Catégories : produit cartésien

Bonjour,

après avoir lu de-ci de-là quelques articles/chapitres sur la théorie des catégories, j'ai décidé de m'y pencher sérieusement en me forçant à faire les preuves des énoncés. Comme base, j'utilise le cours du MPRI que j'ai trouvé ici : https://www.irif.fr/~mellies//mpri/mpri-ens/ens-mimram-td-A.pdf (c'est le TD 1, les autres suivront).

Pouvez-vous m'indiquer si mes réponses sont correctes ou non (ou d'autres remarques, pertinentes) ?

Voici pour l'instant ce que j'ai fait (il est tard je vais faire dodo :) ) (je mets la traduction des questions, je sais que certains sont allergiques à l'anglais par ici) :

1. Soit $(E, \le)$ un poset. On lui associe la catégorie dont les
objets sont les éléments de $E$ et telle qu'il existe un unique morphisme
entre les objets $a$ et $b$ ssi $a\le b$. Qu'est-ce qu'un objet terminal
et un produit dans cette catégorie ?


L'objet terminal est (l'éventuel) maximum de $E$ (remarque: il est "réellement
unique", et non pas "à unique isomorphisme près" à cause de la réflexivité de
$\le$).

Considérons $A$ et $B$ deux éléments de $E$ admettant un produit cartésien.
* On a $A\times B\le \min(A,B)$: en effet, $\pi_A:A\times B \to A$ et $\pi_B:A\times
B \to B$, autrement dit $A\times B \le A$ et $A\times B \le B$.
* D'autre part, $\min(A,B) \le A\times B$. En effet, $\min(A,B)\le A$ et $\min(A,B) \le B$,
ainsi par la propriété du produit cartésien, il existe un morphisme $h:\min(A,B)
\to A\times B$. Conclusion, on a $\min(A,B) = A\times B$.

(Question bête: existe-t-il des poset où il n'y a pas de minimum ?)


2. Montrer que la catégorie Set est cartésienne.

L'existence de produit cartésien "catégorique" est donné par le produit
cartésien "ensembliste". Les objets terminaux sont les singletons. Set est
donc bien une catégorie cartésienne.

(Remarque/question bête: il existe une unique application de $\emptyset$ vers $\{1\}$(?))

3. Montrer que deux objets terminaux sont isomorphes.

Soient $A$ et $B$ deux objets terminaux. Alors il existe un unique morphisme
$\mu: A\to B$ et un unique morphisme $\tau:B\to A$. $\mu \circ \tau$ est
morphisme $B\to B$; or $B$ étant terminal, il existe un unique morphisme $B\to
B$. Mais on a déjà $id_B: B\to B$, ainsi $\mu\circ \tau = id_B$. De même $\tau
\circ \mu = id_A$.

Les objets terminaux sont donc uniques à unique isomorphisme près.

4. Montrer de même que le produit cartésien de deux objets est défini à isomorphism près

Soient $(P, \pi_A,\pi_B)$ et $(P',\pi_A', \pi_B')$ deux produits cartésiens de $A$
et $B$.

Il existe alors un unique $h:P \to P'$ et un unique $h':P'\to P$ faisant
"commuter le diagramme". De la même façon qu'en 3., $h\circ h' = id_{P'}$ et
$h'\circ h = id_{P}$.

5. Comment montrer la question précédente en utilisant la question 3.?

Soient $A$ et $B$ deux objets de la catégorie $\mathcal C$. On considère la catégorie $\mathcal D$ dont:
* les objets sont les triplets de la forme $(C, f, g)$ où $C$ est
un objet de $\mathcal C$, $f:C\to A$ et $g:C\to B$.
* les morphismes $h:(C,f,g) \to (C',f',g')$ sont les morphismes de $\mathcal C$
$h: C\to C'$ vérifiant $f'\circ h = f$ et $g' \circ h = g$.

Un objet terminal de $\mathcal D$ est alors un produit cartésien $A\times B$
dans $\mathcal C$.

Edit: changement du titre, je mettrai les monoïdes dans un autre post.

