De la rédaction d'une récurrence

Bonjour
Je revois un sujet classique dans lequel on trouve de nombreuses récurrences à rédiger : les polynômes de Tchebychev.
J'aimerais savoir si ma rédaction est bonne.
Pouvez-vous me dire ce que vous en pensez ? Merci.

Je dois établir le résultat suivant.
On définit une suite de polynômes par :
$T_0=1$, $\ T_1=X$, pour $n\ge 0$, $\ T_{n+2}=2XT_{n+1}-T_n$
Je dois montrer que $T_n(\cos(\theta))=\cos(n\theta)$.
Par récurrence sur $n\ge 0$, montrons que la proposition suivante est vraie :
$P(n)\ $ : pour $n\ge 0$, $T_n(\cos(\theta))=\cos(n\theta)$

Pour $n=0$, on a $T_0(\cos(\theta))=\cos(0)=1$.
Pour $n=1$, on a $T_1(\cos(\theta))=\cos(\theta)$.
Ceci prouve que $P(0)$ et $P(1)$ sont vraies et initialise la récurrence.

On suppose que pour $n\ge 0$ fixé $P(n)$ et $P(n+1)$ sont vraies. Dans ces conditions, on a :
\begin{align*}
T_{n+2}(\cos(\theta))
&=2\cos(\theta)T_{n+1}(\cos(\theta))-T_n(\cos(\theta))\\
&=2\cos(\theta)\cos((n+1)\theta))-\cos(n\theta)\\
&=\cos((n+2)\theta)),

\end{align*} en utilisant les formules de trigonométrie.
Ainsi, $P(n+2)$ est vraie.
Ce qui prouve l'hérédité de la proposition et achève la récurrence.

Qu'en pensez-vous ?
«1

Réponses

  • Ça me semble très bien mais il faudrait détailler peut-être la dernière ligne de ton calcul.
    Algebraic symbols are used when you do not know what you are talking about.
            -- Schnoebelen, Philippe
  • Merci !
    Oui, c'est fait sur mon cahier. Je voulais surtout avoir un avis sur la rédaction.

    Dans ce calcul, j'utilise les formules suivantes :
    $\cos(a+b)=\cos(a)\cos(b)-\sin(a)\sin(b)$
    $\cos(a-b)=\cos(a)\cos(b)+\sin(a)\sin(b)$
    En addition les deux égalités, on obtient :
    $\cos(a+b)+\cos(a-b)=2\cos(a)\cos(b)$

    C'est cette dernière égalité qui permet d'arriver à l'hérédité dans la récurrence.
  • Ce serait de conclure par $P(n+1)$ et $P(n+2)$ vrais ,du fait de la proposition de récurrence .
  • J'avais peur de la ramener et qu'on me dise que je chipote, mais je suis d'accord avec toi lale. C'est une récurrence forte, pas une récurrence dite "simple".
    Par ailleurs, pourquoi se fatiguer avec une récurrence ? Il suffit de vérifier que $u_n := \cos(n\theta)$ vérifie $u_{n+2} = 2\cos(\theta)u_{n+1}-u_n$ et $u_0 = 1$.
    Même valeur initiale et même relation de récurrence que $v_n := T_n(\cos(\theta))$, donc $u = v$
  • Je ne suis pas d’accord, ce n’est pas une récurrence forte. Il ne suppose pas que la proposition est vraie aux rangs inférieurs ou égaux à n+1 pour démontrer qu’elle est vraie au rang n+2. Il suppose qu’elle est vraie aux rangs n et n+1 pour démontrer qu’elle est vraie au rang n+2
    Algebraic symbols are used when you do not know what you are talking about.
            -- Schnoebelen, Philippe
  • Effectivement il semble que le terme "récurrence forte" soit réservé. Il aurait fallu que j'appelle ça "récurrence d'ordre 2".
  • Pour la refaire en propre, on peut dire qu’on suppose l’hypothèse vraie aux rangs n et n+1, et qu’alors on démontre qu’elle est vraie aux rangs n+1 (trivial) et n+2. C’est une récurrence simple « glissante ».
    Algebraic symbols are used when you do not know what you are talking about.
            -- Schnoebelen, Philippe
  • J'ai déjà dit sur ce forum que ces histoires de récurrence forte (comme la moutarde), ou Dieu sait quoi d'autre, sont apparues il y a quelques années, on ne sait pourquoi. Moi je n'ai jamais vu ça, ni jadis comme étudiant, ni naguère comme professeur. Je ne connais qu'une récurrence.

    J'énonce comme suit le principe de récurrence.
    Soit $P(n)$ une assertion concernant un entier naturel $n$. Si l'assertion $P(0)$ est vraie et si pour tout entier naturel $n$ l'assertion $P(n)\Rightarrow P(n+1)$ est vraie, alors l'assertion est vraie pour tout entier naturel $n$.

    J'ajoutais dans mon cours le principe de récurrence restreinte suivant.
    Soit un entier naturel $a$ et soit $P(n)$ une assertion concernant un entier naturel $n \ge a$. Si l'assertion $P(a)$ est vraie et si pour tout entier naturel $n \ge a$ l'assertion $P(n)\Rightarrow P(n+1)$ est vraie, alors l'assertion $P(n) $ est vraie pour tout entier naturel $n \ge a$.

    Vous me direz que ce second principe est à l'évidence un corollaire du premier, et le premier un corollaire du second, mais il me semblait plus judicieux d'énoncer les deux en vue de la pratique. Et c'est tout, le cours sur la récurrence se réduisait à ceci, avec ensuite une foultitude d'exercices.

    Maintenant, l'assertion $P(n) $ peut être complexe. Elle peut être de la forme : $ « ~Q(n) $ et $Q(n+1) ~»$, où $Q(n)$ est une assertion concernant un entier naturel $n $. Elle peut être de la forme : $«~ \forall k \in \{ 0,1,...,n \}, Q(k) ~ »$, où $Q(k)$ est une assertion concernant un entier naturel $k $. Et il peut y avoir des situations encore plus compliquées, notamment quand il y a plusieurs variables. Ce qu'il faut, c'est considérer un nombre suffisant d'exemples de raisonnements par récurrence pour avoir une claire vision de la chose. À mon avis, leur coller des étiquettes n'ajoute rien.

    Pour paraphraser Napoléon, la récurrence est un art tout d'application (mais pas si simple). J'étais déjà intervenu sur le sujet il y a quelque temps en ouvrant un fil dans lequel je suggérais de collectionner des raisonnements par récurrence, mais je n'ai reçu que des exemples-bateaux que tout le monde connaît. J'en avais donné quelques-uns un peu moins connus, comme le fait que le produit de deux termes de la suite de Fibonacci autres que $0$ et $1$ n'est jamais un terme de cette suite, et j'espérais des contributions diverses et inattendues. Il n'est jamais trop tard pour bien faire.

