Exercices sur les idempotents ?

Avec mon fil sur la localisation, je suis tombé sur un certain nombre de problèmes avec les "objets de base" de la théorie des anneaux. Pour la plupart des notions, j'ai des supports avec lesquels je peux travailler, mais il y a une notion pour laquelle je n'ai quasiment rien : les idempotents. J'ai fouillé mon cours de fac sur les anneaux (xptdrlol il sert à rien ce cours, je ne sais pas pourquoi je le garde), mon bouquin d'Algèbre L3, le bouquin d'Atiyah-Macdonald (le mot "idempotent" n'est même pas dans l'index).

Du coup, un peu sur le modèle de l'autre fil, j'aimerais vous demander quelles sont les propriétés importantes à connaitre* sur la notion d'élément idempotent, sous la forme d'exercices que je dois résoudre moi-même.

Je sais déjà que si $e$ est un idempotent d'un anneau $A$, alors il en est de même pour $(1-e)$. J'ai même vu que c'est un cas particulier d'idempotents orthogonaux, mais d'où vient cette terminologie (rappel pour moi : deux idempotents $x$ et $y$ sont dits orthogonaux si $xy=0$) ?

Il y a le fameux truc sur lequel je bloque déjà dans l'autre fil : si $(e)=(e')$ sont deux idéaux engendrés par deux idempotents, alors $e=e'$ ? C'est censé marcher dans un anneau fini, dans le cas général je ne sais pas.

Quoi d'autre ? Merci !



*connaitre sans accent circonflexe sur le i, spéciale dédicace au correcteur orthographique de AD !

Réponses

  • Dans l'algèbre des endomorphismes d'un espace euclidien, la projection orthogonale $\pi_V$ sur un sous-espace $V$ est un magnifique idempotent. À quelle condition a-t-on $\pi_V\pi_W=0$ ?.
  • Si $e^2=e$, $e'^2=e'$, $e=ae'$ et $e'=eb$, peux-tu calculer $ee'$ de deux manières différentes ?
  • Pour le deuxième :

    On a d'une part $ee' = eeb=eb=e'$ et d'autre part $ee' = ae'e'=ae'=e$. Donc $e=e'$.

    Pour le premier, je vais y réfléchir !
  • Pour le premier : $W \subseteq V^{\bot}$ ? Je ne sais pas si on peut faire mieux.
  • $W\subset V^\bot$ il n'y a pas une manière agréable de le dire ?
  • Je mélange encore plein de choses sur l'orthogonalité, donc je suis frileux avec ça. Je sais que c'est quelque chose que je dois retravailler mais j'ai du mal avec la façon dont c'est fait dans mes bouquins, donc je n'avance pas très bien.

    Qu'est-ce que je suis censé trouver ? $V$ et $W$ sont en somme directe orthogonale ? Je ne sais pas si c'est "plus agréable". J'avais écrit $W \subseteq \ker(\pi_V)$ mais ça n'a pas l'air mieux non plus :-S
  • $V$ et $W$ sont orthogonaux ! (GBZM essayait de te faire comprendre le nom "idempotents orthogonaux" il me semble)
  • Ils sont en somme directe orthogonale comme je disais, ou juste orthogonaux ?

    EDIT : j'ai l'impression que le mot orthogonal provient juste du fait que la multiplication d'un anneau c'est (au détail près qu'on n'a pas un corps) pratiquement une forme bilinéaire
  • $W\subseteq V^\perp$, ce n'est pas $W=V^\perp$.
  • J'ai clairement encore du mal avec ces histoires d'orthogonalité, je reverrai ça en détail prochainement. C'est quelque chose qui fait partie des nombreuses choses que je veux démêler dans ma tête.

    Vous avez d'autres exercices "fondamentaux" sur les idempotents à me proposer ?
  • Quels sont les idempotents de $\Z/n\Z$ ? et de $\C[X]/(P)$, lorsque $P$ est un polynôme donné ?
  • J'ai cherché un peu.

