Somme directe espace + espace dual

Bonjour,

je cherchais des exemples de structures symplectiques et je suis tombé sur une présentation de Charles-Michel Marle dans laquelle il donne entre autre l'exemple de la somme directe $V\oplus V^*$ d'un espace vectoriel $V$ de dimension $n$ avec son dual $V^*$ qui possède une structure symplectique naturelle déterminée par la forme bilinéaire suivante : $$\omega((x_1,\xi_1),(x_2,\xi_2)) = \xi_1(x_2) - \xi_2(x_1).$$

J'ai toujours eu des noeuds au cerveau quand on parle de somme directe entre deux espaces vectoriels qui ne sont pas des sous-espaces d'un autre espace vectoriel. J'avais échangé avec Magnolia il y a quelques temps qui m'avait alors expliqué les définitions http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?3,903004,903045#msg-903045 mais je ne m'en sors pas, je ne comprends pas ce que représente $V\oplus V^*$.

Si je persiste à ne pas comprendre, puis-je remplacer froidement $V\oplus V^*$ par $V\times V^*$ dans l'exemple de M. Marle pour éviter de choquer mes fragiles neurones ?

Je vous remercie par avance pour vos précieuses lumières.

Cordialement,
Mister Da

Réponses

  • Oui, tu peux.
  • Mais je ne vois pas ce qu'il y a de compliqué à comprendre en l'état. La somme directe d'ev c'est le sous-espace du produit direct composé des familles d’éléments presque nulles (i.e seul un nombre fini n'est pas nul). Pour un nombre fini d'espaces c'est la même chose.
  • Bonjour,
    effectivement ! Je suis honteux. Merci énormément d'avoir remis la locomotive dans le bon sens. Je ne sais pas pourquoi je n'y ai plus pensé. J'étais bêtement reparti sur ces histoires abstraites d'ensemble et de familles d'isomorphismes en oubliant l'essentiel que tu viens de rappeler.
    Cordialement,
    Mister Da
  • Ca me rajeunit…
  • Pour te faire pardonner tu montreras que dans une catégorie additive somme et produit fini coïncident toujours. ;-)
  • @Magnolia : ... pourtant le temps glisse sur toi, ton avatar n'a pas perdu un seul pétale ! En tout cas, très content de te croiser :) Comme tu peux voir je décomprends les choses plus rapidement que je ne les comprends.

    @NoName : bigre une interro surprise ! Habituellement j'essaye de répondre aux questions qu'on me pose mais je n'y connais rien en catégorie alors je préfère rendre une copie blanche ! Les seules fois où j'ai lu des choses sur le sujet étaient pour essayer de comprendre certains messages du forum.

    Cordialement,
    Mister Da
  • In fine la preuve est tres semblable à celle que tu ferais dans la catgéorie des $R$-modules, sauf que tu ne "dois" pas utiliser les éléments.

    Si ca t'interesse voici un preuve:
    Le produit $A\times B$ est équippé de deux fleches $p_1, p_2$ dans $A$ et $B$. Tu veux trouver deux fleches $i_1, i_2$ de $A$ et $B$ dans $A\times B$. Tu as une fleche $A\to A$ donné par l'identité et une fleche de $A$ dans $B$ donnée par l'application nulle, par la propriété universelle du produit tu as donc $i_1$ une fleche de $A$ dans $A\times B$ qui composée avec $p_1$ donne $1$ et avec $p_2$ donne $0$. Et idem pour $B$ avec un $i_2$.

