Étude du concours d'accès à Polytechnique

Bonjour,

Une étude sociologique du concours de l'X affirme que le concours lui-même et le processus de préparation en CPGE jouent un rôle de "tri social"** qui s'ajoute à ce qui existe avant le bac (je dirais même avant le brevet ou la 2nde).

Cette étude est intitulée Les concours sont-ils neutres ? Concurrence et parrainage dans l’accès à l’École polytechnique et une de ses particularités est de tenter de mettre à jour des mécanismes (sûrement bien connu dans le milieu des prépas et d'écoles comme l'ENS et l'X) comme notamment la quasi-nécessité de maîtriser un hors-programme officieux connu de quelques grandes prépas parisiennes. D'ailleurs, elle a été co-écrite par un sociologue et un doctorant en mathématiques qui a lui-même, sauf erreur de ma part, été admis à l'X après le concours MP.

Le texte intégral disponible ici : https://www.cairn.info/revue-sociologie-2018-2-p-169.htm est payant mais on en trouve un résumé détaillé avec extraits dans une série de tweets ici : https://mobile.twitter.com/sociosauvage/status/1029670551261011969

NB : je ne suis pas forcément d'accord avec tout quoique cela confirme des choses que j'avais déjà entendues par d'anciens élèves de prépas. A vrai dire, j'attends justement vos avis pour compléter le propos de cet article.

** Cette expression, inutilement provocatrice à mon goût, est celle des auteurs.80562

Réponses

  • Ce n'est que la confirmation de ce qu'on pressentait.
    Il faut légitimer les élites sociales constituées (par la naissance) de nos jours par autre chose que le fait du prince : les concours type polytechnique permettent cette légitimation à posteriori, elles ne les créent pas.

    PS:
    Je rêve d'un monde où les mathématiques seront enseignées comme on peut enseigner le tricot, débarrassées de tout rôle servant à légitimer un pouvoir.
  • Copieusement faux. Les candidats formates exasperent les examinateurs de math.
  • Ça sent l'aigreur et le nivellement par le bas....
  • Ça sent l'aigreur et le nivellement par le bas....

    J'imagine que c'est ce qui devait se dire quand on a raccourci un roi. B-)-

    Comme déjà indiqué j'aimerais que les mathématiques cessent d'être un outil au service d'une minorité pour légitimer leur pouvoir qu'ils détiennent en fait par la naissance: se prévaloir d'être diplômés de grandes écoles servant à obscurcir ce fait et à tromper le péquin moyen sur cette réalité.
  • @P : où as-tu vu qu'il était question de formatage ? Hors programme officieux et "rapport esthète" aux maths n'ont pas grand rapport avec du formatage.
  • P.: As-tu été membre d'un jury dans la session d'un concours d'entrée à Polytechnique?

    Car le discours : "on n'aime pas les formatés, les petits robots" c'est un discours qu'on entend partout mais le fait est que ces profils rassurent en général les gens qui sont en charge d'un recrutement quelconque.


    Pour caricaturer un peu, il y a des gens qui ont les réponses aux questions qui seront posées aux concours des grandes écoles et il y a les autres qui ne les ont pas. Ceux qui ont les réponses appartiennent à une classe de gens assez bien définie et ceux qui ne les ont pas appartiennent eux aussi à une classe de gens assez bien définie.

    Quand un membre d'une classe qui normalement n'a pas reçu les bonnes réponses réussi à un de ces concours on le met en avant pour glorifier la méritocratie. Au temps de Louis XVI des gens de la roture étaient quelque fois anoblis pour services rendus.
  • Je vois au contraire un grand lien entre "hors programme officieux" et "formatage".

    Conseil stratégique donné par un colleur de Ginette (pas à moi et il y a longtemps) : « Le nombre d'exercices du grand oral de l'X est fini. » Certes, on est assez loin du rapport esthète aux math. Côté formatage en revanche...

    Voici des exercices classiques qui sont en bordure du programme : sommation d'Abel ; équivalent de $u_n$, où $u_{n+1}=\sin u_n$ ; équivalent de l'erreur dans les méthodes d'intégration numérique ; équivalent de $\int f(x)\mathrm{e}^{g(x)/h}\mathrm{d}x$ quand $h$ tend vers $0$ ; développement asymptotique d'une suite définie par une équation, par exemple $x_n^n=1-x_n$ avec $x_n\in[0,1]$ ; etc.

    La réaction in situ sera bien différente si ces exercices ont été présentés comme des exercices difficiles « en passant » ou des classiques à connaître par cœur. J'associe la deuxième version à du formatage, elle est réservée à un petit nombre de prépas.

