Météorologie: subsidence et tourbillon

Bonjour,

Je suis toujours en train d'essayer de comprendre Pierre Pélaborde, «Le tourbilln, principe général à la base de la climatologie dynamique», au sujet duquel j'ai déjà posé une question dans une autre discussion.

Dans le I.4.b, p.489 sq., un passage m'intrigue. Je pense que l'auteur ne s'explique pas très bien et que j'ai réussi à comprendre, mais j'aimerais en être sûr.

L'auteur explique que le principe de l'inertie, impliquant la conservation du moment de rotation, fait que si une masse d'air tourbillonnant dans le sens cyclonique diverge sa vitesse de rotation va diminuer. (On comprendra bientôt pourquoi j'ai précisé «dans le sens cyclonique» alors que cela paraît inutile, la question de la conservation du moment de rotation se posant tout autant si la masse d'air est animée au départ d'un mouvement anticyclonique. Je précise aussi que nous parlons ici d'une masse d'air dont la latitude ne change pas) Soit, cela ne pose pas de problème. On le lit d'ailleurs directement sur l'équation «Zêta/D=cte», où Zêta est le double du tourbillon apparent de la masse d'air (dont la latitude ne varie pas) et D la hauteur de la colonne d'air. Jusque là, pas de problème.

Le problème est que l'auteur écrit «l'air froid s'affaisse et diverge, ce qui détermine un Zêta de plus en plus faible aboutissant à un
tourbillon négatif, c'est-à-dire anticyclonique». Or la conservation du moment de rotation fait diminuer la vitesse angulaire mais n'en change pas le signe. On le voit bien aussi sur l'équation «Zêta/D=cte».

Je suppose donc que l'auteur mélange (pas par incompétence, mais pour aller vite) deux processus: la diminution de la valeur absolue de la vitesse angulaire liée à la conservation du moment de rotation, et les conséquences de la pseudo-force de Coriolis qui s'applique à la masse d'air parce qu'elle perd de l'altitude (la divergence et la subsidence étant liées).

Est-ce bien cela, s'il-vous-plaît?

Une espérant ne pas avoir été trop long ou trop confus, merci d'avance.

Réponses

  • Bonjour,

    $\displaystyle f+\zeta \sim D$

    A une latitude donnée, $f$ est constant.

    Dans l'hémisphère Nord, $\displaystyle f = 2 \Omega \sin \phi >0.$

    Quand la colonne d'air froid s'effondre (divergence), $\displaystyle D \to 0$ et donc $\displaystyle f+\zeta \to 0$ et donc $\displaystyle \zeta \to -f<0.$

    Le signe négatif signifie que le tourbillon relatif est anticyclonique.
  • Bonsoir Yves,

    Merci pour votre réponse. Je suis dubitatif parce que la somme d’un paramètre de Coriolis et du double du mouvement relatif n’est pas égale à D, mais à D multipliée par une constante…

    Bien à vous,

    Bastien
  • Bonjour,

    Tu doutes que, pour tout $c>0$, $D \to 0$ implique $cD \to 0.$

    Et donc que, pour tout $f >0$ constant et dans l'hémisphère Nord, $f + \zeta = cD \to 0$ implique que $\zeta \to -f<0.$

    J'en prends bonne note.
  • Bonjour,

    En effet, cela revient au même, pardon.

    (f+zêta)/D=k (k constant) => zêta=kD-f, où l’on voit que si D tend vers 0 le tourbillon relatif de la colonne d’air tend vers l’inverse du tourbillon local, indépendamment de la valeur initiale (indépendamment de la valeur absolue et même du signe), du tourbillon de la colonne d’air (c’est curieux, non?).

    Dans le cas où le tourbillon initial est cyclonique, il devient anticyclonique lorsque l’affaissement de la colonne d’air est suffisant pour que kD<f, soit D<f/k.

    Dans le cas où le tourbillon initial est anticyclonique, on a dès le départ kD<f. Si k>0, quand D diminue zêta diminue aussi, ce qui veut dire que l’anticyclone tourne de plus en plus vite. La vitesse maximale qu’il pourra atteindre du seul fait de sa contraction verticale est majorée par -f/2.