Réponses

  • sebsheep a écrit:
    (Question bête: existe-t-il des poset où il n'y a pas de minimum ?)

    Une relation d'ordre n'est pas nécessairement totale.
    sebsheep a écrit:

    (Remarque/question bête: il existe une unique application de $\emptyset$ vers $\{1\}$(?))

    Pour tout ensemble $E$, il existe une unique application de $\emptyset$ vers $E$.
  • Merci pour ta réponse.

    Pour le minimum, je voulais dire "le minimum entre 2 éléments"... L'exemple "le plus sauvage" de poset que je connais est celui des parties d'un ensembles, muni de l'inclusion.
    Si deux ensembles $A$ et $B$ ne se comparent pas, on peut tout de même définir $\min(A,B) = A\cap B$... Est-ce vrai dans tous les posets ?
  • J'avais bien compris ta question et ma réponse vaut pour le minimum de deux éléments. Considère par exemple l'ensemble $\{ a, b \}$ muni de la relation $\leq$ définie par $x \leq y$ ssi $x = y$.
  • Ok merci (j'allais poster cet exemple avant de voir ta réponse : on prend l'ensemble $A$ des parties d'un ensemble, excepté $\emptyset$... l'intersection de deux sous-ensemble n'est alors pas forcément dans $A$) ! Pas d'autres remarques ?
  • Mes avancées de ce soir. La preuve pour "l'associativité" du produit est lourde je trouve... Y-a-t-il un moyen de faire "plus naturel" (de la même façon qu'on peut montrer l'associativité du produit de convolution en passant par la transformée de Fourier ou celle du produit matriciel en utilisant la composition d'application linéaire) ?

    6. Montrer que pour tout objet $A$ d'une catégorie cartésienne, les objets
    $1\times A$, $A$ et $A\times 1$ sont isomorphes.


    $A$ est un produit cartésien de $A\times 1$; il suffit de prendre pour
    $\pi_1$ l'unique morphisme de $A$ vers $1$ et pour $\pi_A$ de prendre $id_A$.
    En effet, si $C$ est un objet et $f:C\to 1$, $g:C\to A$, il suffit alors
    de prendre $h = g$ et ainsi, on a $f=\pi_1 \circ h$ et $g=\pi_A\circ h=h$ (car $\pi_A=id_A$);
    cette dernière condition impose l'unicité de $h$.

    Ainsi $A$ et $A\times 1$ sont isomorphes, de même pour $A$ et $1\times A$.

    7. Montrer que pour tout objet $A$ et $B$, $A\times B$ et $B\times A$
    sont isomorphes.


    On considère $(A\times B, \pi_A, \pi_B)$ et $(B\times A, \tilde\pi_B, \tilde
    \pi_A)$. Par la propriété universelle du produit cartésien, il existe un unique
    $\tilde h: A\times B \to B\times A$ et un unique $h: B\times A \to A\times B$
    tel que $\pi_X\circ h = \tilde\pi_X$, $\tilde \pi_X \circ \tilde h = \pi_X$ (pour $X=A, B$).

    Ainsi $h\circ \tilde h : A\times B$ et $\pi_X \circ h\circ \tilde h =
    \tilde\pi_X \circ \tilde h = \pi_X$. Or par la propriété universelle du produit
    cartésien, il n'existe q'une seul tel morphisme, donc $h\circ \tilde h =
    id_{A\times B}$. De même, $\tilde h\circ h= id_{B\times A}$. Donc $A\times B
    \simeq B\times A$.

    8. Montrer que pour tout objet $A$, $B$ et $C$, $(A\times B) \times C$
    est isomorphe à $A\times (B\times C)$.


    On peut décomposer les produits ainsi (peut-on faire des diagrammes en TeX sur
    le phorüm ?):
    (AxB) x C
      | \
      v  \
     AxB  \
      | \  \
      v  v  v
      A  B  C
      ^  ^  ^
      |  | /
      |  BxC
      |  ^
      | /
      Ax (BxC)
    