    En gros, un examinateur de concours cherche à vérifier d'une part les connaissances et les réflexes, disons les capacités techniques, d'autre part ce qui demande de l'initiative, disons les capacités de recherche. Selon les écoles, la proportion est variable. Le formatage consiste à faire en sorte qu'un plus grand nombre de questions passent de la catégorie "recherche" à la catégorie "technique", de sorte à résoudre des exercices réputés difficiles (et qui le sont pour la grande majorité des candidats) de façon routinière. Traiter le "hors programme officieux", c'est donc bien renforcer le formatage.
  • Merci à paf pour cette référence.
    Je suis en train de lire cette étude, très intéressante.
    Je ne commente pas tout de suite, car je n'ai pas encore tout compris, notamment dans les tableaux.

    Je réagis toutefois au propos de fdp
    fdp a écrit:
    Comme déjà indiqué j'aimerais que les mathématiques cessent d'être un outil au service d'une minorité pour légitimer leur pouvoir qu'ils détiennent en fait par la naissance

    Je trouve tes mots mal choisis, je pense en fait qu'ils retardent la prise de conscience.
    Les mathématiques ne font rien, il y a ce que font et ce que ne font pas les mathématiciens.
    Quand on parle d'un outil, il y a des gens qui utilisent, or en réalité les faits sociaux se font souvent tout seuls, il n'est pas nécessaire d'invoquer la complicité: l'ignorance, l'indifférence suffisent.
    Cette indifférence aux faits sociaux est bien répandue dans la communauté mathématique, en fait ce sont plutôt des choses sales dont on préfère parler le moins possible.
  • Bon, le catéchisme gauchiste qui apparaît périodiquement. Nihil novi sub sole.
  • Ah, mais comme disait Lénine, les faits sont têtus.
  • Alea:

    Je n'ai pas compris ta réponse ou du moins, le rapport avec ma citation.

    Qui a décidé qu'il fallait faire une terminale S( C précédemment) pour espérer avoir des bons choix de formations et de carrière? Les mathématiciens ont surement été flattés qu'on leur fasse cet honneur mais cela a vite tourné à la fabrication d'un outil bien utile pour discriminer (on préfère plutôt parler de sélection mais les deux termes ont mauvaise presse) au service de la même minorité qui a su s'adapter à la situation (ils sont les principaux détenteurs du capital culturel). J'aime trop les mathématiques pour supporter l'idée qu'on les "prostitue" de la sorte en les utilisant pour cette sale besogne consistant à légitimer symboliquement le pouvoir des biens nés.
  • @FdP : mais de quoi tu parles ? Connais-tu mes origines ? Connais-tu les origines des gens que j'ai fréquenté dans l'une de ces grandes écoles ? C'est toi qui entretient les clichés avec ton discours haineux.
  • Poirot:

    Ce qui satisfait les individus n'est pas l'égalité mais qu'il y ait quelqu'un en dessous de soi socialement pour pouvoir se dire: je vaux plus que lui/elle, que je suis plus méritant que lui/elle. C'est à cette aune que la plupart des gens évaluent leur situation sociale.
    Que cette condition ne soit pas remplie conduit à la peur du déclassement, c'est à dire la peur qu'il y ait moins de gens en dessous de vous dans l'échelle sociale ce qui est insupportable pour beaucoup de gens mais ils supportent beaucoup mieux qu'il y ait des gens au dessus d'eux dont ils ne questionnent jamais la raison pour laquelle ils sont au dessus d'eux. Il est vrai que les grandes écoles et autres institutions censées être les temples de la méritocratie sont là pour brouiller la réflexion: nous sommes élevés dans la religion du mérite, tout ce qui est estampillé officiellement mérite trouve grâce à nos yeux et tue tout questionnement sur l'organisation sociale.

    PS:
    Tu vivais dans un bidon-ville et tes parents étaient chiffonniers? B-)-
  • "Qui a décidé qu'il fallait faire une terminale S( C précédemment) pour espérer avoir des bons choix de formations et de carrière?"

    On peut poser la question différemment: pourquoi pense-t-on que tout le monde peut et doit suivre une formation humaniste (lettres, histoire), alors qu'une formation scientifique ne saurait être accessible à tous ?

    La TS n'est pas une classe de mathématique, c'est juste une classe généraliste, alors que les autres sont fortement déséquilibrées, ce qui effraie la plupart des parents.
  • Aléa:

    Tu peux prendre les choses par n'importe quel bout, les mathématiques sont devenues un outil de discrimination, pardon, de sélection, je pense que c'est un fait.


