Pas de pitié pour les points fixes.

Soit $ABC$ un triangle d'un plan affine euclidien et $M$ un point de son plan. Soient $A'$, $B'$, $C'$ les symétriques respectifs de $M$ par rapport aux côtés $BC$, $CA$, $AB$.

file.php?8,file=10963

Soit $f_M$ l'unique application affine telle que $f_M(A) = A'$, $f_M(B) = B'$, $f_M(C) = C'$.
Quel est le lieu des points $M$ tels que $f_M$ soit sans point fixe?
Amicalement
Pappus10963

Réponses

  • Bonjour Pappus,

    Voici mes premières réflexions sur le sujet.

    Comme chacune des 3 symétries orthogonales est affine, l'application M-> f_M est affine.

    Comme on est en dimension 2, le lieu des zéros de l'application
    $M \rightarrow \det(\overrightarrow{f_M} - Id)$ est donc une conique qui contient le lieu cherché.

    Ainsi, on cherche une partie conique (comme je n'ai toujours pas de logiciel de géométrie dynamique, pour l'instant, je ne vois pas quoi dire de plus).

    J'ai cependant réflechi à un autre problème : déterminer le lieu des points M tel que l'image de f_M soit une droite.

    Par le même raisonnement, on constate qu'il s'agit d'une partie de la conique
    $\det(\overrightarrow{f_M})=0$. Par ailleurs, l'application f_M ne peut être constante (sinon, les coordonnées barycentriques de M serait toutes les 3 strictement négatives et de somme 1 (M devrait être le symétrique de A par rapport à (BC),...)). Ainsi, on obtient la conique $\det(\overrightarrow{f_M})=0$
    en entier.

    En fait, l'image de f_M est une droite si A', B' et C' sont alignés.
    En considérant l'homothétie de centre M et de rapport 1/2, A', B' et C'
    sont alignés si et seulement si les projetés orthogonaux de M sur chacun des cotés sont alignés c'est-à-dire si et seulement si M est sur le cercle circonscrit à A,B et C.
  • Euh, Vincent. Je veux bien croire que l'application $M \mapsto f_M$ est affine mais $M$ et $f_M$ ne vivent pas dans le même espace.
    le point $M$ vit dans un plan affine qui est de dimension 2 et $f_M$ vit aussi dans un espace affine, c'est vrai quoique pas tout à fait évident, mais de dimension différente que je te laisse évaluer.
    Pour le moment, je ne connais qu'une démonstration calculatoire basée sur le "Morley trick", dont j'ai déjà parlé.
    Amicalement
    Pappus
    PS
    Il y a quelqu'un qui a eu la même idée que toi, il y a 120 ans, un certain Neuberg. C'est ainsi qu'il a découvert l'orthopôle d'une droite.
  • Mon cher Vincent
    Tout revient donc à calculer le polynôme caractéristique de $\overrightarrow {f_M}$.
    Il n'y a pas de miracle et il faut se farcir ce calcul!
    C'est ce que le "Morley trick" permet tout simplement en deux coups de cuiller à pots.
    Amicalement
    Pappus
    PS
    Cette configuration initiale des triangles $ABC$, $A'B'C'$ et du point $M$ s'appelle le trèfle de Stéphanos. Sais-tu pourquoi?
  • Cher Pappus,

    ce matin j'ai voulu te répondre (vu qu'hier j'ai étudié les similitudes indirectes) mais le forum m'a empêché de mettre
    ce qui suit. Comme j'étais pressé, j'ai essayé de t'envoyer cela par message privé, cela n'a pas marché non plus!

    Tu as montré (voir Aires Triangles Podaires) que, $O$, centre du cercle $C(ABC)$, étant l'origine des affixes (et, à homothéthie près, ce cercle étant le cercle unité) l'on a :
    $$f(z)=-z- abc\overline m \overline z+a+b+c$$

    Donc $x$ est point double pour $f$ si l'on a :

    $$f(x)=x \Longleftrightarrow x=-\dfrac{abc\overline m}2\cdot \overline x +\dfrac{a+b+c}2$$

    donc ssi $x$ est point double pour $g$, où $g$ est la similitude indirecte :

    $g(z)=\phi\overline z+\psi$ (avec $\phi=-\dfrac{abc\overline m}2,\ \psi=\dfrac{a+b+c}2$).

    Or l'étude des similitudes indirectes montre qu'un tel point double existe, si $\vert \phi \vert\neq 1$, ou bien, si $\phi=\mathrm e^{iu}$ et $\mathrm {Re}(\mathrm e^{-\frac {iu}2}\psi)=0$, auquel cas tous les points de la droite $\mathrm e^{\frac {iu}2}(\mathbb R+\mathrm {Im}(\pfrac{ \mathrm e^{-\frac {iu}2}\psi }{2} i))$ sont doubles.

    On peut supposer que l'on a, $G$ étant le centre de gravité de $ABC$,

    $m=\vert m\vert\mathrm e^{it}, a=\mathrm e^{i\alpha}, b=\mathrm e^{i\beta}, c=\mathrm e^{-i(\beta+\pi)}, g=\vert g\vert \mathrm e^{i\gamma}$,

    donc, si $\vert \phi \vert= 1$, on a $\phi=\mathrm e^{iu}$ avec $u=\alpha-t$ et, $\psi=\dfrac{3 \vert g\vert }2\mathrm e^{i\gamma}$.

    D'où un point double n'existe pas pour $f$, si $\vert m\vert=2$, sauf si l'on a $m=2\mathrm e^{i(\alpha-2\gamma+\pi)}$

    (car $\mathrm {Re}(\mathrm e^{-\frac {iu}2}\psi)=0 \Longleftrightarrow \dfrac {t-\alpha}2+\gamma= \dfrac {\pi}2 [\pi]$ donc $t=\alpha-2\gamma+\pi [2pi]$)

    Soit $R$ le rayon de $C(ABC)$. Le lieu demandé est donc le cercle $C(O,2R)$, sauf le point d'affixe $-2R\mathrm e^{(\alpha-2\gamma)i}$ (je laisse pappus faire une figure plaçant ce point).

