Nombres premiers et $\cos$

On pose $a=2\cos\left(\frac{2\pi}7\right)$, $b=2\cos\left(\frac{4\pi}7\right)$ et $c=2\cos\left(\frac{6\pi}7\right)$. Soit $P\in\mathbb Z[X,Y]$ symétrique. On a pour tout $n\in\mathbb N$,
$P(b,c)a^n+P(a,c)b^n+P(a,b)c^n\in\mathbb Z$. Peut-on trouver un tel $P$ tel que l'ensemble des premiers $p$ ne divisant aucun des $P(b,c)a^n+P(a,c)b^n+P(a,b)c^n$ ($n\in\mathbb N$) soit infini ?

Réponses

  • C'est une récurrence linéaire d'ordre $3$ qui se diagonalise dans les entiers $\Z[a]$ (où $a = \cos(2\pi / 7)$) du corps de nombre $K=\Q(a)$. Avec $P(c,a)$ plus besoin que $P$ soit symétrique.

    Plus généralement un vecteur $v_0 \in \Z^3$ et une matrice $A \in M_3(\Z) \cap GL_3(\Q)$ et $v_n = tr(A^n v_0)\qquad $ (ici $A$ est la matrice de la multiplication par $a$ dans $\Q[a]$ et $P(b,c) = \sum_{j=1}^3 v_0(j) a^{j-1}$)

    La suite $v_n$ est périodique $\bmod\, p$ donc une fois $p$ fixé on peut trouver les $n$ tels que $tr(A^n v)= 0 \bmod p$.

    Est-ce qu'on peut conjecturer qu'il suffit qu'il existe un $p$ (non-ramifié dans $K$, qui ne divise pas $\det(A)$ ni les $v_0(j)$..) qui ne divise aucun des $Tr(P(b,c) a^n)$ pour qu'il y ait une infinité de tels $p$, en suivant la logique que s'il n'y a qu'un nombre fini de $p$ c'est qu'il y a une obstruction simple qui fait que la suite tombe toujours sur $0 \bmod p$ ?

    Cette conjecture sur les réductions des récurrences linéaires doit avoir déjà été étudiée.
  • $\def\Gal{\text{Gal}}\def\Tr{\text{Tr}}\def\ord{\text{ord}}\def\F{\mathbb F}\def\GL{\text{GL}}$@Joapa Je fais le PARI que le polynôme constant $P = 1$ convient. Sauf que je n'ai pas de preuve pour l'instant. Vu le côté alambiqué de ta question, je pense que tu nous caches quelque chose. Est ce que tu nous a tout dit ? En VRAC, quelques points qui militent dans ce sens.

    $\bullet$ Je note $L = \Q(\root 7 \of 1) = \Q(\zeta_7)$. C'est une extension galoisienne de $\Q$, 6-cyclique, de groupe de Galois canoniquement isomorphe à $(\Z/7\Z)^\times$. Ma racine primitive modulo 7 préférée est $3$. Du coup, j'aime bien le générateur $\sigma$ de $\Gal(L/\Q)$ qui réalise $\zeta \mapsto \zeta^3$ sur les racines 7-ièmes de l'unité.
    $$
    \sigma(e^{2i\pi/7}) = e^{6i\pi/7}, \qquad \qquad \sigma(e^{6i\pi/7}) = e^{4i\pi/7} \qquad 3 \times 6 = 18 = 4 \bmod 7
    $$
    Pour cette raison, mais c'est un détail (sauf pour celui qui fait des calculs), je permuterais $b,c$. Mais cela ne change rien, c'est pour mézigue.

    $\bullet$ On dispose du sous-groupe $H = \{\pm 1\}$ de $(\Z/7\Z)^\times$ et $-1$ correspond à la conjugaison complexe. Je note $K = L^H = L \cap \R$, extension 3-cyclique de $\Q$, de groupe de Galois engendré par la restriction de $\sigma$ à $K$. Tes $a,b,c$ sont les périodes de Gauss de $H$, sont $\Q$-conjugués : $\sigma(a) = b$ et $\sigma(b) = c$ avec mes choix. Et l'on a $K = \Q(a) = \Q(b) = \Q(c)$ avec $b = -a^2 - a+1$ et $c = a^2 -2$. Je vais privilégier $a$. Le polynôme minimal sur $\Q$ de $a$ est
    $$
    F = X^3 + X^2 -2X -1 = (X -a)(X-b)(X-c) \qquad\qquad abc = 1
    $$
    $\bullet$ Une première cerise sur le gâteau c'est que l'anneau des entiers de $K$, que je note $B$, c'est $\Z[a] = \Z[b\rbrack = \Z[c]$. On s'attendrait à $\Z[a,b,c]$ mais il y a cerise justement. Et $a,b,c$ sont des unités de $B$. Par ailleurs, le groupe des unités est de rang 2
    $$
    B^\times = \{\pm 1] \cdot \langle a\rangle \cdot \langle b\rangle \simeq \{\pm 1\} \times \Z^2
    \qquad\qquad \text{rappel :} \qquad abc = 1
    $$
    Conforme au théorème de Dirichlet $B^\times \simeq \Z^{r_1 + r_2 -1} \times \text{groupe fini}$ où $(r_1,r_2)$ est la signature de $K$ (ici $r_1=3$, $r_2 = 0$).