    Bonne soirée.
    Fr. Ch.
  • Dans le cas présent, l'assertion $P(n)$ à démontrer par récurrence est :
    « $\forall \theta \in \mathbb R, T_n(\cos \theta )=\cos n\theta $ et $T_{n+1}(\cos \theta)=\cos (n+1)\theta$ ».
    Inutile de lui infliger une qualification plus ou moins fantaisiste, simple, forte, glissante, d'ordre $2$, ou ci ou ça, c'est bien elle qu'il faudra prouver, ce qui est l'affaire d'un peu de trigo.
    Qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse.
    Bonne soirée.
    Fr. Ch.
  • ... sont apparues il y a quelques années, on ne sait pourquoi...

    Rigourer dans le vide pour masquer la vacuité grandissante du contenu pourrait bien être une des motivations de ce genre de moutardification. Dans le même genre: toutes les salades sur l'existence même des suites définies par une récurrence.

    Question: quel est la vraie saveur du vide ?
  • Message de Chaurien

    C'est vrai que l'écrire ainsi évite bien des complications ! Je ne pensais pas qu'il existait des appellations aussi diverses.
    Mais je sentais bien à la rédaction que j'avais besoin d'éclaircissement.

    Cette formulation simplifie grandement les choses !
    Je vais l'adopter, merci !
  • Bravo pldx1, rigourer dans le vide est une très jolie expression. J'ai retrouvé des fils de discussion où on nous rompait le crâne comme tu dis avec l'existence de suites comme la suite de Fibonacci. J'avais demandé s'il était vraiment obligatoire de démontrer qu'il existe une suite $(u_{n})_{n\in \mathbb N}$ et une seule telle que : $u_0=1$ et $\forall n \in \mathbb N, u_{n+1}=u_n$...

    http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?18,1366700,1379512
    http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?18,773557,773777

    Bonne soirée.
    Fr. Ch.
  • Dans toute cette discussion, je tiens à préciser que dans le premier message de ce fil, la chose à démontrer n'est pas quantifiée.

    On lit "je dois montrer $T_n(\cos(\theta))=\cos(n\theta)$".

    On aurait préféré : "je dois démontrer, pour tout $n$, pour tout $\theta$, $T_n(\cos(\theta))=\cos(n\theta)$".

    J'ai changé "montrer" en "démontrer" par excès de zèle. Je veux bien dire que dans ce contexte, ces deux termes sont parfaitement synonymes.
  • Cher Chaurien,

    Merci d'avoir donné des liens vers ces deux discussions ! Je ne me rappelais pas avoir participé et cela fait toujours une drôle d'impression de découvrir, comme avec un regard étranger, ce qu'on a soi-même écrit des années auparavant. Relire les messages de Raymond Cordier amène aussi une certain nostalgie.

    En ce qui concerne l'existence des suites définies par une relation de récurrence, je suis assez d'accord avec toi : ce résultat n'a pas sa place dans des études concrètes de suites comme Fibonacci. C'est toutefois un résultat remarquable par sa généralité et je pense que sa démonstration est importante pour un mathématicien (notamment pour sa ressemblance avec le lemme de Zorn).
  • C'est normal de prouver en maths. De plus la question de l'existence de suites définies par récurrence est légitime. Pourquoi parler de "rigourification" ou que sais-je?
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • 100% d'accord avec Foys. Pour paraphraser un de mes anciens profs: "si on n'aime pas pinailler, il ne faut pas faire des maths, il faut faire un truc du genre communication".
  • Il me semble que ce n'est pas la question ici : si on veut montrer que toute suite vérifiant la relation machin vérifie aussi la propriété bidule, alors démontrer l'existence ou l'unicité d'une suite vérifiant la relation machin est a priori hors-sujet.
  • Bonjour
    Foys écrivait : http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?4,1907454,1907764#msg-1907764
    [Inutile de recopier un message présent sur le forum. Un lien suffit. AD]
    Pur pipeau. Sur la forme: le terme technique est rigourance qui, comme son nom l'indique, décrit la gourance standard consistant à confondre la "rigor mortis" des cadavres avec la rigueur attendue d'un raisonnement (mathématique, technique, juridique, ou autre). Rien de plus rigouré que l'ensemble vide. Rien de plus vide non plus.

    Sur le fond. Foys tient à nous rappeler que Bourbaki, Dehornoy, et quelques autres personnes sérieuses (et de stature internationale et intemporelle) se sont demandées si un schéma récurent comme "voici u(0)" et "voici comment construire u(n+1)" à partir des u(p) précédents (i.e. avec p<n+1)... permet non seulement de disposer de chaque u(k) pour k entier, mais permet aussi de disposer de l'objet $u$ par lui-même. Il y a en effet une forte nuance entre l'infini potentiel et un infini actuel.

    Foys semble s'imaginer que ses interlocuteurs sont incapables d'attraper leur Dehornoy et de l'ouvrir au § III.3.1 (page 110 sqq), ou leur Bourbaki et de l'ouvrir à la cote ENS.3.6.2 (fasc XX, page 68 sqq), puis de décider par eux mêmes si l'évocation du critère C62 est pertinente ou non dans la résolution d'un problème donné. Pire encore. Foys semble estimer qu'il faut bourbachier chaque notion mathématique une par une, jusqu'à ce qu'elle devienne inutilisable, et ainsi de suite, récursivement.

    Il pourrait s'agir d'une stratégie destinée à empêcher le lobby militaro-industriel d'utiliser les mathématiques pour leurs noirs dessins. Et même pour leurs noirs desseins (*). Il se pourrait aussi que l'explication standard soit la bonne.

    Cordialement, Pierre.