    Dans le cas où le tourbillon initial est anticyclonique avec k<0, zêta=kD-f implique que la vitesse angulaire de l’anticyclone va diminuer quand sa hauteur va diminuer, ce qui est bizarre…

    Enfin, au bas de la page 489, l’auteur écrit que «lorsqu'une colonne reste à la même latitude, zêta dépend uniquement de la convergence ou de la divergence, puisque f ne varie plus», jusque là tout va bien, et qu’«on peut écrire zêta/D=cte», ce que je ne comprends pas, parce que si cette dernière équation était vraie, cela voudrait dire qu’aucune variation de D ne fera jamais changer le signe de zêta, or on a vu le contraire…
  • Bonjour,

    Ce que tu écris est faux. Tu confonds valeur absolue et valeur relative. Tu confonds des constantes entre elles. Tu ne précises pas dans quel hémisphère tu te trouves. Tu trouves 'bizarre' des évidences.

    Bref, continue ton travail mais progresse pas à pas.

    Si tu poses une problématique précise, je peux t'aider. Mais je ne sais pas répondre à ton dernier message.
  • Tout cela est sous-entendu dans l’hémisphère Nord.
  • Bonjour,

    Pour reprendre très progressivement et tenter de poser des questions précises, je crois lire, au bas de la page 489, que, de ce que f+zêta/D est constant, on déduit que quand f est constant (c'est-à-dire quand la latitude ne varie pas), zêta/D est constant, ce qui me pose problème.

    Merci d'avance.
  • Bonjour,

    On note $c_1,c_2,...$ des constantes réelles.

    On a $f+\zeta=c_1D$ comme point de départ approximatif (puisque c’est la masse et non le volume qui est conservée).

    Le terme $f=2\Omega \sin \phi$ ne dépend, sur Terre, que de la latitude.

    On se place à la même latitude : donc sur le cercle de latitude constante sur la sphère terrestre. $f =c_2$ sur ce cercle.

    On reporte $\zeta=c_1D-c_2$ puis $\zeta/D=c_1-c_2/D$. L’auteur considère qu’il peut faire une approximation $c_1-c_2/D=c_3$ alors que $D$ va varier dans son raisonnement.

    Ce n’est pas forcément faux : tout dépend que la comparaison être $|c_1|$ et $|c_2/D|$. Mais cette approximation est fausse lorsque $D\to 0$ : divergence des courants atmosphériques et ralentissement de la vitesse angulaire du tourbillon.
  • Bonsoir Yves,

    Merci beaucoup pour votre réponse, vous m'aidez beaucoup. Je trouve choquant de poser «On peut écrire zêta/D=cte» comme ça, sans justifier qu'une telle approximation soit admissible dans la démarche suivie, mais je l'admets pour continuer ma lecture.
  • Nouvelle question, toujours en progressant pas à pas, si vous le voulez bien.

    Avant tout, comme vous m'en avez fait le reproche, je précise que, comme l'auteur le sous-entend dans le passage que le vais citer, j'envisage une situation dans l'hémisphère Nord.

    J'admets que dans le cas où la colonne reste à la même latitude on a zêta/D=cte. Cette équation implique que quand D varie, zêta varie proportionnellement, et ne change pas de signe, puisque D ne change jamais de signe. Or p.490, l'auteur écrit: «si D décroît (divergence), la rotation cyclonique s'affaiblit. C'est le cas des secteurs froids postérieurs à des cyclones: l'air froid s'affecte et diverge, ce qui détermine un zêta de plus en plus faible aboutissant un tourbillon négatif, c'est-à-dire anticyclonique».

    J'y vois une contradiction. Est-ce que je me trompe?

    Merci d'avance.
  • Bonjour,

    On a déjà discuté de ce passage et je t’ai démontré le résultat annoncé (voir plus haut).

    Je t’ai mâché le travail deux fois : démonstration rigoureuse dans le premier message et explication que $\zeta/D$ constante n’est jamais valide quand $D\to 0.$

    Si tu veux chercher la petite bête dans le livre, tu peux dire que tu as trouvé un passage peu clair. Mais l’auteur ne propose pas des démonstrations mathématiques mais des raisonnements physiques et des équations simplistes pour les suivre.

