Racine carrée d'une matrice définie positive

Bonjour,

J’ai un souci pour l’unicité dans le résultat suivant :

Pour toute matrice $M$ définie positive (réelle), il existe une unique matrice définie positive $R$ vérifiant $M=R^{T} R=R^2$ ($R$ étant alors appelée « racine carrée » de $M$).

Je sais que $M$ étant symétrique réelle, on peut l’écrire $M=O D O^{-1}$, avec $O$ orthogonale ($O^{-1}=O^T$). Et donc, il n’est pas très compliqué de montrer que $R = O D^{1/2} O^{-1}$ est une matrice qui convient. Mais le fait qu’elle soit unique … ?

Je ne comprends pas bien l’indication (que j’ai rencontrée) d'utiliser une propriété des matrices commutantes.

Par exemple, soit $A$ une autre matrice définie positive telle que $A^{T} A=A^2=M$. Il est évident que $A$ et $M$ commutent puisque $A^3=A^2 A= MA = A A^2 = AM$.

Or, un résultat (de « diagonalisation simultanée ») dit que si $A$ et $M$ commutent et sont diagonalisables (ce qui est le cas ici), alors elles sont simultanément diagonalisables, c’est-à-dire qu’il existe une même matrice $P$ telle que $A=P \Delta P^{-1}$ et $M=P D P^{-1}$.

OK, par suite, du fait que $A^2=M$ on déduit que $\Delta = D^{1/2}$ ; mais je me retrouve donc avec $A= P D^{1/2} P^{-1}$ et non pas $A = O D^{1/2} O^{-1}$ ($=R$)... Je peux juste dire que $A$ et $R$ ayant les mêmes valeurs propres, elles sont semblables.

Donc, je rate un truc sans doute élémentaire dans la démo, mais je ne vois pas quoi…

Réponses

  • Il vaut mieux (à mon sens) utiliser un résultat intermédiaire : si $A$ et $M$ commutent, alors les espaces propres de $M$ sont stables par $A$.

    Ainsi, si tu écris ton espace comme $\bigoplus_\lambda E_\lambda$ (où $E_\lambda$ est l'espace propre de $M$ associé à la valeur propre $\lambda$), chaque $E_\lambda$ est stable par $A$; en particulier $A$ y est une racine carrée symétrique définie positive de $M_{\mid E_\lambda} = \lambda id_{E_\lambda}$. Y en a-t-il beaucoup ?
  • Soit $M$ un matrice semi-définie positif, $A$ tel que $A^2=M=R^2$, soit $R=V^*D_R^{\frac{1}{2}}V$ je suppose que tous les valeurs propres de $ M$ sont distincts, alors ça revient à dire $U^*D_AU=V^*D_RV=M$, $U$ et $V$ unitaires, $D_{}$ sont les diagonales des v. propres de $M$ à permutation prés. Tu multiplies et tu arrives à $P^TVU^*D_AUV^*P=D_A$, mais tous les elements de $D_A$ sont distincts donc $P^TVU^*=d$, $d$ diagonale donc $V=PdU$ et tu déduis par continuité.

    C'est bon.
  • Bonjour Maxtimax,

    Je te remercie, mais n'ayant pas bossé tout le cours de MP (ceci explique, j'espère, cela) j'avoue n'avoir rien compris à ta démonstration.
  • André : ah oui effectivement; je suis désolé j'ai fait comme si tu avais suivi ce cours (question d'habitude)
    Qu'à cela ne tienne, je vais développer :
    L'espace propre associé à une valeur propre $\lambda$ c'est les $X$ tels que $MX = \lambda X$. En particulier le fait que $M$ soit diagonalisable (par le théorème spectral donc) revient à dire que $\R^n = \bigoplus_\lambda E_\lambda$ où $E_\lambda$ est ledit espace propre.

    Maintenant si $A$ et $M$ commutent et si $MX=\lambda X$, alors $MAX = AMX = \lambda AX$. Donc $X\in E_\lambda \implies AX\in E_\lambda$, i.e. $E_\lambda$ est stable par $A$ (tu remarqueras qu'évidemment $E_\lambda$ est stable par $M$ !)