    (*) thanks to the anonymous referee for this correction.
  • Il y a une preuve là:http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?16,1836838,1836950#msg-1836950
    Ca fait moins de 30 lignes (digressions en petits caractères comprises) en se basant sur des admis de sup. Pas besoin de se référer à un traité quelconque.
    Ce n'est pas plus dur que de montrer qu'une fonction réelle continue définie sur un compact est bornée et atteint ses bornes.
    Il ne s'agit pas de "bourbachier chaque notion mathématique une par une, jusqu'à ce qu'elle devienne inutilisable" mais de démystifier cette construction de suite par récurrence qui fait peur en réalité, en la ramenant au statut de banal théorème.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Siméon a écrit:
    En ce qui concerne l'existence des suites définies par une relation de récurrence, je suis assez d'accord avec toi : ce résultat n'a pas sa place dans des études concrètes de suites comme Fibonacci.
    Comment démontrer l'existence de la suite de Fibonacci? (Ou même l'existence de puissances entières d'éléments dans un anneau).
    Disons que sans ça on peut certes prouver des énoncés du genre "pour toute suite vérifiant la propriété de Fibonacci, on a (...)" mais on a le sentiment qu'il manque quelque chose.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Si l'ensemble des problèmes techniques posés par l'ensemble vide est vide si l'on s'y prend correctement(*), l'ensemble de ses occurrences dans la pratique mathématique ne l'est pas (ce fil n'est toutefois pas concerné par cette nécessité: son apparition y est hors-sujet). Quand vous avez un ensemble, parfois il n'est pas vide mais parfois il est vide et il faut pouvoir traiter son cas.

    [size=x-small](*)Mini cours exhaustif sur l'ensemble vide : étant donné $P$ une propriété, pour tout $x$, si $x\in \emptyset$, on a $P(x)$. Sinon il existe $y$ tel que $\neg P(y)$ et $y\in \emptyset$. Mais il est impossible que $y\in \emptyset$ d'où une contradiction.
    Les difficultés conceptuelles sur le vide proviennent en fait d'une mauvaise appréhension des variables liées (dites aussi muettes), devant une affirmation comme "$\forall x\in \emptyset, P(x)$" les gens peuvent se dire "mais un énoncé qui parle de ce $x$ dans $\emptyset$ n'a pas de sens"; en réalité, $x$ étant muet, il s'agit d'un pur auxiliaire grammatical qui ne désigne rien, pas plus que la lettre $y$ dans l'expression $y\mapsto \frac{1}{\sqrt 5} \left [ \left (\frac{1+\sqrt 5}{2} \right )^{y} - \left (\frac{1-\sqrt 5}{2} \right )^{y} \right ]$.[/size]
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Citation. Les citations sont utiles car elles permettent de *FIXER* ce à quoi on répond.

    Foys écrivait : http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?4,1907454,1907868#msg-1907868
    [avec les admis de sup], [montrer l'existence de l'objet $u$] n'est pas plus dur que de montrer qu'une fonction réelle continue définie sur un compact est bornée et atteint ses bornes.

    Pipeau. Comment montre-t-on ***en sup*** qu'une telle fonction $f$ est bornée ? On suppose qu'elle ne l'est pas (par exemple vers $+\infty$). Et alors, pour chaque $n\in \N$, il existe $x_n\in K$ tel que $n<f(x_n)$. On en prend un et on recommence. Cela donne une suite. Par compacité, cela donne une fonction d'extraction conduisant à une sous-suite qui converge vers un certain $\chi \in K$. Et alors on a à la fois $f(\chi)\in R$ puisque $f$ est définie sur $K$, et $f(x)\rightarrow \infty$ lorsque $x \rightarrow \chi$.

    Que cela plaise ou non aux rigoureurs, c'est comme cela que cela se passe.

    Évidemment, on entend déjà les moulins à prière se mettre à ronronner. L'objectif des rigoureurs n'est-il pas de montrer, de façon récursive, que l'on ne peut faire de mathématiques sans déjà tout savoir.
    Une fois que l'on a vidé l'amphi, tout le reste en devient d'autant plus rigoureux (et d'autant plus vide).

    Cordialement, Pierre.
  • Cher Foys,

    Je crois que tu radotes. Tu as toi-même donné une preuve d'un théorème général qui garantit l'existence de la suite de Fibonacci... Que voudrais-tu de plus ? Développer cette démonstration pour chaque cas particulier ? Soyons sérieux ! Est-ce que tu ressens le besoin de justifier l'existence de la racine carrée ou même de l'ensemble des réels à chaque fois que tu fais un calcul avec racine de 2 ? (inutile de poster des démonstrations de ces existences, je sais le faire)

    Ton "sentiment qu'il manque quelque chose" me fait irrésistiblement penser à ceux qui refusent d'envisager que A implique B sans que A soit vrai. Je te laisse apprécier l'ironie de la situation.
  • Cher Siméon,

    La plupart des développements mathématiques commencent par une incantation comme "soit m une (ou la) machine à défriser la salade". S'ensuit des développements divers puis une conclusion comme "l'ensemble des nombres premiers de la forme 2^(2^n)+1" avec n entier, est infini.

    Le problème est qu'en fait la phrase d'accroche bleue sert à deux missions pouvant être très différentes(*).

    cas 1) Vous essayez de montrer une propriété générale portant (ou non) sur la propriété introduite. vous introduisez une lettre en l'espèce m, absente des axiomes mathématiques que vous utilisez déjà, ainsi qu'un axiome supplémentaire portant sur cette lettre et indiquant qu'elle désigne un objet ayant ladite propriété (c'est une machine à défriser la salade). Vous argumentez et arrivez à une conclusion comme mettons "m ne tombe jamais en panne". Et vous avez à la fin un théorème qui dit "pour toute machine z à défriser la salade, z ne tombe jamais en panne".

    cas 2) Vous essayez de montrer un énoncé qui ne parle pas de l'objet introduit dans "soit un/une/le/la (...)" (la lettre m de la phrase bleue n'apparait pas dans la conclusion).
    C'est l'exemple cité dans l'introduction. Vous n'avez que faire des machines à défriser la salade en réalité. Vous visez l'infinitude des nombres entiers de Fermat. Cependant la phrase bleue signifie au fond que vous savez déjà qu'il existe au moins une machine à défriser la salade et vous lui donnez un nom "$m$". Vous faites une preuve et vous retrouvez avec l'infinité en question (en fait vous avez "pour toute machine $m$ à défriser la salade, l'ensemble des nombres premiers de Fermat est infini"; sachant qu'il y a au moins une telle machine, le théorème voulu est prouvé).

    Plus formellement, une partie du déroulement du cas 2) est en fait un cas particulier du cas 1): vous voulez prouver $F$ (formule sans occurence libre de la lettre $m$), vous dites "soit $m$ tel que $D(m)$", vous établissez $F$ dans ces conditions.
    Vous avez donc prouvé "$\forall m[D(m) \Rightarrow F]$". Puis vous montrez (si ce n'est déjà fait): "$\exists \ell D(\ell)$". Et alors seulement là, vous avez $F$.

    Les énoncés $\forall m[D(m) \Rightarrow F]$ et $[\exists m, D(m)] \Rightarrow F$ sont équivalents lorsque $m$ n'est pas libre dans $F$.

