Caractères sur un groupe fini commutatif

Si G est un groupe groupe fini abélien, peut-on prouver que le groupe formé de ses caractères (G^) est de même cardinal, sans décomposer le groupe G en produit de groupes cycliques, en utilisant par exemple l'orthogonalité des caractères ? En utilisant le morphisme naturel de G vers G^^, je n'arrive pas à établir son injectivité. D'avance, merci.

Réponses

  • $\sum_{\chi \in \hat{G}} \chi(g^{-1}) \chi(x) = |\hat{G}| 1_{x \in gH}$ où $H = \bigcap_{\chi \in \hat{G}} \ker(\chi)$

    donc si on montre que pour tout $g \in G$ il existe un $\chi_g$ tel que $\chi_g(g) \ne 1$ alors on a $H =\{1\}$ et $G \to \hat{\hat{G}}, g\to (\chi\to \chi(g^{-1}))$ injectif

    pour construire $\chi_g$ il y a -t-il plus simple que de trouver un groupe cyclique maximal $C_g \ni g$ tel que $G \cong N_g \times C_g$ ?
  • Oui oui il y a plus simple : les groupes commutatifs finis leur théorie des caractères est très simple.

    Via l'orthogonalité des caractères, et, ou bien via Maschke, ou bien via de la réduction élémentaire, tu montres que les caractères forment une base de $F(G,\C)$ (les fonctions de $G$ dans $\C$). Mais là tu as un espace de dimension $|G|$, donc $|G|= |\widehat{G}|$.

    Par contre dans mon souvenir l'argument de cardinal est plus efficace pour déduire la surjectivité de l'injectivité, donc il faut prouver l'injectivité un jour; mais de toute maniére pour les groupes commutatifs c'est pas très compliqué non plus, sans même utiliser des sous-groupes cycliques maximaux : fixant $g\in G$, il s'agit de prendre un élément bien choisi de $F(G, \C)$, et d'utiliser le fait qu'il se décompose sur les caractères pour en déduire qu'il y a au moins un caractère qui ne vaut pas $1$ en $g$.

    (Les sous-groupes cycliques maximaux ça revient au théorème de structure ;-) )
  • Merci pour les réponses. L'orthogonalité des caractères donne la liberté d'où un majoration du cardinal de G^ par celui de G...Pourquoi a-t-on Vect (G^)=F(G,C)? D' avance, merci.
  • Tu connais la dimension de l'espace vectoriel $F(G,\C)$. En effet, si on énumère les éléments de $G$, disons $G=\{g_1,\dots,g_n\}$, alors $F(G,\C)$ est isomorphe à $\C^n$. À tout élément $(z_1,\dots,z_n)$ de $\C^n$, on associe $f:G\to\C$, $g_k\mapsto z_k$ ($1\le k\le n$). Cela entraîne : $\dim\mathrm{vect}\widehat{G}\le\dim F(G,\C)$.

    Edit : Tiens, j'ai encore lu & répondu trop vite. J'ai vu « $|\widehat{G}|=|G|$ plus haut alors je l'ai utilisé. Dommage, c'était le but...
  • emilie : c'est là qu'intervient Maschke (si tu le connais) ou simplement de la réduction (si tu es plus à l'aise avec ça).

    Dans les deux cas, tu obtiens que $F(G,\C)$ se décompose $\displaystyle\bigoplus_{\chi \in \widehat{G}}E_\chi$ où $E_\chi$ est l'espace des vecteurs "$\chi$-propres", i.e. tels que $g\cdot f= \chi(g) f$, où $g\cdot f(h) = f(g^{-1}h)$. Alors tu remarques qu'un vecteur $\chi$-propre est un multiple de $\chi$, et c'est gagné [edit : peut-être de $\chi^{-1}$ à vrai dire, mais c'est un détail]

    La version Maschke c'est "$F(G,\C)$ avec l'action indiquée est une représentation de $G$, donc se décompose sous forme de représentations irréductibles, et on sait ce qu'est une représentation irréductible d'un groupe abélien"; mais en fait c'est tricher parce que "on sait ce qu'est une représentation irréductible d'un groupe abélien" vient de la version réduction

