?

    (le $g^{-1}$ est obligatoire si on veut obtenir un morphisme).
  • Eh bien, je n'ai rien expliqué parce que c'était ad hoc, justement. Enfin, les vecteurs correspondant à la représentation triviale et à la signature viennent de l'application de $p_\chi$, mais les autres ont été trouvés un peu au hasard. Plus précisément, pour un vecteur de la forme $\sum_{g\in\mathfrak{S}_3}x_ge_g$, le fait d'être orthogonal à $e_{\mathrm{triv}}$ et $e_{\varepsilon}$ impose $x_{()}+x_{(123)}+x_{(132)}=x_{(12)}+x_{(13)}+x_{(23)}=0$. Avec ces contraintes, j'ai cherché des vecteurs simples $v$ qui engendrent une sous-représentation de dimension $2$ en testant la dimension de l'espace engendré par les $\rho_{\mathrm{reg}}(g)v$ ($g\in\mathfrak{S}_3$), où $\rho_{\mathrm{reg}}$ est la représentation régulière préalablement calculée. Pas glorieux...
  • @moduloP : La phrase sur l'interprétation est vraiment vague mais les deux parties sont cohérentes. Il faut distinguer $\mathrm{Hom}_{\C}(W,V)$ et $\mathrm{Hom}_{\C G}(W,V)$ : la première représentation admet bien une vraie bonne action de $G$, la seconde est l'espace des points fixes (donc action triviale ou, pour ainsi dire, pas d'action). Le lien entre les deux parties est bien vague !
  • Oui, ne pas brûler les étapes ! D'abord la section 2.6. Dans le cadre de $\C[G]$, je pense que c'est ok pour moi. Et il faut s'occuper de la section 2.7 i.e. des $e_{i,j}$ pour $1 \le i, j \le d$. C'est évident que $e_\chi = \sum_i e_{i,i}$. Les ingrédients sont dans la proposition 8 (énoncé + preuve). Faire attention à la gauche et à la droite. Il y a un certain nombre de relations vérifiées par les $e_{i,j}$ (je n'ai pas fourni toutes les relations que ``je connais'').

    On a par exemple $e_{i,j} = e_{i,j} e_{j,j}$ qui montre que $e_{i,j} \in \C[G]e_{j,j}$. Ici, je fixe $j$ et je fais agir $G$ à gauche comme il se doit sur $\C[G]e_{j,j}$. Et la relation :
    $$
    g \cdot e_{i,j} = \sum_{k=1}^d \rho_W(g)_{k,i} e_{k,j}, \qquad i = 1, 2, \cdots, d
    $$
    montre simultanément que $(e_{1,j}, e_{2,j}, \cdots, e_{d,j})$ est une base de $\C[G]e_{j,j}$ et que la matrice de la multiplication par $g$ dans cette base est la matrice $\rho_W(g)$. Ce qui fait que $\C[G] e_{j,j} \simeq W$ en tant que $G$-modules.

    Ci-dessous, j'ai pris la représentation hyperplane de $S_3$. I.e. celle sur $x_1 + x_2 + x_3 = 0$. Elle est irréductible de dimension 2. J'ai pris $(e_1-e_2, e_1-e_3)$ comme base de cet hyperplan, ce qui m'a donné explicitement $\rho_W$ puis ...etc...

    (1, 2, 3)
    [-1 -1]
    [ 1  0]
    X^2 + X + 1
    
    (1, 2)
    [-1 -1]
    [ 0  1]
    X^2 - 1
    
    3e11 = Id(S3) - (1, 3, 2) + (2, 3) - (1, 2)
    3e12 = -(1, 2, 3) + (1, 3, 2) - (2, 3) + (1, 3)
    3e21 = (1, 2, 3) - (1, 3, 2) - (1, 2) + (1, 3)
    3e22 = Id(S3) - (1, 2, 3) - (2, 3) + (1, 2)
    