    Es-tu en train d’étudier la météorologie ou de corriger le livre pour une traduction ou une réédition ?
  • «On a déjà discuté ce passage»: fais-tu référence à mon dernier message ou à mon avant-dernier message?

    Si je me trompe dans mon dernier message et si tu veux bien m’aider encore (je comprendrais que non), pourrais-tu dire exactement quelle est mon erreur?

    J’essaie de comprendre l’article en question parce que le sujet m’intéresse.
  • Bonjour,

    Mon tout premier message est la démonstration rigoureuse de l’affirmation selon laquelle le secteur froid postérieur d’un cyclone, divergent, devient anticyclonique (dans l'hémisphère Nord).
  • En effet, ta démonstration est claire et je t’en remercie.

    Je souhaite néanmoins comprendre pourquoi l’auteur écrit que zêta/D est constant, et donc que zêta varie comme D, mais aussi que zêta peut devenir négatif quand D est suffisamment petit. Ça me semble contradictoire. Est-ce une erreur? Ou y a-t-il un sous-entendu, une étape intermédiaire, etc., que je n’ai pas compris? Ou est-ce que je fais un contresens quelque part?
  • Bonjour,

    C’est une erreur de l’auteur. Pour obtenir la négativité il faut éviter l’approximation $\zeta/D$ constant.
  • Bonjour Yves,

    Merci beaucoup pour tes réponses. Je crois que grâce à toi l'article est à peu près clair pour moi maintenant.

    J'aurais encore une ou deux questions à te poser si tu veux bien, ou à quiconque voudra bien répondre. Bien sûr, je comprendrais que cet échange t'ait lassé ou que le caractère plus météorologique que mathématique des questions à venir implique que je doive les poser sur un autre forum.

    Pour avancer pas à pas, je pose une question à la fois. La première est donc celle-ci: quand Marcel Leroux, La Dynamique du temps et du climat, coll. «Enseignement des sciences de la terre», Masson, Paris, 1996, écrit ceci p.33, à propos d'un anticyclone mobile polaire:
    Selon le principe de conservation du tourbillon absolu, sachant que le tourbillon local diminue du pôle en direction de l'équateur, le tourbillon propre de la masse en mouvement est supérieur au tourbillon local: le tourbillon relatif (différence entre tourbillon planétaire et tourbillon local) étant positif, le déplacement s'effectue grossièrement d'ouest en est (ce qui signifie que l'anticyclone mobile se déplace dans l'espace plus vite que la surface de la terre).
    ;

    le processus auquel il fait référence est celui qui est expliqué qualitativement dans l'article de Pédelaborde à la p.487, c'est bien cela?
  • Bonjour,

    Oui, c'est cela. C'est l'interprétation des équations $\Omega'=\omega+\omega' = c$ avec $c$ constant, $\Omega>\omega = \Omega \sin \varphi.$

    On arrive à montrer qu'un courant d'air polair, initialement au repos au-dessus du pôle Nord, qui s'écoule sans divergence ni convergence vers l'Equateur tourne - càd adopte un mouvement de rotation - par rapport à la surface de la Terre, est cyclonique et se déplace par rapport à la surface de la Terre vers l'Est.
    De même, un courant d'air équatorial, initialement au repos à l'Equateur, qui s'écoule sans divergence ni convergence vers le pôle Nord tourne par rapport à la surface de la Terre, est anticyclonique et se déplace par rapport à la surface de la Terre vers l'Est. C'est bien l'Est et non pas l'Ouest. La plupart des étudiants (et les anciens théoriciens) se plantent sur ce point. Le rasionnement correct est page 486-487.

    Tout ça est approximatif puisqu'on néglige les frottements de la colonne d'air sur la surface de la Terre (et donc de l'océan) et que c'est la masse et non pas le volume qui est conservé.
  • Bonjour Yves,

    Merci pour ta réponse. C'est clair.