    PS:

    On voit bien que ce qui est important est que des gens , les bien nés, aient des connaissances culturelles dans un domaine et qu'ils soient capables de faire accroire à la masse des gens que le fait d'avoir ces connaissances est un gage de mérite et par-là légitime leur pouvoir symboliquement. Le contenu réel de ces connaissances n'a probablement qu'un intérêt mineur ce qui importe c'est leur reconnaissance comme symbole de pouvoir.
  • Depuis quand les personnes "de pouvoir" sont celles à avoir reçue une formation scientifique ? L'X n'est pas l'ENA.
  • Il est vrai qu'au chômage, la méritocratie est hors sujet: le système a besoin de règles; sans norme, le système n'a pas de subsistance.
    A toute époque, un métier passe par l'apprentissage; et la formation mène à un savoir-faire qui rapidement reproduit ses automatismes.
    Qui roule à contresens sur une autoroute est moins formaté que celui qui roule à l'opposé mais son espérance de vie est moins longue.
  • Un tel sujet était l'attrape mouche idéal pour engluer @FDP dans son discours écologauchobobo hors sol.....voilà ce qui arrive quand on parle de ce que l'on ne connait pas (@FDP ne connait ni les prépas ni les grandes écoles comme l'X)

    Et maintenant une petite chanson du maître à penser de @ FDP....https://www.google.fr/url?sa=t&source=web&rct=j&url=https://m.youtube.com/watch?v=tiop3zs4Qb4&ved=0ahUKEwjJ9PKinubdAhVCXxoKHR3lCs8Qo7QBCCYwAQ&usg=AOvVaw1PAD09m8EQ6cstQ7iyj5Kh
    Liberté, égalité, choucroute.
  • Ramon Mercader:

    Comment tu expliques que les dirigeants du CAC 40 ont suivi des parcours assez peu différents?
    Ces 50 personnes devraient avoir été dans 50 écoles/formations différentes mais on constate que ce n'est pas le cas. J'aimerais bien savoir à quoi cela sert d'avoir ingurgité autant d'exercices de mathématiques, pour ceux qui ont fait polytechnique et j'imagine les autres aussi si c'est pour faire de la direction d'entreprises. La réponse est simple: un simple prétexte pour éliminer les indésirables et que les biens nés se retrouvent ensemble entre gens de bien à apprendre les rudiments pour se préparer à régner.
  • Fin de partie a écrit:
    Je te parle du vrai pouvoir, le pouvoir économique, et toi tu me parles de leur commis.

    L'ENA ne sert pas à faire que de la politique. D'ailleurs, cette école apparaît en deuxième position dans le classement que tu cites. Je ne suis pas sûr que les mathématiques y jouent un rôle prépondérant.
  • paf a écrit:
    comme notamment la quasi-nécessité de maîtriser un hors-programme officieux connu de quelques grandes prépas parisiennes.
    Il faut faire disparaître la possibilité pour cette mafia qu'est l'inspection, d'interdire à l'enseignant de porter certains savoirs à la connaissance des élèves. Lorsqu'une notion mathématique porte le qualificatif infâmant de "hors programme" dans le programme, c'est presque systématiquement une notion clé fondamentale qui sert à la construction du savoir de l'élève.
    Les profs qui désobéissent à ce sujet ont mille fois raison.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Math Coss a écrit:
    Voici des exercices classiques qui sont en bordure du programme : sommation d'Abel ; équivalent de $u_n$, où $u_{n+1} = \sin (u_n)$; équivalent de l'erreur dans les méthodes d'intégration numérique ; équivalent de $\int f(x)e^{g(x)/h}$quand $h$ tend vers $0$; développement asymptotique d'une suite définie par une équation, par exemple $x_n^n=1-x_n$avec $x_n \in [0,1]$; etc.

    Ces exercices ont une grande valeur formatrice et j'espère que des lecteurs éventuels l(ça ne fera pas plus que quelques dizaines de personnes mais c'est déjà ça...) les verront et essaieront de les faire, ici je pense qu'on est protégé contre la censure institutionnelle du mammouth.
    http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?6,1718002,1718202#msg-1718202

    Je me souviens encore des jours où mon prof de spé nous avait montré l'équivalent de $u_{n+1}= f(u_n)$ où $f$ a un développement limité en $0$ de la forme $x\mapsto x+sx^{\alpha}+ O(x^{\alpha +1})$. Et aussi celui où il nous avait montré comment transformer une somme de la forme $\sum_{k=0}^n a_k (b_{k+1}-b_k)$ en $a_n b_{n+1}- a_0b_0 +\sum_{p=1}^nb_p(a_{p-1}-a_p)$ (vous pouvez vérfier l'égalité entre ces sommes).