    Si tu as une fleche $f$ de $A$ dans $S$ et $g$ de $B$ dans $S$ alors $fp_1+gp_2$ est une fleche de $A\times B$ dans $S$ et $(fp_1+gp_2)\circ i_1=f$ et $(fp_1+gp_2)\circ i_2=g$. Par ailleurs $i_1p_1+i_2p_2=1$ puisque composée avec $p_1$ cette fleche donne $p_1$ et idem pour $p_2$ et par l'unicité dans la propriété universelle cette fleche est donc $1$. Donc si $h$ est la somme de $g$ et $f$ alors $h=h(i_1p_1+i_2p_2)=hi_1p_1+hi_2p_2=fp_1+gp_2$ et donc $h$ est uniquement définie.
  • C'est aussi bien de remarquer que $V \oplus V^*$ c'est juste $T^*V$, ce qui n'est pas très surprenant car localement toute variété symplectique est symplectomorphe à un fibré cotangent.

    Le théorème de Darboux te dit que même localement ça sert à rien de chercher des exemples (contrairement en géométrie riemannienne), toutes les structures symplectiques ont la même forme locale. C'est les invariants globaux (comme par exemple le volume) qui distingue les différentes formes symplectiques.

    Mais comme tu as posté dans "algèbre", peut-être que tu parlais de forme symplectique sur un espace vectoriel. Dans ce cas, en copiant Gram-Schmit on peut voir que n'importe quel forme symplectique peut s'écrire $e_1 \wedge f_1 + \dots + e_n \wedge f_n$ dans une base bien choisie. Donc là aussi il n'y a qu'un seul exemple en quelque sorte.
  • Bonjour,

    merci beaucoup pour toutes ces précisions qui me sont précieuses. Il faudra que je relise encore quelques fois vos messages mais je pense avoir saisi les idées.

    En fait, c'est la mécanique (classique) qui m'a emmené jusqu'au variétés symplectiques mais, étudiant essentiellement des systèmes linéaires, il se trouve que la variété en question est avant tout un espace vectoriel. J'essaye de garder le formalisme des variétés en évitant d'identifier les objets pour mieux comprendre ce qu'il se passe. C'est pour cela que je m'étais mis en algèbre et pas en géométrie (différentielle). Mais suite à vos messages je commence à voir qu'effectivement "il n'y a qu'un seul exemple en quelque sorte".

    Une construction (qui j'imagine archi connue des connaisseurs) que j'ai trouvée dans la présentation de M. Marle utilise un espace vectoriel complexifié. On prend un $\mathbb{R}$-ev $E$ de dimension $n$. On peut construire un autre $\mathbb{R}$-ev $E^2$ de dimension $2n$ mais aussi un $\mathbb{C}$-ev $E^2$ de dimension $n$. La donnée d'un produit scalaire euclidien $g$ et d'une forme symplectique $\omega$ sur le $\mathbb{R}$-ev $E^2$ est équivalente à la donnée d'un produit scalaire hermitien $h$ sur le $\mathbb{C}$-ev $E^2$ avec : $h=g+\mathrm{i}\omega$.

    S'agit-il encore une fois du même exemple déguisé en voyant $E^2$ tantôt comme $TE$ et tantôt comme $T^*E$ ?

    Merci pour vos précieuses lumières.
    Cordialement,
    Mister Da
  • Non, ca n'est pas la meme chose, c'est purement de l'algèbre bi-linéaire. Si tu as une forme hermitienne $h$ sur ce que tu notes $E^2$ (et que j'aurais plutot tendance à noter $E_{\mathbb{C}}$), alors $\Re(h)$ est une métrique Riemanienne sur l'espace réel sous-jacent et $-\Im(h)$ (le signe moins n'est pas important ici) est une 2-forme alternée dont on voit facilement qu'elle est non dégénérée.
  • Bonjour,

    d'accord. Merci beaucoup pour cet éclaircissement.

    J'ai une dernière question qui me trotte dans la tête depuis quelques temps, je profite de cette discussion pour abuser encore une fois de votre aide. Quand nous considérons une variété $M$ différentielle, on peut construire le fibré tangent $TM$ et cotangent $T^*M$.

    Si nous ajoutons à $M$ une métrique $g$ (pour en faire une variété riemannienne) alors, au dessus d'un point $p\in M$ on peut identifier un vecteur de $T_pM$ avec une forme linéaire de $T_p^*M$.