    Comme le tourbillon local varie proportionnellement au sinus de la latitude, qu'il est égal au tourbillon planétaire au pôle et décroît d'abord lentement puis de plus en plus vite à mesure qu'on se rapproche de l'équateur, je suppose que le mécanisme dont nous parlons, considéré abstraitement, devrait être relativement peu sensible à proximité du pôle puis de plus en plus sensible à mesure qu'on se rapproche de l'équateur. Je veux dire: si on ne prend aucune autre cause en compte, on devrait s'attendre à ce que la déviation de l'anticyclone mobile polaire vers l'Est pour un degré de latitude parcouru vers le Sud supplémentaire soit de plus en plus grande à mesure qu'il se rapproche de l'équateur. Est-ce pertinent?

    D'autre part, Leroux, op.cit., p.33 (c'est la suite directe du paysage précédemment cité) écrit:
    Cet avantage sur la rotation de la terre en direction de l'Est n'est pourtant que passager, et il s'épuise progressivement puisque la circonférence des parallèles augmente en s'éloignant des pôles. L'excédent de vitesse relative de l'A.M.P. diminue ainsi lentement, jusqu'à se trouver en équilibre avec la vitesse de rotation (A.M.P. immobile), voire à s'inverser (déplacement vers l'Ouest de l'A.M.P.), si d'autres facteurs ne sont pas intervenus auparavant.

    Or la circonférence des parallèles croît, du pôle à l'équateur, proportionnellement au cosinus de la latitude, donc d'abord rapidement puis de plus en plus lentement jusqu'à l'équateur.

    Il me semble donc que si on considère seulement ces deux causes, abstraitement: (1) l'accélération vers l'Est à cause de l'augmentation du tourbillon relatif et (2) l'accélération vers l'Ouest à cause de l'augmentation de la circonférence des parallèles, on est conduit à supposer que (2) doit l'emporter sur (1) dans un premier temps, et qu'ensuite, dans un second temps, (1) doit l'emporter sur (2), donnant un anticyclone mobile polaire se déplaçant d'abord vers l'Ouest puis vers l'Est. Or c'est le contraire qui se passe: il se dirige d'abord vers l'Est puis de plus en plus vers l'Ouest. Je suppose que la raison à cette apparente contradiction est qu'il faut prendre en compte les autres causes passées sous silence pour le moment. Est-ce correct, s'il-te-plaît?

    Merci encore.
  • Bonjour,

    Pour ta première question que j’ai du mal à cerner, je crois que la réponse est ‘oui’.
    Trace la courbe $\varphi \mapsto \sin \varphi$ pour $0<\varphi<\pi/2.$ Au début $\varphi=0$ et on est à l’Equateur, la variation est la plus importante. Vers le Pôle, $\varphi=\pi/2$, la variation diminue.

    Donc quand un courant d’air polaire arctique, relativement immobile, s’écoule vers l’Equateur, le phénomène de tourbillon anticyclonique et de déplacement vers l’Est s’accélère au fur et à mesure qu’il s’approche de l’Equateur. Mais un autre phénomène entre en jeu (comme souvent en physique).

    Pour la seconde question la réponse est ‘non’.

    On a d’abord le déplacement vers l’Est (que l’on a expliqué) puis, provoqué par l’augmentation du rayon du cercle terrestre qui varie en $\cos \varphi$, on a un ralentissement jusqu’à une latitude d’équilibre puis (éventuellement) un déplacement vers l’Ouest.

    Si l’on ne connaît rien de la météorologie, on pourrait commencer par remarquer que le rayon terrestre augmente (lorsque l’écoulement vers l’Equateur débute à partir du Pôle Nord) et conclure à un tourbillon cyclonique vers l’Ouest. Et pour trancher lequel des phénomènes est plus fort, il faut faire le calcul plus précis à partir des équations de la dynamique des fluides. Ici, l’auteur connaît le résultat et présente donc de façon pédagogique comment comprendre le résultat exact sans faire le calcul.
    On doit aussi pouvoir justifier qu’un phénomène l’emporte sur l’autre par des calculs simplifiés (portant sur les énergies mises en jeu), mais je n’ai pas le courage de le faire : il me faudrait des jours pour me replonger dans la dynamique des fluides.

    Le texte que tu cites n’explique pas pourquoi l’augmentation du rayon terrestre a un impact quelconque sur le phénomène. Quelle est ta réponse à cette question : en quoi le rayon terrestre influence-t-il l’écoulement d’un courant polaire vers l’Equateur ?

    Mettons-nous d’accord sur la réponse avant de continuer.
Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.