Définition du produit tensoriel
Le produit tensoriel de deux espaces vectoriels $V$ et $W$ est défini de deux façons équivalentes.
(1) C'est un couple $(V \otimes W,\mu)$ tel que $V \otimes W$ est un espace vectoriel et $\mu$ une application bilinéaire de $V \times W$ dans $V \otimes W$ et tel qu'il existe une base $(e_i)$ de $V$ et une base $(f_j)$ de $W$ telles que la famille des $\mu(e_i,f_j)$ soit une base de $V \otimes W$.
(On montre alors que si cette définition est vraie pour des bases particulières, elle l'est pour toutes bases).
(2) C'est un couple $(V \otimes W,\mu)$ tel que pour tout espace vectoriel $M$ et toute application bilinéaire $\varphi$ de $V \times W$ dans $M$ il existe une unique application linéaire $\widetilde{\varphi}$ de $V \otimes W$ telle que $\varphi = \widetilde{\varphi} \circ \mu$.
(C'est la propriété universelle d'un produit tensoriel qui définit celui-ci à isomorphisme près).
J'ai vu dans un polycopié une autre définition :
(3) C'est le sous-espace de $\mathcal{L}(V^* \times W^*)$ engendré par les $u \otimes v$, ce dernier étant défini par $\forall (a,b) \in V^* \times W^*$, $(u \otimes v)((a,b)) = \langle a,u\rangle\langle b,v\rangle$.
Pourriez vous m'expliquer le lien entre (3) avec (1) ou (2). Merci.
(1) C'est un couple $(V \otimes W,\mu)$ tel que $V \otimes W$ est un espace vectoriel et $\mu$ une application bilinéaire de $V \times W$ dans $V \otimes W$ et tel qu'il existe une base $(e_i)$ de $V$ et une base $(f_j)$ de $W$ telles que la famille des $\mu(e_i,f_j)$ soit une base de $V \otimes W$.
(On montre alors que si cette définition est vraie pour des bases particulières, elle l'est pour toutes bases).
(2) C'est un couple $(V \otimes W,\mu)$ tel que pour tout espace vectoriel $M$ et toute application bilinéaire $\varphi$ de $V \times W$ dans $M$ il existe une unique application linéaire $\widetilde{\varphi}$ de $V \otimes W$ telle que $\varphi = \widetilde{\varphi} \circ \mu$.
(C'est la propriété universelle d'un produit tensoriel qui définit celui-ci à isomorphisme près).
J'ai vu dans un polycopié une autre définition :
(3) C'est le sous-espace de $\mathcal{L}(V^* \times W^*)$ engendré par les $u \otimes v$, ce dernier étant défini par $\forall (a,b) \in V^* \times W^*$, $(u \otimes v)((a,b)) = \langle a,u\rangle\langle b,v\rangle$.
Pourriez vous m'expliquer le lien entre (3) avec (1) ou (2). Merci.
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Réponses
Les applications bilinéaires de $V^* \times W^*$ dans le corps de base ?
$(u,v)\mapsto u\otimes_3 v$ est une application bilinéaire de $V\times W$ dans $\mathcal{L}(V^* \times W^*)$. Il ne reste plus qu'à vérifier que l'application linéaire induite $V\otimes W\to \mathcal{L}(V^* \times W^*)$ est injective.
Soit $\sum_{i=1}^n u_i\otimes v_i$ un élément du noyau. Alors ... je te laisse continuer.
Indication : on peut supposer sans perte de généralité que les $u_i$ sont linéairement indépendants.
Oui en effet, il s'agit des formes bilinéaires sur $V^* \times W^*$.
J'aurai dû noter plutôt $\mathcal{L}(V^*,W^* \mid K)$ selon la notation utilisée par mon poly.
On pourrait dire que la définition (3) est une sorte de "représentation" des tenseurs dans l'espace des formes bilinéaires sur $V^* \times W^*$ ?
En fait, je ne vois pas trop en quoi cette définition (3) est intéressante.