    Amicalement,
    Georges
  • Bravo Georges
    Tu as trouvé!
    Comme je le disais avec le Morley's Trick, les calculs sont simples.
    La seule difficulté est ici d'interpréter correctement leurs résultats.
    Tu l'as bien fait pour le cercle. Il reste un maudit point $P$ sur ce cercle qu'il faut enlever car $f_P$ est une affinité orthogonale de rapport $-3$.
    Peux-tu calculer l'affixe de ce point exceptionnel $P$ puis ensuite le placer correctement sur la figure? Eh, eh!
    Il faudrait aussi donner la forme "canonique" de $f_M$ car si on connait son cours sur la classification des applications affines, on est justement dans ce cas là! Autrement dit, ici $f_M$ est le produit commutatif d'une translation et d'une affinité orthogonale à déterminer.
    Mais combien d'agrégatifs qui connaissent parfaitement la réduction de Jordan dans le cas linéaire savent aussi l'utiliser dans un cadre affine.
    Je ne connais que deux livres en français qui abordent cette épineuse question, celui de Fraenkel, Géométrie pour l'élève professeur et celui beaucoup plus récent de Pierre Gabriel: Matrices , Géométrie, Algèbre Linéaire, un véritable régal, qu'il faut absolument avoir dans sa bibliothèque, publié aux Editions Cassini.
    Amicalement
    Pappus
  • Cher Pappus,

    Je suis tout à fait conscient que $M$ et $f_M$ ne vivent pas dans le même espace !
    $f_M$ vit dans un espace affine de dimension 6.

    L'intérêt (à mon goüt) du début de la méthode que je propose, est qu'elle donne instantanément la forme du lieu cherché : c'est une conique.

    C'est sur que c'est une réponse très partielle mais c'est déjà pas mal.

    Concernant le fait que $\phi : M \rightarrow f_M$ est affine,
    pour le montrer, on va montrer que $\phi$ conserve les barycentres.

    Si $M$ est le barycentre de $(M_1, \lambda_1)$ et $(M_2, \lambda_2)$
    alors comme la symétrie orthogonale par rapport à $(BC)$ est affine, alors
    $A'$ est barycentre de $(A'_1, \lambda_1)$ et $(A'_2,\lambda_2)$.
    De même pour $B'$ et $C'$.

    Ainsi l'application affine $f_M$ coïncide sur les points $A,B$ et $C$
    avec l'application barycentre des applications $f_{M_1}$ et $f_{M_2}$
    et voilà le travail.

    Concernant l'histoire du trèfle de Stephanos, j'imagine qu'il s'agit d'une histoire d'enveloppe qui à la forme d'un trèfle, non ?


    Concernant le calcul du polynôme caractéristique : en considérant l'homothétie de centre M et de rapport 2, la valeur absolue du déterminant de $\overrightarrow{f_M}$ est égal à 4 fois le rapport de l'aire du triangle formé des projetés orthogonaux de M sur les cotés de ABC et de l'aire de ABC.

    Sans doute sait-on exprimer l'aire de ce triangle des projetés orthogonaux, non ?

    Vincent
  • Sinon dans mon premier message, j'ai écrit des bêtises (sans doute étais-je trop cambré quand je l'ai écrit ;-) ).
    L'histoire avec les coordonnées barycentriques négatives montre en fait que l'identité n'est pas dans l'image de l'application $\phi$ et pas du tout le fait que les applications constantes ne sont pas dans l'image de $\phi$.

    Pour montrer que les applications constantes ne sont pas dans l'image de $\phi$,
    raisonnons par l'absurde. Soit D l'image de $f_M$ avec $f_M$ est constante.

    Alors M est l'image de D par la symétrie par rapport à (BC) mais aussi
    l'image de D par la symétrie par rapport à (AC).

    Ainsi M est un point fixe de la composée des deux symétries
    qui est une rotation non triviale donc M = C. De même, on obtient M=A et M=B... ce qui est absurde.
  • Mon cher Vincent
    Au début, je ne t'avais pas compris mais je me suis bien rendu compte assez rapidement que tu n'avais pas commis d'erreur.
    Le polynôme caractéristique de $\overrightarrow{f_M}$ est:
    $X^2 + 2X + 1 -(\dfrac{OM}{R})^2$
    où $O$ est le centre du cercle circonscrit et $R$ le rayon de ce cercle.
    Sous cette forme, tout devient évident!
    Voilà sans commentaires la figure du trèfle de Stephanos datant de 1881!

    file.php?8,file=10971

    Qu'est-ce que cela te suggère d'avoir tracé ces arcs de cercles en plus?
    Je te signale que le théorème de Stephanos se propage en dimension 3.
    Je laisse en suspens pour le moment la construction du point exceptionnel $P$ ainsi que la décomposition canonique de $f_M$.

    Amicalement
    Pappus10971
  • Voici ma preuve .
    Je rappelle les faits suivants:

    Lemme 1
    Toute application linéaire $f: \mathbb C \longmapsto \mathbb C$ pour la structure vectorielle de $\mathbb C$ sur le corps des réels $\mathbb R$
    s'écrit:
    $f(z) = a.z + b.\overline z \text{avec } (a, b) \in\mathbb C^2$.

    La trace et le déterminant de $f$ sont alors donnés par le lemme suivant:

    Lemme 2
    $\text{Trace}(f) = a + \overline a$.
    $\text{Det}(f) = |a|^2 - |b|^2$

