"Sentiers battus" et raisonnement
Je n'ai aucune idée de la meilleure section pour ce fil. Mais je voulais parler d'un truc.
J'ai ouvert un fil sur la suite des $\sin(n)$, je cherchais à montrer qu'elle ne converge pas parce que j'estime que c'est quelque chose que je dois savoir faire mais je n'avais aucune idée comment la preuve marche. Donc je suis en train de réfléchir sur les sinus, ce que je connais sur le sinus... et l'un des premiers conseils qu'on me donne, c'est de regarder les $e^{in}$ à la place. Je n'y aurais pas pensé tout seul avant aujourd'hui, mais j'ai peut-être appris un truc.
Puisque notre monde physique s'approxime très bien par des coordonnées réelles (espace, temps, autres grandeurs...), en maths on travaille beaucoup avec des nombres réels. On apprend, tôt ou tard, que les nombres réels, c'est quand même compliqué, alors certains résultats peuvent nous aider. Si on montre un truc sur $\mathbb{Q}$, avec des arguments de continuité/densité on peut passer à $\mathbb{R}$ entier, les caractérisations séquentielles permettent aussi de "discrétiser" certaines preuves. Donc on cherche à raisonner sur un sous-ensemble de $\mathbb{R}$ en espérant pouvoir "étendre" le raisonnement après. Ce genre de choses, en analyse, je commence à en avoir l'habitude. Bon, ça ne me dit pas forcément quoi chercher sur $\mathbb{Q}$ ni comment le montrer, mais ça peut aider.
En algèbre, on fait un peu plus l'inverse. Quoi, le polynôme ne se factorise pas bien sur $\mathbb{R}$ ? Pas grave, on passe dans $\mathbb{C}$, les valeurs propres de l'endomorphisme ne seront pas réelles mais c'est la vie. Sauf qu'en fait, en analyse, des fois ça marche aussi. Calculer telle intégrale réelle c'est trop compliqué, mais en choisissant le bon contour dans le plan complexe on peut calculer telle intégrale complexe facilement qui nous donne le résultat qu'on voulait. Je n'étais pas doué pour ça quand j'avais un cours d'analyse complexe en L3, mais depuis, je connais le principe, je ne sais juste pas encore très bien l'appliquer. C'est juste que là, je me rends compte qu'en analyse aussi, rendre le problème a priori "plus compliqué" (ou plus complexe, littéralement :-D) en fait ça peut être une bonne méthode à laquelle il faut que je pense, que j'ose essayer.
Je trouve assez contre-intuitif de se dire "tiens, je vais chercher à résoudre mon problème en me posant une question plus compliquée à la place". Mais peut-être que c'est comme ça qu'on fait des maths ?
J'ai ouvert un fil sur la suite des $\sin(n)$, je cherchais à montrer qu'elle ne converge pas parce que j'estime que c'est quelque chose que je dois savoir faire mais je n'avais aucune idée comment la preuve marche. Donc je suis en train de réfléchir sur les sinus, ce que je connais sur le sinus... et l'un des premiers conseils qu'on me donne, c'est de regarder les $e^{in}$ à la place. Je n'y aurais pas pensé tout seul avant aujourd'hui, mais j'ai peut-être appris un truc.
Puisque notre monde physique s'approxime très bien par des coordonnées réelles (espace, temps, autres grandeurs...), en maths on travaille beaucoup avec des nombres réels. On apprend, tôt ou tard, que les nombres réels, c'est quand même compliqué, alors certains résultats peuvent nous aider. Si on montre un truc sur $\mathbb{Q}$, avec des arguments de continuité/densité on peut passer à $\mathbb{R}$ entier, les caractérisations séquentielles permettent aussi de "discrétiser" certaines preuves. Donc on cherche à raisonner sur un sous-ensemble de $\mathbb{R}$ en espérant pouvoir "étendre" le raisonnement après. Ce genre de choses, en analyse, je commence à en avoir l'habitude. Bon, ça ne me dit pas forcément quoi chercher sur $\mathbb{Q}$ ni comment le montrer, mais ça peut aider.