    L'enseignement de la méthode de Laplace est du formatage ?????
    Tout le monde devrait connaître cette propriété fondamentale de $\exp$.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • @Foys: Tu te trompes. Le principe de liberté pédagogique est inscrit dans le code de l'éducation depuis toujours et c'est un des fondements de notre système éducatif.
    Collège et lycée disposent de l'autonomie en ce qui concerne "Le choix de sujets d'études spécifiques à l'établissement, en particulier pour compléter ceux qui figurent aux programmes nationaux ;"

    Tu peux lire la rapport Villani-Torossian qui recadre ce qu'est un programme: "ni un objectif, ni une feuille de route". C'est une vision aberrante du programme.

    Ainsi les profs qui font du hors programme ne désobéissent pas, bien au contraire ils appliquent la loi et suivent les recommandations du code de l'éducation.

    Bien sûr tu as d'autres obligations: laïcité, objectivité du savoir etc. Les enseignements doivent être fait en accord avec l'équipe pédagogique etc.
    et il y a des restrictions
    " La liberté pédagogique de l'enseignant s'exerce dans le respect des programmes et des instructions du ministre chargé de l'éducation nationale et dans le cadre du projet d'école ou d'établissement avec le conseil et sous le contrôle des membres des corps d'inspection."

    et si tu n'es pas d'accord:
    "Les corps d'inspection peuvent être saisis, pour avis, par le recteur ou par l'enseignant, en cas de recours hiérarchique relatif au compte rendu de l'entretien professionnel, lorsqu'il porte sur les conditions d'exercice de la liberté pédagogique définie à l'article L. 912-1-1 du code de l'éducation."
    Mais tout ça nous écarte du sujet...
  • foys a écrit:
    Il faut faire disparaître la possibilité pour cette mafia qu'est l'inspection, d'interdire à l'enseignant de porter certains savoirs à la connaissance des élèves.
    Les mécontents n'ont qu'à s'inscrire à la fac, ni programme ni inspection là bas (:D
  • Foys a écrit:
    L'enseignement de la méthode de Laplace est du formatage ?????
    Non – enfin, pas forcément – qui a dit ça ?

    En revanche, augmenter le bagage purement technique de ses élèves en rendant mécanique la résolution d'exercices de ce genre, sans se préoccuper de la compréhension des choses, de sorte à pouvoir répondre par réflexe à des questions qui pour la plupart des autres sont des questions non standards de recherche, cela relève du formatage.
  • @Foys: tu prends la citation du texte à l'envers.

    Ce qui est reproché, ce n'est pas de "faire du hors-programme" en classe, mais, pour les écoles, de ne pas respecter le programme, et d'y ajouter, de fait, un programme souterrain.
    Et, là, il ne s'agit pas de liberté pédagogique, il s'agit d'honorer un engagement pris vis-à-vis de l'Etat.
  • @alea: Est-ce que tu as le texte en question dans son intégralité?
  • aléa a écrit:
    Je suis en train de lire cette étude, très intéressante.
    Je ne commente pas tout de suite, car je n'ai pas encore tout compris, notamment dans les tableaux.

    Tout comme Mauricio, je suis preneuse si tu as le texte intégral. J'attends aussi tes commentaires avec impatience...
  • aléa a écrit:
    Ce qui est reproché, ce n'est pas de "faire du hors-programme" en classe, mais, pour les écoles, de ne pas respecter le programme, et d'y ajouter, de fait, un programme souterrain.
    Une solution serait que l'éducation nationale cesse de publier des programmes de concours et que les écoles proposent (et publient officiellement) leurs exigences lors de leur concours d'entrée.

    Comme ça on arrête avec la situation hypocrite où dans une école on demande au candidat de calculer un déterminant 3x3 et dans une autre, de prouver que $L^p([a,b])$ est séparable (je n'invente pas!!!).
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • @alea: pour info je me suis amusé, à l'époque où je préparais des élèves, à écrire le programme souterrain de l'X, des Mines et de HEC (pas très difficile c'est à peu près la même chose tous les ans).
  • Je constate que j'ai été copieusement censuré...
  • j'aimerais avoir une justification....
  • @ Foys.

    Les programmes sont censés protéger les candidats.
    Contrairement à ce que les duettistes Villani et Torossian suggèrent, un programme est un texte de loi.
    À part ça, j'ai appris à l'école, il y a longtemps, que la loi était une question de rapport de forces.

    Les enseignants peuvent enseigner ce qu'ils veulent à condition d'enseigner la totalité du programme.
    Ils ne peuvent évaluer que sur les items du programme.
    Lorsque le programme se heurte à autre texte de loi - le socle commun pour fixer les idées - la théorie en matière de droit stipule que l'accusé (l'enseignant) peut se prévaloir du texte qui le défend.
    Dans la pratique, c'est le contraire.

