Où trouver des sujets de recherche ?

Bonsoir,

Questions adressée à ceux qui font des maths hors des circuits "officiels" (enseignement, fac, labos R&D) : où trouvez-vous vos sujets d'investigation, en dehors des sempiternels exercices posés aux concours et qu'on trouve chaque année dans la RMS ou l'AMM ?

L'idée derrière cette question est de trouver un moyen de continuer de faire des maths intéressantes non pas avec "ce qui existe déjà" – comme lorsqu'on prépare un concours ou qu'on cherche des exercices pour le plaisir –, mais avec ce qui reste à découvrir, quitte à devoir faire un petit investissement théorique (et soyons fous, débordons le cadre des maths pures : on peut penser à l'informatique, la physique, la modélisation, le numérique, etc.).

Toute idée est bonne à prendre :-).

Bon réveillon !

Réponses

  • Salut,
    Je trouve certains de mes sujets sur l'encyclopédie en ligne des nombres entiers. Il y traine des conjectures plus ou moins intéressantes. Certaines clairement inaccessibes d'autres plus réalistes. Il faut utiliser le moteur de recherche interne pour essayer de tomber sur quelque chose qui plait. Je ne tape pas "prime conjecture" qui renvoit à trop de choses sans contenu et dans ce domaine il existe assez de conjectures connues. En revanche "conjecture combinatoric" retourne plus de 600 suites dont des non classiques et une conjecture qui m'interpelle en ce moment concerne par exemple la suite A332603.
  • Bonjour Curiosity.

    Je pense que certaines Questions sans réponse de la RMS sont des sujets de recherche qui ne sont pas méprisables. La liste est téléchargeable sur le site.

    amicalement,

    e.v.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


  • Sur arXiv, avec les bons mots clés on peut trouver plein d'articles récents qui peuvent donner des bonnes idées !
  • Merci pour ces pistes que j'avais déjà plus ou moins envisagées. Concernant les sujets sur les nombres ou les questions de la RMS, j'aurais envie de dire, en m'excusant par avance si cela choque des gens, que je ne cherche pas ce genre "d'amusement". J'aurais trop l'impression, justement, d'essayer de résoudre le millionième exercice de prépa (alors que je n'en pas cherché des masses, en fait, c'est vrai). Il existe des tas de livres remplis avec des questions de ce genre (on a par exemple le fameux "1001 problèmes en théorie classique des nombres"). Pour faire des leçons d'agrégation bien léchées, c'est parfait. J'ai peur que ça me frustre, mais peut-être que je m'en contenterai si je ne trouve pas ce que je cherche.

    Utiliser arXiv me paraît une bonne idée, mais présente le danger qu'on y trouve tout de même tout et n'importe quoi si j'en crois ce qu'on lit ici ou ailleurs. J'avais pensé aux journaux (CRAS, etc.), et aux sites professionnels des chercheurs qui présentent leurs papiers (publiés ou preprint). Si certains ont des retours d'expérience sur le sujet, je suis toujours preneur... :-)
  • Pour publier un article sur arXiv il faut avoir un "parrain" ou une "marraine" qui provient de l'université. Par conséquent, les articles sur arXiv sont relativement sérieux en général. De plus, si c'est un article bien fait souvent l'introduction contient 1) les résultats obtenus récemment sur le sujet 2) les questions ouvertes pour le futur. Il me semble que rien que pour 1) et 2) ça vaut le coup, surtout que pour 1) le lien vers les articles correspondants sont ajoutés, et ça permet de se faire une très bonne idée de l'état actuel des choses !!
  • Bonjour,

    Il y a aussi si c'est en théorie des nombres par exemple le livre
    Unsolved problems in number theory de Richard Guy chez Springer.

    Bien à vous.
  • C'est vrai qu'on peut trouver quelques articles d'huluberlus sur arxiv, mais ce sera principalement des "preuves" de conjectures célèbres, relégués dans la rubriques General Mathematics. Dans les survols (surveys) et listes de problèmes ouverts, tu as peu de risque. Et pour se rassurer, tu peux toujours regarder la liste de publications de l'auteur pour jauger de son sérieux.
  • Voilà un sujet de recherche possible, pour toi et tous ceux que ça intéresse, et aussi parce qu'on n'en a pas beaucoup parlé ici.