En algèbre, on fait un peu plus l'inverse. Quoi, le polynôme ne se factorise pas bien sur $\mathbb{R}$ ? Pas grave, on passe dans $\mathbb{C}$, les valeurs propres de l'endomorphisme ne seront pas réelles mais c'est la vie. Sauf qu'en fait, en analyse, des fois ça marche aussi. Calculer telle intégrale réelle c'est trop compliqué, mais en choisissant le bon contour dans le plan complexe on peut calculer telle intégrale complexe facilement qui nous donne le résultat qu'on voulait. Je n'étais pas doué pour ça quand j'avais un cours d'analyse complexe en L3, mais depuis, je connais le principe, je ne sais juste pas encore très bien l'appliquer. C'est juste que là, je me rends compte qu'en analyse aussi, rendre le problème a priori "plus compliqué" (ou plus complexe, littéralement :-D) en fait ça peut être une bonne méthode à laquelle il faut que je pense, que j'ose essayer.
Je trouve assez contre-intuitif de se dire "tiens, je vais chercher à résoudre mon problème en me posant une question plus compliquée à la place". Mais peut-être que c'est comme ça qu'on fait des maths ?
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Réponses
Ça me fait penser à ce fil : http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?18,1941124.
On te dit "montrer que c'est positif". Alors, forcément, si tu montres que c'est minoré par $1$, tu réponds à la question, mais... pourquoi minorer par $1$ ? Dans le sens, comment avoir l'idée que c'est ça qui permet de résoudre le problème (et pas minorer par $2$, par exemple). Dans chaque problème, ça va être différent. Dans un exercice, on peut te donner l'indice, en te demandant de montrer que c'est minoré par $1$ au lieu de te demander de montrer que c'est positif. Mais quand tu raisonnes dans l'inconnu, ces idées ne viennent pas automatiquement du tout, je trouve. Il faut s'entraîner à les avoir.
Par exemple, si la question est "montrer que c'est positif" et que la seule méthode est de montrer que c'est plus grand que $1$... peut-être que je vais calculer les premiers termes de la suite, et trouver des nombres plus grands que $1$. Mais même ça, ça ne fait que confirmer que les termes sont effectivement positifs comme on me demande de le démontrer, je n'aurai pas forcément le réflexe de me dire "tiens, les premiers termes sont tous plus grands que $1$ !" et d'utiliser ça.
Mais déjà bon dans le cas $\mathbb R$ vs $\mathbb C$, il faut bien se rendre compte qu'à l'origine, les complexes ont littéralement été inventés pour simplifier l'analyse réelle (en un sens plus général d'analyse). Donc rien d'étonnant à ce qu'en cherchant à résoudre des problèmes sur $\mathbb R$, on passe par $\mathbb C$ (enfin, "rien d'étonnant" : j'ai le poids de l'histoire derrière moi qui me dit ça, mais je veux dire, historiquement, c'est tout à fait cohérent)
Après pour l'histoire de "compliquer pour résoudre", en un sens c'est effectivement comme ça qu'on fait des maths. L'une des choses les plus difficiles est de trouver la bonne généralité à nos énoncés.
"Soit $p$ un nombre premier. Montrer que $p(p+1)$ est pair" est certainement un énoncé plus difficile (psychologiquement !!) à montrer que le même en enlevant l'hypothèse de primalité. Je prends un exemple idiot parce que je n'en ai pas d'intelligent sous la main, mais ça m'est arrivé (et j'imagine à toi aussi) à de nombreuses reprises de tomber sur un énoncé, de pas savoir le prouver, puis enfin de me rendre compte que c'était facile en retirant des hypothèses.
L'un des slogans de christophe c'est "tout théorème est un cas particulier d'une évidence", et c'est plus ou moins trivial, mais ça révèle le fait que dans beaucoup de cas, la difficulté à prouver des choses est (du moins en grande partie) contenue dans le choix d'un bon énoncé. Évidemment il y a des énoncés durs à prouver, "même dans le bon cadre", mais voilà, souvent aussi il faut juste trouver le bon énoncé.
Je vais prendre un exemple moins bêta de ce phénomène, mais toujours de bas niveau. C'est beaucoup (beaucoup beaucoup) plus simple de démontrer que pour tout $n$, $\sum_{i=1}^n i =\frac{n(n+1)}{2}$ que de prouver que $1+\cdots+100 = 5050$ (cf. l'anecdote qu'on raconte à propos de Gauss).
Cet exemple révèle une deuxième raison à ce phénomène (pas présente directement dans le slogan de christophe, mais quand même en filigrane), qu'on peut voir exemplifiée aussi par le fil que Calli indique : compliquer un énoncé peut te donner plus d'outils pour attaquer ton énoncé que tu croyais plus simple. Dans le cas de la "somme de Gauss" ci-dessus, avoir le résultat "pour tout $n$" te facilite la vie puisque tu peux compter sur $n$ pour obtenir $n+1$ - si je ne te donne que $100$, tu vas devoir tout calculer !