    Maintenant on considère un triangle $ABC$, un point $M$ de son plan et les symétriques $A'$, $B'$, $C'$ de $P$ par rapport aux côtés du triangle $ABC$.
    On va identifier au moyen d'une similitude $\varphi : \mathcal P \longmapsto \mathbb C$ le plan euclidien $\mathcal P$ du triangle $ABC$ avec $\mathbb C$ de façon que le cercle circonscrit au triangle $ABC$ devienne le cercle unité de $\mathbb C$. ( Yes, we can!)
    Je noterai $a = \varphi(A)$, $b = \varphi(B)$, $c = \varphi(C)$, $a' = \varphi(A')$, $b' = \varphi(B')$, $c'= \varphi(C')$, $\rho = \varphi(P)$, les affixes respectives des points $A$, $B$, $C$, $A'$, $B'$, $C'$, $P$.
    On a donc par hypothèse: $|a| = |b| = |c| = 1$.
    On est ainsi ramené à un problème dans $\mathbb C$.
    Evaluons maintenant les affixes $a'$, $b'$, $c'$.
    L'application $z \longmapsto -bc \overline z + b + c$ est une similitude indirecte de $\mathbb C$ fixant les points $b$ et $c$ car $b\overline b = c\overline c = 1$. C'est donc la symétrie par rapport à la droite joignant les points $b$ et $c$.
    Donc $a' = -bc\overline{\rho} + b + c$ et de même, on a: $b' = -ca\overline{\rho} +c+a$ et $c' = -ab\overline{\rho} + a + b$.
    On introduit maintenant les fonctions symétriques élémentaires des complexes $a$, $b$, $c$:
    $\sigma_1 = a+b+c$
    $\sigma_2 = bc + ca +ab$
    $\sigma_3 = abc$.
    On définit maintenant l'application $f:\mathbb C \longmapsto \mathbb C$ par:
    $f(z) = -z -\sigma_3 \overline{\rho}\overline z + \sigma_1$
    D'après le lemme 1, $f$ est une application affine de $\mathbb C$ dans $\mathbb C$ dont la partie linéaire $\overrightarrow f$ est définie par:
    $\overrightarrow f(z) = -z -\sigma_3 \overline{\rho}\overline z $
    De plus, on vérifie immédiatement que:
    $f(a) = a'$, $f(b) = b'$, $f(c) = c'$.
    D'après le lemme 2, le polynôme caractéristique de $\overrightarrow{f_m}$ est:
    $\chi = X^2 + 2X + 1 -|\rho|^2$
    dont les racines sont:$-1-|\rho|$ et $-1 + |\rho|$
    Les sous-espaces propres sont donnés par:
    $-z -\sigma_3 \overline{\rho}\overline z = (-1 + \epsilon |\rho|)z$ avec $\epsilon = \pm 1$.
    C'est à dire:
    $\dfrac{z}{\overline z}= -\sigma_1 \epsilon\dfrac{\overline \rho}{\rho|}=-\sigma_1 \epsilon\dfrac{|\rho|}{\overline \rho}$
    Il est aisé de voir qu'ils sont orthogonaux.
    Pour que $f_m$ soit sans point fixe, il est nécessaire que $1$ soit racine de $\chi$, ce qui équivaut à $|\rho| = 2$.
    Donc si $|\rho| \ne 2$, $f_m$ a un unique point fixe $\omega$ qu'il est facile d'évaluer. Son affixe est solution de l'équation:
    $2z + \sigma_3 \overline{\rho}\overline z = \sigma_1$ et de l'équation conjuguée:
    $\dfrac{\rho}{\sigma_3}z + 2\overline z = \dfrac{\sigma_2}{\sigma_3}$
    où j'ai tenu compte du fait que:
    $\overline{\sigma_1} = \dfrac{\sigma_2}{\sigma_3}$
    $\overline{\sigma_2} = \dfrac{\sigma_1}{\sigma_3}$
    $\overline{\sigma_3} = \dfrac{1}{\sigma_3}$
    On trouve:
    $\omega = \dfrac{2\sigma_1 -\sigma_2\overline{\rho}}{4 - |\rho|^2}$
    Comme $f_m(0) = \sigma_1$, ce qui équivaut à $f_M(O) = H$ où $O$ est le centre du cercle circonscrit à $ABC$ et $H$ l'orthocentre, on sait que les droites invariantes de $f_M$ divisent le segment $OH$ dans un rapport constant et qu'elles passent par les points homothétiques de $H$ par rapport à $O$ dans les rapports:$\dfrac{1}{2 \pm |\rho|}$.
    Pour $|\rho| = 2$, seul subsiste le point d'affixe $I$ d'affixe $\dfrac{\sigma_1}{4}$. Soit $J$ le point d'affixe $f_m(\dfrac{\sigma_1}{4})$.
    Un calcul simple montre alors que:
    $f_m(\dfrac{\sigma_1}4) - \dfrac{\sigma_1}4 = \dfrac{\sigma_1}2 - \overline{\rho}\dfrac{\sigma_2}4 = \tau$.
    Comme le spectre de $\overrightarrow{f_m}$ est $\{-3, 1\}$, on voit que $\overrightarrow{f_m}$ est diagonalisable et par suite que
    $f_m$ est le produit commutatif d'une affinité orthogonale de rapport $-3$ et d'axe $L$ passant par le point $\dfrac{\sigma_1}{4}$ et dirigé par $\tau$ avec la translation de vecteur $\tau$.
    On a $\tau = 0$ si et seulement si $\rho = 2\dfrac{\sigma_2}{\sigma_1}$.
    Il est à noter que le point $Q$ d'affixe $\dfrac{\sigma_2}{\sigma_1}$ est le point du cercle circonscrit dont la droite de Steiner est la droite d'Euler c'est à dire que les symétriques respectifs $Q_a$, $Q_b$, $Q_c$ de $Q$ par rapport aux côtés $BC$, $CA$, $AB$ sont situés sur cette droite. Par suite le point $P$ d'affixe $2\dfrac{\sigma_2}{\sigma_1}$ est l'homothétique de $Q$ dans l'homothétie de centre $O$ et de rapport $2$.
    file.php?8,file=1097210972
  • J'ai poursuivi ma réflexion sur ce problème sans vraiment avancer dans le cas concret qui nous intéresse.

    Cependant, on peut considérer le problème suivant qui généralise celui de Pappus.

    On se donne un triangle ABC dans un plan affine $E$ (sur un corps quelconque), M un point du plan affine et f_1, f_2,f_3 trois applications affines du plan dans lui-meme (dans notre problème f_1,f_2,f_3 sont les symétries orthogonales par rapport aux cotés de ABC).

    On définit alors f_M l'application affine telle que $f_M(A) = f_1(M)$, $f_M(B) = f_2(M)$ et $f_M(C) = f_3(M)$.

    En suivant le raisonnement que j'ai proposé l'application $M \mapsto f_M$ est affine. Ainsi l'ensemble des M tel que $f_M$ soit sans point fixe est une partie d'une conique et l'ensemble des M tel que l'image de $f_M$ soit une droite
    est aussi une partie d'une conique.