    On a donc un morphisme de $(A\times B) \times C \to B$ et un morphisme $(A\times B)\times C \to C$. Il existe donc un (unique) morphisme $(A\times B)\times C\to B\times C$ (faisant commuter le diagramme idoine). On a maintenant deux
    morphismes depuis $(A\times B)\times C$:
    * un vers $A$
    * un vers $B\times C$

    On peut donc trouver un (unique) morphisme $h:(A\times B)\times C \to A\times
    (B\times C)$ (faisant toujours commuter le diagramme idoine). On construit
    de la même façon $\tilde h:A\times (B\times C) \to (A\times B) \times C$.
    On vérifie de façon similaire à la question précédente que $h\circ \tilde h = id$
    et $\tilde h \circ h = id$.

    Donc $(A\times B)\times C \simeq A\times (B\times C)$.
  • \[\xymatrix{&&(A\times B)\times C\ar[dl]\ar[ddrr]\\&A\times B\ar[dl]\ar[dr]\\A&&B&&C\\
    &&&B\times C\ar[ul]\ar[ur]\\&&A\times(B\times C)\ar[uull]\ar[ur]}\]
  • Juste une remarque. Il est fructueux que quand tu as des bijections naturelles ensemblistes alors ça te donne immédiatement des isomorphismes canoniques entre leurs analogues dans diverses catégories.

    Par exemple, si tu as 4 ensembles $A,B, S, T$ avec des flèches $A\to S$ et $B\to T$ alors tu as un carré commutatif $$\begin{matrix}A\times B&& \to &&B\times A\\
    \downarrow&& && \downarrow \\
    S\times T &&\to && T\times S
    \end{matrix}$$ dont les flèches horizontales sont des bijections.
    En particulier cela implique pour $A=Hom(T_1, X )$, $B=Hom(T_1, Y)$, $S=Hom(T_2, X )$, $T=Hom(T_2,Y)$ avec $X,Y,T_1, T_2$ des objets d'une catégorie $C$ et une flèche $T_2\to T_1$ que les foncteurs $Hom(\bullet, X\times Y)$ et $Hom(\bullet, Y\times X)$ sont isomorphes et donc $X\times Y$ et $Y\times X$ sont canoniquement isomorphes.

    In fine, ça n'est rien d'autre que la preuve que tu as écrite, mais vue un tout petit peu différemment.
  • Pour montrer les isomorphismes, ne suffit-il pas de remarquer que les objets considérés sont solution du même problème universel ?
  • Re,

    Désolé de mon temps de réponse, je n'arrive pas à passer plus de temps sur le sujet...

    @GaBuZoMeu : j'ai bien tenté mais je n'arrive pas à vérifier que $(B\times A, \tilde \pi_B, \tilde \pi_A)$ vérifie la propriété universelle de $(A\times B, \pi_A, \pi_B)$. Dans Set je vois bien comment faire avec la fonction $swap: (x,y) \mapsto (y,x)$ : lorsque j'ai $f: C \to A$ et $g:C\to B$, il existe $\tilde h: C\to B\times A$ qui factorise $f$ et $g$, on peut alors considérer $h=swap \circ \tilde h$ qui donne bien un morphisme $C\to (A\times B, \pi_A,\pi_B)$.

    Mais pour une catégorie quelconque, on n'a pas forcément ce morphisme $swap$... Dis-je une bêtise ?


    @NoName : si je lis bien, tu considère comme acquis :
    * $Hom(T,X) \times Hom(T,Y) \simeq Hom(T, X\times Y)$, ça c'est bon j'arrive à le montrer.
    * si $Hom(\bullet, A) \simeq Hom(\bullet, B)$ alors $A \simeq B$ (et le "canoniquement" signifie qu'il n'y a qu'un seul isomorphisme ?). Là j'ai plus de mal, voilà où j'en suis :