    En 1965, Kolakoski [4] introduisit la suite auto-génératrice $(K_n)_{n \in \mathbb{N}^*}$, à valeurs dans $\{1,2\}$, et définie par $K_1 = 1$ et $K_n$ est égal à la longueur du $n$ème bloc. Voici les premiers termes :
    $$\begin{array}{c|rrrrrrrrrr}
    n &1&2&3&4&5&6&7&8&9&10\\
    \hline
    K_n &1&2&2&1&1&2&1&2&2&1
    \end{array}

    $$ On conjecture que la densité de "$1$" est égale à $\frac{1}{2}$, c'est-à-dire $\displaystyle \lim_{n \to + \infty} \frac{1}{n} \sum_{\substack{j=1 \\ K_j = 1}}^n 1 = \frac{1}{2}$.

    Sujet de recherche. Après avoir lu plusieurs références sur ce sujet (voir par exemple ci-dessous), proposer une idée pour avancer vers la recherche d'une solution à ce problème ouvert.

    Références.

    [1] O. Bordellès & B. Cloitre, Bounds for the Kolakoski sequence, J. Integer Seq. 14 (2011), Article 11.2.1.

    [2] V. Chvátal, Notes on the Kolakoski sequence, DIMACS Technical report, 1993.

    [3] A. Hammam, Some new Formulas for the Kolakoski Sequence A000002, Turkish J. Anal. Number Theory 4 (2016), 54-59.

    [4] W. Kolakoski, Problem 5304: self generating runs, Amer. Math. Monthly 72 (1965), 674.

    [5] N. J. A. Sloane, The On-line Encyclopedia of Integer Sequences, http://oeis.org.

    [6] B. Steinsky, A recursive formula for the Kolakoski sequence, J. Integer Seq. 9 (2006), Article 06.3.7.
  • Merci noix de totos pour cet exemple. Après une lecture cursive de 4 des articles cités, j'ai bien l'impression qu'il s'agit exactement de ce que je décrivais plus haut, à savoir un sujet certainement intéressant mais qui ne requiert pas de connaissances théoriques très poussées. Tu me diras si je me trompe bien sûr, mais il me semble qu'on pourrait faire de ces questions un sujet de concours niveau prépa ou agrégation interne, voire des questions d'Olympiade... (Je ne dis pas pour autant que c'est "facile", bien loin de là même !)

    Ce n'est pas dans cette direction que je souhaite aller (ou essayer d'aller :-D...).
  • Il y a parfois des séances de questions ouvertes dans certaines rencontres, dont on peut trouver trace dans les comptes-rendus. Par exemple, un fascicule est édité à chaque congrès international. Pour l'ICM 2018, voir ici. L'AIM ressence quelques listes de problèmes ouverts ici. Il y a aussi des listes "bien connues" qui circulent. Par exemple, Guido's book of conjectures, The Kourouvka notebook (théorie des groupes), Kirby's list of problems (topologie en basse dimension).
  • Les "Leçons de mathématiques d'aujourd'hui" peuvent être une source d'inspiration comme les sujets de thèse que proposent certains enseignants.
  • Curiosity a écrit:
    mais qui ne requiert pas de connaissances théoriques très poussées

    Je pense le contraire, vu le comportement erratique de cette suite, et, surtout, vu le nombre de publications ces dernières années qui n'ont pas fait avancer du tout le schmilblick.

    D'autre part, la recherche ne porte pas toujours sur des sujets "à haute technologie", ceux-ci étant généralement peu accessibles aux primo-doctorants, et c'est bien normal.

    La conjecture (je devrais même dire "les" conjectures) concernant la suite de Kolakoski est (sont) très certainement hors de portée de la connaissance actuelle, avec ou sans outils technologiques de haut vol.
  • Selon curiosity la conjecture des nombres premiers jumeaux pourrait certainement faire l'objet d'un sujet de concours de prépa... 8-)
  • Par exemple.