    On définit ainsi en général une application de l'ensemble des plans affines de l'ensemble des applications affines de $E$ dans lui-même qui au plan engendré par (f_1,f_2,f_3) associe le plan des applications de la forme f_M.
  • Mon cher Vincent
    Ce qui n'est pas clair dans ton histoire, ce sont les symétries orthogonales. Comment les définis-tu?
    Amicalement
    Pappus
  • Je vais essayer d'être plus clair.

    Dans un cadre abstrait la notion de symétrie orthogonale n'a évidemment aucun sens... ce que je propose, en fait c'est de remplacer ton problème par un problème plus général.

    On fixe un M dans notre plan affine.

    Pour définir $f_M$,plutôt que de prendre l'image de M par la symétrie orthogonale par rapport à (BC), je remplace cette symétrie par une application affine f_1 quelconque. De meme, plutôt que de prendre l'image de M
    la symétrie orthogonale par rapport à (AC), je remplace cette symétrie par une application affine quelconque f_2... et ainsi de suite avec la troisième symétrie f_3.

    Pour montrer que $M \mapsto f_M$ était affine, la seule propriété que j'ai utilisée était que les 3 symétries orthogonales étaient des applications affines.
    Ici, j'ai remplacé les symétries par des applications affines quelconques, je conserve donc cette propriété.

    J'espère que c'est un peu plus clair !
  • Excuse moi, Vincent, je t'avais mal lu mais il vaut mieux rester sur le corps des réels si on veut faire des figures.
    Je t'envoie la figure suivante qui généralise la configuration précédente et sur laquelle tu pourras peut-être essayer ton idée:

    file.php?8,file=10974

    L'application affine $f_1: M \mapsto A'$ est l'affinité d'axe $BC$ transformant $D$ en $U$.
    L'application affine $f_2: M \mapsto B'$ est l'affinité d'axe $CA$ transformant $D$ en $V$.
    L'application affine $f_3: M \mapsto C'$ est l'affinité d'axe $AB$ transformant $D$ en $W$.
    C'est une "légère" généralisation du cas précédent où
    $D$ était l'orthocentre du triangle $ABC$.
    Je dis "légère" par ironie car c'est sans doute une des plus importantes configurations de la géométrie euclidienne. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle n'a jamais été enseignée en France, mise à part la configuration de Stephanos ?
    Ce n'est pas comme cela qu'elle est traditionnellement introduite dans les livres comme le Lalesco par exemple mais c'est amusant de la présenter ainsi.

    On étudie comme auparavant l'application affine $f_M$ telle que $f_M(A) = A'$, $f_M(B) = B'$, $f_M(C) = C'$.

    Je te donne quand même les deux propriétés fondamentales de cette figure:
    1° Les correspondances $ A' \leftrightarrow B' \leftrightarrow C'$ sont des similitudes directes. Dans le cas précédent où $D$ était l'orthocentre, ces correspondances étaient des rotations, (Théorème de Stéphanos, 1881).
    2° $D$ a les mêmes coordonnées barycentriques dans tous les triangles $A'B'C'$.

    Amicalement
    Pappus10974
  • Bonjour,

    Je reprends ce message (pour éviter de rendre ce fil difficile à lire), car Pappus a tracé, dans le message qui suit, une figure qui m'a fait trouver une preuve très simple.

    {\bf Lemme}. Considérons 3 cercles, notés $C_1, C_2$ et $C_3$, passant tout trois par un point $M$. Soient $A$ (resp. $B$, ou $C$) l'autre point commun à $C_1$ et $C_2$ (resp. $C_2$ et $C_3$, ou $C_3$ et $C_1$).

    Il est classique que, partant d'un point $N$ de $C_1$, en traçant la droite $(NA)$ on trouve $t_1(N)$, point de $C_2$, où $t_1$ est une similitude directe de centre $M$, puis en traçant la droite $(t_1(N)B)$ on trouve $t_2\big(t_1(N)\big)$, point de $C_3$,où $t_2$ ..., enfin en traçant la droite $\big( t_2(t_1(N))C\big)$ on trouve $t_3\big( t_2(t_1(N))\big)$, point de $C_1$, où $t_3$...
    On a $t_3\big(t_2(t_1(N))\big)=N$ (regarder $t_3\big(t_2(t_1(O_1))\big)$, où $O_1$ est le centre de $C_1$).
    En particulier, soit $N=E$ tel que la droite $(EA)$ soit tangente à $C_2$, donc $t_1(E)=A$, $t_2\big(t_1(E)\big)=t_2(A)=F$ et
    $E=t_3\big(t_2(t_1(E))\big)=t_3(F)$. D'où $t_2(A)=F$, $t_3(F)=E$ et $t_1(E)=A$.

    Je conserve ce lemme, bien qu'il soit inutile (ce qu'il dit est intéressant). Je considère les notations de la figure du message suivant de Pappus.

    Comme lui appelons $\phi_1$ (idem $\phi_2$ et $\phi_3$ l'affinité d'axe $(BC)$ envoyant $D$ sur $U$ et posons $\phi_1(A)=\alpha$.

    On a $\dfrac{\overline{JU}}{\overline{JD}}=\dfrac{\overline{J\alpha}}{\overline{JA}}$
    d'où $\overline{JB}.\overline{JC} =\overline{JU}.\overline{JA} =\overline{J\alpha}.\overline{JD}$.
    Donc $\alpha$ est bien sur le cercle $C(BCD)$ (et la droite $(AD)$, comme sur la figure).

    De même, on a $\phi_2(B)=\beta$.

    Posons $f_1= \phi_2\circ \phi_1^{-1}$. On voit immédiatement que cette application affine est définie par $f_1(C)=C,\ f_1(U)=V,\ f_1(A')=B'$ ou bien par $f_1(C)=C,\ f_1(\alpha)=A,\ f_1(B)=\beta$.

    Sur la figure on voit que, en considérant les cercles $C(BCD)$ et $C(ACD)$, qu'il existe une similitude directe $s_1$ de centre $C$ envoyant $\alpha$ sur $A$ et $B$ sur $\beta$.
    Donc on a $f_1=s_1$, donc la correspondance $A'\mapsto B'$ est la similitude $s_1$ CQFD.