    Dans le cadre d'une préparation aux concours, il est bien clair que la notion d'évaluation n'a pas le même sens que dans les classes de lycée. Ergo les enseignants peuvent faire ce qu'ils veulent dans la mesure où ils respectent le contrat passé avec leurs étudiants. En particulier ils peuvent faire passer le hors-programme en exercices, problèmes et autres TDs s'ils soupçonnent des grognements du côté de l'IG.

    Un exemple de protection des candidats. Il y a quelques quinquennats de cela, le théorème qui disait que l'image continue d'un compact est un segment a disparu du programme d'hypo.
    En lisant entre les lignes on pouvait imaginer que c'était pour empêcher les examinateurs de poser des exercices à devinettes qui faisaient joujou avec des compacts. Très bien, me direz vous.

    Sauf que

    le théorème en question est crucial pour démontrer l'équivalence des normes en dimension finie.
    Donc couic le théorème d'équivalence des normes en dimension finie.
    Il fallait remplacer "norme" par "norme équivalente à la norme infinie". Un peu ridicule non ? Que faire quand un élève mal luné demande un exemple de norme pas équivalente à la norme infinie ?

    Ben, fermer les rideaux, foutre un planton devant la porte et démontrer le théorème d'équivalence des normes en dimension finie.

    Il fut un temps où le programme de MP* - qui ne s'appelait pas comme ça, mais les choses ont-elles changées - était dicté par l'X.
    Les IGs étaient convoqués, un adjudant leur dictait le programme de l'X. Arrivés à la maison, ils n'avaient plus qu'à enlever le premier et le dernier mot et ils avaient le nouveau programme tout neuf.

    Lorsque j'ai passé les oraux des concours - le quinquennat n'avait pas été inventé - j'ai été confronté à deux situations.

    1/ Un examinateur de maths qui m'a proposé de faire agir un groupe sur un ensemble. Je l'ai regardé effaré car je savais très bien que la notion était hors-programme, balisée comme telle dans mon Ramis, c'est dire. Il a été encore plus effaré l'air de dire qui c'est qui a laissé rentrer cet infirme ?

    2/ Un examinateur de physique qui m'a posé une question. J'ai dit je sais pas. Il a fait sans blague ? Puis m'a dit une minute. S'est absenté pour revenir hilare c'est pas au programme du concours c'est au programme de terminale. Là, mon cerveau a passé une vitesse et il a trouvé la réponse. Il m'a dit je veux pas en entendre parler c'est pas au programme !

    Je suis pas allé dans l'école 1/ ils étaient pas équipés pour recevoir les infirmes.

    C'est la vie.

    e.v.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • @ev: ce que tu dis sur le programme n'est pas la loi, voir code de l'éducation cité plus haut que je t'invite à lire. Donc Villani-Torossian ne sont pas à côté de la plaque, ils remettent les pendules à l'heure et ils ont raison.

    Cette idée de tout mettre en exercice possède le principal inconvénient de ne pas hiérarchiser. Le théorème d'Archimède sur les approximations de pi dans le cahier d'exercice, l'algorithme de Héron dans le cahier d'exercice (td). On se retrouve avec tous les résultats les plus essentiels en exercice et le cahier de cours devient une suite de banalités :-(. C'était les manuels des années 2000. Le corollaire immédiat est que peu à peu, les exercices s'appauvrissent car ils ne correspondent plus au cours et tu te retrouves avec des manuels sans aucun intérêt ou pire dont la seule utilité est de dégoûter des mathématiques les plus brillants...

    Je suis d'accord les examens de concours devraient s'en tenir au programme, ce qu'ils ne font que de manière hypocrite (voir le texte dont ce fil est le sujet!)

    Ce qui est aussi intéressant par rapport à ce que tu dis sur les IG, c'est que sous la troisième république, l'inspection devait chaque année valider les programmes et indiquer les ouvrages adéquats permettant de suivre ces programmes. Il conviendrait de supprimer la notion de supérieur hiérarchique entre proviseurs, inspecteurs et professeurs.

    Je suis aussi d'accord : les programmes de lycée et de prépa ne ressemblent plus à rien.
    M.
  • @ Mauricio, salut et fraternité.

    Pas d'accord.

    Un programme fait l'objet d'un arrêté.
    C'est donc un texte de loi.

    D'ailleurs l'Article L912-1-1 commence par

    La liberté pédagogique de l'enseignant s'exerce dans le respect des programmes et (...)

    Le respect des programmes, c'est le respect de la loi.

    L'enseignant doit respecter son contrat avec les étudiants (et leurs familles). Il doit traiter l'intégralité du programme. Point.