Des exemples de plus haut niveau de ça se trouvent notamment aux débuts de la théorie de la mesure, quand on démontre des choses sur les boréliens (prouver un truc sur un borélien $A$ un peu chelou fixé est souvent immensément plus dur que de le montrer pour tous les boréliens)
Je finis par un dernier exemple, qui me "tient à cœur" puisqu'il révèle un phénomène amusant que j'ai beaucoup exploité : disons que tu veux prouver que $V^*\otimes V \cong End(V)$ pour un espace vectoriel de dimension finie $V$. Bah en fait tu peux définir pour tout $W$, une flèche $V^*\otimes W\to L(V,W)$ qui est "naturelle" (sans guillemets ça marche aussi). Maintenant, à la fois $V^* \otimes -$ et $L(V,-)$ sont compatibles avec les sommes directes, et la flèche "naturelle" est un isomorphisme lorsque $W= k$ trivialement. Donc c'est aussi un isomorphisme pour toute somme directe de copies de $k$, donc en particulier pour $V$. Bam, je n'ai rien fait et c'est tombé gratuitement.
L'avantage de cette preuve par rapport par exemple à l'analyse dimensionnelle c'est que je n'ai pas à prouver la surjectivité, l'injectivité, etc., et aussi qu'elle se généralise à un anneau quelconque, et on voit bien ce qui joue, et on voit bien dans quelle mesure elle se généralise (en fait elle permet même d'aller plus loin mais ce n'est pas l'objet du fil :-D ).
Bref, ce n'était qu'une autre exemplification du phénomène de "si je veux prouver quelque chose sur un objet spécifique, peut-être que si je place cette objet dans une famille plus générale, une idée de type 'induction/récurrence' va me permettre de me ramener à des cas triviaux" (ça vaut pour les trucs de type boréliens, pour les récurrences d'entiers naturels ou d'ordinaux, et pour les trucs du types $V^*\otimes V\cong End(V)$)
Ensuite, comment trouver le bon cadre pour ton énoncé ? ... S'il y avait une méthode, on n'aurait pas besoin de mathématicien.ne.s !!
Ça vient avec l'expérience, les exemples, l'intuition. Tu dis "comment avoir l'idée de regarder que c'est $\geq 1$ ?" : bah en essayant de prouver que ça reste positif, tu essaies de comprendre pourquoi ça reste positif, et pour ça tu regardes des exemples pour voir ce qui se passe, et là tu vois que la raison pour laquelle ça reste positif, c'est que ça reste $\geq 1$ :-D
je préfère les preuves courtes qui "s'éloignent du contexte" elles sont plus "élégantes" à mon avis. Je préfère également les preuves non constructives, il y a une part de mystère...
Je préfère les preuves qui disent quelque chose, peu importe leur "forme".
Pour un même énoncé : $V^*\otimes V\cong End(V)$, une preuve qui ne dit rien : "les deux ont pour dimension $(\dim V)^2$". Une preuve qui dit quelque chose : cf plus haut.
Maintenant si les nombres complexes ont été inventés par nos cousins italiens il y a pas mal de temps, ce n'est pas pour rien.
Bonne soirée.
Fr. Ch.
mais c'est ça qui rend la chose élégante (à mon avis en tout cas).
Ma culture mathématiques est bien pauvre mais il y a des exemples où on obtiens des preuves "simples" en passant par des notions assez éloignées du problème à résoudre (j'ai la flemme de chercher...), peut-être en théorie analytique des nombres.
Amathoué : merci !
Un autre exemple est lorsqu'on dispose d'un foncteur (attention Pablo va rappliquer, Maxtimax est déjà là lui (:P)) qui permet de traduire le problème dans une autre catégorie dans laquelle il est plus facile à résoudre puis on revient en arrière. C'est schön.
$\frac{1}{1+x^2}=\frac{1}{2}\cdot (\frac{1}{1+ix}+\frac{1}{1-ix})$
Une primitive sur $\R$ de $\frac{1}{1+x^2}$ est donc :
$\frac{1}{2i} \cdot \ln (\frac{1-x^2}{1-x^2}+i \cdot \frac{2x}{1+x^2})$
«Or »(sic!) $\ln (a+ib)=\frac{1}{2}\cdot \ln |a^2+b^2|+2i \arctan (\frac{b}{a+\sqrt{a^2+b^2}})$, donc $\arctan$ est une primitive sur $\R$, en remarquant que pour $a=\frac{1-x^2}{1-x^2}$ et $b=\frac{2x}{1+x^2}$, on a bien $\ln (a^2+b^2)=\ln 1=0$ et
$\arctan (\frac{b}{a+\sqrt{a^2+b^2}})=\arctan x$.