    Si $n$ est sans facteur carré, alors la décomposition "restes chinois" de $\mathbb{Z} / n \mathbb{Z}$ est un produit direct de corps. $x \in \mathbb{Z} / n \mathbb{Z}$ est idempotent si, et seulement si, il l'est coordonnée par coordonnée, et les seuls idempotents d'un corps sont $0$ et $1$. Donc dans ce cas, $x$ est idempotent si, et seulement si, $x \equiv 0$ ou $1$ modulo chaque facteur premier de $n$.

    Si $n$ contient un facteur carré, je réfléchis encore.
  • On peut montrer que pour tout premier $p$ et pour tout entier $\alpha\geq 1$, $0$ et $1$ sont les seuls idempotents de $\Z/p^{\alpha}\Z$.
  • Il y avait une question similaire au programme de l'Agrégation, Mathématiques Générales, 2015.

    Déterminer les idempotents de l'anneau $\mathbb{Z}/2^2\mathbb{Z} \times \mathbb{Z}/5^2\mathbb{Z}$.
    ...
  • Je me doutais du résultat, j'essaierai de le prouver.
  • Bon, alors. Je suis dans un $\mathbb{Z}/p^d \mathbb{Z}$ avec $p$ premier.

    $x$ est un idempotent si $x(x-1)=0$ modulo $p^d$.

    - soit $x=0$
    - soit $x-1=0$, c'est-à-dire $x=1$
    - soit $x \notin \{0;1\}$, mais dans ce cas, pour que $x(x-1)$ puisse s'annuler modulo $p^d$, il faut que $x$ et $x-1$ soient des puissances de $p$.

    Donc je cherche $m$ et $n$ tels que $x-1=p^m$ et $x=p^n$ (logiquement on a $m < n$), donc il faut que $p^m+1=p^n$.
    Ce qui n'arrive... jamais, car $p\geqslant 2$.
  • Attention, si $x(x-1)\equiv 0\bmod p^d$, $x(x-1)$ est un multiple de $p^d$.
    Quel est le $\mathrm{pgcd}$ de $x$ et $x-1$ ?
  • Pffff je suis fatigué, je recommence à écrire des bêtises.

    Je pense que le PGCD est forcément $1$, mais j'aimerais trouver le vrai argument...
  • C'est effectivement $1$ et c'est très facile à prouver !
  • Soit $q$ un nombre premier, si l'on suppose que $x=aq$ et $x-1=bq$, alors $bq+1=aq$, donc $q(a-b)=1$, ce qui est impossible. Donc $x$ et $x-1$ n'ont aucun diviseur premier en commun. Donc ils sont premiers entre eux.

    Il y a peut-être moyen de faire plus joli en sortant un théorème d'arithmétique, mais ça marche.
  • Bézout ?

    Tu as maintenant tout en main pour les idempotents de $\Z/p^d\Z$.
  • Comment tu fais pour utiliser Bézout pour montrer directement que les seuls idempotents de $\mathbb{Z}/ p^d \mathbb{Z}$ sont $0$ et $1$ ?
  • Bézout, c'est pour $\mathrm{pgcd}(x,x-1)$...
  • D'accord mais je ne vois quand même pas comment tu fais pour trouver une relation de Bézout :-S
  • $x-(x-1)=1$.
  • Je disais quoi sur la fatigue ? Pfffffff... merci.
  • En tout cas, si $x$ et $x-1$ sont des multiples d'une puissance de $p$, leur PGCD ne peut pas être $1$, d'où une contradiction. Il ne reste que $0$ et $1$ comme idempotents.
  • Parlant de Bézout, comment donne-t-il des idempotents de $\Z/ab\Z$ lorsque $a\wedge b=1$ ?
  • Il y a vraiment quelque chose de particulier à dire dans ce cas-là ?

    Avec ce qu'on a dit, $x \in \mathbb{Z}/n \mathbb{Z}$ est idempotent si, et seulement si, $x \equiv 0$ ou $1 \mod p_i^{k_i}$ pour tout $i$, où $n = p_1^{k_1}...p_d^{k_d}$ est la décomposition en facteurs premiers de $n$.

    A moins que c'est exactement ça que tu voulais me faire écrire.
  • J'aimerais bien un entier $e$ dont l'image dans $\Z/ab\Z$ est un idempotent non trivial.
  • Je vais essayer.

