Racines de polynômes

Bonjour,
sur http://www.rogermansuy.fr/enseignement.html , il y a un "cahier de vacances" pour les élèves entre la sup et la spé et il y a un exercice que je ne sais pas aborder. Je le recopie pour que ce soit plus pratique.

Soit $P \in \C[X]$ un polynôme non constant dont toutes les racines appartiennent au demi-plan complexe d'équation $Im(z) > 0$. Soit $A$ (respectivement $B$) le polynôme obtenu à partir de $P$ en remplaçant les coefficients par leurs parties réelles (respectivement imaginaires).
Montrer que les racines [de] $A$ sont réelles.

En prenant quelques polynômes $P$, j'ai l'impression que le résultat est aussi vrai pour le polynôme $B$. Mais je ne vois pas comment prouver cela (ni pour $A$ ni pour $B$). Je partirais en prenant une racine complexe $z$ de $A$ (en supposant que $A$ n'est pas constant) puis je chercherais à montrer que $Im(z) = 0$. Je note $P = (a_n + ib_n)X^n + \cdots+a_0 + ib_0$, donc on a $A = a_nX^n +\cdots+a_0$ et $B = b_nX^n + \cdots+b_0$. Donc $P(z) = i B(z)$. Donc $z$ ne devrait pas être racine de $P$ (mais je ne vois pas pourquoi). Et je ne suis pas très avancé...

Réponses

  • Bonjour,

    C'est pas plutôt P(z) = A(z) + i B(z) ?

    Ensuite, vérifier que si z0 est une racine de P ..............ak = - i bk pour tout entier k.

    Je vous laisse finir
  • On suit continûment l'argument de $P(x)=p_n(x-z_1)\cdots(x-z_n)$ quand $x$ parcourt l'axe réel de $-\infty$ à $+\infty$ ($P$ ne s'annule pas sur l'axe réel). Chaque argument de $(x-z_i)$ est croissant et augmente de $\pi$ puisque chaque $z_i$ est dans le demi-plan supérieur. Donc l'argument de $P(x)$ augmente de $n\pi$ quand $x$ va de $-\infty$ à $+\infty$. Ceci entraîne que la courbe décrite par $P(x)$ dans $\mathbb C\setminus \{0\}$ croise $n$ fois l'axe imaginaire pur et donc que $\Re P$ a $n$ racines réelles, sauf si cette courbe part de l'axe imaginaire pur et y revient, ce qui revient à dire que $p_n$ est imaginaire pur.
    Dans ce dernier cas, la courbe croise $n-1$ fois l'axe imaginaire pur, le polynôme $\Re P$ est de degré $n-1$ et a bien $n-1$ racines réelles

    Je ne pense pas que ce soit le raisonnement attendu.
  • Un indication: si $Im(z)>0$ alors $|z-z_k|<|z-\bar{z_k}|$ pour toute racine $z_k$ de $P$.
  • Bonjour,

    pas de problème pour montrer l'indication de Jandri en utilisant le fait que les racines de P sont à parties imaginaires > 0. Mais je dois dire que je ne vois pas comment l'utiliser :-(

    @blou 92 : Je l'avais pris dans l'autre sens mais peu importe. Par contre, le fait que $z_0$ soit racine de P n'impliquera pas $a_k = -ib_k$

    @GaBuZoMeu : ce n'est effectivement sans doute pas l'argument attendu mais pourquoi pas. Par contre, je ne comprends pas le lien entre "l'argument de $P(x)$ augmente de $n\pi$ quand x va de $-\infty$ à $+\infty$" et "la courbe décrite par $P(x)$ dans $\C-\{0\}$ croise n fois l'axe imaginaire pur". Je ne suis pas très sûr de la suite, mais ça m'a l'air plus dans mes cordes que ce lien que je ne comprends pas du tout.
  • Combien y a-t-il de nombres de la forme $\pi/2+k\pi$ avec $k\in \mathbb Z$ dans l'intervalle $]\alpha,\alpha+n\pi[$ (on pourra traiter à part le cas où $\alpha$ est lui même de la forme $\pi/2+k\pi$).
  • @Alban_: Soit $P=A+iB$ avec $A$ et $B$ à coefficients réels. Pour utiliser l'indication de Jandri, tu peux utiliser, que si $z$ est une racine de $A$, alors $P(z)=iB(z)$ et $P(\overline{z})=iB(\overline{z})$, et donc $|P(z)|=|P(\overline{z})|$.
  • Ca doit être bon pour la méthode standard, merci