    Evidemment, j'ai des petits soucis en programmation. Mais un petit souci en programmation, c'est en fait un gros souci. Bien entendu, $\C$ cela n'existe pas et je dois le remplacer par une extension cyclotomique assez grande. C'est plus facile à dire qu'à faire. Evidemment, pour le groupe symétrique $S_n$ pas de problème puisque l'on peut prendre $\C = \Q$.
  • @Math coss : Ok, j'avais bien loupé un étage ... sur $\def\Hom{\text{Hom}}$ $\Hom_{\C G}(W,V)$ c'est les applications linéaires compatibles avec les actions et $\Hom_\C(W,V)$ c'est toute les applications linéaires et tu dis que $\Hom_{\C G}(W,V)$ est l'ensemble des points fixes de $\Hom_\C(W,V)$ sous l'action.
  • Histoire de faire un petit diagramme xypic. Je continue ici du même côté i.e. $k[G]e_{j,j}$ en faisant agir $G$ à gauche. On verra plus tard de l'autre côté. Ne pas oublier que $e_{k,j} \in k[G]e_{j,j}$ puisque $e_{k,j} = e_{k,j} e_{j,j}$. Une fois le plein de relations réalisé sur les $e_{i,j}$, on obtient deux isomorphismes réciproques l'un de l'autre:
    $$
    \xymatrix @C = 2cm {
    k[G]e_{i,i}\ar@/^1pc/[r]^{\bullet \times e_{i,j}} & k[G]e_{j,j} \ar@/^1pc/[l]^{\bullet \times e_{j,i}}
    }
    $$
    Je me doute que tout cela n'est pas assez structurel. Pour le structurel, on verra plus tard.
  • Dans le genre, voici un exercice raisonnable : construire la représentation de $\mathfrak{A}_5$ de dimension $3$ (autrement dit, trouver les matrices des symétries de l'icosaèdre à partir de la table de caractères).

    Pour moi, le plus dur, c'est de séparer des représentations irréductibles dans une composante isotypique. De façon générale, l'arme fatale semble être l'algorithme Meat-Axe introduit par Parker en 1984 (je n'arrive pas à trouver l'article original).
  • @MathCoss
    J'ai bien vu ton dernier post. Mais pour l'instant, ce n'est pas mon objectif et en fait ce que je veux réaliser est beaucoup plus élémentaire. Pour ne rien te cacher, je suis encore sur les pages 35-36 de Serre (proposition 8, section 2.7). Les numéros de pages (et le temps passé de ma part là dessus) devraient achever de te convaincre que je fais vraiment dans l'élémentaire. On pourrait penser qu'il n'y a qu'à faire du coupé-collé de Serre. C'est un peu plus compliqué que cela.

    D'abord, il faut bien comprendre, dans cette fameuse proposition 8, que les images des projecteurs ne constituent pas ``la'' décomposition en sous-espaces irréductibles. Il n'y en a pas de canonique comme déjà dit. Il faut considérer des systèmes ``transverses'' (terminologie de mézigue) à ces images. Je me comprends.

    Et dans le contexte dans lequel je me suis placé, les images des projecteurs sont les $e_{ii}k[G]$. Et il y a un système transverse qui nous tend les bras à savoir le système constitué $k[G]e_{ii}$. En un certain sens, le contexte de la décomposition de $k[G]$ est plus simple puisqu'il contient certains ingrédients canoniques. Les $e_{ii}$ sont des idempotents (non canoniques) dont j'ai déjà parlé (et que tout me monde a oublié, normal, mais ils réapparaissent ci-dessous).

    Je peux comprendre que CI-DESSUS, cela puisse être obscur. Mais ci-dessous, je reprends des choses.

    Et figure toi que j'ai réussi à placer ton $W \otimes_k W_{\rm triv.}^*$, cf plus loin. Rappel : $(W, \rho_W)$ est une représentation irréductible de dimension $d$ de $G$, de caractère $\chi$, qui fournit un idempotent central $e = e_\chi \in k[G]$ :
    $$
    e = e_\chi = {d \over \#G} \sum_{g \in G} \chi(g^{-1}) \ \varepsilon_g
    $$
    Alors, on dispose du $G$-isomorphisme que voilà (pas besoin de prendre une base de $W$, youpi) :
    $$
    \Phi : W \otimes_k W_{\rm triv.}^* \ni w \otimes \mu \longmapsto {d \over \#G} \sum_{g \in G} \mu(g^{-1} w) ge \in k[G] e
    $$
    Et si je prends une base $(e_i)$ de $W$, alors $\Phi$ transforme $e_i \otimes e_j^*$ en $e_{ij}$, les $e_{ij}$ dont j'avais déjà parlé. Je trouve cela rassurant.