J'ai peiné à trouver des références sur le produit tensoriel. On tombe assez rapidement sur des exposés de physiciens intéressants du point de vue heuristique mais manquant de rigueur.
Du côté mathématique : on trouve le deheuvels (puf) "Tenseur et spineur" (beaucoup de coquilles).
Il y a un chapitre dans le Algebra de Lang pour la construction des produits tensoriels de modules.
Avez vous d'autres références (du point de vue mathématique) ?
PS. As-tu regardé Bourbaki ?
Soit $h=\sum_{i,j} \lambda_{i,j} u_i \otimes v_j$ dans le noyau de l'application susmentionnée.
(J'ai ajouté les coefficients).
Donc pour tout $(a,b) \in V^* \times W^*$. On a $h((a;b))=0$. En particulier pour $a=u_k^*$ et $b=v_l^*$ (vecteurs des bases duales). Donc $ \lambda_{k,l}=0$ pour tout $k,l$.
PS : Bourbaki ? Pourquoi pas. C'est sûr que pour le point de vue heuristique...
Soit $E = \R^n$ et $F=\R^p$. Alors $E \otimes F = \R^{n \times p}= M_{n,p}(\R)$
(exemple pas terrible, préférer le troisième exemple)
Le plongement $\phi:E\times F \to E\otimes F$ est alors $(\vec X,\vec Y) \mapsto {}^t \vec X \cdot \vec Y \in M_{n,p}(\R)$,
matrice qui correspond à l'application linéaire de rang 1 $E \to F$ $\vec v \mapsto \langle \vec X , \vec v\rangle \cdot \vec Y$.
Soit $E = \R[X]$ et $F = \R[Y]$ (espaces de polynômes).
Alors $E \otimes F = \R[X,Y]$ (espace de polynômes à deux indéterminées).
Le plongement $\phi:E\times F \to E\otimes F$ est alors $(P(X),Q(Y)) \mapsto P(X) \cdot Q(Y)$.
Soit $X,Y$ deux ensembles finis, et $E = \def\F{\mathcal{F}} \F(X,\R) = \R^{X}$, $F = \F(Y,\R)$.
Alors $X \otimes Y = \F(X\times Y,\R)$.
Le plongement $\phi:E\times F \to E\otimes F$ est alors $(f:X\to\R,g:Y\to\R) \mapsto f\circ\pi_{X} \cdot g\circ\pi_{Y}$, la fonction : $(x,y)\mapsto f(x) \cdot g(y)$.
dans un autre style de "je n'ai pas peur des tenseurs mais je n'y comprends rien"
je ne comprends rien à la définition vulgarisée formellement dans le Quadrature n°108.
S
Si $E$,$F$ sont de dimension finie,
alors $\mathcal{L}(E,F)$ est le produit tensoriel de $E^{\vee}$ (dual algébrique) et de $F$.
Le plongement $E^{\vee} \times F \to \mathcal{L}(E,F)$ est donné par :
$(\phi,v) \mapsto \big(x \mapsto \phi(x) \cdot v)$.
Mais je repose la question initiale pourquoi voir un tenseur $v \otimes w \in V \otimes W$ comme une forme bilinéaire sur $V^* \times W^*$ ?
Je ne vois pas ce que cela apporte mise à part que commencer par définir les tenseurs ainsi permet peut-être de se dispenser de construire rigoureusement $V \otimes W$ à coup d'espaces vectoriels libres et de passage au quotient.
Je la reprends. Soient $E,F$ deux $k$-ev de dim finie.
$\DeclareMathOperator{\Bil}{Bil}$
Pour $X,Y,Z$, je note $\Bil(X,Y;Z)$ l'espace des applications bilinéaires de $(X,Y)$ vers $Z$.
Alors $E\otimes F = \Bil(E^\vee,F^\vee;k)$,
avec le plongement bilinéaire $\iota:E\otimes F \to \Bil(E^\vee,F^\vee;k)$
défini par $\iota(u,v) : E^\vee\times F^\vee\ni (\phi,\psi) \mapsto \phi(u) \cdot \psi(v)$.