    On en déduit que l'on a $s_3\circ s_2\circ s_1=\mathrm {id}$.
    Pappus dit que cela permet de construire le produit de 2 similitudes directes $s_2\circ s_1$.
    En effet, supposons $s_1$, définie par son centre $C$ et envoyant $B$ sur $\beta$, et $s_2$, définie par son centre $A$ et envoyant $C$ sur $\gamma$. On construit les cercles $C(AC\beta)$ et $C(AB\gamma)$ on obtient $D$ puis la figure de Pappus.

    On a donc $s_2\circ s_1= s_3^{-1}$, donc $s_2\circ s_1$ est la similitude directe de centre $B$ envoyant $\alpha$ sur $A$ (ou bien $C$ sur $\gamma$).

    Évidemment il faut étudier le cas où l'un des (ou les deux) cercles est une (ou deux) droite.

    Je ne vois pas comment en déduire que $D$ a les mêmes coordonnées barycentriques par rapport aux triangles $UVW$ et $A'B'C'$, mais je vais chercher.

    Amicalement,
    Georges

    [Pour 1\$ de trop ;) AD]
  • Mon cher Georges
    Très très bien, je vois que tu as fourni un bel effort et que tu as pratiquement retrouvé tout seul cette fameuse configuration du produit de deux similitudes, ($s_2 \circ s_1 = s_3^{-1}$). Tu as bien fait d'écrire de façon plus symétrique $s_3\circ s_2 \circ s_1 = id$.
    Sous cette forme, cette configuration ultracélèbre est connue sous le nom de configuration des 3 figures semblables.
    Ton raisonnement est exact. Le seul petit reproche que je pourrai lui faire est son manque d'esthétisme dans le choix de tes 3 cercles puisque les points $A$, $B$, $C$ n'interviennent pas de la même façon.
    Voici comment j'aurai procédé. Tu me diras évidemment, c'est pas de jeu, toi tu connais ce sujet sur le bout des doigts. Tu as raison de le penser et quand j'étais beaucoup plus jeune, j'aurais été incapable de tenir ton raisonnement, alors chapeau bas.
    Comme tu as tracé le cercle $BCD$, par raison de symétrie tu traces les autres cercles $CAD$ et $ABD$.
    Maintenant tu définis le point $\alpha$ comme la deuxième intersection de la droite $AD$ avec le cercle $BCD$ et évidemment tu définis le point $\beta$ comme la deuxième intersection de la droite $BD$ avec le cercle $CAD$ et le point $\gamma$ comme la deuxième intersection de la droite $CD$ avec le cercle $ADB$.

    file.php?8,file=11005

    Dans la configuration des 3 figures semblables, les points $\alpha$, $\beta$, $\gamma$ sont appelés les points associés, (voir Lalesco, Rouché-Comberousse ou F.G-M).
    Le cercle $BCD$ jouera le rôle du cercle $C_1$, le cercle $CAD$ celui du cercle $C_2$ et le cercle $ABD$ celui du cercle $C_3$.
    Maintenant, j'appelle $\varphi _1$, l'affinité $ M \mapsto A'$, $\varphi_2$, l'affinité $M \mapsto B'$, $\varphi_3$ l'affinité $M \mapsto C'$.
    Je m'intéresse maintenant à l'application $f :B' \mapsto C'$ et je vais montrer que c'est la similitude directe $s$ de centre $A$ transformant le cercle $C_2 = CAD$ en le cercle $C_3 = ABD$.
    Pour déterminer $s$, j'utilise ton lemme. Ces deux cercles se recoupent en $D$. Donc si $P$ est un point quelconque de $C_2$, la droite $DP$ recoupe le cercle $C_3$ au point $Q = s(P)$.
    Ainsi on a $s(\beta) = B$ et $s(C) = \gamma$ et évidemment $s(A) = A$
    Maintenant, il, faut prouver que $f = s$.
    Pour prouver que deux applications affines planes coïncident, il suffit de prouver qu'elles prennent les mêmes valeurs en 3 points non alignés.
    Je vais donc prouver que $f(A) = s(A)$, $f(\beta) = s(\beta)$ et $f(C) = s(C)$
    En choisissant $M = A$, il est clair que $f(A) = A = s(A)$
    En choisissant $M = C$, on a $A' = B' = C$.
    Donc $f(C) = \varphi_3(C)$
    Pour prouver que $f(C) = s(C) = \gamma$, il faut donc montrer que:
    $\gamma = \varphi_3(C)$
    Et pour cela, il faut montrer l'égalité des rapports:
    $\dfrac{\overline{L\gamma}}{\overline{LC}} = \dfrac{\overline{LW}}{\overline{LD}}$ où $L$ est l'intersection des droites $AB$ et $CD$.
    Ce qui revient à dire que:
    $\overline{L\gamma}.\overline{LD} = \overline{LC}.\overline{LW}$
    Mais le membre de gauche est la puissance de $L$ par rapport au cercle $ABD$ et le membre de droite la puissance de $L$ par rapport au cercle $ABC$. D'autre part la droite $AB$ est l'axe radical de ces deux cercles.
    CQFD.
    On montre de même que $\varphi_2(B) = \beta$ et on voit en choisissant $M = B$ que ceci entraine que $f(\beta) = s(\beta)$.
    Finalement, c'est pratiquement la même démonstration que la tienne à l'ordre près.
    Très amicalement
    Pappus
    PS
    1° Les points $U$, $V$, $W$ sont appelés les points invariables de la configuration. Ils ont des propriétés très importantes que je n'ai pas le temps de détailler ici.
    2° Je reviendrai plus tard sur cette question de coordonnées barycentriques. Je la laisse mijoter un peu.
    A noter que seul le livre de Rouché-Comberousse en parle quand les livres anglo-saxons n'en disent rien! Donc , cocorico!
    3° Cette configuration fut un problème d'Agrégation Masculine à une autre époque. Les temps ont bien changé. Ce sont plutôt les anneaux de polynômes qui torturent aujourd'hui nos jeunes cerveaux.
    Notons quand même, l'année de ce problème, 1942!
    Nos futurs agrégés avaient certainement d'autres préoccupations plus importantes que la géométrie du triangle en ce triste mois de Mai!11005
  • Bonjour cher Pappus,

    J'ai modifié mon message d'hier en donnant une démo très simple.

    Je vais bientôt recevoir le Lalesco.

    Tu parles de l'agreg de 1942, j'avais 2 ans en mai.