    On peut même en faire du $\text{Hom}$ si on veut suivre le produit versus la composition :
    $$
    \Phi : \text {Hom}_k(W, W_{\rm triv)} \ni u \longmapsto {d \over \#G} \sum_{g \in G} \text{tr} \big(u \circ \rho_W(g^{-1})\big) ge \in k[G] e
    $$
    Petite prise de tête : $\Phi(u \circ v ) = \Phi(u) \Phi(v)$ ou $\Phi(u \circ v ) = \Phi(v) \Phi(u)$. A l'arrivée, cela se passe dans l'idéal (bilatère) engendré par l'idempotent $e$. La gauche et la droite, c'est ma hantise.

    Voilà, voilà. Cela fait plus structurel mais je ne suis pas convaincu que cela soit plus facile à comprendre. En tout cas, je jette pas les $e_{ij}$ qui viennent plus ou moins de Serre (ce sont, à quelque chose près, les $p_{ij}$ de Serre, qui sont d'ailleurs notés $p_{\alpha,\beta}$).

    Pour résumer, j'avance à pas de bébés (et donc je me couche des notes !) mais j'ai tout mon temps.
  • Ah, bravo ! Tu as élucidé le lien entre les matrices des éléments de $g$ sur $W$ et les $e_{ij}$ de Serre. Oui, c'est très rassurant que $e_i\otimes e_j^*$ corresponde à $e_{ij}$ !

    Pour ma part, hier, j'ai commencé une usine à gaz pour essayer de construire les représentations à partir de l'algèbre de groupe et de la table de caractères (que Gap donc Sage calculent). Enfin, pour l'instant, il y a en gros les vestiaires pour se changer : les composantes isotypiques, c'est-à-dire les images des $e_\chi$ vus comme sous-espaces dans $\C G$. Et là, je voudrais faire deux choses : 1) écrire les matrices de taille $\chi(1)\times\chi(1)$, c'est plus raisonnable que $|G|\times|G|$, je devrais y arriver au bout d'un moment ; 2) décomposer les composantes isotypiques en irréductibles, et là, il faut quelque chose – on ne connaît pas les matrices des représentations, c'est le but. Est-il raisonnable de résoudre $\phi\rho(g)=\rho(g)\phi$ pour $g$ dans un ensemble de générateurs de $G$ ? Faut-il comprendre Meat-Axe ?

    C'est vraiment une usine à gaz parce que ça prend déjà plusieurs secondes pour la représentation de dimension $3$ de $\mathfrak{A}_5$ alors ça risque de plafonner avec $\mathrm{PSL}_2(\mathbf{F}_7)$... De toute façon, personne ne fait comme ça, c'est fichu d'avance, il faut partir de choses plus petites (des sous-groupes et on induit, ou des actions combinatoires ou géométrique et on linéarise, ou des produits tensoriels, ou (plus étonnant) des représentations linéaires qu'on transforme en actions combinatoires en regardant l'action sur des vecteurs, ce qui permet éventuellement de linéariser et au passage de changer de caractéristique).
  • @Math Coss

    Plusieurs petites choses.

    1) Faire remonter le fil avant qu'il ne soit trop englouti dans ...

    2) Je n'avais jamais entendu parler de Meat-Axe (avant que tu n'en parles). Et j'ai vérifié, dans le système de Calcul Formel que j'utilise, que c'est une des pièces maîtresses en représentation (effective) des groupes finis. J'ai fait un petit peu joujou avec. Cela m'impressionne.