    Ce qu'il fait en plus c'est du hors-programme. Il le peut le faire à condition de ne pas dénaturer le programme ou sa discipline : Tu peux décider avec tes étudiants de faire un jour ton cours en bulgare (resp. sur la géométrie non euclidienne, c'est la même chose). Pas de problème. C'est hors programme mais pourquoi pas. En revanche si tu fais tous les mercredis ton cours en bulgare (resp. sur la géométrie non euclidienne), ça institutionnalise un cours en bulgare (resp. sur la géométrie non euclidienne) et ça va pas.

    À cette limite près tu peux faire ton hors programme.


    Sinon le problème des bouquins des année 2000 était que souvent ils annonçaient un un théorème bien balèze et ensuite demandait au lecteur de le vérifier sur un exemple bien trivial. Il y a de toutes façons belle lurette que je suis incapable de lire un manuel de lycée.

    La dérive que tu pointes du doigt tient au fait que justement le cours n'est plus assez structuré et hiérarchisé.
    Pour des questions d'évaluation - en pédagogie et en didactiques tous les problèmes se ramènent tôt ou tard à des problèmes d'évaluation - il s'opère un lissage des contenus. Les questions difficiles sont éludées et les questions faciles sont ignorées. Il ne reste plus que la soupe.

    Avec un cours solidement structuré, les exercices, aussi hors-programme soient-ils, ne lui font pas d'ombre.

    À propos de soupe, c'est l'heure d'y aller. Je vais t'envoyer un MP parce qu'on est bien loin de Palaiseau avec tout ça.

    amicalement,

    e.v.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • ev a écrit:
    Les programmes sont censés protéger les candidats.
    :-D
    Ca devait être de l'ironie enfin j'espère ::o.

    La seule chose que les programmes sont censés protéger est le fait que les normaliens se reproduisent de père en fils et que l'établissement en question puisse continuer de recruter quelqu'un qui a découvert la théorie des groupes à 14 ans dans un magazine sur le rubik's cube, qui a écrit ses premiers scripts linux à 12 ans et qui a appris les bons concepts par imprégnation parce qu'il a grandi dans le milieu socio-culturel adéquat (des individus comme ça ainsi que quelques surdoués égarés).
    Pour les autres l'EN devrait s'acquitter mission naturelle de démocratisation des savoirs au lieu de pratiquer de la RETENTION D'INFORMATION.

    C'est bien la France ça, on croit encore que la loi protège le petit (alors qu'elle est destinée avant tout à sécuriser des positions avantageuses).

    Si le mec du rectorat de Paris était réellement indigné par les programmes souterrains, il se lèverait de sa chaise et marcherait un peu parce que quand même les lycées et établissements supérieurs les plus hors-programmistes de France sont à au plus quelques centaines de mètres de son bureau (oh zut il semble qu'il ne le fera pas, comment ce fait-ce....).

    Les propriétés des fonctions continues sur un segment en lien avec la compacité sont fondamentales en maths.
    La notion d'action de groupe est fondamentale et à titre personnel, avant que mon prof de prépa ne nous parle de ça, je n'en avais jamais entendu parler. En tout cas j'aimerais qu'on m'explique comment on protège un jeune en interdisant à l'enseignant de lui montrer ces choses (qui seront montrées à d'autres quoi qu'il arrive).
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Foys.

    Je ne suis pas convaincu qu'une suppression des programmes réduirait les inégalités et la reproduction des "élites".
    Et ta phrase citée n'est pas ironique.
    Foys a écrit:
    Les propriétés des fonctions continues sur un segment en lien avec la compacité sont fondamentales en maths.
    La notion d'action de groupe est fondamentale ...

    Merci je suis au courant. Je n'en ai pas l'air mais je suis allé à l'école. Péniblement, mais ça je l'ai appris.
    Foys a écrit:
    j'aimerais qu'on m'explique comment on protège un jeune en interdisant à l'enseignant de lui montrer ces choses

    J'ai dit à peu près le contraire en expliquant que s'il en avait le temps et une classe qui le suivait, l'enseignant pouvait enseigner ce qu'il voulait. En revanche, j'insiste : les programmes protègent - c'est pas infaillible comme je l'ai dit plus haut - des errements des écoles qui débordent ostensiblement.
    Au début des années 80, les ENSI avaient pondu un sujet foutraque complètement hors-programme en physique.
    L'épreuve a dû être refaite. Le merdier qui s'en est ensuivi les a incité à faire gaffe par la suite. (Même si je garde dans mes archives un sujet de maths assez croquignole)
    Foys a écrit:
    C'est bien la France ça, on croit encore que la loi protège le petit
    j'ai appris à l'école, il y a longtemps, que la loi était une question de rapport de forces.