    En septembre 1942, la police française est venue chercher Soutine (qui se cachait en campagne), et a trouvé mes parents qui se cachaient chez lui.

    Ils les ont emmenés à la gestapo, là (ou avant) mon père a dit "je suis juif, mais ma femme (espagnole) ne l'est pas".

    Ils ont relâché ma mère, mais on envoyé mon père à Drancy d'où, une dizaine de jours après, il a été envoyé avec 1000 personnes vers l'est.

    Mon père et toute sa famille (en Pologne près de Lwow) a disparu à l'est.

    Ils font partie des 3OO.000 juifs que l'évêque anglais, réinvesti par le pape, estime avoir été tués lors de la 2ème guerre mondiale.

    Amicalement,
    Georges
  • Mon cher Georges
    Oui, ce fut une triste période que j'ai connue moi aussi puisque je suis plus vieux que toi. J'ai failli y laisser ma peau avec toute ma famille au moment du débarquement. Ce sont des moments que l'on oublie pas.
    Et si certains bons apôtres ont la mémoire courte, que veux-tu y faire, à part les laisser s'étouffer dans leur propre honte!
    Pour te changer les idées, je te propose encore une généralisation de la configuration des 3 figures semblables.
    file.php?8,file=11024
    C'est exactement la même figure, j'ai gardé les mêmes notations. La seule différence est que le cercle est remplacé par une conique quelconque.
    C'est donc une configuration du plan affine. il n'est pas besoin d'avoir une métrique. J'ai fait la figure pour une ellipse mais tu peux mentalement la remplacer par une hyperbole ou une parabole.
    Alors je pose les deux questions suivantes:
    1° Que peut-on encore dire sur les bijections affines:$A'\leftrightarrow B' \leftrightarrow C'$? J'imagine déjà la réponse de Victor au paradis des géomètres!
    2° Montrer que $D$ a les mêmes coordonnées barycentriques par rapport à tout les triangles $A'B'C'$.
    Très amicalement
    Pappus11024
  • Bonjour à tous,

    Oui Georges, le comportement du pape est lamentable, il aura fallu l'intervention énergique de sa compatriote Angela pour faire machine arrière, mais le mal est fait; de plus, de bien tristes souvenirs te sont remontés en surface. J'espère que tu possèdes cependant un ou deux Soutine, suite à ces moments bien difficiles.

    Merci à vous trois pour votre trialogue; dans le Balliccioni-Chazel- Masson -1962 , figurent l'énoncé et le corrigé des problèmes agrégation Femmes et Hommes 1942. Une annotation sur le livre vers votre discussion s'impose, voilà qui est fait.

    Un gogol de mercis.
  • Je vais ébaucher la démonstration du fait que le point $D$ a les mêmes coordonnées barycentriques oar rapport aux triangles $A'B'C'$. Il est curieux que cette propriété n'ait pas été demandée dans ce fameux problème d'agrégation.
    Quant à la preuve du Rouché-Comberousse : Deuxième Partie, Géométrie dans l'espace, note III, page 632, septième édition, il ne faut pas s'attendre à lire une démonstration bourbakiste mais plutôt lire entre les lignes pour deviner que ce qu'ils ont bien voulu dire s'interprète de la façon que j'ai dite d'un point de vue moderne.
    Comme je l'ai souligné, la présentation que j'ai faite de cette configuration à partir des 3 affinités $M \mapsto A'$, $M\mapsto B'$, $M \mapsto C'$ est très artificielle puisqu'elle suppose que le point $D$ (le point directeur) et les points $U$, $V$, $W$ (les points invariables) sont déjà connus.

    Notons aussi que les points $U$, $V$, $W$ se correspondent dans les similitudes directes, prendre $M = D$, en sorte que $W = \sigma_A (V)$, $U = \sigma _B (W)$, $V = \sigma_C(U)$.
    Autrefois, on appelait les triplets $(A', B', C')$ triplets de points homologues. le triplet $(U, V, W)$ est donc un triplet de points homologues.
    Si on choisit $M = A$, on voit que le triplet $(\alpha, A, A)$ est un triplet de points homologues. De même les triplets $(B, \beta, B)$ et $(C, C, \gamma)$ sont formés de points homologues.

    On voit donc qu'il existe des triplets de points homologues$(A', B', C')$ qui ne forment pas un triangle, soient qu'ils soient alignés soient que deux d'entre eux soient confondus (on dit qu'ils sont affinement liés) et le problème d'Agreg demandait le lieu des points $A'$, $B'$, $C'$ pour qu'il en soit ainsi.

    Quand les points $(A', B', C')$ sont affinement liés, on ne peut évidemment parler de coordonnées barycentriques de $D$ par rapport au triangle $A'B'C'$, il faut déjà formuler autrement cette propriété de $D$.

    Le point de vue du Rouché est un peu celui de Georges au départ.
    On se donne 3 similitudes directes $\sigma_A$, $\sigma_B$, $\sigma_C$ de centres respectifs $A$, $B$, $C$ telles que $\sigma_C \circ \sigma_B \circ \sigma_A = \mathrm{id}$
    Et il se donne un triplet de points homologues $(A', B', C')$ c'est à dire qu'on a: $C' = \sigma_A(B')$, $A' = \sigma_B(C')$ et évidemment $B' = \sigma_C(A')$ puisque $\sigma_C \circ \sigma_B \circ \sigma_A = \mathrm{id}$.
    Pour le moment, on ne connait ni le point directeur $D$ ni les points invariables $U$, $V$, $W$.
    La première chose que fait donc Rouché, c'est de prouver l'existence d'un point $D$, qu'il appellera point directeur, ayant les mêmes coordonnées barycentriques par rapport aux triangles $A'B'C'$ formés de point homologues.
    Après éventuellement, il montrera l'existence des points invariables ainsi que leur disposition relative par rapport au point directeur.
    C'est cette démonstration du Rouché que je vais esquisser de façon moderne en laissant en blanc le passage important de la preuve (comme le fit Rouché) et en vous laissant trouver le théorème fondamental sur le groupe des similitudes directes que Rouché a utilisé implicitement.