    3) Tu m'as sauvé la vie avec ton $W \otimes_k W^*_{\rm triv}$. Je t'assure. Mais j'ai voulu en faire un Hom. Et dans mon dernier post, je mentionne $\text{Hom}_k(W, W_{\rm triv})$. Funeste erreur ; il s'agit de $\text{Hom}_k(W_{\rm triv}, W)$. Il faut vraiment être très très soigneux dans ces histoires.

    4) J'ai découvert dans Bourbaki, Algèbre VIII (Modules et anneaux semi-simples), toute une section (à la fin), consacrée aux représentations linéaires d'un groupe fini sur un corps $k$ de caractéristique 0 (ou disons dont la caractéristique ne divise pas $\#G$). Je parle d'une édition relativement récente (totalement refaite). Petit hic : cette section arrive vers la page 400. J'y ai appris pas mal de choses. Par exemple la caractérisation fonctionnelle des caractères irréductibles :
    $$
    f(g) f(g') = {f(1) \over \#G} \sum_h f(hgh^{-1}g')
    $$
    Je veux dire par là qu'étant donné $f : G \to k$, alors à un scalaire près, c'est un caractère irréductible si et seulement si $f$ vérifie l'équation ci-dessus. Utilisation astucieuse du lemme de Schur. Ce qui m'attriste un peu, c'est que je n'ai pas pu en déduire que $e_\chi$ est idempotent (l'idempotence équivaut à une autre relation fonctionnelle et découle aussi du lemme de Schur). Je m'y prends peut-être mal.

    Voilà, voilà, les nouvelles du front. Et ton usine à gaz dont tu parlais dans le dernier post ? Arrêtée ?
  • Une question bête : au final, en deux lignes, c'est quoi le miracle qui fait que la projection de la représentation régulière $\varepsilon : \mathbb{C}[G]\to \text{End}(\mathbb{C}^{|G|})$ sur la sous-représentation composante isotypique $\rho : \mathbb{C}[G]\to \text{End}(V)$ est donnée par l'idempotent central $e_{tr(\rho)}= \frac{1}{|G|} \sum_g tr(\rho(g^{-1})) \varepsilon(g)$ ?
  • @reuns : Il y a une inexactitude dans ton message : si $\rho:G\to\mathrm{GL}(V)$ est une représentation, son prolongement à $\C[G]$ est à valeur dans $\mathrm{End}_\C(V)$ et pas $\mathrm{GL}(V)$. Le fait qu'un idempotent central détermine pour chaque représentation $V$, une projection sur une sous-représentation, c'est plus ou moins évident :
    • la représentation détermine un morphisme d'algèbre donc si $\varepsilon^2=\varepsilon$ dans l'algèbre de groupe, son image $p$ dans $\mathrm{End}_\C(V)$ est un projecteur ;
    • comme $\varepsilon$ est central, $e_g\varepsilon=\varepsilon e_g$ donc $\rho(g)p=p\rho(g)\in\mathrm{End}_\C(V)$ donc $p$ est un morphisme de représentation.
    Il en résulte que le noyau et l'image de $p$ sont des sous-modules.

    Mais ça, c'est la partie facile, je ne sais pas si c'est bien ta question. Ce qui est un peu plus astucieux, c'est de montrer que $\varepsilon$ est bien un idempotent central et d'identifier que son image est la composante isotypique donnée par $\chi$ (au moins s'il est irréductible).

    @Claude : Ravi d'avoir pu t'être utile.