    Je note $P = A + i B$ avec $A = Re(P)$ et $B = Im(P)$ comme dans mon premier message. Je suppose que le polynôme $A$ est non constant (auquel cas toutes les racines du polynôme $A$ sont réelles). Soit $z \in \C$ une racine de $A$. Comme $A$ est à coefficients réels, $\overline z$ est aussi racine de $A$. On a donc $A(z) = 0$ et $A(\overline z) = 0$. Evaluant l'égalité $P = A + iB$ en $z$ puis en $\overline z$, on obtient $P(z) = i B(z)$ puis $P(\overline z) = i B(\overline z)$. Puis le fait que B est à coefficients réels donne :
    $$|P(z)|^2 = P(z)\overline{P(z)} = i B(z) \overline{iB(z)} = B(z) B(\overline z)$$
    On trouve la même chose pour $|P(\overline z)|^2$.

    On note alors $P = \lambda (X - z_1)...(X - z_n)$. D'après $|P(z)| = |P(\overline z)|$, on a :
    $$|z - z_1|...|z - z_n| = |\overline z - z_1|...|\overline z - z_n|$$
    Si $Im(z) > 0$, alors le terme de gauche est strictement inférieur au terme de droite d'après jandri. Si $Im(z) < 0$, alors le terme de gauche est strictement supérieur au terme de droite d'après quasi-jandri. Donc $Im(z) = 0$ et ainsi $z$ est réel.

    Je me penche dans un moment sur la méthode "non-standard"
  • Scripsit Gabuzomeu : <<Je ne pense pas que ce soit le raisonnement attendu.>>

    Sans doute, non, vu la figure jointe à l'énoncé dans le <<cahier de vacances>>.En revanche, l'argument luxueux de Ga semble montrer en plus que le polynôme $A$ a tous ses zéros distincts ; me trompé-je ?

    Cordialement, j__j81686
  • Je me suis aussi fait cette réflexion sur la simplicité des racines réelles.
  • Je viens de m'apercevoir qu'il existe une réciproque à la propriété : si $A$ est un polynôme réel séparablement scindé, il suffit de poser $P=A-{\rm i}A'$ ; ainsi, les zéros de $P$ sont dans le demi-plan (ouvert) de Poincaré et $A$ a pour coefficients les parties réelles de ceux de $P$.
  • Bonjour,

    Tout ça me rappelle le théorème de Hermite-Biehler. Il stipule qu'en plus, les racines et $A$ et $B$ sont strictement entrelacées, et contient également la réciproque évoquée par john_john.

    @ john_john : as-tu une démonstration élémentaire dans le cas présent ou as-tu utilisé ce théorème ?

    Bien cordialement,

    Ritchie
  • Bonjour, Ritchie,

    oui, on ne peut plus élémentaire : si $A$ est réel séparablement scindé, $P$ n'a pas de zéro réel et, si $z$ a une partie imaginaire $<0$, la dérivée logarithmique de $A$ a une partie imaginaire $>0$.

    Cordialement, j__j
  • Bonjour,

    @john_john : suis-je bête ! Pour me faire pardonner, une preuve alternative du résultat de ce fil (et qui montre l'entrelacement des racines de $A$ et $B$). J'espère ne pas raconter de bêtises.

    On note $\mathcal H = \{z \in\mathbb C \mid \Im z>0 \}$. Soit $z\in\mathcal H$.


    On a déjà démontré que $|P(z)|<|P(\bar z)|$. On a donc $|P(\bar z)|^{2}-|P(z)|^{2}>0$, d'où $2i \big(A(z)B(\bar z)-B(z)A(\bar z) \big)>0$.

    Fait $1$ : $A$ et $B$ n'ont que des racines réelles ; si par exemple $A$ admet une racine non réelle $z$, alors $\bar z$ est aussi racine de $A$, et, en supposant que $\Im z>0$, on a donc $2i \left(A(z)B(\bar z)-B(z)A(\bar z) \right)=0$, contradiction.

    Fait $2$ : $A$ et $B$ n'ont pas de racine commune ; sinon, $P=A+iB$ admettrait une racine réelle, contradiction.

    Fait $3$ : $A$ n'a pas de racine multiple. Par l'absurde, soit $x\in\mathbb R$ une racine (au moins) double de $A$. Quitte à remplacer $P(X)$ par $P(X+x)$ (qui vérifie les mêmes hypothèses que $P$), on peut supposer que $x=0$. Les deux derniers coefficients de $P$ sont donc des imaginaires purs (et le dernier est non nul). Les racines du polynôme réciproque $Q=X^{\deg P}P\left( \frac1X\right)$ sont toutes à partie imaginaire $<0$, donc leur somme également. Or d'après les relations coefficients-racines, leur somme est un quotient de deux imaginaires purs, donc un réel : contradiction.