    Résumé du sujet (abstract).
    Une situation maintenant classique en théorie analytique des nombres consiste à étudier au sein des entiers naturels l'indépendance statistique entre une condition de type multiplicatif et une condition de type digital (c'est-à-dire en lien avec les chiffres dans une certaine base de numération). De tels problèmes sont réputés particulièrement difficiles, notamment lorsque les entiers satisfaisant à la condition multiplicative sont ``rares'' (par exemple, les nombres premiers, les carrés parfaits).
    Des résultats spectaculaires de cet ordre ont été obtenus ces vingt dernières années (cf. notamment les travaux de Mauduit-Rivat, Mauduit-Rivat-Drmota, Bourgain) et stimulent de nombreux travaux.
    En 1998, Erdös, Mauduit et Sarközy ont débuté l'étude des propriétés multiplicatives des nombres dits ellipséphiques, c'est-à-dire des nombres entiers dont le développement dans une base q fixée ne comporte pas certains chiffres fixés également. En 2000, Konyagin, Mauduit and Sarközy [3] ont suggéré d'étudier les entiers ellipséphiques friables, c'est-à-dire sans grand facteur premier.
    Col [1] a obtenu plusieurs résultats de cet ordre en utilisant des techniques de crible. En particulier, la base q et l'ensemble des chiffres à proscrire étant fixés, il obtient l'existence d'un nombre 0<a<1 tel que la proportion de nombres ellipséphiques n'excédant pas un nombre N et dont les facteurs premiers n'excèdent pas N^a soit strictement positive.
    Le travail proposé pour cette thèse consiste à préciser et améliorer les résultats de Col en s'appuyant sur les techniques développées par Maynard [2] dans son récent et spectaculaire travail sur les nombres premiers ellipséphiques.
    Références :
    [1] Sylvain Col. Propriétés multiplicatives d’entiers soumis à des conditions digitales. Thèse, Université Nancy 1,
    2006.
    [2] James Maynard. Primes with restricted digits. Invent. Math., 17(1) : 127-218, 2019.
    [3] Sergei Konyagin, Christian Mauduit et András Sárközy. On the number of prime factors of integers charac-
    terized by digit properties. Period. Math. Hungar., 40(1) : 37–52, 2000.

    Même si tout le monde n'est pas capable d'avancer sur le sujet lui-même. Il y a possibilité d'apprendre des choses et peut-être de se poser des questions qui ne sont pas celles proposées mais qui en dérivent.
  • :-( J'abandonne...
  • En ce qui concerne le sujet indiqué par Rémi, c'est un peu le contraire de ce que je disais plus haut : là, il faut connaître la "technologie" pour pouvoir aborder, puis espérer améliorer des résultats antérieurs. En particulier, je pense qu'on ne peut pas entreprendre cette thèse sans connaître :

    (i) La méthode du col ;

    (ii) Le domaine des entiers $y$-friables ;

    et j'ajouterais :

    (iii) L'identité de Vaughan.

    Tous ces outils nécessitent un long apprentissage, non seulement pour les connaître mais aussi, et surtout, pour savoir comment les appliquer à bon escient.
    Curiosity a écrit:
    J'abandonne...

    C'est bien dommage !...Notons quand même que, dans les références citées plus haut, on a plusieurs voies qui sont exposées pour tenter d'arriver à la solution :

    (i) Chvátal utilise la théorie des mots, et obtient d'ailleurs le meilleur résultat actuel concernant
    $$\left| \lim_{n \to \infty} \left( \frac{1}{n} \sum_{j=1, \, K_j = 1}^n 1 \right) - \frac{1}{2} \right|$$
    à condition toutefois de supposer que la limite existe.

    (ii) Bordellès & Cloitre ont plutôt une vue arithmétique sur ce sujet : les auteurs expliquent avoir tenté plusieurs méthodes de théorie des nombres, en vain semble-t-il, vu le caractère "fractal" de la suite, et se sont retournés vers de la combinatoire, pour obtenir une majoration moins bonne que celle de Chvátal, mais inconditionnelle. À noter que Cloitre a été pendant plusieurs années un membre (très) actif de ce forum.

    Quoi qu'il en soit, ce sujet m'a semble suffisamment intéressant et riche pour perdre du temps à le proposer ici...
  • Merci noix de totos pour tes explications. En fait, mon dernier message était surtout une réponse à celui de Poirot qui me fait dire ce que je n'ai pas dit (et encore moins pensé ce qu'il semble suggérer que je pense).
    Je laisse ceux qui souhaitent se faire une idée par eux-mêmes consulter les 4 documents que j'ai évoqués (je serais curieux de savoir combien les ont cherchés sur internet...).

    Bref, je pense que je m'y suis mal pris, je n'aurais pas dû créer ce sujet en "libre accès" mais m'adresser directement à certaines personnes. C'est ce que je ferai désormais.

    Merci en tout cas à ceux qui ont répondu et fait avancer un peu la question :-).
  • Je trouve que l'idée de ce fil est bonne, car ce sujet peut concerner potentiellement pas mal de gens.