    On considère donc deux triangles $A'B'C'$ et $A"B"C"$ formés de points homologues.
    On prend un point $O$ quelconque (en lequel Rouché vectorialisera le plan affine sans le dire).
    On construit les points $D_A$, $D_B$, $D_C$ de la façon suivante:
    $\overrightarrow{OD_A} = \overrightarrow{A'A"}$, $\overrightarrow{OD_B} = \overrightarrow{B'B"}$, $\overrightarrow{OD_C} = \overrightarrow{C'C"}$.

    A partir de maintenant, je répète l'argument du Rouché et je vous laisse trouver ce qu'il aurait fallu dire pour le rendre non pas correct, (il l'est)!), mais plus convaincant.
    Le triangle $D_AD_BD_C$ garde une forme invariable quand on modifie les triplets de points homologues $A'B'C'$ et $A"B"C"$.
    Rouché appelle ce triangle le premier triangle modulaire, (il y en a en effet un deuxième à se farcir!).
    Le point $O$ a donc les mêmes coordonnées barycentriques bien déterminées $(\lambda, \mu, \nu)$ dans tout triangle modulaire.
    On a donc:
    $\lambda \overrightarrow{OD_A} + \mu \overrightarrow{OD_B} + \nu \overrightarrow{OD_C} = 0$ ou encore:
    $\lambda \overrightarrow{A'A"} + \mu \overrightarrow{B'B"} + \nu \overrightarrow{C'C"} = 0$
    ou encore:
    $\lambda A' + \mu B' + \nu C' = \lambda A" + \mu B" + \nu C"$
    Le point $E = \lambda A' + \mu B' + \nu C'$ ne dépend pas du choix du triplet de points homologues $A'B'C'$.
    Remarquons déjà que lorsque les points $A'$, $B'$, $C'$ sont liés (ou alignés), le point $E$ est sur la droite $A'B'C'$ ainsi ce fameux point $E$ est sur les droites $AA\alpha$, $B\beta B$, $CC\gamma$ et par suite $E = D$.
    Très amicalement
    Pappus
    PS
    Notons qu'en la triste année où a été donné ce problème, le Rouché-Comberousse devait être le livre de chevet des agrégatifs de l'époque comme le livre du (bon) Berger devrait être celui de ceux d'aujourd'hui (mais j'en doute) et j'ai la curieuse impression qu'il faudra bientôt se farcir les oeuvres de Grothendieck avant d'avoir le droit d'enseigner le théorème de Thalès à notre boutonneuse adolescence.
  • Cher Pappus,

    c'est vraiment simple!

    On a $s_1(z)=k\mathrm e^{is}+y_1, s_2(z)=l\mathrm e^{it}+y_2, s_3(z)=\dfrac 1{kl}\mathrm e^{-i(s+t)}+y_3$,

    car on a $s_3\circ s_2\circ s_1=\mathrm {id}$.

    Donc on a $b''-b'=k\mathrm e^{is}(a''-a')$ etc.

    D'où les coodonnées barycentriques $(\lambda, \mu, \nu)$ de $O$ pour $D_AD_BD_C$ sont données par les produits vectoriels (que tu appelles produits mixtes) ce sont :

    $(kOD_A^2 \mathrm {sin}(s), lkOD_A^2 \mathrm {sin}(t), -OD_A^2 \mathrm {sin}(s+t))$

    càd $(k \mathrm {sin}(s), lk \mathrm {sin}(t), - \mathrm {sin}(s+t))$

    (indépendants de $A', A''$).

    Donc, comme tu l'as dit $\lambda A'+\mu B'+\nu C'=\lambda A''+\mu B''+\nu C''=D$.

    Merci pour ton message et celui de BS.

    Amicalement,
    Georges
  • Bravo, Georges d'avoir pensé à utiliser les nombres complexes quoique tu te mélanges un peu les pinceaux entre points et affixes.
    Tu vas me trouver pinailleur mais mon reproche est toujours le même, ta solution n'est pas très esthétique.
    Voilà plutôt comment j'aurai procédé.
    Tout d'abord je me place directement dans le plan complexe pour éviter tout état d'âme entre points et affixes.
    On a trois figures $\mathcal F_1$, $\mathcal F_2$, $\mathcal F_3$, bourbakistement modélisées par trois similitudes directes:
    $\varphi_1:\mathbb C \longmapsto \mathbb C; z \mapsto a_1.z + b_1$
    $\varphi_2:\mathbb C \longmapsto \mathbb C; z \mapsto a_2.z + b_2$
    $\varphi_3:\mathbb C \longmapsto \mathbb C; z \mapsto a_3.z + b_3$
    Les triplets de points homologues sont donc de la forme:
    $(m_1, m_2, m_3) = (a_1.z + b_1, a_2.z + b_2, a_3.z + b_3)$
    Ils sont donc paramétrés par le nombre complexe $z$.
    Les similitudes directes qui les transforment les uns dans les autres sont donc:
    $s_1 = \varphi_3 \circ \varphi_2^{-1}$
    $s_2 = \varphi_1 \circ \varphi_3^{-1}$
    $s_3 = \varphi_2 \circ \varphi_1^{-1}$
    Maintenant, je fais la combinaison linéaire:
    $\lambda_1 m_1 + \lambda_2 m_2 + \lambda_1 m_3 =
    (\lambda_1 a_1 + \lambda_2 a_2 + \lambda_1 a_3 )z
    + \lambda_1 b_1 + \lambda_2 b_2 + \lambda_1 b_3
    $
    Puis je choisis comme triplet $(\lambda_1, \lambda_2, \lambda_3 )$ le triplet des coordonnées barycentriques normalisées de l'origine $0$ par rapport au triangle $a_1a_2a_3$, triplet défini de façon unique.
    Au fait saurais-tu calculer effectivement ce triplet? eh, eh!
    On a donc:
    $\lambda_1 a_1 + \lambda_2 a_2 + \lambda_1 a_3 = 0$ et par suite:
    $\lambda_1 m_1 + \lambda_2 m_2 + \lambda_1 m_3 =
    \lambda_1 b_1 + \lambda_2 b_2 + \lambda_1 b_3
    $
    Donc le point directeur est le point $d = \lambda_1 b_1 + \lambda_2 b_2 + \lambda_1 b_3 $
    Il va sans dire mais cela va mieux en le disant que le triangle $a_1a_2a_3$ n'est qu'un brave triangle modulaire!
    Il est amusant de noter qu'en suivant cette technique, on peut faire défiler toute la théorie des trois figures semblables, (existence des points invariables et leurs propriétés, etc...) qui se réduit ainsi à de sordides calculs entre nombres complexes.
    Très amicalement
    Pappus
  • Mon cher Georges
    Encore une dernière remarque sur ton dernier message car tu me titilles toujours sur les produits vectoriels et les produits mixtes!
    C'est toi qui fait un mélimélo de ces deux notions, alors que moi au contraire, je m'efforce de les distinguer!
    Pour ta gouverne, un produit vectoriel est un vecteur (qui dépend de l'orientation d'un espace euclidien de dimension 3) et un produit mixte est un scalaire qui, dans le cadre où je l'utilise, (celui des aires algébriques), dépend de l'orientation d'un espace euclidien de dimension 2.
    Très amicalement
    Pappus
  • Mon cher Pappus,

