Applications des représentations

Je suis en train de mettre en ordre mon cours et mes connaissances sur les représentations des groupes. Pour l'instant, ce que je connais, ce sont uniquement les représentations linéaires complexes, principalement des groupes finis, mais j'ai commencé à me plonger dans le cas (localement) compact et les groupes/algèbres de Lie.

Ce que j'aimerais savoir, étant donné que c'est quelque chose que je trouve relativement sympa en maths, c'est... quels problèmes ça permet de résoudre ? J'ai pu étudier les propriétés des représentations des groupes finis, des groupes ci, des groupes ça, etc, et d'accord c'est sympa d'étudier un truc en détail, mais, qu'est-ce qu'on peut faire avec ? J'ai vu une conférence (assez nulle, mais passons) sur l'application des représentations en chimie théorique, c'est davantage en mathématiques que ça m'intéresse. Je sais que les représentations sont censées intervenir à plein d'endroits, mais on ne m'a jamais rien donné de concret quand j'étais encore à la fac (et ce n'est pas faute d'avoir demandé à un "spécialiste", hein...)

Est-ce que vous pouvez me lister quelques problèmes qui ont été résolus à l'aide de la théorie des représentations (de préférence en restant dans le cadre linéaire complexe, pour le moment) ? Que ce soit de l'algèbre, de l'analyse, de la géométrie, peu importe. Merci !

Réponses

  • Etudier les représentations galoisiennes de groupes de Galois des corps finis sur l'homologie étale est un bon moyen de compter les points des variétés sur des corps finis si ce genre de trucs t’intéresse.
    Globalement pas mal de choses se lisent sur les representations des groupes de Galois pour des situations arithmétiques (ne serait ce que l'expression de la théorie du corps du classe).
  • En algèbre :
    Les preuves usuelles du théorème de Burnside (je crois ?) qui dit qu'un groupe d'ordre impair est résoluble utilisent de la théorie des représentations; pareil (me semble-t-il) pour le même énoncé avec "d'ordre $p^aq^b$".
    Il y a un résultat que j'aime bien qui dit que si un groupe (fini) $G$ agit sur un ensemble $X$ de sorte que chaque élément de $G$ ait au plus un point fixe, alors l'ensemble des éléments de $G$ qui ne fixent personne $\cup \{e\}$ est un sous-groupe de $G$. Je crois que les seules preuves connues utilisent des caractères.

    En analyse :
    La théorie des représentations de $S^1$ met en lumière la transformée de Fourier sur $S^1$. Quand tu généralises ( à des groupes de Lie compacts par exemple, ce qui inclut les groupes discrets) tu obtiens une théorie de Fourier plus générale; qui, j'imagine, peut être très pratique (pas d'exemple précis mais c'est que je ne suis pas analyste :-D ) . Pour les groupes finis il me semble que ça donne la Fast Fourier Transform (FFT) en informatique.

    Je crois par ailleurs que la théorie des représentations de $S_n$ a des applications en combinatoire.
  • En théorie des nombres : le théorème de Chebotarev est une vaste généralisation du théorème des nombres premiers. Au lieu de compter les nombres premiers plus petits que $x$, on se donne une extension galoisienne de corps de nombres $L/K$, et on compte les idéaux premiers de $K$, de norme plus petite que $x$, dont l'automorphisme de Frobenius associé dans $Gal(L/K)$ est prescrit. Le théorème de Chebotarev donne un développement asymptotique de cette quantité, et celui-ci a d'innombrables applications. Pour obtenir ce résultat (et encore d'autres choses plus fines) on passe par des fonctions $L$ d'Artin, des généralisations de la fonction $\zeta$ de Riemann. Celles-ci sont associées aux représentations (complexes) du groupe de Galois de $L/K$, et en général si on sait dire des choses sur ces représentations, on sait dire des choses sur les fonctions $L$ associées, et donc sur la répartition des nombres premiers ;-)
  • Les applications en analyse, avec les transformations intégrales (Fourier, Laplace etc) ça peut me paraître intéressant. Si ça permet de résoudre des équations différentielles, des EDP, des équations intégrales/intégro-différentielles etc, ça aura immédiatement des applications en physique, et ça c'est chouette.

    Typiquement, je m'attends soit à des applications en analyse (analyse fonctionnelle, analyse harmonique, théorie analytique des nombres...), soit à des trucs algébriques hyper abstraits comme ceux que NoName a mentionné (corps de classe, homologie étale... ça m'intéresse parce que beaucoup de choses m'intéressent, mais je n'ai pas encore le niveau pour ça). J'attends de voir ce que d'autres auront à répondre !

    EDIT : Poirot a écrit en même temps que moi, voilà une application à la théorie des nombres où j'ai au moins une vague idée de ce dont on parle :-D
  • @Homo Topi

    si tu arrives à télécharger ce pdf (ce que je n'ai pu faire), tu trouveras page 236, une liste des applications et avancées récentes en représentations des groupes finis... (théorème de Fermat-Wiles, conjecture de Sato-Tate, théorie des surfaces etc...)
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  • Une dernière chose, dans la liste des applications, il y a ceci...

    Un rapport avec la question posée par @Claude Quitté ?