    Curieusement, je préfère des lois mal foutues et mal respectées que pas de loi du tout.

    Mais c'est moi.

    e.v.

    [ J'ai l'impression que tout le monde dans ce fil s'engueule en étant du même avis. Je ne parle pas de FdP, j'arrête de lire ce qu'il écrit quand il ne commence pas ses phrases par \( \displaystyle \int \). ]
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • Edit : je répondais à Foys, pas à ev que je salue bien amicalement au passage.

    Comme d'autres l'ont déjà remarqué, on n'interdit rien à personne : dans les grandes prépa parisiennes on fait tout ce que tu dis et l'inspection générale en est parfaitement au courant. D'ailleurs à Louis le Grand, certaines classes de terminale commencent à faire le programme de sup, inutile de préciser qu'on est très loin de respecter les programmes déjà au lycée.

    Il y a deux choses distinctes : le fait que des grandes écoles comme l'X s'appuient sur un programme officieux mais bien connu des grandes prépas parisiennes et le fait que le programme officiel des prépa soit critiquable. Ces deux points sont distincts.

    On ne reproche pas à l'X de faire des actions de groupes, on lui reproche de considérer comme implicitement acquises des choses qui ne sont pas dans le programme officiel. Un concours national doit avoir un programme officiel connu de tous et ce qui est reproché à l'X c'est que ce n'est pas le cas.

    On est bien d'accord que les programmes de prépa souffrent d'un certain nombre d'insuffisance, plus généralement, je pense que nous sommes nombreux ici à être d'accord que les programmes de la sixième à la prépa sont mauvais.

    On pourrait d'ailleurs espérer que le fait de dénoncer cette habitude de l'X de se baser sur un programme officieux pourrait amener les gens non pas à forcer l'X à se cantonner au programme officiel actuel, mais au contraire à enrichir le programme officiel de manière à ce qu'il contienne tout ce que demande l'X. Pour moi, ce serait la solution idéale, mais elle demande de modifier tous les programmes scolaires en amont, depuis l'école primaire.

    Ce qui se passe aujourd'hui, c'est que seuls quelques établissements ultra privilégiés peuvent traiter ce programme officieux car il y a un décalage énorme entre le lycée lambda et les grands établissements parisiens, non pas seulement en prépa, mais dès le début de lycée.

    Dénoncer l'existence d'un programme officieux seulement accessible par ceux qui ont fait toute leur scolarité dans les grands établissements parisiens ou qui sont fils de prof de maths, de chercheurs ou d'anciens X permet de mettre en évidence le fait que les programmes de l'école d'aujourd'hui, du CP à la terminale, ne permettent pas à l'élève qui ne vient pas d'un environnement très privilégié d'intégrer cette école. C'est plutôt une bonne chose de le dire, je trouve.
  • Foys a écrit:
    Si le mec du rectorat de Paris était réellement indigné par les programmes souterrains, il se lèverait de sa chaise et marcherait un peu parce que quand même les lycées et établissements supérieurs les plus hors-programmistes de France sont à au plus quelques centaines de mètres de son bureau (oh zut il semble qu'il ne le fera pas, comment ce fait-ce....).

    Il est même fort probable que les enfants du mec du rectorat de Paris soient scolarisés à LLG où H4.....

    N'oublions pas non plus que certains IG qui cautionnent les élucubrations pédagogistes des programmes actuels, ont enseigné dans ces mêmes établissements......
    Un IG aujourd'hui à la retraite qui fut aussi prof en prépa à LLG affirmait même qu'il fallait rendre les maths plus sexys.....Faisait-il des problemzouverts et de la narration de recherche dans ses cours de XM* ????

    Les études de psycho ou en "sciences" de l'éducation, c'est bon pour le fils de la femme de ménage.....
    Liberté, égalité, choucroute.
  • N'y a-t-il pas tout de même des progrès dans la diversification sociale ?

    On peut lire dans https://www.letudiant.fr/etudes/classes-prepa/infographie-les-recettes-de-ces-classes-prepas-qui-menent-aux-tres-grandes-ecoles.html que "Entre 2005 et 2014, le taux de boursiers à Henri-IV est passé de 7 % et à 30 %. Une proportion proche de celle de Louis-le-Grand, qui affiche en moyenne 28 % de boursiers dans ses classes.".