    ASSIMILER UNE PREUVE DE $\forall m[D(m) \Rightarrow F]$ A UNE PREUVE DE $F$ (SANS PROUVER L'EXISTENCE D'AU MOINS UN OBJET SATISFAISANT LA PROPRIETE $D$) EST UNE ESCROQUERIE INTELLECTUELLE.

    "Je peux aller dans l'espace d'ici une semaine. Preuve: considérons un milliard d'euros sur mon compte en banque ..."

    **************
    Siméon a écrit:
    En ce qui concerne l'existence des suites définies par une relation de récurrence, je suis assez d'accord avec toi : ce résultat n'a pas sa place dans des études concrètes de suites comme Fibonacci.
    Siméon a écrit:
    Il me semble que ce n'est pas la question ici : si on veut montrer que toute suite vérifiant la relation machin vérifie aussi la propriété bidule, alors démontrer l'existence ou l'unicité d'une suite vérifiant la relation machin est a priori hors-sujet.

    Lorsque l'on dit "soit f la suite de Fibonacci", est-on dans le cas 1 ou le cas 2? Ce n'est pas si clair...
    Siméon a écrit:
    Ton "sentiment qu'il manque quelque chose" me fait irrésistiblement penser à ceux qui refusent d'envisager que A implique B sans que A soit vrai. Je te laisse apprécier l'ironie de la situation.
    tout dépend de qui est la cible: B ou A implique B.
    S'il savère que A est faux, les raffinements pour prouver A=>B peuvent passer pour des efforts inutiles alors qu'une ligne invoquant (non A)=> (A => B) suffit.

    *******************************************************

    Cas pratiques:
    A)
    pldx1 a écrit:
    On en prend un et on recommence. Cela donne une suite.
    http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?4,1907454,1907900#msg-1907900 Dans cette preuve académique, pldx1 met à contribution l'existence d'une suite définie par récurrence. On est dans le cas 2. En fait cette preuve ne montre le résultat visé que sous réserve qu'il existe des suites définies par récurrence (en plus de l'axiome du choix dépendant - edit: en fait l'axiome du choix dépendant annonce cash l'existence de cette suite, il n'y a pas besoin de théorème supplémentaire si on l'invoque).

    B) polynômes de Bernstein.
    Voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Polynôme_de_Bernstein .
    Pour tout $x\in [0,1]$ et tout $n\in \N$, on considère une suite finie iid de variables aléatoires $\left (X^{x,n}_k \right)_{1\leq k \leq n}$ de Bernoulli, telles que $P(X^{x,n}_i=0)= 1-x$ et $P(X^{x,n}_i=1)= x$ pour tout $i$.
    Soit $f:[0,1] \to \R$ une fonction continue. Alors la suite de fonctions polynomiales $n\mapsto f_n:=t \mapsto \sum_{k=0}^n f\left ( \frac{k}{n}\right ) \binom{n}{k} t^k (1-t)^{n-k}$ converge uniformément vers $f$.

    En effet, soit $\varepsilon>0$. Puisque $f$ est continue sur le compact $[0,1]$, elle y est uniformément continue d'où $\alpha >0$ tel que $|f(x)-f(y)|\leq \varepsilon$ pour tous $x,y\in [0,1]$ tels que $|x-y|\leq\alpha$
    soient $n\in \N$ et $x\in [0,1]$. $f_n(x)$ est l'espérance de la variable aléatoire $f\left( Y^{x,n} \right )$ où $Y^{x,n}$ désigne $ \frac{1}{n} \left (\sum_{k=0}^n X^{n,x}_{k} \right )$. La variance de $Y^{n,x}$ est égale à $\frac{x(1-x)}{n} \leq \frac{1}{4n}$. L'espérance de $Y^{n,x}$ est égale à $x$ (calculs). D'après l'inégalité de Bienaymé-Tchebychev on a $P(|Y^{n,x}-x|>\alpha) \leq \frac{1}{4n \alpha^2}$(édité). Il s'ensuit
    $$ \begin{align}
    |f_n(x)-f(x)| = \left | E\left (f(Y^{n,x}) - f(x)\right)\right | & \leq E\left | f(Y^{n,x}) - f(x)\right | \\
    & \leq 2\|f \|_{\infty}P\left ( |f(Y^{n,x}) - f(x) |> \varepsilon\right )+\varepsilon \\
    & \leq 2\|f \|_{\infty}P\left ( |Y^{n,x}) - x |> \alpha \right )+\varepsilon \\
    & \leq 2\|f \|_{\infty}\frac{E \left ( |Y^{n,x}) - x |^2 \right )}{\alpha^2}+\varepsilon \\
    & \leq \frac{2\|f \|_{\infty}}{4n \alpha^2} + \varepsilon \tag{édité}
    \end{align}$$
    Cela montre que pour tout entier $n$ supérieur à $\frac{2\|f \|_{\infty}}{4\alpha^2 \varepsilon}$(édité) et tout $x\in [0,1]$, $|f_n(x)-f(x)|\leq 2\varepsilon$, d'où le résultat.

    #######
    Il y a quelques années, au cours d'une conversation, un maître de conférences nous a dit "est-ce que le jury d'agreg va continuer d'être vieux jeu et refuser la preuve probabiliste du théorème de Stone-Weierstrass" (à propos de vieux jeu, Bernstein publia cette preuve en 1912).
    En fait le problème est le suivant: le raisonnement ci-dessus ne démontre pas la densité des fonctions polynomiales dans $C^0([0,1],\R)$. Il démontre seulement que:
    Pour toute famille $(X^{x,n})_{n\in \N, x \in [0,1]}$ telle que pour tout $n\in \N$, $\left (X^{x,n}_k \right)_{1\leq k \leq n}$ est une suite finie iid de variables aléatoires de Bernoulli telles que $P(X^{x,n}_i=0)= 1-x$ et $P(X^{x,n}_i=1)= x$ pour tout $i$; l'ensemble des fonctions polynomiales est dense dans $C^0([0,1],\R)$.
    Pour en conclure la densité des fonctions polynomiales dans $C^0([0,1],\R)$, la preuve de l'existence des objets mentionnés en vert est un impératif non négociable (ou alors vous faites une autre preuve).
    Bon en l'espèce ce n'est pas bien dur (poser $\Omega_n:=[0,1]^n$ muni de la mesure de Lebesgue et $X^{x,n}_k (\omega) := 1$ si la $k$-ième coordonnée de $\omega$ est inférieure à $x$, $0$ sinon -edit: cf message d'aléa plus bas). Encore faut-il savoir que la mesure de Lebesgue existe (bref le résultat suppose connue une théorie de l'intégration suffisante)...

