Théorème des accroissements finis

Bonjour.

Dans le livre de calcul différentiel d'Henri Cartan, une démonstration est laissée au lecteur, avec seulement une indication, mais je bloque.

Soient $f : [a,b] \to F$ et $g : [a,b] \to \mathbb{R}$ deux applications continues, où $F$ est un espace de Banach.
On suppose qu'en tout point $x \in [a,b]$, sauf éventuellement pour ceux d'un ensemble dénombrable $D$, les dérivées à droite de $f$ et $g$ existent et satisfont $||f_d^{'}(x)|| \le g_d^{'}(x)$
Alors, $||f(b) -f(a)|| \le g(b) - g(a)$.

Indication : On range les points de $D$ en une suite $x_1,x_2,\ldots, x_n, \ldots$, pour chaque $x\in[a,b]$, on note $N_x$ l'ensemble des entiers $n >0$ tels que $x_n < x$.
On montre alors, pour $\epsilon > 0$ fixé et $x\in [a,b]$, comme dans le théorème des accroissements finis, l'inégalité $||f(x) -f(a)|| \le g(x) -g(a) + \epsilon(\sum\limits_{n\in N_x}2^{-n}) + \epsilon (x-a) + \epsilon$.
On fait ensuite $x=b$ et on fait tendre $\epsilon$ vers $0$.

Mon problème réside dans la démonstration de l'inégalité.
L'idée de la démonstration du théorème des accroissements finis était de poser $U$ l'ensemble des $x$ qui ne vérifiait pas l'inégalité, et de montrer qu'il était vide par l'absurde.
La première étape consistait à montrer que $U$ est un ouvert de $[a,b]$, démarche que je ne peux reproduire à cause de la somme qui rend le terme de droite de l'inégalité non continu en général.

Avez-vous un indice à me proposer pour me débloquer ?
Merci d'avance.

Réponses

  • Bonjour,

    Soit $\phi$ une forme linéaire de norme $1$, tel que $\phi(f(b)-f(a))=\|f(b)-f(a)\|$.
    $\phi \circ f$ est dérivable à droite, sauf en un nombre dénombrable de points de dérivée $\phi \circ f'_d$ et $\| \phi \circ f'_d\| \leq \|f'_d\| \leq g'_d$.
    Donc on peut se ramener à une fonction de $[a,b]$ dans $\R$.

    $|f'_d| \leq g'_d$. Donc, si on fixe $\epsilon$, il existe un voisinage à droite de $a$ tel $(f(x)-f(a))/(x-a) \leq (g(x)-g(a))/(x-a) + \epsilon$
    sur ce voisinage.
    Donc l'ensemble des $x \in U $ est non vide.
    Il est fermé par continuité de $f$ et $g$.
    Soit $c$, sa borne supérieure, si $f$ et $g$ sont dérivables à droite en $c$, on a $f(x)-f(c) \leq g(x)-g(c) + \epsilon (x-c)$ sur un voisinage à droite de $c$. Donc on peut additionner les deux inégalités.
    Sinon, il existe un voisinage à droite de $c$ tel que pour tout $x$ proche de $c=x_n$ à droite tel que $f(x)-f(c) \leq \epsilon 2^{-n}$, et on additionne les deux inégalités.
  • Bonjour marco et merci pour ta réponse.

    Ok, pour une fonction à valeur réelle la démonstration est plus simple, ce qui résout le problème.
    Mais est-ce que c'est possible de démontrer ce résultat en suivant la démarche de Cartan, sans utiliser Hahn-Banach ?
  • Je ne peux pas te dire. Je ne sais pas démontrer le théorème des accroissements finis dans un espace de Banach, sans utiliser Hahn-Banach.
    Comment fait Cartan ?
  • Merci pour l'edit de ta réponse, je vais prendre le temps de la relire car je crois que ça répond à ma question, même si à première vue, je ne vois pas pourquoi l'ensemble $U$ est ouvert. La somme dépendant de $x$ peut créer une discontinuité non ?

    En fait, pour montrer le théorème des accroissements finis, Cartan procède de la manière suivante.

    On fixe $\epsilon >0$, et on pose $U$ l'ensemble des $x\in[a,b]$ tels que $||f(x) - f(a)|| > g(x) - g(a) + \epsilon (x-a) + \epsilon$.

    $U$ est ouvert par continuité de $f$ et $g$. On suppose que $U$ est non vide.
    Il admet donc une borne inférieure $c$. Comme $U$ est ouvert dans $[a,b]$, $c$ ne peut pas être égal à $b$, et ne peut pas appartenir à $U$.
    Par continuité, on a aussi $c > a$.

    Comme on a $a<c<b$, on peut appliquer l'hypothèse à $c$ : $||f_d^{'}(c)|| \le g_d^{'}(c)$.
    On revient à la définition, on utilise le fait que $c \notin U$, et on montre que pour un $\eta$ suffisamment petit, on a $x\notin U$, pour $c\le x \le c+\eta$, ce qui est absurde.

    Ceci montre que $U$ est vide. On peut donc appliquer le résultat à $x=b$, et faire tendre $\epsilon \to 0$.
  • Oups, j'avais raisonné avec $U$ ensemble des points vérifiant l'inégalité, et montrer que $U=[a,b]$.
  • Voici la version de Lelong-Ferrand et Arnaudiès (ils supposent que la dérivabilité à droite existe en tout point)

    TAF.pdf 488.2K
  • Pour faire un raisonnement semblable à celui de la démonstration d'Henri Cartan:
    on prend $I$ le plus grand intervalle contenant $b$ tel que les points de $I$ ne vérifient pas l'inégalité:
    $I$ est ouvert car son complémentaire est fermé: en effet si $x_n$ est une suite de $[a,b]$ vérifiant l'égalité, et tendant vers $l$ par la gauche:
    $\|f(x_n)-f(a)\| \leq g(x_n)-g(a) +\epsilon \sum_{k \in N_{x_n}} 2^{-k} + \epsilon (x_n-a) + \epsilon$.
    Donc comme la série $\sum _{k \in N_{x_n}} 2^{-k}$ converge vers $\sum _{k \in N_{l}} 2^{-k}$ ,
    et que $f$ et $g$ sont continues, on a:
    $\|f(l)-f(a)\| \leq g(l)-g(a) +\epsilon \sum_{k \in N_{l}} 2^{-k} + \epsilon (l-a) + \epsilon$.
    Donc $l \notin I$.
    Ensuite si $I=]c,b]$, si $f$ et $g$ admettent une dérivée à droite en $c$, on a $\|f'_d(c)\| \leq g'_d(c)$. Et $c$ vérifie l'inégalité car il n'appartient pas à $I$. Donc on peut prolonger l'inégalité à droite de $c$ sur un voisinage. Donc contradiction.
    Si $c=x_n$ est un point où il n'y a pas de dérivée à droite, il existe un voisinage à droite où $\|f(x)-f(c)\| -g(x)+g(c) \leq \epsilon 2^{-n}$ par continuité de $f$ et $g$. Donc on a bien l'inégalité sur ce voisinage donc contradiction.
  • Pour info, m'étant posé la même question : le caractère ouvert n'est pas nécessaire pour démontrer cette version du théorème en reproduisant la méthode de Cartan.
    Une preuve détaillée figure dans le livre "Fonctions d'une variable réelle" de Bourbaki (qui va même un tout petit peu plus loin en autorisant la dérivée à droite à prendre une valeur infinie).
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