    On peut donc regarder les endomorphismes $A,M$ restreints à $E_\lambda$. $M$ restreint à $E_\lambda$ c'est très facile puisque par définition si $X\in E_\lambda$, alors $MX= \lambda X$, donc la restriction de $M$ à $E_\lambda$ est $\lambda id_{E_\lambda}$. Maintenant si $X\in E_\lambda$, $A^2X= MX = \lambda X$, donc $A$ restreint à $E_\lambda$ est une racine carrée de $\lambda id_{E_\lambda}$. Mais $A$ est aussi un endomorphisme symétrique défini positif sur cet espace (puisque ça ne dépend que du produit scalaire )

    Maintenant on peut donc appliquer la théorème spectral à ce sous-espace $E_\lambda$ et obtenir $PAP^{-1} = D$, $D$ une diagonale. Mais en mettant au carré on obtient $\lambda Id$. ça restreint beaucoup les valeurs que $A$ peut prendre sur $E_\lambda$, non ?
    Maintenant comme $\R^n = \bigoplus_\lambda E_\lambda$ et que $A$ est unique sur chaque $E_\lambda$, $A$ est unique sur $\R^n$.
  • Bonjour Maxtimax,

    Je pense que je comprends assez bien la logique de ta démonstration passant par les sous-espaces, bien que je ne sois pas à l'aise avec la manipulation des restrictions de matrices à des sous-espaces... Mais, admettons que je sois à l'aise ; il y a quand même un point qui ne me paraît pas clair :

    Tu dis : "$A$ restreint à $E_\lambda$ est une racine carrée de $\lambda id_{E_\lambda}$"

    Je comprends que si $a$ désigne l'endomorphisme associé à $A$ et $a_{E_\lambda}$, la restriction de $a$ au sous-espace $E_\lambda$, alors, il existe un base $B_\lambda$ de vecteurs propres de $E_\lambda$ dans laquelle $a_{E_\lambda}$ est diagonalisable par une matrice $D_\lambda$ qui comporte (ou qui est constituée de, je ne sais pas ce qu'il en est réellement... comme j'ai dit, je ne suis pas à l'aise avec ça) le bloc :
    $$\begin{pmatrix} \sqrt{\lambda} & & [0] \\ & \ddots & \\ [0] & & \sqrt{\lambda} \end{pmatrix}$$
    Si c'est bon jusqu'à présent, il me semble qu'on peut dire qu'en généralisant à tous les sous-espaces, en considérant $\mathbb{R}^n=\bigoplus E_\lambda$, et en prenant la base $B=\bigcup B_\lambda$, on devrait conclure que $A$ se diagonalise par une matrice $D$ qui comporte tous les $\sqrt{\lambda}$ en diagonale.

    Mais je ne vois pas le lien avec ta phrase : "$A$ est unique sur $E_\lambda$" ; tout ce qu'il me semble pouvoir être dit, c'est que $A$ se diagonalise sur $E_\lambda$ (par $D_\lambda$, justement).

    Car supposons maintenant que j'imagine qu'il existe une autre matrice $B$, définie positive, telle que $B^2=M$ ; si j'applique ton même raisonnement à $B$, je vais aboutir à la même conclusion que $B$ se diagonalise sur $E_\lambda$ (par $D_\lambda$, justement) ; et ensuite que $B$ se diagonalise par une matrice $D$ qui comporte les $\sqrt{\lambda}$ en diagonale. Mais qu'est-ce qui me prouve que $B=A$ ?

    Comme tu conclus bien que "$A$ est unique", il y a manifestement quelque chose que je n'ai toujours pas compris. Je ne sais si mes explications ont été claires...
  • Oui tes explications sont claires, pas de souci !
    Ce qui impose l'unicité de $A$ restreinte à $E_\lambda$ c'est que $A$ restreinte à $E_\lambda$ est une homothétie dans une certaine base ($B_\lambda$). Mais être une homothétie sur une base, c'est pareil que sur tout l'espace ! Donc $A$ restreinte à $E_\lambda$ est égale (vraiment égale !!) à $\sqrt \lambda id_{E_\lambda}$
  • D'accord, je médite tout ça...

    Ceci dit, juste pour info, j'ai imaginé un autre moyen qui se dispense des sous-espaces, mais la conclusion manque. Je le soumets tout de même (c'est peut être génial...) :

    Je reprends (pour clarté) les notations : $M$ est une matrice définie positive réelle et je veux montrer qu'il n'y a qu'$1$ matrice définie positive réelle $A$ qui vérifie $A^{T}A=A^2=M$.

    Je laisse tomber le fait qu'on peut facilement en exhiber une et je m'intéresse à l'unicité. Je suppose donc qu'il y en a $2$ : $A$ et $B$. Comme $A$ commute avec $M$, il existe une même matrice $P$ telle que $A=P \Delta_A P^{-1}$ et $M=P D P^{-1}$. Comme $B$ commute avec $M$, il existe une même matrice $Q$ telle que $B=Q \Delta_B Q^{-1}$ et $M=Q D Q^{-1}$. De $A^2=M$, on déduit que $\Delta_A^2=D$ et donc $\Delta_A=D^{1/2}$ et donc $A= P D^{1/2} P^{-1}$. De $B^2=M$, on déduit que $\Delta_B^2=D$ et donc $\Delta_B=D^{1/2}$ et donc $B= Q D^{1/2} Q^{-1}$.