    Je lis partout que la variété $T^*M$ est naturellement symplectique. En effet nous disposons de $\omega$ (qui est la dérivée extérieure de la forme de Liouville qui est une $1$-forme un peu plus remarquable que les autres) qui permet d'identifier fibre à fibre les vecteurs de $T(T^*M)$ avec les formes linéaires de $T^*(T^*M)$.

    Est-ce que dans le second cas je peux dire que cette identification est canonique (dans le sens que finalement je n'ai rien rajouté à ce qui existait déjà pour pouvoir associer) ? Contrairement au premier cas où il a fallu ajouter une structure supplémentaire.

    Je me pose cette question car finalement, $T^*M$ est naturellement symplectique mais on a quand même fait un choix : celui de prendre la forme de Liouville et d'en faire la dérivée extérieure. On aurait très bien pu décider d'en prendre la dérivée extérieure et de la multiplier par 5 en suite et ça aurait fait un nouvel $\omega$ non ?

    J'espère que ma question n'est pas trop fumeuse.
    Cordialement,
    Mister Da
  • Je ne comprends pas trop trop ta question. Surtout que la même question se pose pour le premier cas tu peux très bien dire que c'est $g(\bullet, 5\bullet)$ qui identifie un espace avec son dual.
    Ici tu as une construction qui est "naturelle". Au sens où elle ne dépend d'aucun . On doit très probablement l’écrire comme le fait que la forme en question est fonctorielle pour les applications lisses (i.e $Tf^*(\omega_N)=\omega_M$ pour $f: M\to N$ mais comme je ne me rappelle plus ce qu'est la forme de Liouville, je m'égare peut-être et je doute que ça soit vrai pour n'importe quel $f$ de toute façon).
  • Bonjour,

    merci pour ta patience.

    Zut on a été coupé juste sur le passage le plus important ! "Ici tu as une construction qui est "naturelle". Au sens ou elle ne dépend d'aucun ." d'aucun quoi ?

    Cordialement,
    Mister Da
  • Aucun choix. Pardon. Je sais c'est un peu flou. En général on peut traduire ça par de la fonctorialité.
  • D'accord merci. C'est justement ce flou qui me perturbe toujours un peu : "naturel", "intrinsèque", "canonique", "remarquable", "aucun choix". Je vais aller voir du coté de la "fonctorialité". Merci beaucoup pour cette piste.

    Par exemple ici on peut lire : "Les sections lisses du fibré cotangent sont les 1-formes différentielles, l'une d'entre elles étant remarquable et appelée 1-forme tautologique (ou 1-forme de Poincaré, ou 1-forme de Liouville, ou 1-forme canonique, ou potentiel symplectique). Sa dérivée extérieure donne une 2-forme symplectique canonique. Le fibré cotangent est ainsi muni d'une structure de variété symplectique."

    Je pense voir ce qu'essaye de dire l'auteur mais il y a toujours un petit truc qui me titille sur tout ces mots pour lesquels je n'ai jamais vraiment vu de réelle définition, du coup j'ai toujours la sensation de louper un truc.

    Cordialement,
    Mister Da
  • J'ai l'impression que cette dernière question Mister Da, c'est un peu jouer sur les mots ... Si tu trouve plus naturel de regarder $5d\theta$ que $d\theta$ personne ne va t'en empêcher ! Bizarrement tous les mathématiciens regardent $d\theta$ (sauf moi qui ai pris $12d\theta$).

    @Noname : la formule que tu as écrite est invariante par multiplication scalaire non ?
  • Bonjour,

    @Lupulus, je suis d'accord que je donne l'impression d'ergoter et je suis tout d'accord avec ce que tu dis. Il ne faut pas voir de mauvaise foi de ma part, j'ai toujours été gêné par ces mots. Bref, pour résumer, "canonique" et "naturel" sont des synonymes en fait du style "on prend la chose la plus simple/évidente/qui coule de source" ?