    Dire que $Hom(\bullet, A) \simeq Hom(\bullet B)$ signifie qu'il existe une transformation naturelle $\eta: Hom(\bullet, A) \to Hom(\bullet, B)$ dont chaque composante est un isomorphisme. On peut alors considérer $\eta_A$ qui est alors une bijection entre $Hom(A,A)$ et $Hom(A,B)$; en particulier $id_A$ est envoyé sur un morphisme $\eta_A(id_A) : A \to B$. J'ai bien l'impression que c'est lui notre isomorphisme mais je n'arrive pas à montrer que $\eta_A(id_A)\circ \eta_A^{-1}(id_B) = id_B$ ni l'autre sens...
  • Attention, c'est $(B\times A, \tilde \pi_A, \tilde \pi_B)$ qui a la même propriété universelle que $(A\times B, \pi_A, \pi_B)$. Tout simplement, pour tout couple $(f,g)$ avec $f:C\to A$ et $g:C\to B$, il existe un unique $\tilde h : C\to B\times A$ tel que $f=\tilde \pi_A\circ \tilde h$ et $g=\tilde \pi_B\circ \tilde h$ (c'est bien la même chose que de dire que pour tout couple $(g,f)$ avec $g:C\to B$ et $f:C\to A$, il existe un unique $\tilde h : C\to B\times A$ tel que $g=\tilde \pi_B\circ \tilde h$ et $f=\tilde \pi_A\circ \tilde h$, non ?).
    On en déduit qu'il existe un unique isomorphisme $i: A\times B\to B\times A$ tel que $\tilde \pi_A\circ i=\pi_A$ et $\tilde \pi_B\circ i=\pi_B$.
  • Pour $Hom(T, A\times B)\simeq Hom(T,A)\times Hom(T,B)$ il n'y a rien à montrer si je puis dire, c'est la définition de $A\times B$. "Se donner une fleche dans $A\times B$ est équivalent à se donner une fleche dans $A$ et se donner une fleche dans $B$". Ou, dit encore autrement c'est la propriété universelle du produit.

    Pour le reste c'est Yoneda qui fait le travail. Se donner une fleche $\phi: X\to Y$ donne un morphisme de foncteur contravariants $\phi_*: h_X \to h_Y$. Ce morphisme est lui même fonctoriel au sens où $(\phi\circ \psi)_*=\phi_* \circ \psi_*$. Ici $h_X=Hom(\bullet, X)$. Autrement dit $*$ est un foncteur qui à $X$ associe $h_X$ et qui à $\phi$ associe $\phi_*$.
    Le lemme de Yoneda te dit que ce foncteur est pleinement fidèle. Autrement dit tous les morphismes de foncteurs entre $h_X$ et $h_Y$ sont donnés par un $\phi_*$ pour un unique $\phi: X\to Y$ (ta remarque sur $\eta(id_A)$ est bonne, et c'est la remarque clé pour la preuve de Yoneda).
    Dire que tu as une isomorphisme $H$ de foncteurs, de $h_X$ sur $h_Y$ c'est dire que tu as un isomorphisme unique, $f$, de $X$ dans $Y$ tel que $f_*=H$ (ton $f$ est bien un iso parce que $id_*=id$ ce qui est inclus dans le fait de dire que $*$ est un foncteur).
  • Merci pour vos réponses.

    @Gabu: ok pour $A\times B \simeq B\times A$. Mais pour $A\times (B\times C)\simeq (A\times B)\times C$, je ne vois pas comment directement vérifier la propriété universelle de l'un pour l'autre.

    @NoName: merci pour les précisions. Juste, tu fais l'hypothèse qu'on est dans une catégorie localement petite non ?
  • sebsheep écrivait:

    > @Gabu: ok pour $A\times B \simeq B\times A$. Mais pour $A\times (B\times C)\simeq (A\times B)\times C$,
    > je ne vois pas comment directement vérifier la propriété universelle de l'un pour l'autre.

    C'est très simple : $(A\times (B\times C), \pi_A, \pi_B\circ \pi_{B\times C}, \pi_C\circ \pi_{B\times C})$ et $((A\times B)\times C,\tilde \pi_A\circ \tilde \pi_{A\times B}, \tilde \pi_B\circ \tilde \pi_{A\times B}, \tilde \pi_C)$ ont tous les deux la même propriété universelle : ils sont des objets terminaux dans la catégorie des objets avec trois flèches dans $A$, $B$, $C$ respectivement.
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