    Si $a$ et $b$ sont premiers entre eux, Bézout me donne deux entiers $u$ et $v$ (eux aussi premiers entre eux) tels que $au+bv=1$.
    On sait aussi que $\mathbb{Z}/ab\mathbb{Z} \simeq \mathbb{Z}/a \mathbb{Z} \times \mathbb{Z}/b \mathbb{Z}$.

    Par exemple, dans $\mathbb{Z}/6\mathbb{Z}$ : $6=2\times 3$ avec $2$ et $3$ premiers entre eux. Bézout donne par exemple $2 \times (-1)+3 \times 1=1$.
    Les idempotents de $\mathbb{Z}/6\mathbb{Z}$ sont $0$, $1$, $3$ et $4$. Les entiers $3$ et $4$ (par exemple) ont des images dans $\mathbb{Z}/6\mathbb{Z}$ qui sont des idempotents non triviaux.

    Mais... comment Bézout permet-il de trouver $3$ et $4$ ?

    Pour l'instant, aucune idée.
  • $au+bv=1$, et modulo $ab$, que vaut le produit $au\times bv$ ? Conclusion ?
  • Une fois cette conclusion obtenue, passons si vous le permettez en algèbre linéaire. On se donne un ev de dimension finie, disons sur $\C$, et un endomorphisme $f$. On suppose avoir un polynôme annulateur $n$ et une factorisation $n=ab\in\C[X]$, avec $a$ et $b$ premiers entre eux. On a d'après le lemme des noyaux une décomposition de l'espace en deux supplémentaires $\ker a(f)$ et $\ker b(f)$.

    Quels sont les projecteurs sur l'un parallèlement à l'autre ? Quel lien avec ce qui précède ?

    Edit : ajout de l'hypothèse oubliée, merci gai requin.
  • Ben, $au \times bv = 0$ modulo $ab$, mais je ne comprends pas ce que je suis censé faire de ça ?
  • Homo Topi. Tu t'embrouilles parce que ce n'est pas les mêmes lettres que d'habitude (je comprends, ça me le fait aussi :-D ) $au+bv =1,\ (au)(bv) =0$. Si on réécrit avec $au = e,\ bv=f$, la première égalité se réécrit $e+f=1$ (i.e. $f=1-e$) et la deuxième $ef = 0$ (i.e. $e(1-e) = 0$).
  • $e=au$ vaut $0$ modulo $a$ et $1$ modulo $b$ donc c'est un idempotent non trivial de $\Z/ab\Z$ d'après le théorème chinois.

    @Math Coss : Pour que le lemme des noyaux s'applique, il faut supposer que les polynômes $a$ et $b$ sont premiers entre eux.
  • Ce n'est pas avec les lettres que je m'embrouille. Que tu renommes ça $e$ et $f$ ou pas, je n'aurais juste jamais réussi à penser à écrire $bv = 1 - au$ et donc $au \times bv = au \times (1 - au) = 0$.
  • Donc dans $\mathbb{Z}/ ab \mathbb{Z}$, avec $a \wedge b = 1$, toute relation de Bézout $au + bv = 1$ fournit deux idempotents, à savoir $au$ et $bv$.

    Passons à l'algèbre linéaire. J'appelle $E$ l'espace vectoriel en question, sinon on ne va pas s'en sortir.

    Le lemme des noyaux dit que $\ker(n(f)) = \ker(a(f)) \oplus \ker(b(f))$. Or $\ker(n(f)) = \ker(0)=E$ car $n$ annule $f$.
    Donc on a bien $E = \ker(a(f)) \oplus \ker(b(f))$ avec $ab=n$.

    Le lemme des noyaux de mon bouquin de L2 parle de projecteurs :

    $a$ et $b$ sont premiers entre eux, donc il existe des polynômes $u$ et $v$ tels que $au+bv=1$.