    Bon week-end !
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  • @df : je n'ai pas réussi à télécharger le PDF non plus, pour l'instant.
  • Tu peux regarder la question 3 de l'exercice 71 de mon livre "Probabilités et Processus Stochastiques".
    http://www.iecl.univ-lorraine.fr/~Olivier.Garet/livre-pps

    On calcule la probabilité qu'une marche aléatoire sur un groupe non commutatif revienne en zéro au temps n.

    L'énoncé est dans l'extrait ci-dessous:
    http://www.iecl.univ-lorraine.fr/~Olivier.Garet/livre-pps/extrait.pdf
  • @aléa : merci :)

    @df : oui, ça a marché !
  • Hello,
    Plus modeste (que le pdf pointé par df) : le $p^a q^b$ théorème de Burnside in http://math.oregonstate.edu/~swisherh/JulieLinman.pdf. Tout groupe d'ordre $p^aq^b$ où $p,q$ sont deux premiers distincts, est résoluble.
    Pour comprendre le sel de l'histoire, je recommande de lire les commentaires de T.Y. Lam à la page 469 du II dont j'attache un extrait. cf http://www.ams.org/notices/199803/lam.pdf et http://www.ams.org/notices/199804/lam2.pdf. La preuve ce ce théorème de Burnside fait l'objet d'exercices de Serre, Représentations linéaires des groupes finis, exos 3,4,5 p. 69 et exo 4 p. 8188972
  • Plus modeste, mais plus proche de mon niveau :-D.

    Dans le Serre, je trouve que la grande majorité des exercices font étudier des représentations "pour étudier des représentations", mais pas pour autre chose. Un exemple comme ça, où on va passer par des représentations pour trouver des propriétés sur le groupe représenté, ça j'aime bien, ça me fait penser à la classification des groupes finis simples : on en entend souvent parler quand on demande à quoi servent les représentations, mais on trouve rarement des exemples concrets d'application des représentations pour prouver quelque chose dans la classification.

    J'avais repéré un exercice dans le Serre, où il fait démontrer que si un groupe fini admet une représentation irréductible fidèle, alors le centre du groupe est cyclique. Je n'ai aucune idée à quoi ça peut servir, mais ce résultat ne peut pas être anodin.
  • Une application assez originale, les caractères d'un groupe permettent de calculer le spectre des graphes de Cayley du groupe donné !
    C'est une application directe de la théorie des représentations des groupes finis qui utilise simplement l'écriture de l'endomorphisme d'adjacence d'un graphe de Cayley comme somme de représentation régulière.
  • Deux ou trois choses que je sais d'elle (la représentation linéaire)...

    D'après ce que j'ai compris, la philosophie de la théorie est de se transporter (via un homomorphisme de groupes) du monde abstrait (et angoissant) des structures vers celui plus prévisible de l'algèbre linéaire. L'étude des représentations de $G$ fournit ainsi des informations sur $G$.

    Si par exemple, pour $K=\mathbb{C}$, chaque représentation irréductible de $G$ de la forme $\rho: \: G \longrightarrow GL(V)$ est de dimension $1$ $(\dim V=1)$, alors on en déduit que $G$ est abélien ! (Une représentation irréductible n'est pas forcément de dimension 1...)
    Ce qui est dingue, c'est que le lien entre la dimension de $V$ et la commutativité de $G$ ne saute pas aux yeux (pas aux miens en tout cas !).

    Enfin, il y a aussi un côté sombre à la théorie des représentations: le côté modulaire lié aux corps dont la caractéristique positive $p$ divise l'ordre de $G$.
    Et il est très impliqué dans la classification des groupes finis.

    Je me déconnecte un petit moment. Je commence à écrire "il apparait" au lieu de "il apparaît".
    C'est clairement pour moi un déshonneur et il est temps de partir en vacances !

    Je vais reprendre ma randonnée là où je l'ai arrêtée l'année dernière: au pied du cirque de Gavarnie (Hautes-Pyrénées). Et si je survis au froid, aux orages, chutes de pierres, chutes tout court, à la déshydratation, au manque de sommeil, à la faim, aux ours, aux vautours, aux hyènes: il y a des chances pour que je retrouve ce cher forum à la rentrée.
    Ca devrait bien se passer.

    PS: je poste de courts extraits d'un très intéressant article sur la théorie des représentations (encore en Anglais, désolé) mais très instructif.
    Il est tiré du "Princeton companion to mathematics". Les lettres sont un peu floues mais en agrandissant, ça se lit bien.

    Cordialement
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  • Je crois qu'il y a des résultats très sympathiques de cette théorie en chimie : molécules/cristallographie. Après je n'ai pas de références dessus malheureusement...
  • J'en parlais dans mon premier message, oui. En gros ils utilisent les caractères du groupe des symétries d'une molécule pour en approximer la structure électronique.
  • D'ailleurs j'ai lu que si l'on dispose d'un produit tensoriel de représentations (pas nécessairement irréductibles) alors on peut décomposer ce dernier en somme de représentations irréductibles. Comment pourrait-on illustrer cette propriété dans le cas des groupes finis (par exemple groupe symétrique ou diédral) ?
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