    Je ne crois pas du tout me mélanger un peu les pinceaux entre points et affixes.

    Je ne te titille pas, j'ai compris ta théorie en dimension 2.

    Mais, pour les plus jeunes que toi, ton produit mixte est la mesure algébrique du produit vectoriel dont on connait (tu la connais aussi) la valeur en dimension 2 (mais aussi 3, en orientant par le trièdre..) comme produit des longueurs des vecteurs par le sinus de l'angle.

    Ta démo est jolie, mais comment trouves-tu les similitudes directes $\phi_i$ à partir de $D$ et $ABC$ (en écrivant $s_1=\phi_2\circ\phi_1^{-1}$...)? Cela m'expliquerais comment trouver ton triangle $a_1a_2a_3$.

    Amicalement,
    Georges
  • Mon cher Georges
    Pour clore le débat autour de cette question de produit mixte et de produit vectoriel, je pense qu'il est dû à des raisons pédagogiques: pour la plupart des enseignants et des enseignés, le produit vectoriel et le produit mixte, c'est de la dimension 3 et de la dimension 3 seulement!
    Je connais mal le programme de Terminales, je sais qu'on y aborde le produit vectoriel car on en a besoin en physique. Une fois le produit vectoriel dans la poche, il est facile de construire le produit mixte de 3 vecteurs et l'histoire s'arrête là pour les bacheliers qui ne rencontreront plus ces bestioles de leur vie s'ils ne poursuivent pas une carrière scientifique.
    Par contre pour les taupins et pour les agrégatifs, la situation est différente. On construit d'abord le produit mixte de $n$ vecteurs comme fonction déterminant associée à une base orthonormée directe d'un espace euclidien orienté de dimension $n$ puis dans la foulée on se farcit la construction du produit vectoriel de $n-1$ vecteurs.
    Donc je pense que mon point de vue est le meilleur pour cette catégorie là.
    La question que tu poses au sujet des $\varphi_k$ est intéressante car il est vrai qu'on peut s'en passer!
    Je vais te citer le début de l'article du Rouché qui parle de cette configuration.
    Je cite:
    Soient $\varphi_a$, $\varphi_b$, $\varphi_c$, trois figures directement semblables, situées dans un même plan.

    Voilà une phrase qui ferait bondir les sectateurs de Bourbaki aujourdh'ui.
    Tu peux lire le Rouché de la première à la dernière page, je ne crois pas que tu y trouveras la moindre définition d'une figure.
    Mais pour les contemporains de Rouché, ça ne posait pas le moindre problème!

    Un peu plus loin, Rouché parle de (triplet de) points homologues de(s) (figures) $\varphi_a$, $\varphi_b$, $\varphi_c$, là aussi aucune ambiguité pour les lecteurs de l'époque qui ne savaient pas ce qu'étaient une application et encore moins les composer!

    Et pourtant, ils obtenaient des théorèmes intéressants!

    Maintenant Nicolas a exterminé ces hérétiques et mis un peu d'ordre ou de structure dans notre maison commune!

    Petite question sournoise: d'après toi, combien faut-il de points au minimum dans une "figure" à la Rouché pour pouvoir dérouler sa belle théorie?

    Maintenant je réponds à ta question concernant les $\varphi_k$; tu as bien compris qu'en gardant les mêmes notations que le Rouché tout en en modifiant le sens, j'ai voulu conserver un peu l'esprit de l'époque;
    sous entendu: les figures $\varphi_a$, $\varphi_b$, $\varphi_c$ sont directement semblables à une figure modèle ou patron:$\varphi$
    Et il doit y avoir suffisamment de points dans chaque figure pour qu'elle "engendre" le plan tout entier.

    Maintenant la donnée des similitudes $\varphi_k$ détermine sans ambiguité les similitudes $s_k$ au moyen des formules:
    $s_1 = \varphi_3 \circ \varphi_2^{-1}$
    $s_2 = \varphi_1 \circ \varphi_3^{-1}$
    $s_3 = \varphi_2 \circ \varphi_1^{-1}$
    c'est évidemment faux en sens inverse, si on veut récupérer les $\varphi_k$ à partir des $s_l$.
    Si tu connais un triplet $(\varphi_1, \varphi_2, \varphi_3)$ de similitudes directes vérifiant les équations précédentes, alors le triplet $(\varphi_1 \circ \varphi, \varphi_2 \circ \varphi, \varphi_3 \circ \varphi)$ fonctionnera aussi, où $\varphi$ est une similitude directe quelconque. Si tu réfléchis bien il y a un groupe qui doit opérer à droite sur quelque chose.

    Tout ceci pour te dire que tu peux te donner arbitrairement $\varphi_1$ et par exemple choisir: $\varphi_1 = \mathrm{Id}$, ( tu choisis la figure n°1 pour modèle!), auquel cas: $\varphi_2 = s_3$ et $\varphi_3 = s_2^{-1}$.

    Maintenant applique bêtement ma définition du triangle modulaire avec l'attirail des $\varphi_k$ et tu verras immédiatement pourquoi le triangle $a_1a_2a_3$ en est un!

    Enfin, on peut montrer l'existence du point directeur $D$ sans passer par les complexes. C'est ce qu'a fait Rouché avec les moyens du bord de son époque. Comment rendre sa preuve bourbakistement lisible?
    Très amicalement
    Pappus
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