Vocabulaire « noyau de matrice »

Bonjour à tous,

Quand on parle d’endomorphisme, on a facilement la notion de noyau et la notion d’image.
Dès qu’on a une application toute simple finalement même si noyau est plutôt réservé aux morphismes entre structure (il faut un « zéro » dans l’ensemble).

Un prof de prépa agreg avait insisté (si mes souvenirs sont exacts, car j’ai un doute) sur le fait qu’il n’était pas correct de parler de « noyau de matrice ».
Ou peut-être « d’image d’une matrice » ? Ou les deux ?

Bien entendu, si le contexte précise « on appellera noyau (resp. image) de la matrice ... ».

Je me dis qu’en effet, en taille $1$, disons dans $\mathbb R$, une matrice $1\times 1$ n’est qu’un réel.
Et il est curieux de parler par exemple de « l’image du nombre 3 » ou « du noyau du nombre 3 ».

Abus de langage ? Usage répandu et assumé ?

Cordialement

Dom

Réponses

  • Cela m’est revenu en regardant le fil sur le sujet de l’agrégation avec la copie d’un candidat qui demande des suggestions.
  • Une matrice réelle $1 \times 1$ n'est PAS un réel, même s'il y a isomorphisme bien entendu. Donc on ne parle pas de l'image du nombre réel $3$ même pour une matrice $(3)$ bien sûr.

    Pour le reste, je laisse ceux qui veulent du mal aux mouches en discuter B-)-
  • Il y a un isomorphisme canonique entre $M_n(\mathbb R)$ et $\mathcal L(\mathbb R^n,\mathbb R^n)$
    (attention, je ne mets pas "un espace vectoriel de dimension $n$", mais bien $\mathbb R^n$).

    En particulier, l'abus de langage est tout à fait acceptable. En particulier, puisque l'application linéaire associée à $M$ est simplement décrite par $X\mapsto MX$, lui donner le nom "$M$" est aussi quelque chose qu'on fait usuellement.

    En fait, une manière de faire les choses "sans abus de langage", qui revienne exactement à la même chose, serait de définir $M_n(\mathbb R)$ comme $End(\mathbb R^n)$, et de dire que les tableaux de nombres ne "sont" pas des matrices, mais représentent des matrices. Mais ça reviendrait au même.

    Enfin bon, l'idée c'est que les gens qui font des maths ont intégré que "canoniquement isomorphe" veut dire "égal", et que ça n'a pas de sens de distinguer entre les deux- dire qu'une matrice "n'est pas une application linéaire $\mathbb R^n\to\mathbb R^n$" c'est du même niveau que dire qu'un rationnel n'est pas un réel. (attention à nouveau il est important que je mette $\mathbb R^n$, ou plus généralement "un espace vectoriel de dimension $n$ muni d'une base" et pas "un espace vectoriel de dimension $n$")

    EDIT : bien sûr j'ai parlé du cas carré, mais comme le message de MathCoss suivant l'indique, il n'y a aucune raison de se restreindre à ce contexte - l'important est que les bases soient fixées des deux côtés, et il n'y a alors aucune ambiguïté possible
  • Faut pas pousser, ai-je envie de dire. Quand on a une matrice $A$ de taille $m\times n$ à coefficients dans $K$, il vient avec elle une application $u_A:K^n\to K^m$, $X\mapsto AX$. Le noyau, l'image, le rang, les (sous-)espaces propres ou caractéristiques, etc., de $A$ sont, par une convention qui ne me paraît pas extravagante, ceux de $u_A$.

    On définit le rang d'une matrice comme la dimension de l'espace engendré par ses colonnes. Le théorème du rang dit alors que $\mathop{\mathrm{rg}}A+\dim\ker u_A=n$. Ne serait-il pas plus agréable d'écrire $\mathop{\mathrm{rg}}A+\dim\ker A=n$ ?