    Sinon, oui, ces jours-ci j'ai laissé ça en stand-by. Mais je viens de constater après lecture de ton message que MeatAxe est implémenté dans Sage (normal ! c'est dans GAP qui est dans Sage !). On peut donc sans programmer faire les choses suivantes pour décomposer l'algèbre de groupe en $G$-modules :
    1. écrire les matrices des générateurs de $G$ sur un corps fini de caractéristique assez grande et qui contient les racines correspondant à la table de caractères ;
    2. calculer le groupe matriciel engendré par ces générateurs ;
    3. décomposer le module en question en une instruction !
    Pour $\mathrm{PSL}_2(\mathbf{F}_7)$ (groupe simple d'ordre $168$), ça décompose sur $\mathbf{F}_{71}$ en quelques secondes (une dizaine ?). Évidemment, c'est tricher et je voudrais faire quelque chose qui décompose effectivement « ex nihilo » – mais il faut une idée que je n'ai pas...
  • Si on sait que $e_{tr(\rho)} $ est un idempotent central alors ça réduit le problème à chercher son noyau ou son image.
    Mais c'est quoi l'idée générale à retenir qui permet de montrer toutes ces propriétés non-triviales de $e_{tr(\rho)} = \frac{1}{|G|} \sum_g tr(\rho(g^{-1})) \varepsilon(g)$ ? L'orthogonalité des caractères permet de se ramener aux représentations irréductibles, ensuite quoi d'autre ?
    [small]Dans le cas d'un groupe diédral $D_n$ je pourrais m'en sortir en montrant que les caractères non-abéliens sont induits par un sous-groupe abélien. Je devrais pouvoir étendre ça aux groupes solvables. Mais je n'arrive pas à me représenter le truc qui fait que ça marche en général.[/small]
  • Soit $\chi$ un caractère irréductible et soit $(\rho,V)$ une représentation quelconque. On pose $p_{\chi} = \frac{\chi(1)}{|G|} \sum_g \chi(g^{-1})\rho(g) = \frac{\chi(1)}{|G|} \sum_g \overline{\chi(g)}\rho(g)$. On vérifie que c'est un morphisme de représentations (par invariance de $\chi$ par conjugaison).

    Si $\rho$ est irréductible, $p_\chi$ est donc une homothétie. Si on calcule son rapport grâce à la trace, on voit que c'est $1$ ou $0$ selon que $\chi$ est le caractère associé à $\rho$ ou pas (relations d'orthogonalité). L'image est respectivement $V$ ou $\{0\}$.

    Si $\rho$ est quelconque, on la décompose en somme directe d'irréductibles (Maschke) et on applique le premier cas : l'image est la somme des irréductibles de $V$ qui ont pour caractère $\chi$ et la restriction à cette somme est l'identité. C'est bien la projection sur la composante isotypique de type $\chi$.

    Si on lit/relève ça dans l'algèbre de groupe, on obtient les propriétés mirifiques de $e_\chi$.

    Edit : correction de l'expression ($\chi(1)$).
  • Math coss, je pense qu'il faut un $\chi(1)$ dans la formule. $\frac{\chi(1)}{\#G} \sum_{g \in G} \chi(g^{-1}) \rho(g)$.

    Sinon je voulais faire la construction de Serre dans le cas de $S_3$ et j'ai abandonné (faut vraiment faire la calcul sur un logiciel).
  • $\def\tr{\text{tr}}\def\End{\text{End}}$@MathCoss
    Je viens de mettre un bémol à $W \otimes W_{\rm triv}^*$. Rappel : $(W, \rho)$ est une représentation irréductible de dimension $d$ d'un groupe fini $G$ sur un corps algébriquement clos $k$, de caractère $\chi$. Il s'agissait d'expliciter le fait qu'elle figure $d$ fois dans la représentation régulière. En fait, inutile de se forcer à l'expliciter car c'est déjà fait dans Bourbaki (il appelle cela l'inversion de Fourier).

    Et la réponse tient en une ligne en définissant $\Phi$ où $k[G]$ est l'algèbre de groupes de base $(\varepsilon_g)_g$ :
    $$
    \Phi : \End_k(W) \to k[G], \qquad \qquad
    u \longmapsto {d \over \#G} \sum_g \tr\big( \rho(g^{-1} \circ u\big) \varepsilon_g
    $$
    Pour l'instant, on ne s'inquiète pas de structure de $G$-module sur l'espace (de matrices) de départ (il y en aura deux, une à gauche, une à droite, comme sur $k[G]$ d'ailleurs).