C'est très malin. Si on ne sait pas construire $E\otimes F$, on sait quand même que son dual $\big(E\otimes F\big)^\vee = E^\vee\otimes F^\vee$ est $\Bil(E,F;\R)$.
Du coup on dit que $E\otimes F$ est son propre bidual, et donc que $E\otimes F = \big(\Bil(E,F;\R)\big)^\vee = \Bil(E^\vee,F^\vee;\R)$.
C'est une construction bien plus élégante que celle avec le quotient de l'espace libre sur $E\times F$ avec plein de relations.
Je pense qu'elle est susceptible de transporter plus facilement de la structure : la topologie par exemple.
Elle est bilinéaire, donc elle n'est pas du tout injective.
J'ai l'impression que si $E,F$ ne sont pas spécialement de dimension finie, certaines des égalités que j'ai écrites ne sont que des plongements.
$\DeclareMathOperator{\Bil}{Bil}$
Il me semble notamment clair que $E\otimes F \to \Bil(E^\vee,F^\vee;k)$ est injective.
Du coup c'est un isomorphisme sur son image, et c'est ce que zorg disait tout au début avec son "sev engendré par les $u\otimes v$."
Celui-ci appartient au produit tensoriel $E_0\otimes F_0$ de deux sev de dimension finie.
On a du mal à voir comment $t$ pourrait être non-nul, vu qu'il doit être tué par toutes les $\phi\otimes\psi$ avec $\phi\in E,\psi\in F$, donc en particulier pour celles induites dans les même conditions avec $E_0$,$F_0$, non ?
Je reprends ce que j'avais commencé ici. Soit $\sum_{i=1}^n u_i\otimes v_i$ un élément du noyau. On peut supposer sans perte de généralité les $u_i$ linéairement indépendants (utiliser la bilinéarité). Soit $a$ une forme linéaire sur $V$ telle que $a(u_1)=1$ et $a(u_i)=0$ pour tout $i\neq 1$. Pour toute forme linéaire $b$ sur $W$ on a $0=(\sum_{i=1}^nu_i\otimes_3 v_i)(a,b)=b(v_1)$, donc $v_1=0$. On peut répéter le même argument pour $i=2,\ldots,n$ et on obtient $\sum_{i=1}^n u_i\otimes v_i=0$.
$\DeclareMathOperator{\Bil}{Bil}$
De même, $\Bil(E_0^\vee,F_0^\vee;k)$ se réalise comme sous-espace de $\Bil(E^\vee,F^\vee;k)$.
Le carré est commutatif. La flèche entre les choses de dimension finie est un isomorphisme (voir ce qui se passe entre $M_{n,p}(k)$ et $\Bil(k^n,k^p;k)$)
Par conséquent, la flèche $E\otimes F\to\Bil(E^\vee,F^\vee;k)$ est injective sur les $E_0 \otimes F_0$ de dim finie.
Or $E\otimes F$ est la limite de ces $E_0 \otimes F_0$ de dim finie, donc la flèche est injective.
Pour le deuxième, en revanche, c'est complètement transparent si on écrit les définitions impliquées.
$\DeclareMathOperator{\Bil}{Bil}$
Je note $i : E_0 \hookrightarrow E,j : F_0 \hookrightarrow F$.
Alors la flèche
$
\Bil(E_0^\vee,F_0^\vee;k) \to
\Bil(E^\vee,F^\vee;k)$ est définie comme suit :
Soit $a_0$ une forme bilinéaire sur $(E_0^\vee,F_0^\vee)$.
On lui associe $a=(i,j)^*(a_0)$ : la forme bilinéaire sur $(E^\vee,F^\vee)$ qui à $(\phi,\psi)$ associe $a_0(\phi\circ i,\psi\circ j)$.
Ce procédé est évidemment injectif, car $i^* : E^\vee \to E_0^\vee$ et $j^*:F^ \vee \to F_0^\vee$ sont surjectives.