    Cordialement,
    Mister Da
  • Je préfère ne jamais interpréter "canonique" de manière précise. Parfois comme dit NoName c'est synonyme de "fonctoriel" ou "naturel" mais parfois c'est juste là pour faire joli. Je pense que les mathématiciens aiment bien avoir l'air intelligent :-D

    Un exemple d'isomorphisme "naturel" (au sens, qui provient d'une transformation naturelle) c'est l'isomorphisme $V \cong (V^*)^*$, quand $V$ est un espace vectoriel réel de dimension finie. Si $C$ est la catégorie des espaces vectoriels réels de dimension finie, il y a un isomorphisme naturel de foncteurs $\eta : \text{id}_C \to ((-)^*)^*$.

    P.S : j'espère que tu n'a pas mal pris mon commentaire d'en haut !
  • @lupulus: heu... oui (pour l'invariance par multiplication scalaire) mais je ne vois pas où tu veux en venir. :-D
  • Mister Da disait que poser $\omega = d\theta$ n'était pas vraiment canonique puisqu'on aurait pu poser $\omega' = 5d\theta$. Du coup l'argument de dire "$\omega$ est fonctorielle puisqu'elle vérifie cette formule" marcherait aussi avec $\omega'$. Bref désolé d'ergoter autant, dernière intervention promis ^^
  • Ah oui oui bien sur. Dire que c'est fonctoriel ca veut dire que la construction est "la même pour tous les objets" ou plus correctement que la construction pour tous les objets sont compatibles entre elles. Donc oui ce serait quand même fonctoriel. Mais si on décidait de multiplier par 3 pour une variété et par 5 pour une autre alors là non. Donc oui ce serait aussi naturel au sens fonctoriel. Mais pas au sens du "bon sens".
  • Re,

    non je n'ai pas du tout mal pris ta remarque, j'espère juste ne pas passer pour un lanceur de faux débats.

    "Je préfère ne jamais interpréter "canonique" de manière précise" C'est probablement là mon erreur. Bref, voilà ce que j'ai en tête en fait (et j'ai l'impression que je me trompe) :

    Pour l'identification d'un espace vectoriel $E$ avec son bidual $E^{**}$ avec $i\colon x\mapsto(\varphi\mapsto \varphi(x))$ pour tout $x$ de $E$ et $\varphi$ de $E^*$, on qualifie $i$ de canonique dans le sens où la seule donnée de $E$ suffit, on utilise des objets qui existent déjà et de naturelle dans le sens où c'est la construction la "simple" (mais reste qu'on a fait un choix de prendre cette construction).

    En revanche, l'identification de $E$ avec $E^*$ n'est pas qualifiée de canonique dans le sens où juste la donnée de $E$ ne suffit plus et il faut ajouter un nouvel objet ou une nouvelle structure comme un produit scalaire.

    Dans $\mathbb{R}^n$ quand on parle de la base canonique, on ferait mieux de parler de la base naturelle dans le sens celle qui coule de source vu que les coordonnées d'un $n$-uplet auront les mêmes valeurs que ses composantes (dans mon esprit toutes les bases sont canoniques étant donné qu'elles sont composées de vecteurs qui existent à partir du moment où on s'est donné un espace vectoriel).

    Merci beaucoup pour votre patience.

    Cordialement,
    Mister Da
  • @NoName : entièrement d'accord avec toi !

    @Mister Da : Oui c'est une bonne manière d'interpréter ! Mon dernier message soulignait que pour $\omega = d\theta$ je crois pas (?) qu'il y a de foncteurs derrière, tandis que l'isomorphisme naturel que tu décris pour les espaces vectoriels de dimension finie est bien une transformation naturelle entre deux foncteurs. Du coup la notion de "naturelle" dépends toujours du contexte.
  • Bonjour,

    d'accord ! Un grand merci pour vos précieuses lumières et votre patience. J'en ai fini avec mes digressions ésotériques.

    Cordialement,
    Mister Da
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