    Concernant la suite de Kolakoski, et pour y avoir travaillé quelque peu dessus il y a quelques années, je pense que le challenge est grand. D'ailleurs, je crois savoir que deux "camps" se sont formés : ceux qui pensent que la limite $\displaystyle \lim_{n \to \infty} \frac{1}{n} \sum_{\substack{j=1 \\ K_j = 1}}^n 1 $ existe, et ceux qui pensent qu'elle n'existe pas (dont je fais partie, du moins jusqu'à preuve du contraire).
  • Curiosity : J'ai un peu de mal à comprendre ce que tu recherches. Tu veux un sujet de recherche ouvert nécessitant éventuellement de "faire un petit investissement théorique" mais tu ne veux pas d'un sujet qui s'étudierait avec les outils "niveau prépa ou agrégation interne", pourtant aux dernières nouvelles tu ne maitrisais pas la majorité du programme de l'agrégation interne. :-S

    Il existe des bouquins de math niveau M2 qui présentent des problèmes ouverts actuels, ça peut être une piste de départ. Sinon il y a le $\mathbb{TFJM}^2$ qui propose des sujets dont on ne connait pas de réponse complète. Les énoncés sont élémentaires parce que fait pour des lycéens mais ils peuvent a priori s'étudier avec des outils plus complexes.

    Pour finir lire des articles sur arxiv n'est pas si risqué que ça à condition de savoir un peu ce que tu fais. Si tu es inquiet de la validité des preuves que tu y rencontre tu peux te contenter des articles arxiv qui ont été publiés par la suite dans des revues avec commité de lecture, arxiv n'étant alors qu'un moyen légal et gratuit d'accéder à ces papiers publiés.

    Noix de totos : Merci pour la découverte de cette suite. "Tout le monde" connait la suite de Conway mais celle là je n'en avais jamais entendu parler ! Est-ce qu'il y a des arguments heuristiques qui permettent de supposer que la limite existe et est 1/2 ?
  • Corto. L'article de Steinsky (voir la référence [6] de mon 1er message), téléchargeable en ligne sur le site du Journal of Integer Sequences, fournit quelques heuristiques allant dans cette direction, mais, personnellement, je doute que cette limite existe.
  • Corto : Je ne sais pas ce que tu entends par "maîtriser", mais de mon côté, je ne me fais pas de souci pour attaquer "confortablement" n'importe quel sujet de niveau licence (jusqu'en L3 donc), et de savoir où chercher pour des niveaux postérieurs. Pas de tête, pas sans document, pas sans avoir à replonger dans les bouquins pour rafraîchir ma mémoire durant un certain temps, mais il est sûr que je n'apprendrai rien dans les bases des théories exposées classiquement à ce niveau...

    En ce sens, c'est vrai que je ne "maîtrise" pas ces programmes : devant un jury et sans note, à l'heure actuelle, j'aurais du mal à énoncer les résultats les plus costauds de but en blanc et à les démontrer. C'est pour cette raison aussi que j'ai mis de côté la préparation de l'agrégation (interne/externe, quelle qu'elle soit). Je sais parfaitement qu'une grosse part du travail est un effort immense de mémorisation, et je ne peux déjà pas terminer la préparation, comme je le souhaiterais, de l'oral. Ceci dit, je doute qu'il y ait beaucoup de candidats (interne/externe) qui maîtrisent le programme de l'agrégation, même parmi ceux qui finissent dans la première décile ! J'ai déjà raconté un jour cette anecdote d'un prof de physique de prépa (sorti d'une ENS) qui m'avait dit n'avoir vraiment compris certains résultats du programme de CPGE que longtemps après les avoir enseignés. Je pense que le programme en maths est suffisamment vaste pour qu'on en ait encore à découvrir longtemps après avoir réussi le concours...

    Bref, tout cela pour conclure finalement, comme je l'ai dit plus haut, qu'il était inutile de me répondre. Noix de totos estime que le sujet a un intérêt en lui-même, alors c'est parfait, je n'aurai pas trop perdu de temps ni en fait perdre à d'autres ;-). Je suis parti sur une autre option parmi celles que j'avais devant moi quand j'ai lancé ce sujet (je vais essayer de mettre en forme ce que j'ai déjà écrit pour en faire un cours, un livre... ou un best-seller :-D !).
  • Bonjour curiosity et bonne année.

    Le regretté Richard K. Guy a écrit plusieurs livres de problèmes non résolus.
    Par exemple Unsolved Problems in Number Theory.

    ou Unsolved Problems in Geometry

    ou Unsolved Problems in Combinatorial Games

    Il a tenu une chronique régulière dans l'American Mathematical Monthly. Par exemple :

    Don't try to Solve these problems AMM (1983) pp 35-40.

    Si tu veux arrondir tes fins de mois, regarde de ce côté.

    Sinon, perdu pour perdu, autant aller à la pêche.

    amicalement,

    e.v.
    Personne n'a raison contre un enfant qui pleure.


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