$\cos 2\pi/n$ et $\sin 2\pi/n$ rationnels ?

Bonjour,

Est-ce que pour certaines valeurs paires de $n$ strictement plus grandes que $4$, on peut avoir $\cos \frac{2\pi}{n}$ et $\sin \frac{2\pi}{n}$ rationnels (en même temps) ?

Je crois avoir montré que c'était impossible pour $n$ impair, grâce au coloriage d'une grille (constituée de petits carrés) avec deux couleurs, telle que deux points de la grille qui se trouvent à une distance $d$ fixée à l'avance sont toujours de couleurs différentes. Est-ce que vous vous avez des références sur cette méthode ?

Merci d'avance.

Réponses

  • Non car pour $n \in \mathbb N^*$, $\cos\left(\frac{\pi}{n}\right)$ est rationnel si et seulement si $n=1, 2$ ou $3$. C'est un résultat classique. On peut utiliser les polynômes de Tchebychev et un critère classique sur les racines rationnelles de polynômes à coefficients entiers pour montrer ça. C'est détaillé dans le dernier numéro de Quadrature (numéro 103), ou encore dans le livre Théorie des nombres de Daniel Duverney chez Dunod.

    Donc pour ton problème ça ne laisse que le cas $n=6$ de possible, et comme $\sin\left(\frac{\pi}{3}\right) = \frac{\sqrt 3}{2} \not \in \mathbb Q$...
  • D'accord, merci Poirot. Le critère est-il: les racines rationnelles de polynômes unitaires à coefficients entiers sont des entiers ?
  • Merci pour les références.
  • Oui c'est bien celui-là, c'est un corollaire du fait que si $\frac{p}{q}$ ($p,q$ premiers entre eux) est racine de $a_nX^n + \dots + a_1X+a_0$ alors $p \mid a_0$ et $q \mid a_n$.
  • On peut aussi montrer que les racines de l'unité dans $\mathbb{Q}(i)$ sont exactement les racines 4ème de l'unité.
  • @MrJ: j'essaie de faire la démonstration. Si $z\in \Q [ i]$ est racine de l'unité, $z^n-1=0$, donc $z$ est racine d'un polynôme unitaire à coefficients entiers relatifs. De même, pour $\overline{z}$.Donc $z+ \overline{z}$ aussi (on utilise la noetherianité de $\Z[z, \overline{z}]$ par exemple). Donc comme $z+ \overline{z} \in \Q$, $z+ \overline{z} \in \Z$.

    Donc $2 \Re (z) \in \Z$. Donc $\Re(z)=-1, -1/2,0,1/2$, ou $1$. Comme $\Im(z) \in \Q$, $z\in \{1,-1,i,-i\}$.
  • Il y a une jolie démonstration géométrique.
    Un réseau plan est l'ensemble $R$ des points du plan dont les coordonnées dans un repère $(O,\overrightarrow{i},\overrightarrow{j})$ (orthogonal ou non) sont des entiers relatifs. Quels sont les polygones réguliers dont tous les sommets sont situés sur un réseau ?
    On utilisera seulement la propriété : si trois sommets d'un parallélogramme sont sur un réseau, alors le quatrième y est aussi.
    Soit un polygone régulier $A_{1}A_{2}...A_{n}$, $n\geq 3$, de côté $c>0$, ayant ses sommets sur un réseau $R$. On construit les points $B_{1},B_{2}...,B_{n}$ tels que : $\overrightarrow{OB_{1}}=\overrightarrow{A_{1}A_{2}}$, $\overrightarrow{OB_{2}}=\overrightarrow{A_{2}A_{3}}$, ... , $\overrightarrow{OB_{n-1}}=\overrightarrow{A_{n-1}A_{n}}$, $\overrightarrow{OB_{n}}=\overrightarrow{A_{n}A_{1}}$. Ces points $B_{1},B_{2}...,B_{n}$ sont tous sur le réseau $R$, et ils sont les sommets d'un polygone régulier de côté $c^{\prime }=2c\sin \frac{\pi }{n}$. Si $n \geq 7$, alors $c^{\prime }<c$, et il existe donc sur le réseau un polygone régulier de côté strictement inférieur. Impossible car la distance de deux points distincts d'un réseau a un minimum.
    Reste le cas du pentagone. Voir la figure. Si les sommets $A,B,C,D,E$ sont sur le réseau, alors les points $F,G,H,I,J$ y sont aussi, et ils sont les sommets d'un pentagone régulier de côté strictement inférieur au précédent, et le même raisonnement s'applique.
    Les seuls polygones réguliers qui restent sont le triangle équilatéral le carré et l'hexagone régulier, et réellement ils le sont, comme on dit au début du film « Titanic ». Cette figure et ce raisonnement sont extraits du Petit Archimède n° 75-76, mai-juin 1981, qui traita de cette question.

    Par ailleurs la mise en équation de cette question conduit à l'équation diophantienne $\cos r \pi=s$ dans $ \mathbb Q$, et le raisonnement précédent fournit la solution de cette équation.

    Bonne journée.
    Fr. Ch.
  • @marco

    Ta démonstration m'a l'air très bien. J'en connais deux autres :
    - Une avec la théorie des extensions de corps (Si $a$ est une racine de l'unité dans $\Q(i)$, alors $\Q(a)/\Q$ est de degré $2$, ce qui ne laisse plus beaucoup de choix pour le polynôme minimal de $a$).
    - Une preuve où on étudie les suites des parties réelles et des parties imaginaires des puissances (Lien ).
  • Pour tout $n \in \N$ le $n$-ième polynôme cyclotomique (noté $\Phi_n$ ci-après) est irréductible sur $\mathbb Z$, soit $\omega$ une de ses racines (i.e. une racine $n$-ième primitive de l'unité). Si $\omega \in \Q [ i ] $ alors $\big [\Q[\omega]:\Q \big ] \leq 2$ donc $\Phi_n$ possède un facteur de degré au plus $2$ et donc : $\deg(\Phi_n)=\varphi(n)\leq 2$ (indicatrice d'Euler). Les seules possibilités pour ça sont $n \in \{1,2,3,4,6\}$. On en déduit la liste exhaustive des solutions au problème. Certes il n'est pas évident de montrer que $\Phi_n$ est irréductible.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Merci MrJ, Chaurien, et Foys pour les démonstrations.
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