    D'après mon bouquin :
    - $p:=(au)(f)$ est le projecteur de $\ker((ab)(f)) = E$ sur $\ker(a(f))$ parallèlement à $\ker(b(f))$
    - $q:=(bv)(f)$ est le projecteur de $\ker((ab)(f)) = E$ sur $\ker(b(f))$ parallèlement à $\ker(a(f))$

    Je ne vais pas recopier la démonstration de mon bouquin ici, ça n'a aucun intérêt. Par contre il me reste à trouver le lien avec ce qui précède. Le lien, c'est que les projecteurs sont les idempotents de l'anneau $\big( \mathcal{L}(E), +, \circ \big)$.
  • Il me reste les idempotents de $\mathbb{C}[X]/(P)$ où $P$ est un polynôme quelconque donné.

    Soit $\overline{Q} \in \mathbb{C}[X]/(P)$. $\overline{Q}$ est idempotent si $Q(1-Q)$ est un multiple $AP$ de $P$ dans $\mathbb{C}[X]$.

    Je tombe sur $Q = AP + Q^2$, mais il faut que je réfléchisse à ce que je peux faire avec ça. Il faut que $AP+Q^2$ ait le degré de $Q$, mais le $A$ ne m'arrange pas.
  • Il n'y a aucune différence entre la situation de $\mathbb Z/n\mathbb Z$ et celle de $\mathbb C[X]/(P)$. Dans les deux cas, c'est l'arithmétique des anneaux euclidiens qui joue.
  • Oui mais dans $\mathbb{C}[X]/(P)$ j'ai plus de mal à l'écrire.

    Dans $\mathbb{Z}/n \mathbb{Z}$ on disait que $x$ est idempotent s'il est congru à $0$ ou $1$ modulo chaque facteur premier $p_i^{k_i}$ de $n$.

    Dans $\mathbb{C}[X]/(P)$, du coup c'est pareil mais avec les facteurs irréductibles $(X-r)^{\alpha}$ de $P$ ?
  • À ceci près qu'il ne s'agit ni de premiers ni d'irréductibles, mais de puissances d'iceux.
  • C'est pourtant évident non ? $(X-r)^{\alpha}$ n'est pas un facteur irréductible, mais une puissance d'irréductible.
  • Pour les $p_i^{k_i}$ aussi, donc je pense que je me suis juste mal exprimé.

    Avec $n$, on écrivait sa décomposition $n = p_1^{k_1}\times...\times p_d^{k_d}$.

    Avec $P$ on fait pareil : $P = (X-r_1)^{\alpha_1}\times...\times(X-r_d)^{\alpha_d}$ et c'est par rapport aux $(X-r)^{\alpha}$ qu'il faut être congru à $0$ ou à $1$ pour être idempotent dans le quotient par $P$. C'est juste maintenant ?
  • Il y a aussi des idempotents rigolos dans les anneaux d'entiers $g$-adiques où $g$ n'est pas premier. Par exemple il y a deux idempotents autre que $0$ et $1$ dans $\mathbb Z_{10}$, où $10$ est bien notre dix, soit $9+1$.
    Les derniers $n$ chiffres forment les nombres $x_n$ à $n$ chiffres décimaux dont l'écriture décimale se termine par les mêmes $n$ chiffres. Niewenglowski appelait ceci les « nombres automorphes ». Par exemple pour $ n=15$ on trouve : $259~918 ~212~ 890~ 625$ ou $740~ 081~ 787~ 109~ 376$.
    La somme de ces deux nombres dans $\mathbb Z_{10}$ est $ 1$. C'est parce que l'anneau $\mathbb Z_{10}$ est isomorphe à la somme des deux anneaux intègres $\mathbb Z_2$ et $\mathbb Z_5$.
    Bonne soirée.
    Fr. Ch.
  • l'anneau $\mathbb Z_{10}$ est isomorphe à la somme des deux anneaux intègres $\mathbb Z_2$ et $\mathbb Z_5$.
    C'est un produit, pas une somme.
  • De toute façon, je connais à peine les nombres $p$-adiques où $p$ est effectivement premier, alors les autres cas c'est juste complètement hors de portée...

    Par contre, si vous avez encore des exercices théoriques importants ou des exemples fondamentaux à ma portée, je prends !
  • En effet, GaBuZoMeu, c'est bien l'anneau-produit.
  • J'ai fait le tour ?
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