    Alors $\Phi$ vérifie $\Phi(u \circ v) = \Phi(u) \Phi(v)$. On note $e_\chi =\Phi(\text{Id}_W)$. C'est un idempotent central et $\Phi$ est à valeurs dans l'idéal bilatère $k[G] e_\chi$. Et l'on a
    $$
    \Phi(\rho(g)) = g e_\chi = e_\chi g \qquad \hbox {si bien que } \qquad
    \Phi(\rho(g) \circ u) = g\Phi(u), \qquad \Phi(u \circ \rho(g)) = \Phi(u)g
    $$
    Vu les deux égalités de droite, on comprend maintenant quelles sont les deux structures de $G$-module à gauche et à droite qu'il faut installer sur $\End_k(W)$. Et alors $\Phi$ est un isomorphisme de $G$-bi-module(s) de $\End_k(W)$ sur l'idéal bilatère $k[G]e_\chi$.

    En terme de produit tensoriel, c'est préférable de considérer $W \otimes_k W^*$ au lieu de $W \otimes_k W_{\rm triv}^*$ et de mettre deux strucures de $G$-module : une à gauche sur le facteur gauche et une à droite sur le facteur droit, et ceci comme on le pense. Si bien que la lecture de $\Phi$ devient :
    $$
    w \otimes \mu \longmapsto {d \over \#G} \sum_g \mu(g^{-1} w) \varepsilon_g
    $$
    Cette manière de voir (grosso-modo Bourbaki) évite la pollution due à l'utilisation d'une base de $W$. La considération d'une base de $W$ fait que $\End_k(W)$ est vraiment un espace de matrices.
    Et les anciens $e_{ij}$ du côté de $k[G]$ s'obtiennent en balançant par $\Phi$ la base canonique de $\End_k(W)$.

    Je n'ai compris vraiment cela (histoire de gauche/droite) que fort tard. Et j'avais commencé à écrire des notes (que j'attache) qui sont maintenant à mettre à la poubelle (c'est un m.rd.er pas possible là-dedans). Mais elles ont été utiles pour implémenter. A quoi cela sert d'implémenter ? A constater que l'on n'a pas tout compris et parfois rien compris. Cela a été un peu mon cas ici. En résumé : tout est dans Bourbaki Algèbre VIII (Modules et anneaux semi-simples). Il faut juste s'accrocher au début pour le lire.
  • $\def\tr{\text{tr}}\def\End{\text{End}}$Hello,
    Suite au post de Poirot http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,1598234,1598294#msg-1598294 concernant l'absence de question (dans le post d'Apollonius concernant la notion d'anneau double), je me rends compte que mon post précédent ne comportait pas de véritable question. Je m'empresse de corriger le tir.

    Soit $(W, \rho)$ une représentation irréductible de dimension $d$ d'un groupe fini $G$ sur un corps algébriquement clos $k$ de caractéristique $0$. Pour $u,v \in \End_k(W)$, il faut montrer que :
    $$
    {\#G \over d} \tr(u \circ v) = \sum_{g \in G} \tr\big(\rho^{-1}(g) \circ u\big) \tr\big(\rho(g) \circ v\big) \qquad\qquad (\star)
    $$
    Pour l'instant, je ne sais pas le prouver. Si quelqu'un a une idée, merci (je me doute qu'il faut utiliser le lemme de Schur). Forte récompense.

    PS1 : comment puis je savoir que l'égalité $(\star)$ est vraie si je ne l'ai pas prouvée ? Tout simplement parce qu'elle figure parmi les 6 relations d'orthogonalité de Schur page 399 de Bourbaki (Modules et anneaux semi-simples). Et ce dernier utilise les résultats qui figurent dans les sections précédentes (normal), en particulier la structure des anneaux semi-simples (p. 137). Je suis donc à la recherche d'une preuve directe dans le cadre des représentations linéaires d'un groupe fini.

    PS 2 : dans le post d'Apollonius, certes il n'y a pas de question. Mais doit-on faire figurer une question lorsque l'on fait profiter le forum d'une nouvelle notion (la notion d'anneau double) ? Notion qui, ma foi, paraît prometteuse, pour autant que je puisse en juger. Ici, ce n'est pas du tout la même chose puisqu'il s'agit du terrain archi-rabattu des représentations linéaires d'un groupe fini. Je me devais donc de poser une question comme il est d'usage sur ce forum ; voilà qui est fait.
Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.