    La version réduction c'est "les endomorphismes $f\mapsto g\cdot f$ de $F(G,\C)$ commutent entre eux, et sont diagonalisables car ils vérifient $x^{|G|}-1=0$; donc sont codiagonalisables; de sorte que dans une base la matrice de $g$ est $\mathrm{diag} (\lambda_1(g),...,\lambda_n(g))$, et alors on vérifie aisément que chaque $\lambda_i$ est un caractère, donc un $\chi$, donc le premier vecteur de la base est $\lambda_1$-propre, le deuxième $\lambda_2$-propre, etc.; ce qui donne la décomposition voulue"

    (le fait que ce soit si élémentaire m'a d'ailleurs fait penser à le suggérer en exercice de colle :-D )
  • Bonjour et merci pour la réponse. Avec la diagonalisation simultanée, on obtient bien le résultat et même beaucoup plus que l'égalité entre les cardinaux de G et de G^... Mais si on ne connait rien sur cette théorie, c'est difficilement trouvable. On est loin de l'utilisation de l'orthogonalité des caractères. Merci pour toutes ces indications.
  • Je suis d'accord que c'est plus fort que l'égalité des cardinaux :-D
    Effectivement il faut avoir une petite idée de ce qu'on fait avant de tenter de codiagonaliser
  • Emilie, il y effectivement une preuve qui fait appel à peu de choses, sans outillage autre que la formule d'orthogonalité des caractères. Comme l'écrit Reuns, il suffit de savoir, pour tout élément $g\neq e_G$ de $G$, différent du neutre, trouver un caractère de $G$ qui ne vaut pas 1 en $g.$

    Pour cela, on considère le sous-groupe $H$ de $G$ engendré par $g.$ $H$ est cyclique. Donc il existe un premier caractère, $\chi_1,$ sur $H,$ non-trivial en $g.$ (il suffit par exemple d'envoyer $g$ sur $\exp(2i\pi/h)$, avec $h$ l'ordre de $H.$).

    Maintenant, il s'agit de prolonger ce caractère $\chi_1$ de $H$ en un caractère $\chi$ de $G$ (qui sera donc automatiquement non-trivial en $g.$) C'est le résultat clef. Je renvoie pour la preuve au cours d'arithmétique de Serre, Chap. 6, première proposition établie.
    (indication : il s'agit essentiellement de savoir définir $\chi(g^kx^\ell)$ pour un élément $x$ dans $G$ et pas dans $H.$ Et on sait que $x^a$ est dans $H$ pour un certain entier $a,$ donc la valeur de $\chi(x)$ n'a pas trop de choix (mais un peu quand même...)).

    Je te laisse regarder, ça vaut le coup d'y méditer, c'est une belle preuve instructive (pour les agrégatifs !)
  • Nounoche : certes, mais ça c'est essentiellement l'argument de reuns; qui revient essentiellement à faire la décomposition de $G$ en groupes cycliques. Enfin ça marche hein, mais ça revient au théorème de structure
  • Hello,
    Je pense, quand on dit que ceci revient à cela, qu'il est important de préciser les acquis, les pré-requis ...etc.. Je me permets d'attacher un problème (corrigé) et self-contained (je crois) dans lequel j'essaie de passer en revue quelques résultats concernant les caractères sur un groupe abélien fini, et surtout les interactions entre telle et/ou telle approche. Il me semble que les règles du jeu sont précisées. Note : rien d'original dans les résultats en question, il s'agit des résultats classiques ordinaires. Enfin, je dis ``je crois'', ``il me semble'' car cela remonte à l'époque où j'étais encore en activité (c.a.d. il y a très longtemps).
  • Effectivement, on sait déjà casser G en groupe cyclique, alors OK. Mais comme le dit Claude, ça dépend des prérequis.

    J'observe juste que Serre ne présuppose pas G décomposé en produit de cycliques, qui est un énoncé plus fin, à mon goût.
    (en fait, on peut même (plutôt) déduire que G se décompose en produit de groupes cycliques, à partir de ce lemme de prolongement des caractères).
  • C'est d'ailleurs cette démonstration de G abélien fini qui se décompose en produit de groupes cycliques dont les ordres se divisent (cf son exo 1d) et e).

    Je ne suis pas tout à fait d'accord avec le mot canoniquement isomorphe entre $\hat{\mathbb Z/n\mathbb Z}$ et $\mathbb U_n$ dans la toute première question. Mais on a déjà discuté de ce point avec Claude il y a longtemps, je n'y reviens pas.
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