    Ce rang 2, c'est bon pour nous. Je veux dire que l'on ne pourra pas faire le coup que l'on fait en degré 2. Par exemple pour Fibonacci via $\Z[\phi]^\times$, qui est de rang 1 et qui permet de démontrer que pour tout entier $f \ge 2$, $\{ n \in \Z \mid F_n \equiv 0 \bmod f\}$ est un idéal NON trivial de $\Z$. Je me comprends (que je dis). Et c'est pour cela que je propose le polynôme symétrique $P = 1$. Jusqu'à preuve du contraire.

    $\bullet$ Autre bonus. Le polynôme galoisien 3-cyclique $F(X)$ est homographique via l'homographie $h : z \mapsto -(z+1)/z$ d'ordre 3. C.a.d. que si $F$ admet une racine $x$ quelque part (je pense à $\F_p$ par exemple), alors il en admet une ``autre'' $x' = h(x)$ et encore une ``autre'' $x'' = h(x')$. Une autre a la signification que $F(X) = (X - x)(X - \sigma(x)) (X-\sigma^2(x))$.

    $\bullet$ Ce polynôme $F$ est un cas particulier de $F_a(X) = X^3 - aX^2 - (a+3)X -1$ pour $a = -1$. Attention dans $F_a$, $a$ est un paramètre, rien à voir avec $2\cos(2\pi/7)$. Ce polynôme $F_a$ a la particularité que son discriminant est un carré : $(a^2 + 3a + 9)^2$. Il est donc galoisien. Et homographique pour la même homographie. Pour $a = -1$, $F$ est de discriminant $7^2$. Note : en ce qui concerne ce polynôme $F_a$ rechercher sur la toile ``Daniel Shanks, The simplest cubic field''.

    $\bullet$ Puisque l'on est en terrain abélien explicite, on a la loi de ``réciprocité abélienne pour les bébés'' en ce qui concerne la factorisation de $p$ dans $B$. Qui est reflétée par celle de $F$ modulo $p$, vu que $F$ n'a point de garbage. Cela donne que modulo $p$, $F$ est totalement décomposé (produit de 3 facteurs distincts) si est seulement si $p \equiv \pm 1 \bmod 7$. Ce $\pm 1$ provient de $H$. Pour $p = 7$, on a $F(X) = (X-2)^3 \bmod 7$. Et pour les autres $p$, $F$ est irréductible modulo $p$. En particulier, dès que $F$ admet une racine modulo $p$, il en admet 3.

    $\bullet$ Et maintenant, il faut s'attaquer à montrer l'existence d'une infinité de premiers $p$ tels que $p$ ne divise AUCUN $\Tr_{K/\Q}(a^n) = a^n + b^n + c^n$ pour $n \in \N$. C'est une autre paire de manches. J'ai envie de les chercher parmi les premiers $p$ totalement scindés dans $K$ i.e. $p \equiv \pm 1 \bmod 7$.

    $\bullet$ Bref, on a intérêt à être le plus clair possible sur l'arithmétique de $K$. Par exemple sur l'ordre de $a$ dans le groupe des inversibles $(B/pB)^\times$. Ce qui est la même chose que l'ordre dans $\GL_3(\F_p)$ de la matrice $M$, multiplication par $a$ sur $K$ (ou encore la matrice compagnon française de $F$)
    $$
    M = \pmatrix {0 & 0 &1\cr 1 & 0 & 2\cr 0 & 1 &-1\cr}
    $$
    Cet ordre contrôle la périodicité de la suite $a^n \bmod p$ dans $(B/pB)^\times$. Rappel : on a la main sur $B/pB$ : c'est un produit de 3 corps $\F_p$ si $p \equiv \pm 1 \bmod 7$ et un corps $\F_{p^3}$ sinon (une fois pour toutes, je vire $p = 7$ qui est totalement ramifié).
    J'ai d'autres renseignements mais cela commence à faire un peu long je trouve.
  • claude quitté écrivait :
    > Vu le côté alambiqué de ta question, je pense que tu nous caches quelque chose. Est-ce que tu nous as tout dit ?

    Merci pour ton message détaillé. J'ai bien tout dit. Je ne cache rien (à part le fait que si on a une démonstration pour ce cas particulier, pourra-t-on généraliser à des entiers algébriques conjugués ?
  • @Joapa

    1) Généraliser quoi ? Peut-être que tu pourrais prendre le temps de mettre un contexte précis et une question précise ?

    2) Tout dire ou pas ? Moi, voilà ce que je pense. Il y des matins au café où je me dis : tiens je ne sais pas quoi faire. Je vais considérer $a = 2\cos(2\pi/7)$, $b = 2\cos(4\pi/7)$, $c = 2\cos(6\pi/7)$ et examiner les $a^n + b^n + c^n \bmod p$ pour $n \in \N$, cela pourra occuper ma journée. Et puis pourquoi pas glisser un polynôme symétrique $P \in \Z[X,Y]$ dans ... tout cela est tellement naturel.

    3) Où est ce que j'en suis de vouloir montrer qu'il existe une infinité de premiers $p$ tels que $p$ ne divise AUCUN $(a^n + b^n + c^n)_{n \in \N}$ ? Au point mort. Et j'ai compris assez vide que c'était en dehors de mes compétences. Conclusion : je capitule.

    Ce binz de mixture from http://www.numdam.org/article/JTNB_2001__13_1_303_0.pdf, ce n'est pas pour mézigue.89356
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