    [size=x-small](*) Les formes de raisonnement décrites aux cas 1 et 2 du présent texte sont détaillées dans les manuels de logique formelle à la rubrique "déduction naturelle" sous les appellations respectives d' "introduction du quantificateur universel" et d' "élimination du quantificateur existentiel". Voir par exemple "introduction à la logique" de R.David, K.Nour et C.Raffalli.[/size]
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Tu pousses un peu: on n'a pas besoin de la mesure de Lebesgue pour justifier l'existence d'une suite finie de variables de Bernoulli indépendantes.
    $\Omega=\{0;1\}^n$ !
  • C'est vrai, ça.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Bonsoir à tous,

    Est-on d'accord qu'il s'agit de la même discussion avec l'existence des fonctions vérifiant des équations différentielles ?

    Avec les notations usuelles, sans formalisme :

    Avec des fonctions définies sur $R$ à valeurs dans $R$ :

    $y''=y'+y$ et $y(0)=y'(0)=1$

    Avec des suites indexées par $N$ à valeurs réelles :

    $u_{n+2}=u_{n+1}+u_{n}$ et $u_0=u_1=1$.

    Foys, dis-tu qu'on ne peut pas étudier une propriété d'une fonction vérifiant l'équation différentielle si l'on ne démontre par l'existence d'un telle fonction ?

    Ce n'est pas ironique, je veux juste savoir si j'ai bien compris la discussion.

    En d'autres termes : passer sous silence "l'équivalent du théorème de Cauchy-Lipschitz" (c'est inapproprié, cher lecteur qui passe par là par hasard, mais c'est pour faire peur) pour les suites récurrentes.
  • Franchement Foys, je ne comprends pas pourquoi tu prends la peine d'écrire toutes ces banalités. Je ne vois pas non plus le rapport avec les passages que tu cites, qui n'ont pourtant rien d'équivoque. En revanche tu ne réponds pas à mes questions alors que c'est là je pense que tout se joue : démontres-tu l'existence de racine de 2 à chaque calcul ? Si ta réponse est négative, en quoi serait-ce différent pour l'existence de la suite de Fibonacci ? Mais je soupçonne que tu ne lis pas vraiment, comme dans tant d'autres fils.
  • Siméon a écrit:
    En revanche tu ne réponds pas à mes questions alors que c'est là je pense que tout se joue : démontres-tu l'existence de racine de 2 à chaque calcul ?
    Je n'ai pas besoin de prouver cette existence pour faire des tours de passe-passe comme trouver la factorisation $X^4+1=(X^2+\sqrt 2 X +1)(X^2-\sqrt 2 X +1)$ (dans la mesure où je considère travailler dans une théorie où on me livre un corps et un élément dudit corps, noté "$\sqrt 2$", dont le carré vaut $2:=1+1$). J'ai besoin d'un théorème qui assure l'existence d'un réel $r$ tel que $r^2=2$ pour montrer que $\R[X]/ \langle X^4+1 \rangle$ n'est pas un anneau intègre (ou que $X^4+1$ se factorise) dans le cadre des maths usuelles (conséquences prouvables de ZFC).
    Et qui te parle de refaire la même preuve plusieurs fois de suite?
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Cher Foys,

    Merci pour cette clarification qui montre bien que n'avons pas vraiment de désaccord. Le cas de la suite de Fibonacci $f$ est semblable à celui de $\sqrt 2$, à savoir que l'existence de la suite n'est pas indispensable à la démonstration de propriétés de $f$ comme celles citées par Raymond Cordier (dans les discussions en lien).

    Cette remarque ne contredit en rien le fait que l'existence de la suite puisse être indispensable à d'autres démonstrations. Et quoi qu'il en soit, on dispose d'un théorème général d'existence des suites récurrentes qui s'applique directement au cas de Fibonacci.

    Maintenant, si tu le permets, je vais arrêter ici cette discussion qui n'a pas abouti à grand chose.
  • Salut Foys,

    En fait, je pense que tu n'as pas besoin de supposer que $\sqrt{2}$ existe. Soit $R$ un anneau commutatif unitaire.

    Notons $k = \frac{R[X]}{X^4+1}$. Alors $X$ est inversible dans $k$, en effet $X \times (-X^3) = 1$. Notons ensuite $\alpha := \frac{1}{X}+X$; Alors $$
    \alpha^2 = \left( \frac{1}{X}+X \right)^2 = \frac{1}{X^2} +X^2 +2 = 2
    $$
    Ainsi $2$ a bien une racine dans $k$.

    Ps / On s'en fou par rapport à ce que tu veux dire, mais j'ai bien compris ce que tu veux dire !

    Edit : Hum je dis n'importe quoi en fait c'est dans $R$ qu'il faut une racine et pas dans $k$ :-D
  • Bon tout ça commence à me chauffer les oreilles. On m'a déjà rompu le crâne il y a un certain temps avec des considérations analogues à propos des bases de Hamel de $\mathbb R$sur $\mathbb Q$, où avant d'avoir le droit d'en dire quoi que ce soit il fallait réciter comme un Bénédicité une prière à ZFC.

    On a parlé de la suite de Fibonacci parce que c'est peut-être la plus célèbre et qu'elle a une myriade de propriétés, toutes plus intéressantes les unes que les autres. On peut donner une importante bibliographie sur cette suite, présentant et démontrant ces propriétés, et bien sûr on n'y pose jamais, au grand jamais, la question de l'existence de cette suite. Franchement la première fois que j'ai lu qu'il fallait s'assurer de cette existence je suis tombé de l'armoire, moi qui m'intéresse à cette suite depuis plus de cinquante ans. Et tout aussi franchement je trouve tout à fait inutile, superflue et finalement ridicule cette « rigourisation », terme emprunté à pldx 1 dont je salue la verve polémique.

    Et il n'y a pas que le suite de Fibonacci. Il faudra peut-être encore trente lignes de logique incompréhensibles pour décider qu'une suite arithmétique existe, voire une suite constante ! Et franchement, un texte mathématique qui commence par traiter d'une « machine à défriser la salade », je n'ai pas du tout envie d'en poursuivre la lecture.

    On distingue 97 spécialités mathématiques : https://en.wikipedia.org/wiki/Mathematics_Subject_Classification . La logique est l'une d'elles, tout aussi légitime et intéressante que les 96 autres, pas plus, pas moins. Nous matheux de base moyens, nous ne pouvons les aborder toutes. Quand on fait de l'algèbre, de l'analyse, de la géométrie ou autre, on pose des hypothèses et on en déduit des conclusions. On admet implicitement que nos amis logiciens nous assurent un cadre qui légitime nos déductions, mais on ne passe pas sa vie en logique, il y a aussi d'autres choses à faire. Quand nos amis géomètres commencent par « soit un triangle $ABC$ », leur faudra-t-il réciter aussi la Bismillah-ZFC pour s'assurer que ce triangle existe ?