    Fait $4$ : On a, toujours pour $z\in\mathcal H$ :
    \[
    \frac{2i \left(A(z)B(\bar z)-B(z)A(\bar z) \right)}{2i(z-\bar z)} = \frac{2i \left(A(z)B(\bar z)-B(z)A(\bar z) \right)}{-4\Im z}<0,
    \]
    i.e.
    \[
    \frac{A(z)B(\bar z)-B(z)A(\bar z)}{z-\bar z} = \frac{B(z) \big(A(z)-A(\bar z)\big) -A(z) \big( B(z)-B(\bar z)\big)}{z-\bar z}<0.
    \]
    On pose $z=x+iy$. On fixe $x\in\mathbb R$, et on fait tendre $y$ vers $0$. On a donc :
    \[
    B(x)A^{\prime}(x)-A(x)B^{\prime}(x)\leqslant 0
    \]
    On pose $Q\colon x\mapsto \frac{B(x)}{A(x)}$. Soient $x_{1}<x_{2}$ deux racines consécutives de $A$. Sur $]x_{1},x_{2}[$, $Q$ est dérivable et sa dérivée est négative, et même strictement négative sauf en un nombre fini de points, donc $Q$ est strictement décroissante. Puisque $\lim\limits_{x_{1}^{+}}Q = +\infty$ et $\lim\limits_{x_{2}^{-}}Q = -\infty$, $Q$ s'annule exactement une fois sur $]x_{1},x_{2}[$, et donc $B$ possède exactement une racine sur $]x_{1},x_{2}[$. Les racines de $A$ et $B$ sont (strictement) entrelacées.

    Bien cordialement,

    Ritchie
  • Pour $P=A+iB$ avec $A$ et $B$ polynômes réels non constants, l'argument de GaBuZoMeu permet de démontrer l'équivalence entre:
    $P$ a toutes ses racines dans $Im(z)>0$ ou bien a toutes ses racines dans $Im(z)<0$
    et
    $A$ et $B$ sont scindés à racines simples sur $\R$ avec leurs racines strictement entrelacées.

    GaBuZoMeu a démontré le sens direct.

    Pour démontrer la réciproque on vérifie d'abord que $P$ n'a pas de racine réelle puis que $P(z)=0$ est équivalent à $\arg\left(\dfrac{A(z)}{B(z)}\right)=-\dfrac{\pi}2$.
    Premier cas: $A(x)=\displaystyle\prod_{k=1}^n(x-a_k)$, $B(x)=\displaystyle\prod_{k=1}^n(x-b_k)$ avec $a_1<b_1<...<a_n<b_n$
    Si $Im(z)<0$ alors $\arg\left(\dfrac{A(z)}{B(z)}\right)=\displaystyle\sum_{k=1}^n\arg\left(\dfrac{z-a_k}{z-b_k}\right)\in]0,\pi[$ d'où une contradiction, par suite on a $Im(z)>0$ pour toute racine de $P$.
    Si on échange $A$ et $B$ ou bien si les racines sont dans l'ordre inverse ou bien si les coefficients dominants de $A$ et $B$ sont de signes opposés on obtient $Im(z)<0$ pour toute racine de $P$.

    Deuxième cas: $A(x)=\displaystyle\prod_{k=1}^n(x-a_k)$, $B(x)=\displaystyle\prod_{k=1}^{n-1}(x-b_k)$ avec $a_1<b_1<...<a_n$
    Si $Im(z)>0$ alors $\arg\left(\dfrac{A(z)}{B(z)}\right)=\displaystyle\sum_{k=1}^{n-1}\arg\left(\dfrac{z-a_{k+1}}{z-b_k}\right)+\arg(z-a_1)\in]0,\pi[$ d'où une contradiction, par suite on a $Im(z)<0$ pour toute racine de $P$.
    Si on échange $A$ et $B$ ou bien si les racines sont dans l'ordre inverse ou bien si les coefficients dominants de $A$ et $B$ sont de signes opposés on obtient $Im(z)>0$ pour toute racine de $P$.
  • Bonjour,

    D'accord avec Jandri pour l'équivalence et l'alternative. Petite remarque : les relations coefficients-racines (et notamment la somme des racines) permettent de déterminer lequel des deux hyperplans contient les racines.

    Cordialement,

    Ritchie
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