math news

Bonjour à tous,

Sous l’épaisse couche d’indifférence médiatique, la recherche s’active quand même un peu:

• La preuve de la conjecture de Kepler annoncée en 1998 a été difficile à vérifier. Elle a été publiée en 2005 et aucune faille n’a été trouvée mais les efforts considérables qui devaient la valider laissaient aux chercheurs un sentiment d’inachèvement.
Pour établir définitivement la preuve originelle, les équipes de Thomas Hales de l’université de Pittsburgh se tournèrent vers les ordinateurs, les techniques de logique formelles et en vérifièrent chaque étape avec la rigueur et la certitude requise.

• La science utilise des techniques statistiques pour prédire des phénomènes complexes.
Elles combinent des mesures physiques et des équations.
La simulation à grande échelle met en jeu un nombre de données dont le gigantisme est sources d’erreurs et donc d’incertitude. Les méthodes "Uncertainty quantification" (UQ) en plein essor actuellement ont pour but de minorer les incertitudes expérimentales. Elles intègrent ces risques d’erreurs aux modèles physiques pour les rendre aussi prédictifs que possible.
En appui de ces techniques, la méthode de Monte-Carlo permet d’approcher numériquement les objets de grandes dimensions. Des chercheurs en ont développé une version améliorée tout aussi précise mais moins gourmande en calculs: la « Multi Level Monte-Carlo Method » (MLMC) permettra entre autres de « mieux cerner les conséquences d’effets mineurs au sein des systèmes » s’enthousiasment les chercheurs.

• Dans la série: « Si vous voulez éviter les bouchons: roulez au hasard ! »… Vous marchez sur le trottoir et un autre piéton vient dans votre direction. Si aucun de vous deux ne modifie sa trajectoire vous allez rentrer en collision !
Des chercheurs de l’université de Würzburg mettent en équation le comportement des piétons afin d’optimiser le design des places publiques et prévenir les phénomènes de panique générale en aménageant des issues.
L’évitement est le facteur clé de cette modélisation. Deux piétons sont sur le point de rentrer en collision: quelle solution optimale peut-être trouvée pour résoudre ce conflit de manière satisfaisante pour les deux parties ? Normalement, il faudrait que chacun consente à s'écarter un peu... Celui qui fait un pas de côté (alors que l'autre reste en ligne droite comme si de rien n'était) a la désagréable impression d'avoir cédé !
Pour répondre à ces questions, les chercheurs s’appuient sur l’équilibre de Nash qu’ils combinent avec l’équation de Fokker-Planck (qui décrit en gros tous les mouvements possibles d’un corps de A vers B). Ils laissent le soin aux calculs de confirmer les expérimentations et nous conçoivent une ville idéale inspirée de la théorie des jeux dans laquelle il ne sera plus possible de rentrer en collision avec une jolie fille même en le faisant exprès.

• Les mathématiciens ont découvert une nouvelle forme de lunarité ! D’après ce que j’ai vaguement compris le phénomène « Mooshine » désigne les liens qui unissent les coefficients d’une fonction modulaire appelée « fonction j » et les dimensions de ces objets algébriques massifs: les groupes sporadiques.
Comme chacun le sait, le groupe sporadique de O’Nan d’ordre $2^9.3.^4.5.7^3.11.19.31 = 460 815 505 920$ (Wolfram) contient de précieuses informations sur les propriétés des courbes elliptiques et leur comportement général.
La courbe elliptique est plus proche du tore que de l’ellipse. Ce "doughnut" torique est parcouru de « délicates configurations » de points rationnels: les paillettes colorées saupoudrées sur le doughnut (je ne crois pas à ce que je suis en train d’écrire !).
Ces configurations, la plupart du temps, on en ignore jusqu’à l’existence. "C’est comme manger son dougnut dans le noir !" explique Ken Ono et John Duncan de l’université Emory. L’étude du groupe de O’Nan permettrait entre autres de mieux les localiser.

• Des chercheurs du laboratoire d’informatique de l’université Claude Bernard de Lyon 1 ont montré qu'il n’existe que 15 modèles pentagonaux pour paver le plan.
La recherche exhaustive des modèles convexes (ayant des angles inférieurs à 180°) susceptibles de recouvrir exactement (sans débordements) un plan donné a été initiée par Karl Reinhardt en 1918.
Tous les triangles et quadrilatères peuvent paver le plan mais seulement 3 types d’hexagones peuvent le faire. Les polygones ayant un nombre de côtés supérieurs ou égal à 7 sont exclus.
Un programme informatique a généré et exploré les 371 familles de pentagones candidates (en fonctions de leurs angles et de la longueur des côtés) au pavage du plan.
De 1918 à 2015, on en avait trouvé que 15. On sait désormais que ce sont les seules.


Sur « www.Physic.org- daily news » !
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Réponses

  • À noter que ce phénomène appelé "moonshine" ne concerne pas que le groupe de O'Nan, le Monstre $M$ est aussi concerné, voir par exemple https://en.wikipedia.org/wiki/Monstrous_moonshine ou certains très bons pdf disponibles en ligne.
  • Au sujet des architectes qui modélisent l'évitement: si je comprends bien la foule est assimilée à un système constitué d'agents individuels dont le comportement est modélisé d'une certaine façon. Comme il y a beaucoup d'agents, un faible écart individuel vis-à-vis du modèle peut a priori prendre au niveau de la foule des proportions considérables. Cet aspect a-il été étudié quantitativement?
  • @poirot: il y a un intéressant pdf sur la question: "mathématicians chase Moonshine shadow-Erika Klareich" sur le site Quanta magazine.

    @shadh'ock: d'après ce que j'ai lu, à très grande échelle, la foule est assimilée à des grains de pollen en suspension dans l'eau. Son comportement semble erratique et aléatoire. (C'est l'observation qui est à l'origine du mouvement brownien...)
    Les chercheurs font des expériences de comportements avec un nombre raisonnable d'individus. Ils en déduisent des lois plus générales. Dans cette étude les facteurs biologiques et psychologiques sont à prendre en compte, ce qui complique la quantification. Qui ai-je en face de moi ? Quelle est la largeur du trottoir ? Comment éviter de se décaler du même côté que son vis-à-vis ? Ce problème d'évitement d'apparence simpliste révèle sa complexité quand on s'y attarde un peu !
    Vouloir remédier à des problèmes comme les mouvements de panique au sein d'une foule c'est partir du principe que, même à grande échelle, le comportement humain est prévisible.
    Mais le mieux c'est d'aller voir là:
    S. Roy et al, Pedestrian motion modelled by Fokker-Planck Nash games, Royal Society Open Science (2017)
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