    Et tiens, il me semble avoir lu qu'il y a une école de logique dans quoi un objet mathématique est considéré comme existant lorsqu'un algorithme peut le définir. Je m'exprime avec maladresse sur ce sujet car comme on sait je ne suis pas franchement un logicien. La définition de la suite de Fibonacci vous donne immédiatement la moyen d'en calculer n'importe quel terme, $F_{732}$, $F_{2020}$, ou autre. Bon, les sommités logiques de ce forum me diront ce que vaut cet argument, pas grand-chose sans doute, alors tant pis.

    On peut réconcilier tout le monde : chaque texte mathématique peut être considéré comme un « îlot déductif ». On postule qu'il existe une suite dite de Fibonacci définie comme on sait, on étudie ses propriétés sous réserve de cette existence, et alors si elle existe tant mieux, et si elle n'existe pas, eh bien c'est bien triste car tout ce qu'on a dit sera sans objet, pas grave. Je vous donnerai tantôt des exemples de réflexions sur des objets mathématiques qui n'existent pas, là je n'ai pas le temps. Quant à savoir si elle existe, cette suite, ma foi que les logiciens passent leur vie sur cette question, ça ne me gêne pas, tant qu'ils ne m'obligent pas à considérer comme préalable incontournable à tout exposé mathématique l'étude des « machines à défriser la salade ».

    Bonne journée.
    Fr. Ch.
  • Bonjour,

    Chaurien (tu)(tu)

    Cordialement,

    Rescassol
  • Bonjour aux profs de prépa en activité ou à la retraite (et aux autres intervenants aussi).
    (d'après le message de Dom plus haut http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?4,1907454,1908124#msg-1908124 ) Pensez-vous que le théorème de Cauchy-Lipschitz ne sert à rien ?
    On peut envisager les solutions éventuelles d'une équation en $y$ comme $\forall x\in \R,\ y'(x)-y(x)^4=\exp(x+y(x))$ sans lui.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Bonsoir,
    1. Reprenons cette histoire de polynômes de Bernstein. Foys nous a donné un festival de tout ce qu'il ne faut pas faire lorsque l'on prétend rédiger une démonstration. Chaque étape est engluée dans un verbiage ahurissant, mélangeant déclarations d'intention, gloubi-glouba interprétatoire, élucubrations pédagogiques, et même une machine à défriser les salades.

      $\,$
    2. Cette manie de souligner en masse, avec des renvois de partout, et des conversations en "miroir de Nerval" semble constituer un pattern déjà rencontré... mais ne nous égarons pas dans des détails secondaires.

      $\,$
    3. $\def\nn{\mathbb{N}} \def\rr{\mathbb{R}} $ Plutôt que de nous fatiguer à faire le tri dans un tel méli-mélo, mieux vaut tout reprendre ab initio. On a donc une fonction $f$ (uniformément) continue $\left[0,1\right]\hookrightarrow\rr$. Pour un entier donné $n$ (non nul), on échantillonne $f$ aux points $k/n$ (pour $0\leq k\leq n$). Puis on applique des masses variables $\mu_{k}$ aux échantillons. Les masses choisies par Bernstein conduisent aux polynômes: \[ B_{n}\left(t\right)=\sum_{k=0}^{k=n}f\left(\frac{k}{n}\right)\times\binom{n}{k}t^{k}\left(1-t\right)^{n-k} \]
    4. On commence par des lemmes concernant les $\mu_{k}$. Leur série génératrice est \[ S_{n}=\sum z^{k}\binom{n}{k}t^{k}\left(1-t\right)^{n-k}=\left(zt+\left(1-t\right)\right)^{n} \]
      • lemme0: $\sum\mu_{k}=\left(S_{n}\right)_{z=1}=1.$

        $\,$
      • lemme1: $\sum k\times\mu_{k}=\left(\frac{\partial}{\partial z}S_{n}\right)_{z=1}=nt$

        $\,$
      • lemme2: $\sum\left(k-1\right)k\times\mu_{k}=\left(\frac{\partial^{2}}{\partial z^{2}}S_{n}\right)_{z=1}=n\left(n-1\right)t^{2}$

        $\,$
      • Calculons $n^{2}t^{2}\times$lemme0 +$\left(1-2nt\right)\times$lemme1 + lemme2. Cela donne \[ \sum_{k=0}^{n}\left(k-nt\right)^{2}\times\mu_{k}=n\,t\left(1-t\right) \]

      $\,$
    5. Considérons la majoration \[ \left|f\left(t\right)-B_{n}\left(t\right)\right|=\left|f\left(t\right)\sum\mu_{k}-\sum f\left(\frac{k}{n}\right)\mu_{k}\right|\leq\Delta\doteq\sum\left|f\left(t\right)-f\left(\frac{k}{n}\right)\right|\mu_{k} \] Pour chaque valeur de $n$ et $t$, nous partitionnons l'ensemble des indices en deux morceaux $V_{n}$ et $W_{n}$, conduisant à deux sommes et à $\Delta=\Delta_{V}+\Delta_{W}$. Et nous allons obtenir des majorants uniformes (en $t$) pour chacune de ces sommes, en dépit du fait que $V_{n}$ et $W_{n}$ dépendent de $t$.

      $\,$
    6. Premier morceau. Pour un $\alpha>0$ donné, il existe $\beta>0$ tel que \[ \forall x,y\in\left[0,1\right]\,:\,\left|x-y\right|<\beta\implies\left|f\left(x\right)-f\left(y\right)\right|<\alpha \] On définit $V_{n}\left(t\right)$ comme étant l'ensemble des $k,\,0\leq k\leq n$ tels que $\left|t-k/n\right|<\beta$. On a alors \[ \Delta_{V}\doteq\sum_{V}\left|f\left(t\right)-f\left(\frac{k}{n}\right)\right|\mu_{k}\leq\sum_{V}\alpha\mu_{k}\leq\sum_{V\cup W}\alpha\mu_{k}=\alpha \]
    7. Deuxième morceau. L'ensemble $W$ est donc caractérisé par $\left|k-nt\right|/\left(n\beta\right)\geq1$. Ce qui conduit aux majorations \[ \Delta_{W}\leq \sum_{W}2M\,\mu_{k}\leq\sum_{W}2M\,\left(\frac{k-nt}{n\beta}\right)^{2}\mu_{k}\leq\sum_{V\cup W}2M\,\left(\frac{k-nt}{n\beta}\right)^{2}\mu_{k}=\frac{2M}{n^{2}\beta^{2}}\times n\,t\left(1-t\right) \] où $M$ est un majorant global de $f$ sur $\left[0,1\right]$.