Par contre je n'ai pas de mal à faire des "raisonnements de physicien" où on ne justifie pas trop au début, pour trouver une "solution crédible" au début. Et après on justifie proprement quand même.
Raoul : Quelle preuve de l'existence d'au moins un irrationnel dans $\Bbb R$ préfères-tu ? "$\sqrt2$ est irrationnel car ..." ou "${\rm card}(\Bbb Q)<{\rm card}(\Bbb R)$" ?
Moi je penche pour la première. J'ai étrangement l'impression de tricher dans la deuxième (ne me demande pas à quelle règle, c'est une impression que je n'explique pas). Parfois il est difficile voire impossible d'éviter des démonstrations non constructives, mais pas ici donc j'ai de gros scrupules à faire une preuve non constructive dans cet exemple.
Néanmoins si je prend le cas des nombres transcendants c'est déjà un poil différent. On montre facilement que les algébriques sont dénombrables et donc qu'il existe des transcendants, mais pour exhiber un transcendant c'est une autre paire de manches (la preuve que$\pi$ est transcendant devrait plaire à Homo Topi question intuition...). Dans ce dernier cas on est bien content d'avoir une preuve simple et non constructive de l'existence.
De toute façon indépendamment de ces exemples, le fait de réussir à montrer l'existence d'un objet sans l'exhiber est génial à mon avis.
C'est vrai.
En particulier si je prends assez de temps auparavant, et que vous me demandez la $n$ème décimale du réel que je vous exhibe, je peux vous la donner en temps fini
Voici un très bel exemple "contre-intuitif" de niveau Terminale S (théoriquement).
Exercice : On range aléatoirement 12 livres sur 7 étagères. Quelle est la probabilité qu'aucune étagère ne soit vide ?
Si tu y réfléchis 2 secondes tu vas t'apercevoir que pour résoudre cet exercice tu vas te ramener à un exercice a priori plus difficile, dans lequel tu remplaces 7 par n. Tu notes $\Delta_n$ le nombre de cas favorables (ou défavorables, comme tu veux), puis tu calcules successivement $\Delta_1$, ..., $\Delta_2$, ..., $\Delta_7$.
(d'ailleurs c'est un exemple bébé de "proof-relevance" : à chaque preuve de "$\mathbb Q\sim \mathbb N$" on associe une preuve de "il existe un irrationnel", et quand tu regardes au niveau des témoins, ça te donne une application "bijections $\mathbb Q\to \mathbb N$" $\to$ "irrationnels")
Peut-être que j'ai juste besoin d'assouplir un peu mon cerveau. Entre ça et mes problèmes de mémoire (je retiens très peu de choses), il y a de quoi se poser des questions, quand même.
Je ne sais pas ce que c'est "proof-relevance".
Alors on n'a que deux sources de preuves non constructives : celles qui utilisent l'axiome du choix et celles qui raisonnent par l'absurde ("on suppose par l'absurde $\forall x, \neg {\cal P}(x)$, ..., absurde donc $\exists x, {\cal P}(x)$"). C'est ça ?
C’est un prof de TD que j’ai eu en maîtrise qui l’avait utilisé lors d’un exercice pour construire une suite (il me semble) vérifiant
certaines propriétés. Il avait besoin d’utiliser que le logarithme néperien d’un nombre entier naturel plus grand que 1 est irrationnel mais trouvait trop coûteux d’en admettre la démonstration. En réalité, comme il n’avait besoin que d’un nombre entier, il a écrit : « Montrons qu’au moins l’un des deux nombres $\ln(2)$ ou $\ln(3)$ est irrationnel. S’ils étaient tous les deux rationnels, on aurait $\dfrac{\ln(2)}{\ln(3)}=\dfrac pq$ pour deux nombres entiers naturels non nuls $p$ et $q$, ce qui mènerait à $2^q=3^p$, ce qui est absurde par unicité de la décomposition en facteurs premiers d’un nombre entier naturel (ou pour une question de parité tout simplement) ».
Ensuite, dans son exo, il avait posé $a=\ln(2)$ ou $\ln(3)$ de telle manière que $a$ soit irrationnel (je ne me souviens plus du reste).