    Ton prof. interdisait de parler de noyau de matrices, s'interdisait-il aussi d'écrire $\ker(A-2\mathrm{I}_n)$ par exemple ?
  • J’entends bien Chalk.
    J’ouvre ce fil non pas pour embêter les diptères mais on ne sait jamais, ça pourra aider des candidats peut-être, à quelques examens et concours.
    Amusant cela dit : identifier $3$ à $(3)$ te semble davantage abuser que d’identifier $(3)$ à $x\mapsto 3x$, je le note (:D

    Oui Maxtimax, je me doute qu’on identifie la matrice à un endomorphisme.

    Par contre quand la matrice représente autre chose, évidemment il faut faire attention à ce que l’on raconte (matrice d’une forme bilinéaire symétrique, matrice magique, etc.).

    Pour moi, le prof avait été très clivant : c’était un « non » catégorique.
    Mais comme je n’ai plus le contexte exact, il m’est impossible de rapporter son propos de manière précise.

    Édit : Math Coss, je viens de voir ton message.
    En effet j’ai pensé à tout ça également. J’essaye de me souvenir, en vain.
    Ce n’était pas un farfelu d’ailleurs. Il a certainement été plus précis que ce que je raconte.

    Pour le rang d’une matrice ça ne pose aucun problème car c’est une définition sur les colonnes qui est explicite.
  • Dom a écrit:
    identifier [...] à [...] te semble davantage abusé que d’identifier [...] à [...] ,je le note
    Dans le cas précis où on parle de noyau et d'image oui, parler de l'image du nombre $3$ est un abus que je n'ai jamais vu pour parler de l'image de la matrice $(3)$.

    Alors qu'identifier canoniquement une matrice à son application linéaire dans $\R^n$, c'est un "abus" constant, tout est question de convention.

    Si on enlève TOUS les abus de langage des mathématiques (et j'ai bien tous), même un livre de niveau L1 ne tiendrait pas en 25 volumes ; je ne parle même pas du niveau master ... La puissance des maths, c'est aussi le langage, et de ce point de vue là je rejoins CC. Une preuve de maths n'est pas une preuve au sens logique du terme, mais c'est un moyen de convaincre tout le monde qu'une preuve logique existe vraiment.
  • Évidemment que cet extrait n’apporte aucune accréditation. Je ne connais d’ailleurs aucun des intervenants.
    Mais il me semble que ça dit au moins que je n’invente pas le thème de ce fil.
    C’est issu de ce forum : https://www.ilemaths.net/sujet-passage-du-ker-de-la-matrice-au-ker-de-l-application-lineaire-354556.html115808
  • Je me bats de plus en plus souvent avec des élèves pour qui matrices carrées et endomorphismes (ou plus généralement matrices et applications linéaires), c'est la même chose.

    Il faut vraiment insister pour leur faire dire que pour passer de l'un à l'autre, il faut tout de même se donner :
    • un espace vectoriel de départ E ayant la bonne dimension
    • un espace vectoriel d'arrivée F ayant la bonne dimension
    • une base e de E
    • une base f de F

    Combien de fois ai-je entendu : "On considère l'endomorphisme $u$ canoniquement associé à la matrice $A$." sans que l'élève qui a prononcé cette phrase soit capable de dire précisément de quel espace vectoriel $u$ est un endomorphisme, ni ce que signifie le "canoniquement"... avec bien souvent la croyance que n'importe quel espace vectoriel de dimension finie posséderait une base canonique !

    Je pense donc que ce prof interdisait cet abus de langage pour ces raisons... tout simplement parce qu'il y avait trop d'abus.
  • Bien sûr que tu n'inventes pas ;-)
    Certaines personnes ont du mal à accepter que certaines identifications sont canoniques (ou à accepter la notion de convention), pour différentes raisons - parfois un manque de compréhension, parfois pas.

    Comme le dit Chalk, il faudrait leur poser la question de tous les autres abus de langages utilisés, voir quelle est leur position à ce sujet - je doute qu'elle soit cohérente en général
  • C’était peut-être davantage une précaution qu’une interdiction, en effet.
  • @dom: le noyau de $f$ est $\{(x,y)\mid f(x)=f(y)\}$. Qui que soit $f$ :-D
    Aide les autres comme toi-même car ils sont toi, ils sont vraiment toi
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