      $\,$
    8. Comme $\forall t:\;t\left(1-t\right)\leq1/4$, nous obtenons une majoration uniforme: \[ \Delta\leq\alpha+\frac{1}{n}\,\frac{M}{2\beta^{2}} \] La donnée de $\alpha$ impose la valeur de $M\div2\beta^{2}$. On voit donc que \[ \left(\forall\alpha>0\right)\left(\forall n>\frac{M}{2\alpha\,\beta^{2}\left(\alpha\right)}\right)\left(\left\Vert f-B_{n}\left(f\right)\right\Vert <2\alpha\right) \] et c'est fini.

      $\,$
    9. En résumé, le déroulé de cette preuve ne nécessite qu'un peu d'algèbre et les deux résultats d'analyse donnant respectivement $M$ et $\beta\left(\alpha\right)$. Pas de quoi agiter "une théorie de l'intégration suffisante", les beaux réliens, les probas à la Feller-Kolmogorov, les impératifs catégoriques, les machines à défriser les salades et quoi encore.

      $\,$
    10. Cela donne une illustration de plus du fait que "faire des mathématiques" consiste principalement à trouver des résultats, puis à trouver des preuves. Utiliser une loi binomiale réduite pour construire une mesure convergeant vers la mesure de Dirac, voila l'idée sous-jacente à la preuve de Bernstein. Les masses utilisées ne sortent pas de rien. Les lemmes 1 et 3 ne font que donner l'espérance et la variance (de la variable $k$). Tandis que §7 est $mesure\left(W\right)\leq var\left(k/n\right)/\beta^{2}$, c'est à dire l'inégalité de Bienaymé-Tchebychev pour la variable $k/n$.

      $\,$
    11. Au passage, le majorant $\frac{2\|f\|_{\infty}}{4n^{2}\alpha^{2}}+\varepsilon$ donné par Foys ne semble pas être valable.

    Cordialement, Pierre.
  • Bonsoir,
    je ne pensais [pas] qu'un tel fil de discussion pouvait amener à cette conversation.
    Pour ma part, me semble très clair.
    Pour la suite, je ne suis pas certain de vous suivre.

    Mais puisque je révise mes classiques, les polynômes de Bernstein évoqués dans le dernier message peuvent m'intéresser.

    Avez-vous un énoncé d'un sujet de niveau agreg interne traitant du sujet ?
    Merci.
  • Bonsoir,
    pldx1 a écrit:
    Chaque étape est engluée dans un verbiage ahurissant, mélangeant déclarations d'intention, gloubi-glouba interprétatoire, élucubrations pédagogiques
    A quel message cette remarque est censée s'appliquer ? A Celui-ci? A celui que j'ai écrit plus haut? Moi j'ai juste quelques étapes de calcul et le signalement d'un manque, le reste de la prose est essentiellement consacré à autre chose.
    Je n'ai pas voulu traiter Bernstein comme ça (on dirait la preuve du "maths en tête" d'analyse de Xavier Gourdon: une page d'astuces au lieu de 5 lignes basées sur des concepts) car cela masque l'aspect probabiliste qui est l'intérêt de cette preuve (outre l'introduction d'une suite de polynômes explicites) mais aussi la source du problème: on se base sur une chose dont il faut aussi démontrer l'existence.
    pldx1 a écrit:
    Au passage, le majorant $\frac{2\|f\|_{\infty}}{4n^{2}\alpha^{2}}+\varepsilon$ donné par Foys ne semble pas être valable.
    Merci tout de même pour le signalement de cette coquille.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Pour se détendre, voici un exemple d'étude d'un objet mathématique qui n'existe pas. C'est un énoncé posé le 30 août 2001 au concours d'admission directe à HEC & alii pour diplômés du deuxième cycle. Il se trouve que les dits entiers « $p$-beaux » qui font l'objet de toutes ces questions n'existent pas ! En effet, Paul Erdös a démontré en 1939 qu'un produit d'entier consécutifs n'est jamais un carré.
    Bonne soirée.
    Fr. Ch.
  • Encore une anecdote de non-existence.
    Dans la Revue de Mathématiques Spéciales (RMS) de 1983-84, n° 5 (janvier 1984), p. 247, on trouve l'énoncé suivant, n° 92, qui est une question d'oral de l'X, énoncé étoilé donc réputé difficile :On considère l’équation différentielle $y^{\prime \prime }+e^{-t^{2}}y=\sin t $ ; soit $f$ une solution bornée sur $[1,+\infty \lbrack $, telle que $\int_{1}^{+\infty }f^{~2}$ soit convergente.
    Montrer que $ \underset{t\rightarrow +\infty }{\lim }f(t)=0$.Une solution est parue dans le n° 10 de la même année (juin 1984), p. 415.
    Las ! Dans la RMS de 1984-85, n° 9 (mai 1985), p. 345, Jean-Marie Exbrayat (le regretté Papex) prouve qu'il n'existe pas de telle fonction $f$...
    On en tirera les enseignements qu'on voudra...
    Bonne soirée.
    Fr. Ch.
    [small]La môme néant
    .
    Quoi qu'a dit ? - A dit rin.
    Quoi qu'a fait ? - A fait rin.
    À quoi qu'a pense ? - A pense à rin.
    Pourquoi qu'a dit rin ?
    Pourquoi qu'a fait rin ?
    Pourquoi qu'a pense à rin ?
    - A' xiste pas.

    Jean Tardieu[/small]
  • Pour juger de la preuve du théorème de Weierstrass par Bernstein, pourquoi de ne pas la lire directement dans le texte : http://m.mathnet.ru/php/getFT.phtml?jrnid=khmo&paperid=107&what=fullt&option_lang=eng

    C'est court, limpide, et rédigé en français ! On aurait tort de s'en priver, non ?
  • Siméon a écrit:
    C'est court, limpide, et rédigé en français ! On aurait tort de s'en priver, non ?
    Pourquoi le jeu de hasard qui fait gagner $x$ francs en moyenne existe?
    Du reste je suis d'accord avec le fait que l'idée est élégante mais il manque ce "détail". C'est tout l'objet de mon laïus.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Cher Foys,

    J'avais bien compris ton laïus. Bernstein décrit explicitement la loi binomiale en s'appuyant sur Bernoulli. J'imagine que c'était assez clair pour tout le monde à l'époque. Vérifier que ceci définit une probabilité sur $\{0,1\}^n$ ne pose aucun problème, même en termes modernes, comme l'a déjà rappelé aléa.