    Sur le site http://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2016/09/dutercq_solo1.pdf on peut lire le tableau suivant :80630
  • @JLT, ça ne paraît pas clair si on croit la conclusion du texte dont tu as tiré le tableau :
    texte du cnesco a écrit:
    La seule modification significative dont les médias se sont fait le relais durant ces 10 dernières années concerne le taux de boursiers. Mais peut-on postuler une ouverture sociale à partir de cet indicateur ? Nous avons vu que la part d’étudiants issus des milieux populaires n’a pas évolué sur la même période malgré une hausse importante du taux de boursiers et de l’instauration de politiques d’ouverture sociale. Le taux de boursiers cache en définitive les difficultés à démocratiser ces filières.
    On peut conclure en constatant que la démocratisation n’est pas significative en CPGE mais qu’on peut noter quelques avancées dont il faut souligner qu’elles sont variables selon la filière tout en étant assez éloignées des objectifs initialement fixés. De la sorte l’entre-soi socio-scolaire reste prégnant au point que l’ouverture sociale en CPGE peut se résumer à une nouvelle forme de démocratisation ségrégative.
  • (HS)
    ev a écrit:
    le théorème en question est crucial pour démontrer l'équivalence des normes en dimension finie.
    Pas tout à fait
    http://www.les-mathematiques.net/phorum/read.php?4,1719072
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • Très habile et fort intéressant, mais pas convaincant :

    1/ Les espaces complets avaient giclé dans le programme en question. Apu les suites de Cauchy. Magister demerdetur.
    2/ Les espaces quotient avaient giclé depuis encore plus longtemps. Pas une grosse perte au passage.

    Sinon, pas de s médian à contre-exemples (je ne fais le malin, je viens de vérifier. J'avais un doute parce que la liaison chiait à l'oreille)1.

    Le crucial est discutable, mais je le maintiens dans ce contexte.

    amicalement,

    e.v.


    1 C'est moi ou la nouvelle orthographe contrexemple est affreuse ? Je vois une bouteille de contrex ! Horresco referens.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • Je sais bien qu'il n'y a plus que les additions qui sont autorisées mais j'ai mis ça pour les curieux!
    Merci tout de même pour la remarque orthographique.
    Une fonction est un ensemble $f$ de couples tel que pour tous $x,y,z$, si $(x,y)\in f$ et $(x,z)\in f$ alors $y = z$.
  • omega a écrit:
    ça ne paraît pas clair si on croit la conclusion du texte dont tu as tiré le tableau

    C'est sans doute que les classes prépa recrutent plus parmi les boursiers ayant les revenus les plus élevés que parmi les boursiers ayant les revenus les plus faibles, mais ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu d'efforts de faits.

    Vouloir que l'ascenseur social monte directement du sous-sol jusqu'au dernier étage en une seule génération est sans doute trop demander, mais s'il pouvait déjà monter de la moitié de la hauteur de l'immeuble, ce serait déjà pas mal.

    Pour que les enfants d'ouvriers entrent dans une classe prépa il faudrait déjà qu'ils candidatent, or à niveau scolaire égal il me semble que les enfants d'ouvriers s'auto-censurent plus que les enfants de cadres supérieurs.
  • C'est difficile de tirer une conclusion du taux de boursier quand les définitions changent (cf boursiers à taux zéro).
    A titre de comparaison, à Nancy, sur la période 2012-2018, le taux de boursiers est 39% en prépa agreg.
  • L'étude fait l'objet d'un article dans Libération. Extrait :
    Libé a écrit:
    si la France est peuplée de 29,2 % d’enfants d’ouvriers, ils ne représentent que 1,1 % des élèves de Polytechnique. À la fin des étapes de sélection, ils sont 80 % d’enfants de cadres et professions intellectuelles supérieures admis à l’X, soit quatre fois supérieur à la proportion en vigueur dans la population. Autre chiffre qui hérisse : un candidat a deux fois plus de chances qu’une candidate d’être admissible aux concours. « À l’X, elles représentent entre 15 % et 20 % des effectifs », lit-on dans l’étude. Et la quasi-totalité des polytechniciennes sont ainsi issues des classes supérieures…
    PS : Un autre, qui me surprend :
    « Ce sont les matières scientifiques qui creusent l’écart le plus important entre les enfants d’ingénieurs et les boursiers. »
  • Ce qui est intéressant est l'échantillon statistique considéré sur la durée et sous ses conditions d'entrée pour établir un résultat.

    Lire cet article récent :
    tableau1.png


    tableau3.png

    ...
  • On peut aussi se poser ce même genre de question pour l'agrégation.
    J'avais un bouquin ( Tissier, prêté et jamais rendu) où étaient classés par thème des exercices regroupant les
    méthodes attendues au concours. On passait souvent du coq à l’âne et c'était "compact", ce qui a amoindri
    mon intérêt.
Connectez-vous ou Inscrivez-vous pour répondre.