Pour répondre à ta question sur la source de non constructivisme, oui, en un sens; même si en vrai c'est le tiers exclu à l'origine de tout (exercice inspiré : l'axiome du choix implique le tiers exclu). En fait, c'est un théorème: en logique intuitionniste, si tu sais prouver $\exists x, P(x)$, alors tu sais extraire un terme $t$ tel que $P(t)$ est prouvable (ce n'est plus le cas en logique classique, pour des raisons évidentes)
Philippe : exemple super intéressant ! De la même manière "étant donné $m,n\geq 2$ premiers entre eux, au moins l'un de $\ln(m), \ln(n)$ est irrationnel". En fait on peut faire mieux que premiers entre eux, dès lors qu'ils ont un facteur premier distinct
(ou encore mieux, en analysant leur valuation $p$-adique, c'est plutôt : dès lors que $(v_p(n))_p, (v_p(m))_p$ ne sont pas $\mathbb N$-colinéaires)
Est-ce qu'on peut pas le déduire pour tout $\ln(n)$ à partir de ça ? J'ai le sentiment que ça doit être possible
zeitnot : exactement, c'est ce qui en fait une preuve non constructive ! (en fait, grâce à d'autres théorèmes, par exemple Gelfand-Schneider, on peut déterminer lequel marche - mais c'est plus complexe ! On avait discuté sur le forum à un autre moment d'un exemple explicite et facile, qui était amusant)
Il y a des exemples bien plus "graves", par exemple en théorie des nombres où il y a certains résultats qui sont prouvés comme suit : "on suppose l'hypothèse de Riemann. Alors bidule donc blablabla. On suppose désormais qu'elle est fause. Alors machin donc blablabla. Donc blablabla"; et du coup on ne sait pas si c'est bidule ou machin qui est vrai !
Est-ce un théorème intuitionniste ? ;-)
Par exemple, il faudrait voir si les preuves de $\sqrt 2^\sqrt 2\notin \mathbb Q$ (par exemple par Gelfand-Schneider) peuvent être rendues constructives.
Vu que $\sqrt 2^\sqrt 2$ est relativement explicite, cela ne m'étonnerait pas que $\sqrt 2^\sqrt 2\notin \mathbb Q$ puisse être (même si on n'en a pas de preuve actuellement) un théorème intuitionniste, et donc la disjonction aussi. Mais je ne sais pas.
Par contre, "$\forall x\in \mathbb R, x\in\mathbb Q\lor x\notin\mathbb Q$" n'est pas un théorème intuitionniste.
@Calli : Tu peux éventuellement regarder [ce fil] (1 seule page).
J'avais notamment apprécié les explications de foys [ici] et [là].
$$
L_u = \sum_{i \ge 1} {u_i \over 10^{i!}}
$$Via des questions bien guidées, ce n'est pas si difficile de voir que $L_u$ est transcendant sur $\Q$. C'est un grand classique. Ce qui nous fait une tripotée de nombres transcendants sur $\Q$.
Et pendant que j'y pense, connaissez vous Michel Waldschmidt ? Cela vaut le coup d'aller visiter son site, vous ne serez pas déçu(e)s. https://webusers.imj-prg.fr/~michel.waldschmidt/index2.html. Par exemple, son entretien avec Norbert Verdier https://webusers.imj-prg.fr/~michel.waldschmidt/articles/pdf/Tangente103Mars-Avril2005.pdf
Un tel exemple est donné par le joli résultat de Littlewood $$\pi(x) - \text{Li}(x) = \Omega_{\pm} \left(\frac{x^{1/2} \log \log \log x}{\log x}\right).$$ C'est "facile" en supposant RH fausse mais franchement plus dur si elle est vraie (alors qu'en général RH trivialise des arguments !).
J'imagine que tu le cites, parce qu'à ta connaissance il n'y a pas se preuve "inconditionnelle" ? (ici : qui ne passe pas par une disjonction de cas facilement équivalente à RH)
(EDIT : Je me suis rendu compte en écrivant qu'à cause de non-constructivisme, la question même n'est pas facile à poser. Imaginons une preuve où à un moment on dit “blabla donc vrai si $\epsilon >0$ et bambouk donc vrai si $\epsilon \leq 0$“, mais qu'on a aucun moyen, en pratique, de tester si $\epsilon >0$ ou pas : comment faire pour savoir si cette 'innocente' disjonction de cas n'est pas la même que 'RH ou non RH' ?)
Un autre phénomène non constructif bien connu en théorie analytique des nombres est la famille des résultats impliqués par l'existence de zéros de Siegel. Si j'ai le temps j'essaierai d'en dire plus demain.