    Précisons de toute façon que je m'adressais ici davantage à pldx1 et à la cantonade qu'à toi.
  • Bonjour.

    Lorsque l'on rédige une preuve, le seul souci est d'être clair et probant, tant pis si ce n'est pas "éclairant". Lorsque l'on veut expliquer pourquoi cette preuve fonctionne, le seul souci est d'être clair et explicatif, tant pis si ce n'est pas "prouvatoire".

    Par ailleurs, "être clair et probant" dépend du contexte. Prouver la convergence uniforme $B_n \rightarrow f$ au sein d'un cours de stats-probas n'est pas la même chose que prouver cette convergence dans un autre contexte, et cela parce que les "briques élémentaires disponibles" ne sont pas les mêmes. Dans les deux cas, la stratégie mise en oeuvre consiste à prouver une certaine propriété, qui concerne les fonctions $t\mapsto f(t)$ et $t\mapsto B_n(t)$ en utilisant les distributions $\kappa \mapsto \mu_{n,t}(\kappa)$ pour aboutir au fait que leur action converge (pour $n \rightarrow \infty$) vers celle de $\delta_t(\kappa)$... et cela uniformément par rapport au paramètre $t$.

    Si l'on veut "comprendre", il suffit de faire un dessin. On voit que la convergence vient du TCL et l'uniformité vient de la majoration uniforme $var(\kappa)=t(1-t)/n\leq 1/4n$. Et voilà, c'est fini. Toujours pas besoin d'une machine à friser les salades.

    Cordialement, Pierre

    edit $ \mu_{n,t}(\kappa)$ plutôt que $ \mu_{t}(\kappa)$94258
  • Digression.

    Soit $f:[1,+\infty[$ une fonction bornée et continue. On notera $M:=\sup \{|f(x)|: x \geq 1\}$ dans la suite.
    Alors pour tout $r\geq 1$, $\left |\exp \left (-r^2 \right ) f(r) \right | \leq rM\exp \left ( -r^2\right )$. Par suite $r\mapsto \exp \left (-r^2 \right ) f(r)$ est intégrable sur $[1,+\infty[$ et pour tout $s\geq 1$, $$\left |\int_s^{+\infty} \exp \left ( -r^2 \right ) f(r) dr \right | \leq \int_s ^{+\infty } \left |\exp \left (-r^2 \right ) f(r) \right | dr \leq \int_s^{+\infty} rM\exp \left ( -r^2\right )dr=\frac{1}{2}M\exp \left ( -s^2\right ) \tag{1}$$
    La fonction $s\mapsto \frac{1}{2}M\exp \left ( -s^2\right ) $ est elle-même intégrable (on peut refaire le même argumentaire en remplaçant $f$ par la fonction constante $x\mapsto \frac{M}{2}$; on a pour tout $x\geq 1$, $\int_x^{+\infty } \frac{1}{2}M\exp \left ( -s^2\right )ds \leq \int_x^{+\infty } \frac{1}{2}Ms\exp \left ( -s^2\right )ds = \frac{M}{4}\exp\left ( -x^2\right)$ ).
    Pour tout $t\geq 1$ on peut donc poser $\Phi(t):= \int_t^{+\infty} \left (\int_s^{+\infty}\exp \left (-r^2 \right ) f(r) dr \right ) ds$. On a par ce qui précède, pour pour tout $t\geq 1$, $$\left |\Phi(t) \right |\leq \frac{M}{4}\exp\left ( -t^2\right) \tag{2}$$ De plus $\Phi$ est deux fois dérivable avec $\Phi''(t) = \exp\left ( -t^2\right ) f(t)$ pour tout $t\geq 1$.

    ##########################

    Cela dit, supposons que $f$ satisfasse toutes les hypothèses de l'exo du message http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?4,1907454,1908540#msg-1908540 (ce qui inclut $f$ bornée sur $[1,+\infty[$comme ci-dessus).
    Alors la dérivée seconde de $t \mapsto -\sin(t) - \Phi(t)$ est égale via ce qui précède, à $t\mapsto \sin(t) -\exp \left ( -t^2\right ) f(t)$, autrement dit à $f''(t)$ par hypothèse. Il existe donc des réels $a,b$ tels que pour tout $t\in [1,+\infty[$, $$f(t)=a+bt - \Phi(t) - \sin(t) \tag{3}$$.
    Or $f$ ne peut pas être de carré intégrable. En effet si c'était le cas, comme la somme de deux fonctions de carré intégrable est de carré intégrable (utiliser Cauchy-Schwarz au cas où public auquel et destiné l'exo ne connaît pas $L^2$, ou même carrément l'inégalité $(p+q)^2 \leq 2p^2+2q^2$ valable pour tous $p,q\in \R$ ), $t \mapsto a+bt-\sin(t)$ le serait aussi car compte tenu de $(2)$, $\Phi(t)^2\leq \frac{M^2}{16}\exp\left ( -2t^2\right )$ et est donc de carré intégrable (*).
    On a donc une contradiction et une telle $f$ ne peut exister, donc en particulier, toute fonction satisfaisant les hypothèses de l'exo de Chaurien est de limite nulle en $+\infty$.

    [size=x-small](*) Bien sûr on a plus généralement le fait qu'aucune fonction de la forme $a+bt - \sin(t) + o(t)$ au voisinage de l'infini, n'a un carré intégrable. On a $a=0$ et on peut distinguer les cas $b\geq 0$ et $b<0$ puis exhiber des suites d'intervalles de longueur minorée sur lesquel le carré de la fonction est trop gros. Je préfère exploiter les informations supplémentaires qu'on a sur $\Phi$ pour accélérer les choses devant un public tâtillon.[/size]
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • side a écrit:
    L'équation différentielle (message de Chaurien) implique $y^{''}$ bornée et comme $y$ tend vers $0$ à l'infini,
    C'est la conclusion de l'exo, on ne le sait pas a priori...
    Qu'essaies-tu de prouver en fait?
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Le hic est qu'on peut montrer rapidement (cf mon message plus haut) qu'une solution bornée de l'équation différentielle de l'exo est de la forme $a+bt -\sin(t) + O\left (\exp(-t^2) \right)$ quand $t$ est grand (ce qui est envisageable à première vue: la dérivée seconde de la fonction est un $\sin$ + un truc très négligeable; en $t \mapsto \exp(-t^2)$). On a tout de suite la non intégrabilité du carré. Je me demande quelle contorsion bizarre a amené l'auteur à dire que la fonction a une limite en l'infini nulle.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
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