    Ensuite, puisque par hypothèse, $P D P^{-1}=Q D Q^{-1}$, ne peut-on pas facilement en déduire que $P D^{1/2} P^{-1}=Q D^{1/2} Q^{-1}$ ??? Ce qui montrerait que $A=B$, youpi !

    Plus sérieusement, c'est une bonne piste, ou est-ce que je m'égare ? (merci par avance de ta patience).
  • facilement, facilement.. ça dépend de ce que tu considères facile :-D à nouveau, avec les espaces propres effectivement on peut le déduire très simplement, mais si tu n'es pas à l'aise avec c'est plus compliqué, et je ne vois pas de manière immédiate de le faire (mais peut-être que c'est parce que je pense beaucoup en termes d'endomorphismes et peu en termes de matrices)

    Si tu veux, voilà une autre approche, plus matricielle :


    Soit $R$ un polynôme d'interpolation qui vaut $\sqrt \lambda_i$ en $\lambda_i$, pour toutes les valeurs propres $\lambda_i$ de $M$.

    Soit $P$ telle que $PMP^{-1}, PAP^{-1}$ sont diagonales, avec les valeurs propres mises dans "le bon ordre", c'est-à-dire quelque chose comme $\lambda_1 \leq \lambda_1 \leq ... \leq \lambda_k$ (tu mets $\lambda_1$ autant de fois qu'il y en a, puis $\lambda_2$ pareil etc. ), et pour $A$ tu auras alors $\sqrt{\lambda_1}\leq \sqrt \lambda_1 \leq ...\leq \sqrt \lambda_n$. J'appelle ces deux matrices diagonales $D$ et $D^{1/2}$ avec tes notations.

    Alors tu vérifies facilement que $R(D) = D^{1/2}$ : un polynôme appliqué à une matrice diagonale, ça fait juste le polynôme sur chacune des entrées diagonales. En exprimant ça en fonction de $M$ et $A$ : $R(PMP^{-1}) = PAP^{-1}$. Maintenant on vérifie facilement que $R(PMP^{-1}) = PR(M)P^{-1}$, donc $PR(M)P^{-1} = PAP^{-1}$, donc $R(M) =A$.

    Mais AH ! magie, $R$ ne dépendait pas du tout de $P$ ni de $A$, il dépendait juste de $M$. Et je viens de prouver que $R(M) = A$. Donc on a unicité.
  • Et bien, c'est plutôt ça qui est génial. Cette fois-ci, j'ai tout compris. Si je veux pinailler, je peux dire que $R(M)=A$, puis que $R(M)=B$, donc $A=B$, n'est-ce pas ?

    Juste ceci : "$P^{-1}MP$ est diagonale" ; ce ne serait pas plutôt $PMP^{-1}$ ? (vu qu'on part de $M=P D P^{-1}$ ; remarque, ça ne change rien)

    "polynôme d'interpolation" : n'importe lequel ?
  • Oui, tu peux pinailler ainsi si ça t'amuse ;-)

    Je ne crois pas avoir écrit que $P^{-1}MP$ était diagonale, mais de toute façon que ce soit $P$ ou $P^{-1}$ l'argument est le même.

    Oui, n'importe lequel. Tu peux en prendre un spécifique si ça t'amuse, mais la preuve convient avec n'importe quel $R$ qui vérifie $R(\lambda_i) =\sqrt \lambda_i$
  • Bien, merci beaucoup ! Je vois que j'ai inversé $P^{-1}MP$ et $PMP^{-1}$ ; je fatigue... j'arrête les maths pour ce soir !
  • Il existe une astuce économique pour établir l'unicité : si $M$ est sym. positive, on en désigne les valeurs propres par $\lambda_1,;;;, \lambda_k$ (sans les répéter) et ensuite on désigne par $\mu_1,..., \mu_k$ les racines positives de ces réels, on appelle $P$ le polynôme de degré $\leqslant k-1$ qui envoie les $\mu_i$ sur les $\lambda_i$ respectivement ; alors, si $A$ est symétrique positive et si $A^2=M$, on a $A=P(M)$.

    j__j
  • john_john : oui, c'est d'ailleurs la solution que j'ai proposée 4 messages plus haut
  • Maxtimax : ah ben oui, pardon, j'ai dû louper ton message dans le séquence !
  • j_j : pas de souci, tu as eu raison de proposer une solution en apparence plus simple que la première que j'avais mise ;-)
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